T. COM. LONS-LE-SAUNIER, 30 août 1991
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 219
T. COM. LONS-LE-SAUNIER, 30 août 1991 : RG n° 91/60
(sur appel CA BESANÇON (2e ch. com.), 16 avril 1993 : RG n° 1825/91 ; arrêt n° 375)
Extrait : « Le Tribunal observe que X. demande, non pas la résolution de la convention, mais sa nullité pour dol par application de l'article 1116 du code civil. En l'espèce, il est évident que la Société STIBA a délibérément trompé X. en lui proposant comme neuf un photocopieur « reconditionné », ce qui constitue manifestement un dol ; le dol est une cause de nullité « lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté ». La jurisprudence semble univoque en pareille matière (Cass. Ch. mixte, 23 novembre 1990 - 3 arrêts ; T. com. Lyon 11 Avril 1991 ; Cour d'Appel de Besançon, 15 mai 1991). La résolution du contrat de vente entraîne nécessairement la résiliation du contrat de crédit-bail. Dans ces conditions, il échet de dire et juger nul le contrat passé entre M. X. et la Société STIBA ; en conséquence de cette nullité, le contrat de crédit-bail liant X. à la Société « UFB LOCABAIL » doit être déclaré nul pour absence de cause. La Société « UFB LOCABAIL » devra restituer à X. tout loyer qu'elle aurait pu percevoir à raison de ce contrat. ».
TRIBUNAL DE COMMERCE DE LONS-LE-SAUNIER
JUGEMENT DU 30 AOÛT 1991
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 91/60. À L'AUDIENCE PUBLIQUE DU TRIBUNAL DE COMMERCE DE LONS-LE-SAUNIER (Jura) tenue au Palais de Justice de ladite ville le VENDREDI TRENTE AOÛT MIL NEUF CENT QUATRE VINGT ONZE, à quinze heures, il a été rendu le jugement suivant dans la cause :
ENTRE :
Monsieur X.
entrepreneur en construction métallique, demeurant [adresse], Demandeur comparant par Maîtres ANCEAU et FAVOULET, Avocats Associés, Barreau de Lons-le-Saunier, d'une part
ET :
- 1° - la société anonyme STIBA
dont le siège social est à [adresse] ayant agence à [ville], Défenderesse non représentée
- 2° - la société anonyme « UFB LOCABAIL »
dont le siège social est à [adresse], Défenderesse comparant par Maîtres PARIS et PARAISO, Avocats Associés, Barreau de Lons-le-Saunier, d'autre part
Procédure : - Actes en dates des 8 et 11 février 1991 portant assignations pour l'audience du 1er mars 1991.
- Après divers renvois sollicités par Maîtres PARIS et FAVOULET pour communication de pièces et échanges de conclusions, la cause a été finalement retenue et plaidée à l'audience du 17 mai 1991, mise en délibéré à cette date pour jugement être rendu le 5 juillet 1991 (délibéré prolongé au 30 août 1991).
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyens et prétentions des parties :
M. X. expose qu'il a été démarché, au siège de son entreprise, par un représentant (M. A.) de la Société STIBA, dans le courant du mois de juillet 1990 en fin de journée ; que M. A. lui a proposé l'acquisition d'un photocopieur de marque TOSHIBA type B D 7790 ; pour le même prix, à titre promotionnel, il lui a proposé la fourniture d'un caméscope, d'un conditionneur d'air et d'un micro-ondes ; X. a signé un bon de commande non daté portant le n° XX ; un document intitulé « demande de livraison » lui fut remis, stipulant une livraison au 10 septembre 1990 ; le même jour. A. fit signer à X. une demande de crédit-bail destinée à la société « UFB LOCABAIL » ; le photocopieur TOSHIBA n'a été installé que le 23 octobre 1990, à 16 h 00 ; après que trois pannes se fussent produites, les 23, 25 et 30 octobre 1990, X. constata que le matériel livré n'était pas en réalité un matériel neuf, mais « reconditionné » ; X. a alors demandé amiablement l'annulation du marché conclu et du contrat de crédit-bail ; ne recevant aucune réponse, X. se trouve dans l'obligation de saisir le tribunal aux fins d'entendre dire et juger nul le contrat de vente passé avec la société STIBA ; par voie de conséquence, X. demande que le contrat de crédit-bail passé avec la société « UFB LOCABAIL » soit déclaré nul pour absence de cause ; il réclame la condamnation de la société STIBA à lui payer la somme de 20.000 Francs à titre de dommages et intérêts et celle de 4.000 Francs sur le fondement de l'art. 70 du nouveau code de procédure civile ; il demande la restitution de tous les loyers perçus par la société « UFB LOCABAIL » ; il demande à la société STIBA de reprendre possession de tout le matériel livré et sa condamnation aux dépens ; il sollicite l'exécution provisoire du jugement à intervenir.
La société STIBA ne comparait pas ni personne pour elle, de sorte que le jugement sera réputé contradictoire à son égard.
La société « UFB LOCABAIL » soutient avoir rempli son contrat ; X. a signé le contrat de crédit-bail le 31 juillet 1990 ; la société STIBA lui a adressé l’avis de livraison conforme à la facture et au bon de commande ; la société STIBA a été payée du montant de sa facture pour le matériel choisi par X. ; la Société [minute page 2] « UFB LOCABAIL » invoque les dispositions de l'article 6 des conditions générales de location de crédit-bail conclu : « le bailleur qui aura accompli l'essentiel de ses obligations en passant commande au fournisseur n'encourra aucune responsabilité du fait dudit fournisseur vis à vis du locataire », même en cas de défaillance ou de vices cachés affectant le matériel loué ou encore de résolution de la vente.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Discussion :
Le Tribunal observe que X. demande, non pas la résolution de la convention, mais sa nullité pour dol par application de l'article 1116 du code civil. En l'espèce, il est évident que la Société STIBA a délibérément trompé X. en lui proposant comme neuf un photocopieur « reconditionné », ce qui constitue manifestement un dol ; le dol est une cause de nullité « lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté ».
La jurisprudence semble univoque en pareille matière (Cass. Ch. mixte, 23 novembre 1990 - 3 arrêts ; T. com. Lyon 11 Avril 1991 ; Cour d'Appel de Besançon, 15 mai 1991). La résolution du contrat de vente entraîne nécessairement la résiliation du contrat de crédit-bail.
Dans ces conditions, il échet de dire et juger nul le contrat passé entre M. X. et la Société STIBA ; en conséquence de cette nullité, le contrat de crédit-bail liant X. à la Société « UFB LOCABAIL » doit être déclaré nul pour absence de cause. La Société « UFB LOCABAIL » devra restituer à X. tout loyer qu'elle aurait pu percevoir à raison de ce contrat.
La Société STIBA devra reprendre possession de tout le matériel livré à X.
Il convient de condamner la Société STIBA à verser à X. une somme de CINQ MILLE Francs (5.000 Francs) à titre de dommages et intérêts, et une autre de TROIS MILLE Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Les dépens seront supportés par la Société STIBA.
L'exécution provisoire ne sera pas ordonnée.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal de Commerce de Lons-le-Saunier (Jura), après en avoir délibéré :
Statuant publiquement, en premier ressort, par décision réputée contradictoire
à l'égard de la Sté STIBA et contradictoire à l'égard de la Sté "UFB. LOCABAIL",
Déclare nul et de nul effet le contrat passé entre X. et la Sté STIBA, En conséquence de cette nullité, le contrat-de crédit-bail liant 'X. à la Sté "UFB LOCABAIL" est lui même nul pour absence de cause.
Condamne la Sté "UFB LOCABAIL" à restituer à X. tous loyers qu'elle aurait pu percevoir à raison de ce contrat.
Ordonne à la Sté STIBA de reprendre possession de tout le matériel livré à X..
Condamne la Sté STIBA à verser à X. la somme de CINQ MILLE FRANCS (5.000 Francs) à titre de dommages et intérêts et celle de TROIS MILLE. FRANCS (3.000Francs) sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Condamne la Sté STIBA aux dépens.
Dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire.
Ainsi jugé et prononcé les jour, mois et an susdits et, après lecture, le présent jugement a été signé par le Président de ce Tribunal de Commerce et le greffier.