CASS. CIV. 1re, 26 octobre 2004
CERCLAB - DOCUMENT N° 2006
CASS. CIV. 1re, 26 octobre 2004 : pourvoi n° 02-12471 ; arrêt n° 1485
Extrait : « Attendu que la cour d'appel, qui a relevé que l'option d'assurance complémentaire était proposée et que, compte tenu de la marque, du modèle du véhicule volé et de son kilométrage, le montant de la franchise était inférieur à la valeur dudit véhicule, en a justement déduit que la clause litigieuse, qui ne conduisait pas à un déséquilibre entre les parties, n'était pas abusive ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 26 OCTOBRE 2004
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 02-12471. Arrêt n° 1485.
DEMANDEUR à la cassation : Monsieur X.
DÉFENDEUR à la cassation : Société Auto 44
Président : M. BOUSCHARAIN conseiller, président.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que, suivant contrat en date du 24 mai 1994, la société Auto 44 a donné en location à M. X. un véhicule automobile qui a fait l'objet d'un vol pendant la période de location ; que le contrat prévoyait en cas de vol une franchise de 100.000 francs à la charge du locataire qui n'a pas souscrit d'assurance pour garantir ce risque ; que, par jugement en date du 29 décembre 1998, le tribunal de grande instance de Toulouse a condamné M. X. au paiement du montant de la franchise déduction faite d'un prélèvement déjà opéré de 38.600 francs en déclarant la clause relative au rachat de la franchise applicable et non abusive dès lors que le locataire avait la faculté de souscrire une assurance complémentaire et que la valeur du véhicule était très supérieure au montant de ladite franchise ;
Sur le moyen unique, pris en ses première, deuxième, troisième et sixième branches, tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe du présent arrêt :
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE ET RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que l'arrêt confirmatif attaqué (Toulouse, 10 janvier 2001) relève que les mentions manuscrites concernant le rachat de franchise en cas de vol, son montant ainsi que la mention manuscrite non incluse, sont inscrites clairement sur la première page du contrat, lequel a été fourni en original recto-verso sans que les clauses déterminantes pour le litige qui sont d'une lisibilité satisfaisante ne soient raturées ou surchargées, que le locataire avait paraphé la case « non » en face de la référence à l'article 4 d 2 expliquant l'assurance complémentaire pour vol : que rien ne permettait de retenir que le montant de la franchise avait été renseigné postérieurement à la signature de M. X., l'original du contrat ayant été versé aux débats ; que la cour d'appel qui, sans commettre la dénaturation alléguée, a ainsi effectué la recherche prétendument omise, en a justement déduit que la société Auto 44 avait satisfait à ses obligations au regard de l'article 1135 du Code civil ;
Sur les quatrième et cinquième branches du moyen, tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe du présent arrêt :
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE ET RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que la cour d'appel, qui a relevé que l'option d'assurance complémentaire était proposée et que, compte tenu de la marque, du modèle du véhicule volé et de son kilométrage, le montant de la franchise était inférieur à la valeur dudit véhicule, en a justement déduit que la clause litigieuse, qui ne conduisait pas à un déséquilibre entre les parties, n'était pas abusive ;
Sur la septième branche du moyen, tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe du présent arrêt :
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE ET RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que les juges du fond, qui ont relevé le consentement éclairé de M. X. quant à la portée de ses engagements relativement à la clause litigieuse et à la franchise applicable, n'étaient pas tenus de répondre au simple argument concernant la contestation postérieure et tardive du locataire qui résulterait selon l'exposant de la lettre dont la dénaturation est alléguée ; que le moyen qui critique un motif surabondant, est inopérant ;
Sur la huitième branche du moyen, tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe du présent arrêt :
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE ET RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que les juges du fond n'ont pu tirer aucune conséquence quant à l'application de la clause pénale de constatations faites par eux qui ne concernaient que l'absence de lisibilité des conditions générales du contrat relatives à la clause concernant la faculté de souscrire une garantie complémentaire pour vol ; que le moyen manque en fait ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X. aux dépens ;
Vu les articles 700 du nouveau Code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de la SCP Gatineau ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille quatre.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyen produit par la SCP Gatineau, avocat aux Conseils pour M. X.
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné monsieur X. à verser à la société AUTO 44 la somme de 65.400 francs, outre les intérêts au taux légal à compter du 7 octobre 1997 ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS PROPRES QUE le présent litige doit se régler sur la base des seuls documents contractuels signés par les parties et sans référence aux brochures EUROPCAR d'avril et mai 1994 qui précisent d'ailleurs expressément que les locations sont soumises aux conditions générales figurant aux contrats de location ; que la société AUTO 44 SA fournit un original du contrat comportant un recto et un verso ; que s'il est exact que les cases 43-44-46-48 et 49 sont raturées et que les cases 51-53-57 et 59 sont surchargées, les clauses déterminantes pour le litige et notamment celles relatives à la franchises au cas de vol, ne sont ni raturées, ni surchargées, de telle sorte qu'imprimées vert sur blanc, leur lisibilité est satisfaisante ; que Monsieur X. ne conteste d'ailleurs pas avoir paraphé la case « NON » par référence aux indications de l'article explicatif 4 d 2 ; qu'il s'en déduit que la clause lui est opposable, rien ne permettant de retenir que le montant de la franchise de 100.000 francs TTC a été renseigné postérieurement à sa signature ; que monsieur X. n'a d'ailleurs pas soulevé cette argumentation à réception de la facture du 31 mai 1994 ; que la lecture du contrat démontrant que le rachat de la franchise a été proposé au locataire, ce dernier ne peut soutenir que son cocontractant a manqué à son obligation d'information et de conseil ; que les contrats de location peuvent prévoir des options particulières dérogatoires aux conditions générales de location de véhicules automobiles, aucun élément ne permet de retenir le caractère déséquilibré et donc abusif de la clause, le locataire ayant eu la possibilité de souscrire une assurance et la valeur du véhicule (ayant roulé 8.750 km), étant, comme l'a fait observer le premier juge, très supérieure à 100.000 francs ; qu'enfin, la société AUTO 44 a communiqué, pour satisfaire à la demande de l'appelant, une attestation de la société CONTROLE RISK faisant ressortir que le vol du véhicule « n'a et ne fera l'objet d'aucune indemnisation » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QU'il ressort clairement des conditions particulières du contrat que monsieur X. a accepté de souscrire au rachat partiel d'une franchise portant sur les dommages au véhicule mais non celle relative au vol (...) ; que les conditions générales du contrat effectivement peu lisibles pour un non professionnel souscrivant un contrat généralement de manière assez rapide, ne concernent pas exactement ces dispositions puisqu'elles abordent notamment les hypothèses où le locataire devra assumer des pertes alors même qu'il aurait souscrit à l'assurance ; que le caractère peu lisible des conditions générales ne peut influer en l'espèce sur le sort à donner au litige, compte tenu des conditions particulières expresses souscrites par monsieur X. ; quant au déséquilibre des obligations des parties, la jurisprudence citée par le locataire vise les contrats de location de longue durée (contrat de crédit-bail, contrat de location avec option d'achat) ; que la commission des clauses abusives, dans sa recommandation nº 96-02 en date du 14/06/96 a considéré que « certaines clauses prévoient qu'en cas de défaut de restitution des documents et des clés, le locataire doit au loueur la valeur du véhicule ; ces clauses sont abusives lorsque la non-restitution n'est pas imputable au locataire » ; qu'en l'espèce, il ne s'agit pas d'une non-restitution de clés ou de documents mais de la non-souscription d'une assurance vol, non-souscription choisie par le locataire, lequel doit donc régler à la société une franchise qui a été fixée compte tenu de la valeur du véhicule ; qu'en l'espèce, il convient de relever que le véhicule était un véhicule Renault Safrane très récent (8.750 kms) d'une valeur à priori supérieure à 100.000 francs ; qu'en conséquence, il ne peut être dit que le montant de la franchise est abusif ; que sur les conditions de prélèvement de la somme de 38.600 francs, les parties sont contraires en fait ; qu'il est étonnant de constater que monsieur X. n'a émis aucune contestation suite au prélèvement diligenté ce qui peut laisser supposer un accord ; que par ailleurs, le montant inscrit correspond à celui inscrit au crédit de son compte après le vol et n'a donc pu être donné que par monsieur X. lui-même ; qu'en conséquence, il convient de rejeter la demande de restitution de monsieur X. ainsi que sa demande de dommages et intérêts (...) ; qu'il est demandé la somme de 12.280 francs laquelle correspond à la clause pénale contractuellement prévue (article 4-f) ; que le juge peut, même d'office, modérer la peine si elle est manifestement excessive ce qui est le cas en l'espèce, le taux d'une pénalité de 20 % des sommes dues étant à lui seul parlant ; qu'il convient de réduire le montant de la somme réclamée à la somme de 4.000 francs en tenant compte des taux généralement appliqués pour les clauses pénales et du préjudice subi par le créancier ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
1. - ALORS QUE les clauses illisibles et déraisonnables des contrats d'adhésion souscrits par les consommateurs auprès de professionnels sont sanctionnées par la nullité ; qu'en l'espèce, monsieur X. soutenait que les clauses litigieuses étaient manifestement illisibles compte tenu de leur typographie inférieure à corps 8, préconisée par la commission des clauses abusives, et déraisonnables dans la mesure où, compte tenu de sa situation financière, il n'avait aucune raison de prendre un risque de 100.000 francs pour économiser 40 francs par jours ; qu'en jugeant néanmoins valable la clause litigieuse relative à la franchise au cas de vol, sans rechercher, comme l'y invitait le preneur, si la clause relative à la franchise en cas de vol n'était pas illisible et déraisonnable et par conséquent nulle, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
2. - ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les écrits clairs soumis à leur appréciation ; que [Monsieur] X. indiquait clairement, dans ses conclusions, qu'il avait simplement signé le contrat préalablement préparé par la société AUTO 44 sans prendre le soin de le lire ; qu'en affirmant néanmoins que monsieur X. ne contestait pas avoir paraphé la case « NON » par référence aux indications de l'article explicatif 4 d 2, la Cour d'appel a dénaturé les conclusions de monsieur X. et partant violé les articles 4 et 5 du code civil ;
3. - ALORS QUE le professionnel doit informer son cocontractant profane de la portée exacte des engagements souscrits et plus particulièrement des risques éventuels que la conclusion de l'acte peut présenter pour lui ; que monsieur X. indiquait dans ses conclusions que la société AUTO 44 n'avait jamais attiré son attention sur la possibilité de racheter la franchise en cas de vol du véhicule, que les mentions portées sur le contrat n'étaient pas de sa main et qu'il n'aurait jamais refusé de souscrire cette assurance étant donnée sa situation financière si elle lui avait été proposée ; qu'en jugeant que le loueur n'avait pas manqué à son devoir d'information aux seuls motifs que la lecture du contrat démontrerait que le rachat de la franchise avait été proposé au locataire, sans rechercher si la forme et les circonstances dans lesquelles avait été conclu le contrat ne révélaient pas un défaut d'information de la part du loueur, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1135 du code civil ;
4. - ALORS QU'est abusive la clause qui, dans un contrat de location, fait supporter au preneur la totalité des risques de perte ou de détérioration de la chose louée, même lorsque ceux-ci sont dus à un événement imprévisible et irrésistible constitutif de la force majeure et qu'aucune faute ne peut être imputée au preneur ; que la clause qui prévoit à la charge du preneur une franchise de 100.000 francs en cas de vol du véhicule confère au bailleur un avantage excessif dès lors que le locataire supporte seul le risque du vol ; qu'en estimant que la clause ne présentait pas un caractère abusif, la Cour d'appel a violé l'article L. 132-1 du code de la consommation ;
5. - ALORS QUE le juge ne peut se contenter de déduire un motif abstrait et général sans procéder à aucune constatation de fait concrète ; qu'en affirmant qu'aucun élément ne permettait de retenir le caractère déséquilibré et donc abusif de la clause dans la mesure où la valeur du véhicule est très supérieure à 100.000 francs, sans indiquer sur quel élément elle se fonde pour retenir un tel prix, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de L. 132-1 du code de la consommation ;
6. - ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; que monsieur X. invoquait le fait que la clause litigieuse n'était pas présentée de manière claire et compréhensible de sorte qu'elle ne satisfaisait pas aux exigences de l'article L. 133-2 du code de la consommation ; qu'en omettant de répondre, même succinctement, à ce chef de conclusions, pourtant déterminant pour l'issue du litige, la Cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile.
7. - ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les écrits clairs soumis à leur appréciation ; que Dominique X. avait produit une lettre adressée le 17 juin 1994 par son conseil au Crédit Mutuel de Bressuire au terme de laquelle il contestait le débit de la somme de 38.600 francs opéré par la société AUTO 44 ; qu'en énonçant qu’ « il est étonnant de constater que monsieur X. n'a émis aucune contestation suite au prélèvement diligenté ce qui peut laisser supposer un accord », la Cour d'appel a dénaturé la lettre du 17 juin 1994 produite par monsieur X. et partant violé l'article 1134 du code civil ;
8. - ALORS QUE monsieur X. faisait valoir que la taille des caractères du contrat de location ne répondait pas aux recommandations de la commission des clauses abusives ; que les juges du fond ont constaté que les conditions générales du contrat étaient « effectivement peu lisibles pour un non professionnel souscrivant un contrat de manière généralement assez rapide » ; qu'en faisant néanmoins droit à la demande de condamnation de monsieur X. à la clause pénale prévue aux conditions générales de location, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard de l'article 1134 du code civil.