CASS. CIV.1re, 21 novembre 1995
CERCLAB - DOCUMENT N° 2080
CASS. CIV.1re, 21 novembre 1995 : pourvoi n° 93-18051 ; arrêt n° 1782
Publication : Bull. 1995, I, n° 422, p. 294
Extrait : « Mais attendu, d’abord, que M. X. n’ayant pas soutenu dans ses conclusions devant la cour d’appel le caractère abusif de la clause litigieuse, le moyen est, en sa dernière critique, nouveau et irrecevable comme mélangé de fait ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 21 NOVEMBRE 1995
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 93-18051. Arrêt n° 1782.
DEMANDEUR à la cassation : Monsieur X.
DÉFENDEUR à la cassation : Société Mattei automobiles, devenue SA Albatros investissement
Président : M. Lemontey. Rapporteur : M. Grégoire. Avocat général : M. Sainte-Rose. Avocats : la SCP Rouvière et Boutet, la SCP Defrénois et Levis.
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches, et sur le second moyen, pris en ses deux branches, réunis :
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que, le 12 mai 1988, la société Mattei automobiles, devenue SA Albatros investissement, a donné en location à M. X., une automobile qui a été volée à ce dernier le jour même, alors que la copie de la carte grise remise par le loueur au locataire était restée à l’intérieur du véhicule ; que, se fondant sur la clause 4-4-1 des conditions générales de location figurant au verso de l’acte, selon laquelle « le loueur prend à sa charge les risques de vol du véhicule à la condition expresse que le locataire restitue les documents (carte grise ou copie certifiée conforme de la carte grise) et les clefs du véhicule ; à défaut de restitution par le locataire des documents et des clefs du véhicule, il doit au loueur la valeur du véhicule », la société Mattei automobile a assigné M. X. en paiement d’une somme d’argent ; que l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 25 mai 1993) a fait droit à cette demande ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que M. X. fait grief à l’arrêt d’avoir ainsi statué alors, selon le moyen, d’une part, qu’une clause mettant, en cas de vol, le prix de la chose louée à la charge du locataire, ne peut être déclarée opposable à celui-ci dans la mesure où elle figure au verso d’un acte, qui n’a été signé qu’au recto, et qui comporte de nombreuses clauses en caractères aussi petits que difficilement compréhensibles, de sorte qu’en statuant comme elle a fait la cour d’appel a violé les articles 1109-1110 et suivants et 1134 du Code civil ; alors, d’autre part, que l’arrêt dénature par omission la clause d’exclusion de la garantie de vol qui, loin d’attirer l’attention du locataire sur les risques de vol, commence par mentionner « le loueur prend à sa charge les risques de vol du véhicule », ce qui trompe le souscripteur et l’incite à ne pas prendre connaissance des restrictions qui suivent cette proposition ; alors, encore, que l’arrêt, qui fonde la condamnation du locataire sur la seule clause 4-4-1 du contrat, indissociable des clauses précédentes concernant le vol du véhicule, manque de base légale ; alors, en outre, que la cour d’appel, qui s’est refusée à rechercher si la clause d’exclusion de garantie était opposable au locataire bien qu’il n’existe aucun lien de causalité entre le vol et l’absence de remise des documents, n’a pas donné de base légale à sa décision et alors, enfin, que la cour d’appel, qui devait rechercher si la clause subordonnant la garantie de vol à une condition sans lien de causalité avec le sinistre n’était pas abusive au sens de l’article 35 de la loi du 10 janvier 1978 sur la protection et l’information des consommateurs, a privé sa décision de base légale ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mais attendu, d’abord, que M. X. n’ayant pas soutenu dans ses conclusions devant la cour d’appel le caractère abusif de la clause litigieuse, le moyen est, en sa dernière critique, nouveau et irrecevable comme mélangé de fait ;
Attendu, ensuite, que l’arrêt retient souverainement, hors la dénaturation alléguée, que les conditions générales des locations étaient très lisibles, que la clause litigieuse était imprimée en caractères gras, de petites dimension comme l’ensemble du texte mais cependant plus gros que ceux utilisés pour certaines autres conditions, que l’attention du locataire était expressément attirée sur l’importance des clauses imprimées en caractère gras par une mention figurant sous l’intitulé « Conditions générales de location » et que les mots « les risques de vol du véhicule » étaient soulignés, de sorte que l’objet de la clause apparaissait clairement ; que l’arrêt ajoute que l’acte mentionnait au recto, juste au-dessus de la signature du locataire, que celui-ci reconnaissait avoir lu et accepté les conditions figurant au verso ; que la cour d’appel a pu en déduire, sans violer aucun des textes visés au moyen, que, faute d’avoir procédé à la restitution des documents, M. X. était, en vertu du contrat, débiteur envers le loueur de la valeur du véhicule, peu important que la présence des documents dans le véhicule soit sans lien avec le vol ;
D’où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n’est pas fondé pour le surplus ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyen produit par SCP Rouvière et Boutez, avocat aux conseils pour M. Jean-Claude X.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné M. Jean-Claude X., qui a pris en location un véhicule, volé quelques heures plus tard, à payer à la Société ALBATROS INVESTISSEMENT, propriétaire du véhicule, le prix de celui-ci soit 48.996 Francs ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE LES Conditions Générales de location figurant au verso du contrat étaient très lisibles, les caractères utilisés pour la rédaction de la clause 4.4.1. étant de petites dimensions comme l'ensemble du texte mais imprimés en caractères plus gros, et que l'attention du locataire était expressément attirée par une mention figurant immédiatement après l'intitulé "Conditions Générales de Location", "sur l'importance des clauses imprimées en caractère gras" ; qu'en outre étaient soulignés dans la première phrase de la clause les mots "les risques de vol du véhicule", en sorte que son objet apparaissait clairement ; que le contrat comportait au verso (en réalité recto) la mention imprimée en caractères très apparents et précédant immédiatement la signature du locataire, selon laquelle il déclarait avoir lu et accepté les conditions figurant au recto (en réalité verso) ; que celles-ci et notamment la clause 4.4.1 lui sont donc opposables ; qu' X. ne conteste pas avoir été dans l'incapacité de restituer les documents administratifs qu'il avait laissés à l'intérieur du véhicule volé, dont il a seulement remis les clefs au loueur ; que faute d'avoir procédé à la double restitution des documents et des clefs du véhicule volé, il est conventionnellement débiteur envers le loueur de la valeur du véhicule, en application de la clause 4.4.1.
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS D'UNE PART QUE ne peut être déclarée opposable à un locataire une clause mettant à sa charge le prix intégral de la chose louée en cas de vol dans la mesure où cette clause figure au verso du contrat de location ne comportant pas la signature de l'intéressé et comportant en une seule page un tel nombre de clauses : 53 que celles ci sont écrites en caractères aussi petits que difficilement compréhensibles (Violation des articles 1109-1110 et suiv, 1134 du Code Civil) ;
ALORS D'AUTRE PART QUE l'arrêt dénature par omission la clause d'exclusion de garantie de vol litigieuse car celle-ci loin d'attirer l'attention du locataire sur les risques de vol du véhicule débute précisément en ces termes : "le loueur prend à sa charge les risques de vol du véhicule" ce qui trompe d'évidence et d'emblée le souscripteur, incite à ne pas prendre connaissance des restrictions en petits caractères et non soulignées qui suivent cette proposition (conditions de remise des documents et des clés) (violation des articles 4 du NCPC , 1134 du Code Civil).
ALORS ENFIN QUE l'arrêt manque de base légale en ce qu'il vise, pour condamner le locataire, la seule clause 4.4.1. du contrat indissociable des clauses qui le précèdent et ainsi libellées :
"4.3. VOL ET DEGATS AU VEHICULE
4.3.1. IL N'Y A PAS D'ASSURANCE POUR LE VOL TOTAL OU PARTIEL DU VEHICULE OU DES OBJETS TRANSPORTES, la charge de ces risques étant fournie par le loueur lui-même sous les conditions précisées au § IV ci-après ;
GARANTIES FOURNIES PAR LE LOUEUR.
4.4. VOL
4.4.1 Le loueur prend à sa charge les risques de vol du véhicule..." (manque de base légale, articles 1134 et suivants, 1156, 1161 du Code Civil).
SECOND MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné M. Jean-Claude X. qui a pris en location un véhicule volé, quelques heures plus tard, à payer à la Société ALBATROS INVESTISSEMENT, propriétaire du véhicule le prix de celui -ci soit 48.996 Francs ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE la clause imposant au locataire de restituer non seulement les clés mais les documents du véhicule volé, afin d'être garanti du vol lui étant opposable, il n'y a pas lieu de rechercher si la présence des documents administratifs dans le véhicule est en relation avec le vol.
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS QU'il ne peut être opposé à une partie une exclusion de garantie en matière de vol, s'il n'est pas établi qu'il y a un lien de causalité entre une des conditions figurant à l'exclusion et qu'en se refusant à cette recherche l'arrêt a privé sa décision de base légale au regard des articles 1131, 1134 du Code Civil ;
ET ALORS SUBSIDIAIREMENT qu'il appartenait à la Cour de rechercher si en imposant au locataire, aux fins de garantie, une condition, sans lien de causalité avec le sinistre, la Société propriétaire n'avait pas eu recours à une "clause abusive" condamnée par l'article 35 de la loi du 10 Janvier 1978 sur la protection et l'information des consommateurs.