CASS. CIV. 1re, 28 octobre 1997
CERCLAB - DOCUMENT N° 2064
CASS. CIV. 1re, 28 octobre 1997 : pourvoi n° 95-19470 ; arrêt n° 1667
Extrait : « Mais attendu qu’ayant, par motifs propres et adoptés, d’abord relevé que les modalités de calcul du taux d’invalidité, gouvernant la prise en charge du risque, expressément déterminé par combinaison du taux d’incapacité fonctionnelle et du taux d’incapacité professionnelle, étaient expliquées de façon claire et précise à l’aide d’un tableau très détaillé et que l’intéressée ne pouvait ignorer que seul un degré d’invalidité égal à 66 % par référence à ce tableau permettait de prendre en charge l’intégralité des échéances, et énoncé, ensuite, que le caractère progressif des clauses, conformes aux prévisions contractuelles en la matière, ne révélait aucun avantage propre à instaurer un déséquilibre contractuel au profit du professionnel, la cour d’appel a, par ces motifs, légalement justifié sa décision au regard [de l’article 35 de la loi du 10 janvier 1978] par le moyen ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 28 OCTOBRE 1997
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 95-19470. Arrêt n° 1667.
DEMANDEUR à la cassation : 1°/ Madame X. 2°/ Monsieur Y. ès qualités de curateur de Mme X
DÉFENDEUR à la cassation : Assurances Générales de France AGF
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par : 1°/ Madame X., demeurant […], 2°/ Monsieur Y., demeurant […], ès qualités de curateur de Mme X., en cassation d’un arrêt rendu le 14 juin 1995 par la cour d’appel de Pau (1ère chambre), au profit des Assurances Générales de France (AGF), dont le siège social est […], défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l’article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 16 juillet 1997, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Aubert, conseiller rapporteur, Mme Delaroche, conseiller, M. Sainte-Rose, avocat général, Mme Aydalot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Aubert, conseiller, les observations de la SCP Ancel et Couturier-Heller, avocat de Mme X. et de M. Y., ès qualités, de Maître Baraduc-Benabent, avocat des Assurances Générales de France, les conclusions de M. Sainte-Rose, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu, selon les énonciations de l’arrêt confirmatif attaqué (Pau, 14 juin 1995), que Mme X. a obtenu un prêt pour l’achat d’un appartement et a adhéré, à cette occasion, en janvier 1985, à un contrat d’assurance groupe de la compagnie Assurances générales de France (AGF) couvrant les risques de décès et d’incapacité de travail-invalidité ; que, depuis le 5 août 1985, Mme X. a été en arrêt de travail et les AGF ont pris en charge les échéances du prêt à compter de l’expiration du délai de franchise, soit à la date du 8 novembre 1985 ; qu’à la suite d’une visite médicale faite en octobre 1992, les AGF ont limité leur garantie, décision notifiée à Mme X. et à M. Y., son curateur, désigné en cette qualité par un jugement en date du 20 juillet 1990; qu’après une ordonnance de référé qui a désigné un expert et prescrit à l’assureur de reprendre dans son intégralité le paiement des échéances à titre provisionnel, les AGF ont assigné Mme X., assistée de son curateur, en réduction de la prise en charge des échéances de remboursement et en répétition du trop-payé ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que Mme X. fait grief à l’arrêt de l’avoir condamnée à rembourser le trop-versé par les AGF et d’avoir rejeté ses propres demandes qui tendaient à la condamnation des AGF à la prise en charge de la totalité du remboursement du prêt, alors que, en se bornant à énoncer que la convention expliquait de façon claire et parfaitement intelligible les circonstances et les modalités selon lesquelles l’assureur prend le risque à sa charge, sans rechercher concrètement si les variables insérées au contrat étaient compréhensibles par le consommateur, même médecin, la cour d’appel aurait privé sa décision de toute base légale au regard de l’article 35 de la loi du 10 janvier 1978 ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mais attendu qu’ayant, par motifs propres et adoptés, d’abord relevé que les modalités de calcul du taux d’invalidité, gouvernant la prise en charge du risque, expressément déterminé par combinaison du taux d’incapacité fonctionnelle et du taux d’incapacité professionnelle, étaient expliquées de façon claire et précise à l’aide d’un tableau très détaillé et que l’intéressée ne pouvait ignorer que seul un degré d’invalidité égal à 66 % par référence à ce tableau permettait de prendre en charge l’intégralité des échéances, et énoncé, ensuite, que le caractère progressif des clauses, conformes aux prévisions contractuelles en la matière, ne révélait aucun avantage propre à instaurer un déséquilibre contractuel au profit du professionnel, la cour d’appel a, par ces motifs, légalement justifié sa décision au regard du texte visé par le moyen ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X. aux dépens ;
Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de Mme X. ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyen produit par la SCP Ancel et Couturier-Heller, avocat aux Conseils pour Mme X. et M. Y..
MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Madame X. à rembourser la part versée indûment par la Compagnie AGF à titre de remboursement de l'emprunt et d'avoir rejeté comme inutiles ou mal fondées les demandes de Madame X. tendant à la condamnation des AGF à prendre en charge la totalité du remboursement du prêt au profit de la SOFAL ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS PROPRES QUE "Madame X. et son curateur se bornent à affirmer péremptoirement que les bases de calcul de l'invalidité telles qu'indiquées au contrat "entrent dans la catégorie des clauses abusives telles que prévues par l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978 sur la protection et l'information des consommateurs" ; qu'ils reprennent les dispositions dudit article et énoncent la recommandation 90-01 de la Commission des clauses abusives sans préciser en quoi le contrat objet du litige y contrevient ; que par les motifs énoncés par le premier juge que la Cour adopte expressément comme procédant d'une juste appréciation des éléments de la cause et d'une exacte application de la loi du 10 janvier 1978 invoquée, il convient de débouter Madame X. et Monsieur Y. ès-qualités, de leur demande tendant à voir déclarer abusives les clauses contenues dans les conditions générales du contrat d'assurance-groupe ; que notamment aux pages 12 et 16, la convention explique de façon claire et parfaitement intelligible les circonstances et les modalités selon lesquelles l'assureur prend le risque à sa charge ; qu'en sa qualité de médecin, Madame X. ne peut raisonnablement et de bonne foi soutenir qu'elle a pu être abusée par les termes du contrat et se méprendre sur le contenu et la portée de la clause ; que l'analyse des dispositions contractuelles ne révèle l'existence d'aucun avantage propre à instaurer un déséquilibre au profit de l'assureur ; qu'il y a donc lieu de déterminer l'invalidité dont est atteinte Madame X. en fonction des définitions énoncées à l'article 15 du contrat" ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE "le caractère variable et progressif de la prise en charge totale ou partielle en fonction du degré d'incapacité ou d'invalidité est parfaitement admissible ; il est au demeurant habituel et constitue la base permettant le calcul de primes adaptées ; que le contrat explique de façon très claire et précise à compter de la page 12 les circonstances dans lesquelles le risque est pris en charge et selon quelles modalités, notamment à l'aide d'un tableau très détaillé, le taux est calculé ;
Que l'intéressée ne pouvait ignorer que seul un degré d'invalidité égal à 66 % par référence au tableau dont s'agit permettait de prendre à charge l'intégralité des échéances ; que par ailleurs, il est expliqué que l'état d'invalidité est déterminé par la combinaison de deux types d'incapacités : le taux d'incapacité fonctionnelle et le taux d'incapacité professionnelle" ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS QUE constitue une clause abusive la disposition contractuelle imposée au consommateur et qui confère au professionnel un avantage excessif (art. 35 de la loi du 10 janvier 1978) ; Que dans la recommandation n° 90-01 émise dans le domaine des contrats d'assurance complémentaires à un contrat de crédit à la consommation ou immobilier (BOCCRF du 28 août 1990), la Commission des clauses abusives insiste sur le fait que l'assuré doit avoir clairement connaissance des termes de la garantie et ne pas être induit en erreur par "l'imprécision ou le caractère trompeur des présentations" ;
Que devant la Cour d'appel (Prod. n° 4 : conclusions de l'exposante), Mme X. faisait valoir que l'article 15 du contrat d'assurance avait le caractère d'une clause abusive, puisqu'il ne permettait pas à l'assuré de connaître les limites de la garantie, notamment par l'adjonction d'un "degré N", donnant lieu à des calculs "particulièrement byzantins" (p. 4 al. 3) ;
Qu'en se bornant, pour écarter cette argumentation, à énoncer que la convention expliquait "de façon claire et parfaitement intelligible les circonstances et les modalités selon lesquelles l'assureur prend le risque à sa charge" (p. 7 al. 6), sans rechercher concrêtement si les variables insérées au contrat étaient assimilable par le consommateur, même médecin, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978.
- 6015 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Clauses sur l’objet principal ou le prix - Régime initial (L. 10 janvier 1978)
- 6364 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Assurance - Assurances de groupe - Assurance-crédit - Obligations de l’assureur - Invalidité permanente