CA PARIS (pôle 5 ch. 8), 23 septembre 2025
- T. com. Paris, 13 janvier 2023 : RG n° J2022000437J
CERCLAB - DOCUMENT N° 24341
CA PARIS (pôle 5 ch. 8), 23 septembre 2025 : RG n° 23/02868
Publication : Judilibre
Extrait : « M.X., qui n'était pas partie aux pactes le 23 juin 2017, y a adhéré lors de son entrée au capital des sociétés Advancy en 2019.
Il résulte des préambules et des stipulations des pactes que ceux-ci sont indivisiblement liés à une opération par laquelle les associés historiques de la société Advancy Groupe ont souhaité ouvrir le capital de la société à d'autres personnes. Dans cet objectif a été créée la société Financière Advancy qui détient 100% du capital et des droits de vote de la société Advancy Groupe et dont la société Advancy Management détient environ 17 % du capital social. L'opération a été réalisée par le biais d'un emprunt bancaire et de crédits vendeurs. Les pactes, qui étaient destinés à assurer l'équilibre économique de l'Opération, sont uniquement consacrés aux stipulations régissant les promesses de cession, aux faits générateurs les déclenchant, au prix qui est déterminé par rapport à la date du fait générateur selon qu'elle est antérieure ou postérieure au complet remboursement de la dette senior et antérieure au complet remboursement de la dette subordonnée, à son paiement, à la réalisation de la cession, ou selon qu'elle intervient dans un certain délai par rapport à la réalisation de l'opération.
Ce contexte étant rappelé, il convient de rechercher si les pactes ont ou non donné lieu en 2017 à négociation ou discussion entre les signataires historiques, les parties étant contraires à ce sujet.
M.X. verse aux débats un courriel de M. Y., signataire des pactes le 23 juin 2017 (pièce n°46), dans lequel l'intéressé indique « qu'il n'y a eu aucune discussion ou négociation des termes des pactes d'associés signé le 23 juin 2017 pour les sociétés Financière Advancy et Advancy Management. Les actionnaires minoritaires comme moi ont reçu ces documents avec demande de les signer dès réception, sans ouverture à la modification des documents, ce que nous avons tous fait. Aucun des associés minoritaires n'a pu à ma connaissance discuter du contenu de ces pactes qui de toute façon n'était pas l'objet de négociation de notre part. » Il ressort toutefois des courriels versés aux débats par les sociétés intimées, émanant de 8 signataires historiques des pactes (pièces 25 à 32), qu'à l'origine le projet a bien été présenté aux personnes susceptibles de participer à l'opération, qu'il y a eu des discussions et que certains ont préféré ne pas participer à l'engagement (pièce n°25), qu'il n'y a pas eu qu'une seule version du pacte, que certains ont eu le sentiment d'avoir pu échanger et apporter leurs idées (pièces n° 26 et 27), que les associés ont eu accès aux documents, pu travailler avec un avocat et poser des questions (pièce n°28), que les plus novices ont compris le mécanisme du pacte grâce aux questions et échanges avec l'avocat rédacteur, qu'ils ont pu poser les questions et exprimer leurs préoccupations, apporter leurs réflexions et suggestions (pièce n° 29). Ainsi, il ne peut se déduire du seul courriel de M.Y. que les stipulations du pacte n'étaient pas négociables à l'origine alors que le projet a été discuté par plusieurs des futurs signataires et que des modifications sont intervenues sur la version initiale proposée. La circonstance que plusieurs associés minoritaires ont refusé de participer à l'opération ne démontre pas que les clauses des pactes n'étaient pas négociables mais seulement qu'ils n'adhéraient pas à l'opération dans son intégralité, laquelle formait un tout indivisible.
Les pactes ne sauraient dès lors être qualifiés de contrats d'adhésion lors de leur formation.
Il s'agit à présent de rechercher si les adhésions ultérieures de nouveaux associés aux pactes, sans lesquelles l'entrée au capital des sociétés Advancy n'aurait pas été possible, confèrent aux pactes la qualification de contrats d'adhésion à leur égard.
Ces pactes ne constituent pas des conventions qui organisent des échanges ponctuels entre les parties, mais ont vocation à régler, pendant une période de 10 ans, la situation juridique des associés au moment de leur départ de la société, pour quelle que cause que ce soit. Ces pactes devaient donc nécessairement s'appliquer aux tiers devenus associés postérieurement au 23 juin 2017, les parties signataires ayant entendu pendant la durée des pactes soumettre toute entrée au capital des sociétés Financière Advancy et Advancy Management aux clauses de ceux-ci. Ainsi, les pactes conclus initialement se poursuivent à l'égard de l'associé entrant au moyen de son acte d'adhésion. La circonstance que de nouveaux associés entrent dans la société en cours de vie, que ce soit par la cession, l'héritage des titres sociaux ou augmentation de capital de la société, ne peut venir modifier la qualification initiale de contrat de gré à gré, alors qu'il a été expressément prévu dès l'origine que la signature du pacte d'associés s'imposerait à ceux qui veulent entrer au capital social, cette obligation s'inscrivant dans une opération qui lie la détention des titres et le remboursement des financements bancaires par les ressources procurées par l'activité générée au sein du groupe.
Il n'est pas concevable que la qualification d'un contrat de gré à gré ou de contrat d'adhésion puisse évoluer dans le temps et que des associés se trouvant dans une même situation, mais entrés à des moments différents dans le capital social, puissent transformer la qualification du contrat et obtenir que certaines clauses, qui ont été librement négociés en 2017, soient réputées non écrites en 2019. Le droit des contrats impose que la qualification soit figée au moment de la formation du contrat.
Si le pacte d'associés est un contrat et que le droit des contrats lui est applicable, il est aussi un outil du droit des sociétés et la distinction prévue par l'article 1110 du code civil précité, n'est pas adaptée en l'espèce. Le droit des sociétés ne peut en effet admettre ni l'insécurité juridique, ni l'existence de distinctions entre les associés alors qu'ils ont tous, comme au cas présent, approuvé le même projet d'entreprise, et le même schéma destiné à rembourser des dettes sociales, M.X. ayant été libre de devenir associé ou de refuser de le faire parce que cela impliquait la signature des pactes.
En conséquence, la qualification de contrat de gré à gré qui a été scellée lors de l'échange des consentements initiaux est demeurée en l'état au gré des opérations contractuelles ultérieures.
La qualification de contrat d'adhésion n'ayant pas été retenue, il n'y a pas lieu d'examiner le moyen pris de l'existence, dans un contrat d'adhésion, d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.
Il s'ensuit que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M.X. de sa demande de dommages-intérêts fondée sur la qualification des pactes d'associés en pactes d'adhésion. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 8
ARRÊT DU 23 SEPTEMBRE 2025
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 23/02868 (12 pages). N° Portalis 35L7-V-B7H-CHDGY. Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 janvier 2023 - Tribunal de commerce de PARIS - RG n° J2022000437J.
APPELANT :
Monsieur X.
Né le [Date naissance 1] à [Localité 7], De nationalité française, Demeurant [Adresse 3], [Localité 5], Représenté par Maître Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34, Assisté de Maître Éric LE FRANCOIS, avocat au barreau de PARIS, toque : D 901, et de Maître Edouard CASTEL, avocat au barreau de PARIS, toque : D 901,
INTIMÉES :
SAS ADVANCY GROUPE
agissant poursuites et diligences en la personne de son président domicilié en cette qualité audit siège, venant aux droits des sociétés dissoutes FINANCIERE ADVANCY et ADVANCY MANAGEMENT, Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro YYY, Dont le siège social est situé [Adresse 2], [Localité 4]
SAS ADVANCY
agissant poursuites et diligences en la personne de son président domicilié en cette qualité audit siège, venant aux droits des sociétés dissoutes FINANCIERE ADVANCY et ADVANCY MANAGEMENT, Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 899 754 998, Dont le siège social est situé [Adresse 2] [Localité 4]
Représentées par Maître Luca DE MARIA de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, Assistées de Maître Jean REINHART de la SELARL REINHART MARVILLE TORRE, avocat au barreau de PARIS, toque : K0030,
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 9 septembre 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant la cour composée en double-rapporteur de Madame Marie-Christine HEBERT-PAGEOT, présidente de chambre, et de Madame Constance LACHEZE, conseillère.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre, Madame Constance LACHEZE, conseillère, Monsieur François VARICHON, conseiller. Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT dans le respect des conditions prévues à l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT : - Contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
Le groupe Advancy, composé notamment des sociétés Advancy Groupe et Advancy (anciennement Financière Advancy et Advancy Management), exerce une activité de conseil en stratégie.
Aux termes d'un contrat à durée indéterminée du 1er mars 2017,
M. X. a été recruté en qualité de « Senior Partner » avec pour mission de développer l'activité du groupe Advancy dans le secteur des biens de consommation et des fonds d'investissement.
Le 10 avril 2019, M. X. a souscrit à l'augmentation de capital de la société Advancy Management à hauteur de 33.264 actions nouvelles. Il a par la suite, le 15 septembre 2019, acquis 11.088 actions supplémentaires de la société Advancy Management.
Le 10 septembre 2019, il a également souscrit à une augmentation de capital dans la société Financière Advancy lui permettant de détenir 33.264 parts de cette société.
Concomitamment à son entrée au capital des sociétés Financière Advancy et Advancy Management, M.X. a adhéré au pacte d'associés de ces deux sociétés les 15 mai 2019 et 10 septembre 2019
Le 8 octobre 2020, M. X. a été licencié.
Les sociétés Financière Advancy et Advancy Management ont, dès la notification de son licenciement, réclamé l'application des stipulations des pactes d'associés, qui prévoient qu'en cas de survenance d'un Fait Générateur, au nombre desquels figure la perte de la qualité de salarié du fait notamment de la notification du licenciement, l'associé consent irrévocablement une promesse unilatérale de vente de l'intégralité de ses titres à chacune des sociétés, ces dernières disposant de 90 jours calendaires à compter de la date du fait générateur pour lever l'option, puis de 3 mois à compter de cette date pour verser le prix de cession.
Le 22 octobre 2020, les sociétés Financière Advancy et Advancy Management ont notifié la levée de l'option d'achat consentie à leur profit et ont versé, le 5 novembre 2020, à M.X. la somme de 103.299,28 euros représentant le prix d'achat des titres.
Par deux courriers du 6 novembre 2020, M.X., par l'intermédiaire de son avocat, a indiqué aux sociétés Financière Advancy et Advancy Management que les promesses l'obligeant à céder ses titres sur le simple fondement d'une notification d'un licenciement lui étaient inopposables dans la mesure où elles créaient un déséquilibre significatif entre leurs droits respectifs et a rappelé les articles 8.2 et 9.2 des pactes stipulant que les différends pouvant découler du Pacte devaient, en premier lieu être négociés de façon amiable entre les Parties dans un délai de un mois de la mise en demeure par lettre recommandée avec demande d'avis de réception de l'une des Parties à l'autre Partie.
Les sociétés Financière Advancy et Advancy Management ont répondu le 16 novembre 2020 à M.X. que dans la mesure où lui seul contestait la validité de la clause, aucun différend ne pouvait être retenu au sens des pactes, de sorte qu'aucune négociation amiable ne pouvait leur être imposée.
Le 9 novembre 2020 M.X. a saisi le conseil des prud'hommes pour contester son licenciement.
Après avoir agi en référé, M.X. a, par acte du 3 décembre 2020, fait assigner au fond les sociétés Financière Advancy et Advancy Management devant le tribunal de commerce de Nanterre puis s'est désisté de cette instance compte tenu de la décision d'incompétence prise par le juge des référés saisi d'une demande de rétractation de l'ordonnance qu'il avait rendue.
Par acte du 22 juin 2021, M.X. a ensuite fait assigner les sociétés Financière Advancy et Advancy Management devant le tribunal de commerce de Paris pour voir juger que les pactes d'associés des sociétés Financière Advancy et Advancy Management constituent des contrats d'adhésion, que les clauses des articles 1.1 et 2.1 des pactes d'associés des sociétés Financière Advancy et Advancy Management, qui prévoient comme Fait Générateur des promesses de cession la notification du licenciement, doivent être réputées non écrites en ce qu'elles créent un déséquilibre significatif entre ses droits et obligations et ceux des sociétés Financière Advancy et Advancy Management, et condamner en conséquence les sociétés à lui restituer les titres qu'il détenait dans ces sociétés ou si la restitution était impossible au paiement de 1.400.000 euros de dommages-intérêts.
En juin 2021, le groupe Advancy a réalisé une opération d'OBO (Owner Buy Out) et pour les besoins de cette opération, les sociétés Financière Advancy et Advancy Management ont été radiées et l'intégralité de leur patrimoine transmis respectivement:
- à la société Advancy Groupe, par l'effet d'une opération de fusion absorption de la société Financière Advancy,
- à la société Advancy du fait de la réunion de l'ensemble des parts de la société Advancy Management entre les mains de celle-ci.
Par nouvel acte du 25 janvier 2022, M. X. a fait assigner les sociétés Advancy et Advancy Groupe devant le tribunal de commerce de Paris aux fins de condamnation solidaire à lui verser la somme de 2,4 millions d'euros à titre de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la date de réalisation de l'OBO, pour exécution déloyale et de mauvaise foi des pactes d'associés.
Dans la première instance, M.X. a demandé la condamnation solidaire des sociétés Advancy Groupe et Advancy à lui verser une somme 2.400.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la suppression illégale des 33.264 parts qu'il détenait dans la société Financière Advancy et des 44.352 actions qu'il détenait dans la société Advancy Management.
Par un premier jugement daté du 23 septembre 2022, le tribunal a rejeté l'exception de nullité de l'assignation délivrée le 22 juin 2021 et a joint les procédures nées des deux assignations.
Par jugement en date du 13 janvier 2023, le tribunal de commerce de Paris a:
- dit recevable l'intervention volontaire des sociétés Advancy et Advancy Groupe,
- débouté M.X. de sa demande de dommages-intérêts fondée sur la qualification des pactes d'associé en contrats d'adhésion,
- sursis à statuer sur la demande d'indemnité fondée sur une exécution déloyale des pactes d'associés dans l'attente du jugement du conseil des prud'hommes de [Localité 6] relatif au licenciement de M.X.,
- renvoyé la cause au rôle des sursis à statuer
- condamné M.X. aux dépens sur cette partie de l'instance.
Le 2 février 2023, M.X. a interjeté appel du jugement du 13 janvier 2023 en ce qu'il le déboute de sa demande de dommages-intérêts fondée sur la qualification des pactes d'associés en contrats d'adhésion et en ce qu'il le condamne aux dépens de l'instance.
[*]
Par conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 1er juillet 2024, M.X. demande à la cour de le déclarer recevable et bien fondé en son appel, y faisant droit, infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté sa demande de dommages et intérêts sur le fondement de la qualification des pactes d'associés en contrats d'adhésion et l'a condamné aux dépens, le confirmer en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts d'un montant de 20.000 euros des sociétés Financière Advancy et Advancy Management, statuant à nouveau, juger que les pactes d'associés des sociétés Financière Advancy et Advancy Management doivent être qualifiés de contrat d'adhésion à son égard, juger que les clauses des articles 1.1 et 2.1 de ces pactes d'associés qui prévoient comme fait générateur des promesses de cession « la notification du licenciement » créent un déséquilibre significatif entre ses droits et obligations et ceux des sociétés Financière Advancy et Advancy Management, juger non écrites les clauses des articles 1.1 et 2.1 des pactes d'associés qui prévoient comme fait générateur de ses promesses de cession « la notification du licenciement », condamner solidairement les sociétés Advancy Groupe et Advancy à lui payer une somme 2.400.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la suppression illégale des 33.264 parts qu'il détenait dans la société Financière Advancy et des 44.352 actions qu'il détenait dans la société Advancy Management, débouter les sociétés Advancy Groupe et Advancy de l'ensemble de leurs demandes, condamner solidairement les sociétés Advancy Groupe et Advancy à lui payer une somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
[*]
Par conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 20 juillet 2024, les sociétés Advancy Groupe et Advancy demandent à la cour de juger que les pactes d'associés conclus par les associés des sociétés Advancy Groupe et Advancy ne peuvent pas être qualifiés de contrat d'adhésion, juger que les promesses unilatérales qui y sont stipulées ne créent pas de déséquilibre significatif entre les droits et les obligations de X. et les leurs, juger qu'elles ne sont redevables d'aucune somme à l'égard de X., juger que X. a abusé du droit d'agir en justice en introduisant six instances distinctes contre les sociétés du Groupe Advancy à la suite de son licenciement, en conséquence, le débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions, confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts de X. sur le fondement de la qualification des pactes d'associés en contrats d'adhésion et l'a condamné aux dépens, y ajoutant, le condamner à leur verser une somme globale de 20.000 euros au titre de l'abus que constitue l'action en justice à l'origine de la présente instance, et à leur verser respectivement une somme de 30.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
[*]
Pour un plus ample exposé des demandes et moyens des parties, il est renvoyé à leurs écritures.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
A titre liminaire, il sera rappelé que l'appel dans la présente instance ne porte que sur les dispositions du jugement du 13 janvier 2023 ayant débouté M.X. de sa demande de dommages et intérêts fondée sur la qualification des pactes d'associés en contrats d'adhésion.
Sur la demande de dommages et intérêts de M.X. fondée sur la qualification des pactes d'associés en contrats d'adhésion :
Au soutien de sa demande de dommages et intérêts d'un montant de 2.400.000 euros dirigée solidairement contre les sociétés Advancy et Advancy Groupe venant aux droits de Financière Advancy et Advancy Management, M.X. fait valoir que les pactes d'associés auxquels il a adhéré en 2019 doivent être qualifiés de contrats d'adhésion au sens de l'article 1110 du code civil et que les clauses des articles 1.1 et 2.1 de ces pactes, prévoyant une obligation de cession des titres des sociétés Financière Advancy et Advancy Management sur le fondement d'une simple notification d'un licenciement, créent un déséquilibre significatif à son détriment et doivent par conséquent être déclarées non écrites.
Il expose :
- depuis le 1er octobre 2018 et la suppression délibérée, ainsi que le démontrent les débats parlementaires, de la référence aux « conditions générales » dans la rédaction de l'article 1110 du code civil, la doctrine retient qu'un pacte d'associés peut être qualifié de contrat d'adhésion et qu'il en résultera une application plus aisée du régime des clauses abusives au droit des sociétés,
- le fait qu'un pacte d'associés ait été négocié entre les premiers signataires, et constitue un contrat de gré à gré lors de sa formation, ne s'oppose pas à sa qualification de contrat d'adhésion pour les associés qui y adhèrent postérieurement sans avoir eu la possibilité de le négocier,
- en l'espèce, les pactes lui ont été communiqués concomitamment à son entrée au capital des sociétés avec instruction d'y adhérer purement et simplement, cette adhésion aux pactes étant une condition préalable et indispensable à son entrée au capital des sociétés Financière Advancy et Advancy Management dans la mesure où les articles 4 et 5 des pactes prévoient que toute acquisition de titres doit impérativement être précédée d'une adhésion aux pactes,
- son adhésion matérialisée par la signature d'un 'Acte d'Adhésion au Pacte d'Associés', document au titre pour le moins évocateur, n'a été précédée d'aucune négociation ni même d'aucune discussion, cette absence de négociation étant la conséquence de son simple statut de salarié et d'associé minoritaire,
- 11 autres salariés du groupe Advancy ont adhéré aux pactes en même temps que lui, sans réserve et sans négociation après avoir souscrit une participation minoritaire au capital des sociétés Financière Advancy et Advancy Management,
- les courriers électroniques produits par les intimées font simplement état d'une présentation et d'explications données par l'avocat du groupe Advancy concernant le fonctionnement de l'opération et des pactes à signer et que les pactes, dont il n'existe qu'une seule version, étaient à prendre ou à laisser,
- ainsi, les clauses des pactes ont été soustraites à la négociation et ont fait l'objet d'une détermination préalable et unilatérale par l'une des parties au contrat, comme c'est généralement le cas lorsque les pactes sont conclus avec des salariés ou des actionnaires minoritaires, comme en l'espèce, qu'aucun des associés n'a bénéficié de l'assistance de son propre conseil, le seul avocat intervenu dans le cadre de l'OBO et de la rédaction des pactes étant celui du groupe Advancy, lequel ne pouvait défendre à la fois les intérêts du groupe Advancy et des associés majoritaires et ceux des associés minoritaires de l'autre, dont les intérêts pouvaient être opposés, que les explications fournies par Mme [L] et de M.[Z], relativement à l'établissement des pactes, proviennent d'associés majoritaires pour lesquels la capacité de négociation des pactes n'est pas remise en cause.
- il existe un déséquilibre significatif, les pactes permettant aux sociétés Financière Advancy et Advancy Management d'obtenir de manière arbitraire la cession de ses titres dans la mesure où il leur suffit de lui notifier un licenciement sans qu'aucun élément objectif et vérifiable n'ait besoin d'être apporté, que cette clause est évidemment déséquilibrée et déraisonnable puisque même dans l'hypothèse où son licenciement serait jugé nul cela ne pourrait, en l'état, remettre en question son obligation de cession, qu'il pourrait donc être réintégré en qualité de salarié du groupe Advancy sans que cette réintégration puisse entraîner une restitution de ses titres.
- l'attribution des titres des sociétés Financière Advancy et Advancy Management à son profit constituait un élément majeur dans sa relation contractuelle avec le groupe Advancy, celle-ci lui ayant été promise à l'occasion de son recrutement et dans le cadre de l'exécution de son contrat afin de justifier notamment de l'absence de revalorisation de sa rémunération, que c'est la perspective d'une rémunération complémentaire liée à l'attribution d'actions et à leur vente à court terme dans le cadre d'une opération d'OBO qui l'a convaincu de donner une suite favorable à la proposition d'embauche du groupe Advancy en démissionnant des fonctions qu'il occupait au sein d'un cabinet concurrent, et que grâce aux clauses litigieuses stipulées dans les pactes, le groupe Advancy bénéficie d'une faculté de modifier unilatéralement la rémunération qui lui a été promise lors de son recrutement,
- face à ses refus légitimes de céder aux pressions des sociétés pour céder à vil prix ses titres, les sociétés Financière Advancy et Advancy Management ont fait usage à son égard des clauses litigieuses pour récupérer arbitrairement les titres à un montant décorrélé de leur valeur réelle, alors que d'autres dispositions des pactes leur permettaient en cas de comportement jugé fautif d'un associé de contraindre ce dernier au rachat de ses titres,
- compte tenu de la radiation des sociétés Financière Advancy et Advancy Management aucune restitution des titres qu'il détenait ne pourra intervenir, qu'il a dû en conséquence substituer à sa demande initiale de restitution des actions une demande de condamnation à des dommages et intérêts, qu'il a chiffrée en tenant compte de la valeur d'entreprise du groupe Advancy, fixée par un cabinet indépendant dans une fourchette comprise entre 56.200.000 euros et 68.100.000 euros pour les besoins de l'opération d'OBO intervenue en juin 2021, soit une valeur médiane arrondie à 60.000.000 euros, cette valorisation ayant été rendue publique par le dirigeant et de sa participation à hauteur de 4%.
Les sociétés Advancy Groupe et Advancy contestent la qualification de contrat d'adhésion que M.X. entend voir reconnaître aux pactes d'associés, arguant que la définition donnée par l'article 1110 du code civil n'est pas applicable aux pactes d'associés, que le législateur à lui même écarté cette qualification, que le ministre de la justice avait clairement dit que le gouvernement n'entendait nullement couvrir ces hypothèses, que les clauses des statuts d'une société ou d'un pacte d'actionnaires sont négociées par les parties initiales, que considérer que ces statuts ou pactes sont assimilables à un contrat d'adhésion pour le cessionnaire de parts auquel il s'impose reviendrait à méconnaître si ce n'est la lettre, du moins l'esprit du texte, que le gouvernement a, par amendement en date du 28 novembre 2017, proposé de modifier la définition légale du contrat d'adhésion, afin précisément d'en exclure les pactes d'associés, puisqu'il prévoyait de manière très concrète, de limiter la définition du contrat d'adhésion aux contrats comportant 'des conditions générales au sens de l'article 1119", que la doctrine majoritaire rappelle fermement la position du législateur, qui exclut l'application du régime du contrat d'adhésion aux pactes d'associés, en soulignant notamment que la qualification de contrat d'adhésion conduirait à une situation particulièrement complexe où la clause d'un pacte pourrait être tout à fait valide entre les associés qui l'ont initialement négociée et réputée non-écrite pour les associés qui ont signé le pacte par la suite, et surtout que la définition de l'article 1110, alinéa 2, du code civil s'accommode mal des contrats éloignés du schéma traditionnel, que le pacte exprime des besoins de sécurité et de constance et que la qualification de contrat d'adhésion n'a jamais été retenue, ni par les juges du fond, ni par la Cour de cassation, au sujet d'un pacte d'associés.
Elles relèvent qu'au cas particulier les pactes d'associés ont été librement négociés entre leurs parties initiales, que le courriel versé aux débats par l'appelant est un courriel de complaisance, que d'autres signataires des pactes d'associés confirment que ceux-ci ont bien été soumis à la négociation des parties, que de plus, l'entrée de M.X. au capital du Groupe Advancy a fait l'objet d'importantes négociations, tant sur son principe que sur ses conditions et que ce dernier était parfaitement libre de souscrire ou non aux pactes d'associés et aux clauses qu'ils contiennent, qu'il a rejoint le Groupe Advancy en qualité de Senior Partner, qu'il était donc suffisamment expérimenté et compétent pour, d'une part, comprendre les termes des pactes d'associés, d'autre part, mesurer la portée des différentes clauses ainsi que les conséquences de ses engagements.
Elles concluent que les pactes d'associés ne pouvant être qualifiés de contrats d'adhésion, toute considération relative à un prétendu déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties est superflue car dépourvue de base légale. A titre surabondant, elles ajoutent toutefois que les pactes d'associés et les promesses unilatérales qui y sont stipulées ne créent pas de déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties, que la faculté, pour le bénéficiaire d'une promesse unilatérale de vente, d'opter unilatéralement pour la conclusion de la vente est prévue par la définition légale de la promesse unilatérale donnée par l'article 1124 alinéa 1er du code civil, que l'article 1171 du code civil prévoit que l'appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix à la prestation, que les clauses de Bad Leaver portent sur l'adéquation du prix à la prestation et ne peuvent donc pas être prises en compte dans le cadre de l'appréciation d'un hypothétique déséquilibre significatif, qu'ainsi, même dans l'hypothèse où un pacte d'associés viendrait à être qualifié de contrat d'adhésion, une clause de Bad Leaver ne pourrait pas être réputée non écrite.
Elles soulignent enfin les particularités de l'opération effectuée, près d'un an après le licenciement de M.X. et reprochent à ce dernier de chercher à obtenir la valorisation de ses anciens titres à un montant hypothétique et postérieur à la souscription de l'OBO, tout en échappant à l'obligation du groupe Advancy de rembourser, sur de nombreuses années l'emprunt bancaire contracté à cet effet et affirment qu'il n'existe aucun lien d'aucune sorte entre le licenciement de M.X. pour insuffisance professionnelle en octobre 2020 et l'opération financière réalisée par le Groupe Advancy en juin et août 2021, qu'en outre l'opération d'OBO visée par M.X. est une opération financière qui impose la souscription d'un emprunt bancaire considérable et de longue durée, et que les documents contractuels conclus à cette occasion prévoient l'obligation, pour l'associé, en cas de départ avant le complet remboursement, par le Groupe Advancy, de son emprunt bancaire, de reverser au Groupe Advancy sa quote-part de l'emprunt restant à rembourser, de sorte que M.X. n'aurait, ainsi, réalisé aucune plus-value s'il avait participé à l'OBO à l'été 2021, car il aurait dû rembourser, lors de son départ du Groupe Advancy, sa quote-part de l'emprunt restant à rembourser et que s'il avait participé à l'OBO il n'aurait perçu qu'un prix de cession de l'ordre de 100.000 euros.
Sur ce la cour,
L'article 1110 du code civil en sa version entrée en vigueur le 1er octobre 2018 dispose que « Le contrat de gré à gré est celui dont les stipulations sont négociables entre les parties. Le contrat d'adhésion est celui qui comporte un ensemble de clauses non négociables, déterminées à l'avance par l'une des parties ».
Selon l'article 1171 du code civil, « Dans un contrat d'adhésion, toute clause qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite ».
Le pacte d'associés de la société Financière Advancy a été conclu le 23 juin 2017 entre 8 parties. Son préambule expose de la manière suivante les circonstances dans lesquelles il a été conclu :
« 1. Les associés historiques de Advancy Group ont souhaité réaliser une opération visant à (i) associer au capital, soit directement, soit indirectement par l'intermédiaire Advancy Management, certaines personnes qui étaient associées au travers de Advancy Development; développer leur participation pour certains, et (ii) permettre à d'autres personnes exerçant au sein du Groupe d'accéder au capital, par l'intermédiaire de Advancy Management.
C'est ainsi qu'a été constituée la société Financière Advancy, détenant 100% du capital et des droits de vote de Advancy Groupe et dont Advancy Management détient une participation d'environ 17% (ci-après l'article « Opération »)
L'objectif de l'Opération est de renforcer le développement et la croissance de Advancy Groupe et, d'une manière générale, sa position sur le marché en favorisant sa cohésion interne, par le biais d'une accession privilégiée au capital pour certains, et du renforcement de leur participation au capital pour d'autres. »
[....]
3. L'Opération est réalisée par le biais (i)d'un financement bancaire souscrit par Financière Advancy (la « Dette Senior ») au sein de laquelle les parties soussignées sont associées, et (ii) de crédits-vendeurs (la « Dette Subordonnée »).
4. La présence et l'exercice de leur activité professionnelle des soussignés au sein de Advancy Groupe ou d'une société du Groupe constitue un élément fondamental, ceux-ci générant l'activité et le chiffre d'affaires indispensables pour permettre le remboursement de l'emprunt souscrit dans le cadre de l'Opération. Un départ anticipé impacterait de facto le volume d'activité, et donc réduira d'autant la capacité de Financière Advancy à régler chacune des échéances de la Dette Senior sans grever par ailleurs les fonds propres de la Société et rompre l'équilibre dans la contribution des Parties aux remboursements de la Dette Senior et de la Dette Subordonnée.
5. C'est au regard de ce schéma et de ces motivations sous-tendant l'Opération, acceptés par chaque soussigné, que les Parties ont entendu organiser les modalités de leur éventuelle sortie du capital (ci-après le 'Pacte').
6. Les associés au capital, de manière indirecte, par le biais de Advancy Management, ont également déterminé les modalités de leur éventuelle sortie du capital de celle-ci et souscrit des engagements en ce sens, au sein d'un pacte conclu entre les associés de Advancy Management.
7. Les Parties reconnaissent que la conclusion du Pacte et, en particulier, leurs conventions relatives aux prix déterminés en cas de sortie d'un Associé, constituent un élément essentiel et déterminant de leur engagement respectif au titre de l'Opération et de leur association.'
Le pacte d'associés de la société Advancy Management, conclu concomitamment le 23 juin 2017 entre 18 parties, indique dans son préambule que :
« 2. [...]Advancy Management est née dans le cadre d'une opération visant à associer au capital des personnes exerçant leur activité professionnelle au sein de la société Advancy Groupe et de permettre aux associés de Advancy Development de développer leur participation. A cette fin a été créée Financière Advancy (holding détenant Advancy Group) à laquelle Advancy Management est associée. (Ci-après « l'Opération »).
L'objectif de l'Opération est de renforcer le développement et la croissance d'Advancy Groupe et, d'une manière générale, sa position sur le marché, en favorisant sa cohésion interne, par le biais d'une accession privilégiée au capital pour certains, et du renforcement de leur participation au capital pour d'autres. »
Il est ensuite précisé comme dans l'autre pacte, que l'Opération est réalisée par le biais d'un financement bancaire, qu'un départ anticipé impacterait le volume d'activité et réduirait les capacités de Financière Advancy à régler les échéances des dettes contractées pour cette opération et que c'est au regard de ces motivations sous-tendant l'Opération que les parties ont réglé les modalités de leurs éventuelles sorties du capital par ce pacte.
La durée de chacun des pactes a été fixée à 10 ans, renouvelable par tacite reconduction par périodes de deux années, à défaut de dénonciation par l'une ou l'autre des Parties.
Les pactes prévoient en leurs articles 1, rédigés de manière similaire, des promesses de cession consenties par les associés aux termes desquelles :
« 1.2 Chaque Associé [....] consent irrévocablement en cas de survenance d'un Fait Générateur, une promesse unilatérale de vente (dénommée la « Promesse » ou les « Promesses ») au Bénéficiaire désigné à l'article 1.4 [3.1 dans le pacte d'associés d'Advancy Management], portant sur l'intégralité des Titres de la Société détenus par lui à la date du Fait Générateur.
Chaque Promettant déclare, chacun pour ce qui le concerne, donner son consentement de manière définitive et irrévocable à la Cession des Titres de la Société qu'il détient à la date du Fait Générateur conformément aux stipulations de la Promesse le concernant.
Le Bénéficiaire accepte le bénéfice des Promesses en tant que promesses de vente seulement en se réservant le droit d'en demander la réalisation en une ou plusieurs fois ou non. »
La perte de la qualité de salarié d'Advancy Groupe ou de Financière Advancy constitue aux termes des articles 1.1 des pactes un 'Fait Générateur'.
L'article 4 (Financière Advancy) et l'article 5 (Advancy Management) des pactes stipulent que « Tout tiers acquéreur de Titres sera tenu d'adhérer au présent Pacte préalablement ou au plus tard concomitamment à son entrée dans le capital, chaque Partie étant tenue vis à vis de la Société et de l'autre Partie d'obtenir cette adhésion et reconnaissant que la Société, sera obligée de refuser l'inscription du Transfert de ses Titres dans les registres sociaux aussi longtemps que le Tiers cessionnaire n'aura pas adhéré au présent pacte.
Le Tiers se trouvera alors investi des mêmes droits et obligations que ceux du cédant concerné tels que ceux-ci résultent des présentes pour la durée restant à courir du présent pacte ».
M.X., qui n'était pas partie aux pactes le 23 juin 2017, y a adhéré lors de son entrée au capital des sociétés Advancy en 2019.
Il résulte des préambules et des stipulations des pactes que ceux-ci sont indivisiblement liés à une opération par laquelle les associés historiques de la société Advancy Groupe ont souhaité ouvrir le capital de la société à d'autres personnes. Dans cet objectif a été créée la société Financière Advancy qui détient 100% du capital et des droits de vote de la société Advancy Groupe et dont la société Advancy Management détient environ 17 % du capital social. L'opération a été réalisée par le biais d'un emprunt bancaire et de crédits vendeurs.
Les pactes, qui étaient destinés à assurer l'équilibre économique de l'Opération, sont uniquement consacrés aux stipulations régissant les promesses de cession, aux faits générateurs les déclenchant, au prix qui est déterminé par rapport à la date du fait générateur selon qu'elle est antérieure ou postérieure au complet remboursement de la dette senior et antérieure au complet remboursement de la dette subordonnée, à son paiement, à la réalisation de la cession, ou selon qu'elle intervient dans un certain délai par rapport à la réalisation de l'opération.
Ce contexte étant rappelé, il convient de rechercher si les pactes ont ou non donné lieu en 2017 à négociation ou discussion entre les signataires historiques, les parties étant contraires à ce sujet.
M.X. verse aux débats un courriel de M. Y., signataire des pactes le 23 juin 2017 (pièce n°46), dans lequel l'intéressé indique « qu'il n'y a eu aucune discussion ou négociation des termes des pactes d'associés signé le 23 juin 2017 pour les sociétés Financière Advancy et Advancy Management. Les actionnaires minoritaires comme moi ont reçu ces documents avec demande de les signer dès réception, sans ouverture à la modification des documents, ce que nous avons tous fait. Aucun des associés minoritaires n'a pu à ma connaissance discuter du contenu de ces pactes qui de toute façon n'était pas l'objet de négociation de notre part. »
Il ressort toutefois des courriels versés aux débats par les sociétés intimées, émanant de 8 signataires historiques des pactes (pièces 25 à 32), qu'à l'origine le projet a bien été présenté aux personnes susceptibles de participer à l'opération, qu'il y a eu des discussions et que certains ont préféré ne pas participer à l'engagement (pièce n°25), qu'il n'y a pas eu qu'une seule version du pacte, que certains ont eu le sentiment d'avoir pu échanger et apporter leurs idées (pièces n°26 et 27), que les associés ont eu accès aux documents, pu travailler avec un avocat et poser des questions (pièce n°28), que les plus novices ont compris le mécanisme du pacte grâce aux questions et échanges avec l'avocat rédacteur, qu'ils ont pu poser les questions et exprimer leurs préoccupations, apporter leurs réflexions et suggestions (pièce n°29).
Ainsi, il ne peut se déduire du seul courriel de M.Y. que les stipulations du pacte n'étaient pas négociables à l'origine alors que le projet a été discuté par plusieurs des futurs signataires et que des modifications sont intervenues sur la version initiale proposée.
La circonstance que plusieurs associés minoritaires ont refusé de participer à l'opération ne démontre pas que les clauses des pactes n'étaient pas négociables mais seulement qu'ils n'adhéraient pas à l'opération dans son intégralité, laquelle formait un tout indivisible.
Les pactes ne sauraient dès lors être qualifiés de contrats d'adhésion lors de leur formation.
Il s'agit à présent de rechercher si les adhésions ultérieures de nouveaux associés aux pactes, sans lesquelles l'entrée au capital des sociétés Advancy n'aurait pas été possible, confèrent aux pactes la qualification de contrats d'adhésion à leur égard.
Ces pactes ne constituent pas des conventions qui organisent des échanges ponctuels entre les parties, mais ont vocation à régler, pendant une période de 10 ans, la situation juridique des associés au moment de leur départ de la société, pour quelle que cause que ce soit. Ces pactes devaient donc nécessairement s'appliquer aux tiers devenus associés postérieurement au 23 juin 2017, les parties signataires ayant entendu pendant la durée des pactes soumettre toute entrée au capital des sociétés Financière Advancy et Advancy Management aux clauses de ceux-ci.
Ainsi, les pactes conclus initialement se poursuivent à l'égard de l'associé entrant au moyen de son acte d'adhésion. La circonstance que de nouveaux associés entrent dans la société en cours de vie, que ce soit par la cession, l'héritage des titres sociaux ou augmentation de capital de la société, ne peut venir modifier la qualification initiale de contrat de gré à gré, alors qu'il a été expressément prévu dès l'origine que la signature du pacte d'associés s'imposerait à ceux qui veulent entrer au capital social, cette obligation s'inscrivant dans une opération qui lie la détention des titres et le remboursement des financements bancaires par les ressources procurées par l'activité générée au sein du groupe.
Il n'est pas concevable que la qualification d'un contrat de gré à gré ou de contrat d'adhésion puisse évoluer dans le temps et que des associés se trouvant dans une même situation, mais entrés à des moments différents dans le capital social, puissent transformer la qualification du contrat et obtenir que certaines clauses, qui ont été librement négociés en 2017, soient réputées non écrites en 2019. Le droit des contrats impose que la qualification soit figée au moment de la formation du contrat.
Si le pacte d'associés est un contrat et que le droit des contrats lui est applicable, il est aussi un outil du droit des sociétés et la distinction prévue par l'article 1110 du code civil précité, n'est pas adaptée en l'espèce. Le droit des sociétés ne peut en effet admettre ni l'insécurité juridique, ni l'existence de distinctions entre les associés alors qu'ils ont tous, comme au cas présent, approuvé le même projet d'entreprise, et le même schéma destiné à rembourser des dettes sociales, M.X. ayant été libre de devenir associé ou de refuser de le faire parce que cela impliquait la signature des pactes.
En conséquence, la qualification de contrat de gré à gré qui a été scellée lors de l'échange des consentements initiaux est demeurée en l'état au gré des opérations contractuelles ultérieures.
La qualification de contrat d'adhésion n'ayant pas été retenue, il n'y a pas lieu d'examiner le moyen pris de l'existence, dans un contrat d'adhésion, d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.
Il s'ensuit que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M.X. de sa demande de dommages-intérêts fondée sur la qualification des pactes d'associés en pactes d'adhésion.
Sur la demande de dommages et intérêts des sociétés Advancy :
Bien que non fondée, l'action de M.X. n'a pas dégénéré en abus du droit d'agir en justice, la question posée par ce litige ayant suscité des débats en doctrine.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts de sociétés Advancy Groupe et Advancy.
- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
M.X. qui succombe en son appel sera condamné aux dépens et ne peut en conséquence prétendre à l'octroi de sommes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
L'équité ne commande pas le condamner à payer aux intimées une indemnité procédurale à hauteur d'appel.
Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions critiquées,
Y ajoutant,
Rejette toutes autres demandes des parties,
Condamne M.X. aux dépens d'appel.
Liselotte FENOUIL Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT
Greffière Présidente