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CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 18 avril 2024

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 18 avril 2024
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 8e ch. sect. 1
Demande : 21/02797
Décision : 24/325
Date : 18/04/2024
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 8/05/2021
Décision antérieure : TJ Avesnes sur Helpe, 6 avril 2021 : RG n° 19/00789 ; Dnd
Numéro de la décision : 325
Décision antérieure :
  • TJ Avesnes sur Helpe, 6 avril 2021 : RG n° 19/00789 ; Dnd
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CERCLAB - DOCUMENT N° 23025

CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 18 avril 2024 : RG n° 21/02797 ; arrêt n° 24/325

Publication : Judilibre

 

Extrait : « L'article 4.1) « propriété du matériel » du contrat litigieux stipule que « le matériel est la propriété entière et exclusive du bailleur ». L'article 8 « fin de la location-restitution » prévoit que : « 1) dès la fin de la location le locataire restituera le matériel, à ses frais, Franco de port et d'emballage, en bon état d'entretien et de fonctionnement, et avec tous les documents techniques et administratifs qui sont attachés, en tout lieu convenu entre les parties, ou à défaut d'entente à celui indiqué par le bailleur, 2) tout retard dans la restitution du matériel, soit au terme du contrat, soit après résiliation entraînera l'exigibilité d'une indemnité d'utilisation correspondante au terme locatif moyen calculé sur une base mensuelle (toute période commencée étant due en totalité), sans préjudice des poursuites que le bailleur pourrait engager à l'encontre du locataire. »

D'une part, M. X. invoque le caractère abusif de la clause d'indemnité d'utilisation sur le fondement des dispositions de l'article 1171 du code civil. Toutefois, ces dispositions issues de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable au contrats conclus à compter du 1er octobre 2016, n'étaient pas applicables la date de conclusion du contrat litigieux du 4 novembre 2010.

Jusqu'à l'adoption de l'ordonnance susvisée, les règles relatives aux clauses abusives étaient énoncées à l'ancien article L. 132-1 devenu L. 212-1 du code de la consommation qui disposait « (...) » Il était jugé qu'un contractant ne pouvait se prévaloir des dispositions de l'article L.132-1 relatives aux clauses abusives lorsque le contrat qu'il avait conclu était en rapport directe avec son activité professionnelle. Le consommateur est désormais défini à l'article préliminaire du code de la consommation, comme toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, et le Professionnel comme toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu'elle agit au nom ou pour le compte d'un autre professionnel.

En l'espèce, le dit contrat litigieux conclu par M. X. auprès de la société Lixxbail portant sur la location d'une moissonneuse-batteuse est à l'évidence en rapport direct avec son activité d'agriculteur, ce dernier ayant manifestement agi à des fins entrant dans le cadre de ses activités professionnelles, en sorte qu'il ne peut être considéré comme consommateur au sens de l'article L. 132-1 ancien. Dès lors, M. X. ne peut bénéficier des dispositions relatives aux clause abusives. D'autre part, s'agissant d'un contrat de location et le matériel restant la propriété du bailleur, le prix du matériel, en cas de revente éventuelle, ne pourra s'imputer sur les sommes dues par M. X.

Enfin, l'indemnité d'utilisation correspondant au terme locatif moyen calculé sur une base mensuelle suivant l'article 8 2)du contrat, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que l'indemnité d'utilisation mensuelle était d'un montant de 2.073 euros, et a condamné en conséquence M. X. à payer une indemnité de 118.161 euros arrêtées au 1er novembre 2020, terme du mois d'octobre inclus, ainsi qu'une indemnité d'utilisation mensuelle de 2.073 euros à compter du 1er octobre 2020 jusqu'à restitution du matériel. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

HUITIÈME CHAMBRE SECTION 1

ARRÊT DU 18 AVRIL 2024

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 21/02797. Arrêt n° 24/325. N° Portalis DBVT-V-B7F-TUE2. Jugement (R.G. n° 19/00789) rendu le 6 avril 2021 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'Avesnes sur Helpe.

 

APPELANT :

Monsieur X.

né le [Date naissance 1] à [Localité 6] - de nationalité Française, [Adresse 3], [Localité 4], Représenté par Maître Fabienne Menu, avocat au barreau de Valenciennes, avocat constitué

 

INTIMÉE :

SA Lixxbail

au capital de XXX € immatriculée au RCS de Nanterre sous le n° YYY, agissant poursuites et diligences en la personne de son Président du Conseil d'Administration domicilié en cette qualité audit siège, [Adresse 2], [Localité 5], Représentée par Maître Martine Vandenbussche, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

 

DÉBATS à l'audience publique du 7 février 2024 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Fabienne Dufossé

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Yves Benhamou, président de chambre, Samuel Vitse, président de chambre, Catherine Ménegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 18 avril 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 25 janvier 2024

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Selon acte sous-seing privé en date du 4 novembre 2010, la SA Lixxbail a conclu avec M. X., agriculteur, un contrat de location n°351442FA0 ayant pour objet le financement d'une moissonneuse-batteuse de marque Class à hauteur de 239.000 euros TTC, d'une durée de 60 mois, moyennant le paiement de six loyers annuels successifs d'un montant de :

- un premier loyer de 27.000 euros HT,

- quatre loyers de 24.500 euros HT,

- un sixième loyer de 24.263,05 euros HT,

outre les sommes dues au titre de la TVA et de la prime d'assurance pour chacun de ces loyers.

Ce contrat était assorti d'une promesse unilatérale d'achat du matériel en fin de contrat par M. X., pour un montant de 80.000 euros HT, outre la TVA au taux en vigueur à la date de la réalisation de l'achat.

Le matériel a été livré le 16 décembre 2010.

Par jugement du 8 octobre 2013, le tribunal de grande instance d'Avesnes-Sur-Helpe a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de M. X., puis, par jugement du 14 janvier 2014, ce même tribunal a prononcé la rétractation du jugement ayant initialement prononcé la liquidation judiciaire de M. X. et dit que ce dernier sera placé en redressement judiciaire.

Par courrier du 27 juin 2014, dont copie au mandataire judiciaire, la société Lixxbail a mis en demeure M. X. de lui indiquer dans un délai d'un mois si le mandataire judiciaire ou le juge commissaire l'autorisaient à poursuivre le contrat de location. Par courrier 11 juillet 2014, le mandataire judiciaire a informé la société Lixxbail de ce qu'il n'avait cause d'opposition à la poursuite dudit contrat.

Se prévalant du non-paiement de la cinquième échéance au titre de l'année 2014/2015, la société Lixxbail a mis en demeure M. X. de régler les sommes dues par courrier recommandé du 13 mai 2015, dont copie a été adressée au mandataire judiciaire.

Suivant jugement du 12 janvier 2016, le tribunal de grande instance d'Avesnes-Sur-Helpe a arrêté un plan de redressement au profit de M. X.

Après plusieurs mises en demeure infructueuses, la société Lixxbail a, par courrier du 25 octobre 2018 dont copie a été adressé au mandataire judiciaire, mis en demeure M. X. de lui payer la somme de 45'152,20 euros TTC et de lui restituer le matériel, objet du contrat.

Par acte d'huissier de justice du 29 octobre 2018, elle a fait assigner M. X. devant le tribunal de commerce de Valenciennes aux fins de le voir condamner à lui payer diverses sommes et à lui restituer le matériel.

Ce tribunal s'est déclaré incompétent et a renvoyé les parties devant le tribunal de grande instance d'Avesnes-Sur-Helpe, dit n'y avoir lieu en l'état de la procédure à l'allocation d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et laissé les dépens à la charge de la société Lixxbail, les frais de greffe étant liquidés à la somme de 104,44 euros.

Par jugement contradictoire en date du 6 avril 2021, le tribunal judiciaire d'Avesnes-Sur-Helpe a :

- déclaré irrecevable la demande indemnitaire de la société Lixxbail au titre de la résistance abusive faute de bénéficier du privilège de poursuite de l'article L. 622-17 du code de commerce,

- déclaré les autres demandes formées par la société Lixxbail recevables,

- condamné M. X. à verser à la société Lixxbail la somme de 42.596,03 euros, arrêtée au 25 octobre 2018 inclus, ainsi répartie :

- 24.500 euros au titre du loyer impayé hors-taxes de l'année 2014/2015,

- 11.555,83 euros au titre des intérêts de retard échus arrêtés au 25 octobre 2018,

- 1.225 euros au titre de l'indemnité forfaitaire contractuelle de 5 %,

- 4.900 euros au titre de la TVA au taux de 20 % appliqué au loyer hors-taxes,

- 415,20 euros au titre des assurances,

outre les intérêts au taux contractuel (1 % par mois) portant sur le montant du loyer hors-taxes (24.500 euros) à compter du 26 octobre 2018 jusqu'à parfait paiement de cette somme,

- enjoint à M. X. de restituer à la société Lixxbail la moissonneuse-batteuse de marque Class, modèle Lexion, numéro de série C5400109 ainsi que l'ensemble des documents administratifs et clés afférents au bien dans le délai de deux mois suivant la signification de cette décision,

- rappelé que l'autorisation d'appréhender le bien restitué est soumise aux règles de droit commun des procédures civiles d'exécution,

- condamné M. X. à verser à la société Lixxbail au titre de l'indemnité d'utilisation dudit matériel une somme de 118.161 euros, arrêtée au 1er novembre 2020, terme du mois d'octobre 2020 inclus,

- condamné M. X. à verser à la société Lixxbail une indemnité d'utilisation du matériel à compter du 1er novembre 2020 jusqu'à restitution du matériel, à hauteur de la somme mensuelle de 2.073 euros,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- débouté les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. X. aux dépens, en ce compris les dépens devant le tribunal de commerce liquidés à hauteur de 104,44 euros,

- dit n'y avoir lieu exécution provisoire.

[*]

Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 8 mai 2021, M. X. a relevé appel de cette décision en ce qu'il a :

- déclaré les demandes formées par la société Lixxbail recevables,

- condamné M. X. à verser à la société Lixxbail la somme de 42'596,03 euros, arrêtée au 25 octobre 2018 inclus ainsi répartie :

- 24.500 euros au titre du loyer impayé hors-taxes de l'année 2014/2015,

- 11.555,83 euros au titre des intérêts de retard échus arrêtés au 25 octobre 2018,

- 1.225 euros au titre de l'indemnité forfaitaire contractuelle de 5 %,

- 4.900 euros au titre de la TVA au taux de 20 % appliqué au loyer hors-taxes,

- 415,20 euros au titre des assurances,

outre les intérêts au taux contractuel (1 % par mois) portant sur le montant du loyer hors-taxes (24.500 euros) à compter du 26 octobre 2018 jusqu'à parfait paiement de cette somme,

- enjoint à M. X. de restituer à la société Lixxbail la moissonneuse-batteuse de marque Class, modèle Lexion, numéro de série C5400109 ainsi que l'ensemble des documents administratifs et clés afférents aux biens dans le délai de deux mois suivants la signification de cette décision,

- condamné M. X. à verser à la société Lixxbail au titre de l'indemnité d'utilisation dudit matériel une somme de 118.161 euros, arrêtée au 1er novembre 2020, terme du mois d'octobre 2020 inclus,

- condamné M. X. à verser à la société Lixxbail une indemnité d'utilisation du matériel à compter du 1er novembre 2020 jusqu'à restitution du matériel, à hauteur de la somme mensuelle de 2073 euros,

- débouté M. X. de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. X. aux dépens, en ce compris les dépens devant le tribunal de commerce liquidés à hauteur de 104,44 euros.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 9 août 2021, M. X. demande à la cour de :

- réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Avesnes-Sur-Helpe le 6 avril 2021 en toutes ses dispositions critiquées,

en conséquence,

- débouter la société Lixxbail de l'ensemble de ses demandes,

à titre subsidiaire,

- réduire les sommes sollicitées au titre des intérêts de retard, de l'indemnité forfaitaire et de l'indemnité de jouissance,

à titre reconventionnel,

- condamner la société Lixxbail à verser à M. X. :

- la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance et la somme de 3.000 euros au titre de la procédure d'appel,

- les entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction profit de la SCP Action Conseils, avocat aux offres de droit.

M. X. soutient qu'il s'est acquitté du loyer annuel à échéance du 20 novembre 2014, puisque son expert-comptable lui a toujours affirmé qu'il l'avait payé mais ne lui a pas transmis les éléments comptables permettant d'en justifier ; que les intérêts hauteur de 11.555,83 euros et l'indemnité forfaitaire constituent des clauses pénales manifestement excessives qu'il convient de réduire à 1 euro.

S'agissant de l'indemnité d'utilisation, il soutient notamment que la clause qui permet au bailleur de solliciter une telle indemnité jusqu'à la restitution du matériel est abusive au sens de l'article 1171 du code civil et que le bailleur pourra revendre le matériel. Il conteste le montant mensuel de ladite indemnité retenue par le premier juge. Il ajoute que la société Lixxbail n'est pas fondée à obtenir la restitution de la moissonneuse-batteuse au motif qu'elle n'a pas engagé d'action en revendication dans le cadre de la procédure collective conformément aux dispositions de l'article L. 624-9 du code de commerce, et qu'elle n'a pas opéré la publicité du contrat de crédit-bail litigieux.

[*]

Aux termes de ses conclusions notifiées le 9 novembre 2021, la société Lixxbail demande à la cour de :

Vu les articles 1134 et suivants du code civil,

- déclarer recevable et bien fondée la société Lixxbail en toutes ses demandes, fins et prétentions, y faire droit

- en conséquence débouter M. X. de l'ensemble de ses demandes, fins moyens et prétentions,

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- condamner M. X. à payer à la société Lixxbail la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. X. aux entiers frais et dépens de la présente instance en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

La société Lixxbail fait valoir que le loyer annuel du 20 novembre 2014 n'a pas été réglé par M. X., et que ce dernier ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de ce qu'il s'est libéré de sa dette ; que les intérêts au taux contractuel ne constitue pas une clause pénale pouvant donner lieu à réduction sur le fondement de l'article 1231-5 du code civil, et qu'ils ne sont en tout état de cause pas manifestement excessifs ; que l'indemnité forfaitaire contractuellement prévue et expressément acceptée par M. X. n'est pas manifestement pas excessive ; que les stipulations contractuelles impliquent la restitution du matériel loué et à défaut de restitution, le paiement d'une indemnité d'utilisation. Elle ajoute que le prix de vente du matériel ne vient pas en déduction de cette indemnité et que le montant mensuel retenu par le premier juge est exact. S'agissant de la restitution du matériel, la société Lixxbail fait valoir que sa créance étant postérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective, elle n'avait pas l'obligation de déposer une requête en restitution du matériel. Pour le même motif, il ne peut être invoqué le défaut de publicité du contrat de location, laquelle a pour seul objet de rendre opposable à la procédure collective le droit de propriété du bailleur.

[*]

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour le surplus de leurs moyens.

La clôture de l'affaire a été rendue le 25 janvier 2024 et l'affaire plaidée à l'audience de la cour du 7 février 2024.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

A titre liminaire, la cour constate que M. X. ne soulève plus l'irrecevabilité des demandes de la société Lixxbail à raison de l'ouverture de la procédure collective.

 

Sur la demande de la société Lixxbail au titre du loyer impayé, intérêts de retard et indemnité forfaitaire :

Les textes du code civil mentionnés dans l'arrêt sont ceux dans leur version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable à la date de conclusion du contrat de location du 4 novembre 2010.

En vertu de l'article 1134 du code civil les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Selon l'article 1315 du code civil du code civil « Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui produit l'extinction de son obligation. »

Aux termes de son décompte de créance arrêté au 25 octobre 2018 (pièce n° 14), la société Lixxbail sollicite le paiement de la somme de 45 152,20 euros se décomposant comme suit :

- loyers HT du 20 novembre 2014 : 24.500,00 euros,

- intérêts sur loyers : 11.555,83 euros,

- pénalités sur loyers : 1.225,00 euros,

- TVA : 20 % 7.456,17 euros,

- total TTC : 44.737,00 euros,

- assurance : 415,20 euros,

- TOTAL IMPAYE : 45.152,20 euros.

 

- Sur le loyer annuel du 20 novembre 2014

Il est rappelé que le contrat de location du 4 novembre 2010 porte sur la location par la société Lixxbail à M. X. d'une moissonneuse-batteuse, d'une durée de 60 mois, moyennant le versement par ce dernier de six loyers annuels successifs :

- le 20/12/2010, un loyer d'un montant de 27.000 euros HT, outre 5 292 euros au titre de la TVA, et 380,60 euros au titre de l'assurance,

- les 20 novembre 2011, 2012, 2013, 2014, quatre loyers d'un montant de 24'500 euros HT, outre 4 802 euros au titre de la TVA et 415,20 euros au titre de l'assurance,

- le 20 novembre 2015, un loyer d'un montant de 24'263,05 euros HT, outre 4 852,61 euros et 34,60 euros au titre de l'assurance.

Il résulte du décompte produit par la société Lixxbail et de ses différentes mises en demeure non contestées par M. X., que le loyer du 20 novembre 2014 n'a pas été réglé.

M. X., qui se borne a faire valoir que son expert-comptable lui avait assuré que ce loyer était payé ne produit aucune pièce justificative susceptible de prouver qu'il s'est libéré de sa dette, conformément aux dispositions de l'article 1315 du code civil susvisées.

Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné M. X. à payer la somme de 24.500 euros HT au titre du loyer du 20 novembre 2014 ainsi que la prime d'assurance afférente d'un montant de 415,20 euros.

La société Lixxbail n'émettant aucune critique en ce que le premier juge a relevé qu'il ressort des dispositions contractuelles que la TVA n'a pas vocation à être appliquée sur les pénalités et intérêts, mais uniquement sur les loyers HT, et a en conséquence retenu la TVA à hauteur de 4 900 euros, au lieu de 7 456,17 euros, le jugement sera également confirmé sur ce point.

 

- Sur les intérêts de retard et l'indemnité forfaitaire

Selon l'article 1152 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite.

Il est de principe que constitue une clause pénale la clause d'un contrat par laquelle les parties évaluent forfaitairement et d'avance l'indemnité à laquelle donnera lieu l'inexécution de l'obligation contractuelle.

En l'espèce, le contrat de location litigieux stipule à l'article 2.9 - modalités de location – loyers que « tout retard dans le paiement de tout ou partie de loyers, ou de ses accessoires entraîne de plein droit l'exigibilité d'intérêts de retard au taux de 1 % par mois, et d'une indemnité forfaitaire égale à 5 % HT des sommes impayées (avec un minimum de 100 euros HT) en remboursement des frais administratifs engagés par le bailleur, sans préjudice des dispositions prévues à l'article « résiliation ci-après ».

Une telle clause d'intérêt ne peut s'analyser en une clause pénale susceptible de modération.

Par ailleurs, si l'indemnité forfaitaire de 5 % (d'un montant de 1.225 euros) constitue une clause pénale susceptible de modération, M. X. ne rapporte nullement la preuve qu'elle est, en l'espèce, manifestement excessive, et doit donner lieu à réduction.

Dès lors, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné M. X. à payer à la société Lixxbail la somme de 42.596,03 euros, outre intérêts au taux contractuel de 1 % par mois portant sur la somme de 24.500 euros, correspondant au montant du loyer HT, à compter du 26 octobre 2018, date du décompte et jusqu'à parfait paiement.

 

Sur la demande au titre de l'indemnité d'utilisation :

L'article 4.1) « propriété du matériel » du contrat litigieux stipule que « le matériel est la propriété entière et exclusive du bailleur ».

L'article 8 « fin de la location-restitution » prévoit que : « 1) dès la fin de la location le locataire restituera le matériel, à ses frais, Franco de port et d'emballage, en bon état d'entretien et de fonctionnement, et avec tous les documents techniques et administratifs qui sont attachés, en tout lieu convenu entre les parties, ou à défaut d'entente à celui indiqué par le bailleur,

2) tout retard dans la restitution du matériel, soit au terme du contrat, soit après résiliation entraînera l'exigibilité d'une indemnité d'utilisation correspondante au terme locatif moyen calculé sur une base mensuelle (toute période commencée étant due en totalité), sans préjudice des poursuites que le bailleur pourrait engager à l'encontre du locataire. »

D'une part, M. X. invoque le caractère abusif de la clause d'indemnité d'utilisation sur le fondement des dispositions de l'article 1171 du code civil.

Toutefois, ces dispositions issues de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable au contrats conclus à compter du 1er octobre 2016, n'étaient pas applicables la date de conclusion du contrat litigieux du 4 novembre 2010.

Jusqu'à l'adoption de l'ordonnance susvisée, les règles relatives aux clauses abusives étaient énoncées à l'ancien article L. 132-1 devenu L. 212-1 du code de la consommation qui disposait « Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la commission instituée à l'article L. 534-1, détermine une liste de clauses présumées abusives ; en cas de litige concernant un contrat comportant une telle clause, le professionnel doit apporter la preuve du caractère non abusif de la clause litigieuse. (...) »

Il était jugé qu'un contractant ne pouvait se prévaloir des dispositions de l'article L.132-1 relatives aux clauses abusives lorsque le contrat qu'il avait conclu était en rapport directe avec son activité professionnelle. Le consommateur est désormais défini à l'article préliminaire du code de la consommation, comme toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, et le Professionnel comme toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu'elle agit au nom ou pour le compte d'un autre professionnel.

En l'espèce, le dit contrat litigieux conclu par M. X. auprès de la société Lixxbail portant sur la location d'une moissonneuse-batteuse est à l'évidence en rapport direct avec son activité d'agriculteur, ce dernier ayant manifestement agi à des fins entrant dans le cadre de ses activités professionnelles, en sorte qu'il ne peut être considéré comme consommateur au sens de l'article L. 132-1 ancien. Dès lors, M. X. ne peut bénéficier des dispositions relatives aux clause abusives.

D'autre part, s'agissant d'un contrat de location et le matériel restant la propriété du bailleur, le prix du matériel, en cas de revente éventuelle, ne pourra s'imputer sur les sommes dues par M. X.

Enfin, l'indemnité d'utilisation correspondant au terme locatif moyen calculé sur une base mensuelle suivant l'article 8 2)du contrat, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que l'indemnité d'utilisation mensuelle était d'un montant de 2.073 euros, et a condamné en conséquence M. X. à payer une indemnité de 118.161 euros arrêtées au 1er novembre 2020, terme du mois d'octobre inclus, ainsi qu'une indemnité d'utilisation mensuelle de 2.073 euros à compter du 1er octobre 2020 jusqu'à restitution du matériel.

 

Sur la demande de restitution du matériel :

L'article 8 1) du contrat de bail prévoit la restitution du matériel à l'échéance du contrat du bail. En outre, le contrat du bail est assorti d'une promesse unilatérale d'achat du matériel en fin de contrat par M. X., pour un montant de 80.000 euros HT, outre la TVA au taux en vigueur à la date de la réalisation de l'achat, aux termes de laquelle il était prévu que « la propriété du matériel sera transférée au promettant à la date du paiement effectif et complet du bailleur du prix convenu ci-dessus. »

Il n'est pas discuté par M. X. qu'à l'échéance du contrat de location en décembre 2015, il n'a pas exécuté son engagement d'acquérir le matériel résultant de la promesse unilatérale d'achat, moyennant le paiement comptant du prix de 80.000 euros, de telle manière qu'il devait le restituer à la société Lixxbail, laquelle en est restée propriétaire.

Pour demander le rejet de la demande de restitution du bien loué, l'appelant invoque l'absence de revendication par la société Lixxbail dans les délai requis par l'article L. 624-9 du code de commerce dans le cadre de la procédure collective et le défaut de publicité du contrat de location.

Selon l'article L. 624-9 du code de commerce dispose que « La revendication des meubles ne peut être exercée que dans le délai de trois mois suivant la publication du jugement ouvrant la procédure » et l'article L.624-10 du même code dispose que « Le propriétaire d'un bien est dispensé de faire reconnaître son droit de propriété lorsque le contrat portant sur ce bien a fait l'objet d'une publicité. Il peut réclamer la restitution de son bien dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. »

Toutefois, il est rappelé que la propriété d'un bien qui n'a pas été revendiqué dans le délai imparti par l'article L.624-9 devient inopposable à la procédure collective, mais que si l'absence de revendication rend le droit de propriété inopposable à la procédure collective, elle n'entraîne cependant pas extinction de ce droit de propriété ni le transfert de la propriété au débiteur, la forclusion ne constituant pas un mode d'acquisition de ce droit, ce dont il résulte que, dans les rapports entre le débiteur et le créancier, l'absence de revendication est sans incidence.

En outre, lorsque le débiteur obtient un plan de redressement, comme en l'espèce, le propriétaire pourra lui opposer sa propriété et demander restitution du bien.

Dès lors, le jugement arrêtant le plan de continuation en date du 12 janvier 2016 ayant mis fin à la procédure collective, le débiteur a été remis à la tête de ses affaires et la société Lixxbail, propriétaire du matériel, est bien fondée à en obtenir la restitution par l'effet de l'arrivée à terme du contrat de bail, à défaut d'exercice par l'appelant de sa promesse d'achat.

Confirmant le jugement, il y a donc lieu de condamner M. X. à restituer à la société Lixxbail la moissonneuse batteuse de Marque Claas, modèle Lexion 650, numéro de série C5400109, ainsi que l'ensemble des documents administratifs et clefs afférents au bien dans le délai de deux mois suivant la signification de l'arrêt.

 

Sur les demandes accessoires :

Les motifs du premier juge méritant d'être adoptés, le jugement est confirmé en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

M. X., qui succombe, est condamné aux dépens d'appel en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

Il n'est pas inéquitable de le condamner à payer la société Lixxbail la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour statant par arrêt contradictoire ;

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Condamne M. X. à payer la société Lixxbail la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. X. aux dépens de l'instance d'appel.

Le greffier                                         Le président

Gaëlle PRZEDLACKI                    Yves BENHAMOU