CASS. CIV. 1re, 17 septembre 2025
- CA Paris (pôle 5 ch. 16), 3 janvier 2023
CERCLAB - DOCUMENT N° 24552
CASS. CIV. 1re, 17 septembre 2025 : pourvoi n° 23-18785 ; arrêt n° 561
Publication : Legifrance ; Bull. civ.
Extraits : 1/ « 10. Selon l'article 25 du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 (règlement Bruxelles I bis), si les parties, sans considération de leur domicile, sont convenues d'une juridiction ou de juridictions d'un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ces juridictions sont compétentes, sauf si la validité de la convention attributive de juridiction est entachée de nullité quant au fond selon le droit de cet État membre. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties. Les conventions attributives de juridiction sont sans effet si elles sont contraires aux dispositions des articles 15, 19 ou 23 ou si les juridictions à la compétence desquelles elles dérogent sont exclusivement compétentes en vertu de l'article 24.
11. La Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que cet article doit être interprété en ce sens que dans le cadre de l'appréciation de la validité d'une convention attributive de juridiction, les griefs tirés du caractère prétendument imprécis ou déséquilibré de cette convention doivent être examinés non pas au regard des critères relatifs aux causes de « nullité quant au fond » de cette convention, définis par le droit des États membres conformément à cette disposition, mais à l'aune de critères autonomes qui se dégagent de cet article (CJUE, arrêt du 27 février 2025, Sociétà Italiana Lastre Spa, C-537/23). 12. Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé. »
2/ « 14. Interprétant l'article 25 précité du règlement Bruxelles I bis, la Cour de justice a dit pour droit qu'une convention attributive de juridiction en vertu de laquelle l'une des parties à celle-ci ne peut saisir que le seul tribunal qu'elle désigne, tandis qu'elle permet à l'autre partie de saisir, outre ce tribunal, toute autre juridiction compétente, est valide, dans la mesure où, premièrement, elle désigne les juridictions d'un ou de plusieurs États qui sont soit membres de l'Union européenne soit parties à la convention concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, signée le 30 octobre 2007, et dont la conclusion a été approuvée, au nom de la Communauté européenne, par la décision 2009/430/CE du Conseil, du 27 novembre 2008, deuxièmement, elle identifie des éléments objectifs suffisamment précis pour permettre au juge saisi de déterminer s'il est compétent et, troisièmement, elle n'est pas contraire aux dispositions des articles 15, 19 ou 23 de ce règlement et ne déroge pas à une compétence exclusive au titre de l'article 24 de celui-ci (CJUE, arrêt du 27 février 2025, Società italiana Lastre, C-537/23).
15. S'agissant, d'abord, du caractère déséquilibré d'une convention attributive de juridiction conférant plus de droits à une partie qu'à l'autre, la Cour de justice expose qu'il n'est pas de nature à remettre en cause la validité de la clause au regard des exigences énoncées à l'article 25 de ce règlement, sauf dans les cas expressément interdits par le règlement Bruxelles I bis (point 63 de l'arrêt précité). »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 17 SEPTEMBRE 2025
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : U 23-18.785. Arrêt n° 561 FS-B.
DEMANDEUR à la cassation : Monsieur X. - Société de commercialisation des Produits du Cameroun (Producam)
DÉFENDEUR à la cassation : Société Banque africaine d'import-export
Président : Mme Champalaune. Avocat(s) : Maître Haas, SAS Hannotin Avocats.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
1°/ M. X., domicilié [Adresse 2] (Cameroun), 2°/ la société de commercialisation des Produits du Cameroun (Producam), société anonyme avec administrateur général de droit camerounais, dont le siège est [Adresse 2] (Cameroun),
ont formé le pourvoi n° U 23-18.785 contre l'arrêt rendu le 3 janvier 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 16), dans le litige les opposant à la société Banque africaine d'import-export, dont le siège est [Adresse 1] (Égypte), défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Ancel, conseiller, les observations de Me Haas, avocat de M. X. et de la société de commercialisation des Produits du Cameroun, de la SAS Hannotin Avocats, avocat de la société Banque africaine d'import-export, et l'avis de M. Straudo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 17 juin 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Ancel, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseillère doyenne, M. Bruyère, Mmes Peyregne-Wable, Tréard, Corneloup, conseillers, Mme Robin-Raschel, conseillère référendaire, M. Straudo, premier avocat général, et Mme Vignes, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, de la présidente et des conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits et procédure :
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 janvier 2023), la Banque africaine d'import-export (la banque) a consenti le 12 juin 2017 à la société de commercialisation des Produits du Cameroun SA (la société Producam) une ouverture de crédit renouvelable pour l'achat par cette dernière de fèves de cacao, garantie notamment par un engagement de caution solidaire de M. X., conclu le même jour.
2. Aux termes de l'article 29 du contrat de crédit, les parties ont choisi de soumettre le contrat au droit français et ont prévu une clause attributive de juridiction au tribunal de commerce de Paris.
3. L'acte de cautionnement du 12 juin 2017 signé par M. X. contient également une clause attributive de juridiction stipulant que « Sans préjudice du droit pour le bénéficiaire ou les créanciers d'introduire une demande en justice devant les tribunaux dans le ressort desquels des actifs de la caution seraient situés, la caution accepte irrévocablement que tout litige relatif au présent acte de cautionnement soit porté devant le tribunal de commerce de Paris ».
4. La banque a prononcé la déchéance du terme du contrat de prêt consenti à la société Producam et l'a assignée en paiement ainsi que M. X. devant le tribunal de commerce de Paris.
5. La société Producam et M. X. ont contesté la validité de la clause attributive de juridiction et ont soulevé l'incompétence de la juridiction française au profit des juridictions camerounaises.
Examen du moyen :
Sur le moyen en tant qu'il est dirigé contre le chef de l'arrêt disant mal fondée l'exception d'incompétence en ce qu'il est soutenu par la société Producam :
Enoncé du moyen :
6. La société Producam fait grief à l'arrêt de dire mal fondée l'exception d'incompétence et de retenir la compétence du tribunal de commerce de Paris pour trancher le litige qui les oppose avec M. X. à la banque, alors :
« 1°/ que l'article 25, § 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, dit Bruxelles I bis, renvoie au droit de l'Etat membre de la juridiction désignée pour apprécier la validité de la clause attributive de juridiction "quant au fond" ; que la question de la licéité d'une clause attributive de juridiction asymétrique offrant à l'une des parties seulement la possibilité d'opter pour une autre juridiction que celle mentionnée par cette même clause, relève de la validité au fond de cette clause ; que, dans leurs conclusions d'appel, M. X. et la société de commercialisation des Produits du Cameroun contestaient le « contenu » de l'article 15 du contrat de cautionnement en tant qu'il autorise, de manière asymétrique, le seul bénéficiaire du cautionnement à introduire la demande en justice devant les tribunaux dans le ressort desquels les actifs de la caution seraient situés ; qu'en considérant qu'« il n'est pas soutenu que les clauses litigieuses seraient atteintes d'une nullité de fond », pour n'examiner leur validité qu'au regard des seules règles autonomes tirées de l'article 25, § 1, du règlement Bruxelles I bis et de l'objectif de prévisibilité et de sécurité juridique poursuivi par ce règlement, et non de la loi française, la cour d'appel a violé l'article 25, § 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, dit Bruxelles I bis ;
2°/ et en tout état de cause, que la clause asymétrique qui autorise une caution à ne saisir qu'un seul tribunal, tout en permettant à son créancier de saisir, outre ce tribunal, toute autre juridiction dans le ressort de laquelle les actifs de la caution seraient situés, ne répond pas, eu égard à son caractère imprécis et déséquilibré, aux objectifs de prévisibilité et de sécurité juridique poursuivis par le règlement Bruxelles I bis et ne peut donc pas recevoir application ; qu'en considérant, pour faire application de la clause attributive de juridiction litigieuse, que « l'impératif de prévisibilité est satisfait avec une clause d'élection de for qui laisse à une partie le choix de saisir, de manière optionnelle, d'autres juridictions que celles désignées dans la clause », la cour d'appel a violé l'article 25, § 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, dit Bruxelles I bis. »
Réponse de la Cour :
7. Le moyen, qui ne précise pas en quoi s'agissant de la société Producam, la partie critiquée de l'arrêt attaqué encourt le reproche allégué, ne satisfait pas aux exigences de l'article 978, alinéa 2, du code de procédure civile.
8. Il est donc irrecevable.
Sur le moyen en tant qu'il est dirigé contre le chef de l'arrêt disant mal fondée l'exception d'incompétence soulevée par M. X., pris en sa première branche :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Enoncé du moyen :
9. M. X. fait grief à l'arrêt de dire mal fondée son exception d'incompétence et de retenir la compétence du tribunal de commerce de Paris pour trancher le litige qui l'oppose à la banque, alors « que l'article 25, § 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, dit Bruxelles I bis, renvoie au droit de l'Etat membre de la juridiction désignée pour apprécier la validité de la clause attributive de juridiction "quant au fond" ; que la question de la licéité d'une clause attributive de juridiction asymétrique offrant à l'une des parties seulement la possibilité d'opter pour une autre juridiction que celle mentionnée par cette même clause, relève de la validité au fond de cette clause ; que, dans leurs conclusions d'appel, M. X. et la société de commercialisation des Produits du Cameroun contestaient le "contenu" de l'article 15 du contrat de cautionnement en tant qu'il autorise, de manière asymétrique, le seul bénéficiaire du cautionnement à introduire la demande en justice devant les tribunaux dans le ressort desquels les actifs de la caution seraient situés ; qu'en considérant qu'"il n'est pas soutenu que les clauses litigieuses seraient atteintes d'une nullité de fond", pour n'examiner leur validité qu'au regard des seules règles autonomes tirées de l'article 25, § 1, du règlement Bruxelles I bis et de l'objectif de prévisibilité et de sécurité juridique poursuivi par ce règlement, et non de la loi française, la cour d'appel a violé l'article 25, § 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, dit Bruxelles I bis. »
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Réponse de la Cour :
10. Selon l'article 25 du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 (règlement Bruxelles I bis), si les parties, sans considération de leur domicile, sont convenues d'une juridiction ou de juridictions d'un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ces juridictions sont compétentes, sauf si la validité de la convention attributive de juridiction est entachée de nullité quant au fond selon le droit de cet État membre. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties. Les conventions attributives de juridiction sont sans effet si elles sont contraires aux dispositions des articles 15, 19 ou 23 ou si les juridictions à la compétence desquelles elles dérogent sont exclusivement compétentes en vertu de l'article 24.
11. La Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que cet article doit être interprété en ce sens que dans le cadre de l'appréciation de la validité d'une convention attributive de juridiction, les griefs tirés du caractère prétendument imprécis ou déséquilibré de cette convention doivent être examinés non pas au regard des critères relatifs aux causes de « nullité quant au fond » de cette convention, définis par le droit des États membres conformément à cette disposition, mais à l'aune de critères autonomes qui se dégagent de cet article (CJUE, arrêt du 27 février 2025, Sociétà Italiana Lastre Spa, C-537/23).
12. Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé.
Sur le moyen, pris en sa seconde branche :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Enoncé du moyen :
13. M. X. fait le même grief à l'arrêt, alors « en tout état de cause, que la clause asymétrique qui autorise une caution à ne saisir qu'un seul tribunal, tout en permettant à son créancier de saisir, outre ce tribunal, toute autre juridiction dans le ressort de laquelle les actifs de la caution seraient situés, ne répond pas, eu égard à son caractère imprécis et déséquilibré, aux objectifs de prévisibilité et de sécurité juridique poursuivis par le règlement Bruxelles I bis et ne peut donc pas recevoir application ; qu'en considérant, pour faire application de la clause attributive de juridiction litigieuse, que "l'impératif de prévisibilité est satisfait avec une clause d'élection de for qui laisse à une partie le choix de saisir, de manière optionnelle, d'autres juridictions que celles désignées dans la clause", la cour d'appel a violé l'article 25, § 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, dit Bruxelles I bis. »
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Réponse de la Cour :
14. Interprétant l'article 25 précité du règlement Bruxelles I bis, la Cour de justice a dit pour droit qu'une convention attributive de juridiction en vertu de laquelle l'une des parties à celle-ci ne peut saisir que le seul tribunal qu'elle désigne, tandis qu'elle permet à l'autre partie de saisir, outre ce tribunal, toute autre juridiction compétente, est valide, dans la mesure où, premièrement, elle désigne les juridictions d'un ou de plusieurs États qui sont soit membres de l'Union européenne soit parties à la convention concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, signée le 30 octobre 2007, et dont la conclusion a été approuvée, au nom de la Communauté européenne, par la décision 2009/430/CE du Conseil, du 27 novembre 2008, deuxièmement, elle identifie des éléments objectifs suffisamment précis pour permettre au juge saisi de déterminer s'il est compétent et, troisièmement, elle n'est pas contraire aux dispositions des articles 15, 19 ou 23 de ce règlement et ne déroge pas à une compétence exclusive au titre de l'article 24 de celui-ci (CJUE, arrêt du 27 février 2025, Società italiana Lastre, C-537/23).
15. S'agissant, d'abord, du caractère déséquilibré d'une convention attributive de juridiction conférant plus de droits à une partie qu'à l'autre, la Cour de justice expose qu'il n'est pas de nature à remettre en cause la validité de la clause au regard des exigences énoncées à l'article 25 de ce règlement, sauf dans les cas expressément interdits par le règlement Bruxelles I bis (point 63 de l'arrêt précité).
16. S'agissant ensuite de l'appréciation du caractère suffisamment précis d'une convention attributive de juridiction aux fins de la détermination d'un tribunal ou de tribunaux d'un État membre pour connaître des différends nés ou à naître entre les parties, la Cour de justice rappelle que les termes "sont convenues", qui figurent à l'article 25, § 1, du règlement Bruxelles I bis, ne sauraient être interprétés en ce sens qu'ils exigent qu'une telle clause soit formulée de sorte qu'il soit possible d'identifier la juridiction compétente par son seul libellé (point 42) et énonce qu'en application de ce texte, pour être valide, une convention attributive de juridiction doit notamment identifier, de manière suffisamment précise, les éléments objectifs sur lesquels les parties se sont mises d'accord pour désigner le tribunal ou les tribunaux auxquels elles entendent soumettre leurs différends nés ou à naître (point 45).
17. Elle ajoute encore qu'une convention attributive de juridiction désignant avec suffisamment de précision les juridictions des États membres ou des États parties à la convention de Lugano II pouvant être saisies, à savoir, d'une part, une juridiction en particulier et, d'autre part, les autres juridictions compétentes en vertu des dispositions du chapitre II, sections 1 et 2, du règlement Bruxelles I bis ainsi que du titre II, sections 1 et 2, de la convention de Lugano II, satisfait à l'exigence de précision découlant de l'article 5, § 1er, de ce règlement ainsi qu'aux objectifs de prévisibilité, de transparence et de sécurité juridique énoncés aux considérants 15 et 16 dudit règlement. Elle observe qu'il s'agit, en réalité, d'un renvoi aux règles générales de compétence prévues par le même règlement et par ladite convention (point 59).
18. La Cour de justice précise toutefois, au point 60 de l'arrêt, que si, en ce qu'elle vise "un autre tribunal compétent [...] à l'étranger", la convention attributive de juridiction en cause devait être interprétée en ce sens qu'elle désignerait également une ou plusieurs juridictions d'un ou de plusieurs États qui ne seraient ni membres de l'Union ni parties à la convention de Lugano II, elle serait, en ce cas, contraire au règlement Bruxelles I bis. La Cour explique que cette convention attributive de juridiction méconnaîtrait alors les objectifs de prévisibilité, de transparence et de sécurité juridique visés aux considérants 15 et 16 de ce règlement, dans la mesure où le droit de l'Union ne permettrait pas, à lui seul, de désigner les juridictions compétentes, cette désignation étant, le cas échéant, tributaire de l'application de règles de droit international privé de pays tiers.
19. Il en résulte que trois conditions sont posées pour admettre la validité d'une clause attributive de juridiction en vertu de laquelle l'une des parties à celle-ci ne peut saisir que le seul tribunal qu'elle désigne, tandis qu'elle permet à l'autre partie de saisir, outre ce tribunal toute autre juridiction compétente. S'agissant de la réserve exprimée au point 60 de son arrêt, la Cour de justice renvoie cependant au juge national le soin d'interpréter la clause, le cas échéant afin de lui faire produire un effet utile pour se conformer à l'autonomie de la volonté des parties dont le respect nécessaire est aussi rappelé au considérant 19 du règlement Bruxelles I bis et au point 56 de l'arrêt.
20. Ayant constaté que la clause litigieuse désignait une juridiction parisienne et relevé qu'elle ouvrait la possibilité pour le bénéficiaire ou les créanciers, non pas de saisir toute autre juridiction compétente, mais la juridiction du lieu où la caution détenait des actifs, la cour d'appel a pu en déduire que cette clause, qui désigne la juridiction d'un Etat membre et qui permet au juge saisi d'identifier, à partir des éléments objectifs sur lesquels les parties se sont mises d'accord, le tribunal ou les tribunaux auxquels elles permettent à l'une d'elles de soumettre leur différends nés ou à naître, sans requérir l'examen des règles de conflits de juridictions d'Etats ni membres de l'Union européenne ni parties à la convention de Lugano II, satisfait l'exigence de précision découlant de l'article 25 précité et répond aux objectifs de prévisibilité, de transparence et de sécurité juridique de sorte qu'elle est valable.
21. Le moyen n'est donc pas fondé.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société de commercialisation des Produits du Cameroun SA et M. X. aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société de commercialisation des Produits du Cameroun SA et M. X. et les condamne à payer à la Banque africaine d'import-export la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé publiquement le dix-sept septembre deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.