CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CASS. COM., 2 décembre 2008

Nature : Décision
Titre : CASS. COM., 2 décembre 2008
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. commerciale
Demande : 08-10731
Date : 2/12/2008
Nature de la décision : Cassation avec renvoi
Mode de publication : Legifrance
Décision antérieure : CA DOUAI (ch. 2 sect. 2), 20 novembre 2007
Référence bibliographique : Bull. civ. IV, n° 201
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 3270

CASS. COM., 2 décembre 2008 : pourvoi n° 08-10731

Publication : Bull. civ. IV, n° 201

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 2 DÉCEMBRE 2008

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 08-10731.

DEMANDEUR à la cassation : Société Castorama

DÉFENDEUR à la cassation : Société Tomécanic-Benetière

Mme Favre, président. M. Jenny, conseiller apporteur. Mme Batut, avocat général. SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat(s).

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

 

 

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu, selon l’arrêt déféré, tel que rectifié, que la société Tomécani-Benetière (ci-après Tomécanic), fabrique des outillages spécialisés pour le bâtiment, qu’elle commercialise auprès d’une clientèle principalement constituée de réseaux de revendeurs pour le bricolage et de professionnels du bâtiment ; que la société Castorama, qui fait partie du groupe Kingfisher au même titre que la société Brico-Dépôt, est spécialisée dans la distribution en France d’articles de bricolage et de décoration dans des magasins à enseigne « Castorama » ; que depuis plus de trente ans, la société Tomécanic fournissait à la société Castorama des outils et accessoires pour la pose de carrelage et sanitaires ; qu’au début de l’année 2006, la société Tomécanic réalisait 25 % de son chiffre d’affaires avec la société Castorama ; que par lettre du 28 juin 2005, la société Castorama a annoncé à la société Tomécanic son intention de lancer un appel d’offres aux fins d’actualisation de sa gamme « outillage carrelage » et a invité la société Tomécanic à soumissionner d’ici le 30 juillet 2005 ce qu’elle a fait ; que le 18 novembre 2005, la société Castorama a annoncé à la société Tomécanic, sa décision de déréférencer sa gamme d’outillage à mains à compter du 1er septembre 2006 ; que par courrier du 2 mars 2006, la société Castorama a informé la société Tomécanic que la totalité de ses produits, y compris ceux vendus sous la marque Castorama, cesseraient d’être référencés à compter du 2 mars 2007 ; qu’après avoir dénoncé le caractère brutal du déréférencement opéré par la société Castorama, à la suite de celui qui lui avait déjà été infligé par la société Brico-Dépôt, la société Tomécanic a assigné la société Castorama en réparation du préjudice lui ayant été causé par la rupture brutale et abusive des relations commerciales établies avec sa cocontractante ;

 

Sur le quatrième moyen :

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;

 

Sur le premier moyen, pris en ses trois premières branches :

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que la société Castorama fait grief à l’arrêt d’avoir dit qu’elle avait rompu sans préavis suffisant ses relations commerciales avec la société Tomécanic-Benetière et de l’avoir condamnée en réparation à payer diverses sommes à cette dernière, alors, selon le moyen :

1°/ qu’en vertu de l’article L. 442-6, I, 5° du code de commerce, la rupture d’une relation commerciale établie ne peut intervenir sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels ; que le délai de préavis fixé par l’accord interprofessionnel qui tient compte de l’ancienneté des relations commerciales, s’impose au juge, qui ne peut refuser de l’appliquer au motif qu’il serait insuffisant ; que dès lors, en décidant que l’existence d’un accord interprofessionnel ne dispense pas le juge du pouvoir d’apprécier si le délai est suffisant, et en décidant que les préavis accordés, pourtant conformes à l’accord interprofessionnel FMB UNIBAL, étaient insuffisants la cour d’appel a violé l’article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce et l’accord FMB UNIBAL ;

2°/ qu’en décidant que les délais de préavis prévus par l’accord interprofessionnel FMB UNIBAL étaient tous des délais minima s’imposant aux signataires, alors que l’accord prévoit des fourchettes de délais, ce qui exclut que la fourchette haute puisse être un délai minimum, la cour d’appel a violé l’article L. 442-6, I, 5° du code de commerce et l’accord FMB UNIBAL ;

3°/ que, la durée des relations antérieures est le seul critère à prendre en compte pour apprécier si le préavis est suffisant, depuis la modification de l’article L. 442-6, I, 5° du code de commerce par la loi NRE du 15 mai 2001 ; qu’en décidant que le délai maximal de l’accord interprofessionnel FMB UNIBAL pouvait être dépassé, compte tenu de la dépendance économique de Tomécanic à l’égard de Castorama et de Brico-Dépôt, et des investissements réalisés par Tomécanic au cours de ses relations avec Castorama pour tenir compte des demandes spécifiques de cette dernière, la cour d’appel a violé l’article L. 442-6, I, 5° du code de commerce ;

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Mais attendu que l’arrêt retient exactement que l’existence d’un accord interprofessionnel ne dispense pas la juridiction d’examiner si le préavis, qui respecte le délai minimal fixé par cet accord, tient compte de la durée de la relation commerciale et des autres circonstances de l’espèce ; que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;

 

Mais sur le premier moyen, pris en sa septième branche et sur le troisième moyen, pris en sa troisième branche :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu les articles L. 442-6, I, 5° et L. 442-6 I, 2 b) du code de commerce ;

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que pour dire que la société Tomécanic était dans une situation de dépendance économique à l’égard des sociétés Brico-Dépôt et Castorama, enseignes faisant partie du « groupe Castorama France », et prendre en compte cette situation pour le calcul du délai de préavis, l’arrêt retient que les deux sociétés sont juridiquement distinctes, que leurs activités sont identiques mais destinées à des clientèles différentes, le bricoleur dans le cas de la société Castorama et les professionnels dans le cas de la société Brico-Dépôt, que la société Tomécanic est en droit de faire valoir, pour l’examen de la dépendance comme pour l’évaluation des conséquences de la rupture, la gémellité des deux entités Brico-Dépôt et Castorama, que le poids de la société Castorama dans le chiffre d’affaires de la société Tomécanic doit être mesuré en prenant en considération le poids de l’ensemble des sociétés Castorama + Brico-Dépôt, que cet ensemble pesait jusqu’au début 2006 41 % de l’activité totale de la société Tomécanic ; que Castorama et Brico-Dépôt représentaient la première enseigne du marché français du bricolage, avec une part de marché s’élevant en 2006 à plus de 35 % dans le circuit de la grande distribution, lequel était largement prédominant représentant 67 % du marché total et que les sociétés Castorama et Brico-Dépôt faisaient partie des trois premières enseignes sur le marché français ;

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu qu’en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir que les sociétés Brico-Dépôt et Castorama n’étaient pas autonomes dans leur relations commerciales avec la société Tomécanic ou qu’elles avaient agi de concert, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a dit que la société Castorama France a rompu brutalement ses relations commerciales avec la société Tomécanic-Benetière et qu’elle a abusé de la situation de dépendance économique dans laquelle cette dernière société se trouvait à son égard, l’arrêt rendu le 20 novembre 2007, rectifié par arrêt du 11 décembre 2007, entre les parties, par la cour d’appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Douai, autrement composée ;

Condamne la société Tomécanic-Benetière aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du deux décembre deux mille huit.

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyens produits par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils pour la société Castorama France

 

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt d’avoir dit que la société CASTORAMA avait rompu sans préavis suffisant ses relations commerciales avec la société TOMECANICBENETIERE, et de l’avoir condamnée en réparation à payer diverses sommes à cette dernière ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Aux motifs que « 1° - Sur la norme applicable (prééminence de la loi sur l’accord Unibal-FMB) ; qu’aux termes de l’article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, la rupture de relations commerciales établie ne peut intervenir « sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels » ; que le secteur du bricolage est un des secteurs dans lesquels un accord interprofessionnel (l’accord FMB/UNIBAL) est intervenu pour préconiser des délais de préavis ; que dans le jugement entrepris, le Tribunal a considéré que l’accord FMB/UNIBAL ne reprenait ni des délais minimums, comme le faisait valoir TOMECANIC, ni des délais maximums, comme le prétendait BRICO-DEPOT, mais qu’il s’agissait simplement « d’une référence comme il est indiqué expressément en préambule de cet accord » ; que tout en affirmant que les délais préconisés par l’accord FMB/UNIBAL ne constituaient qu’une simple référence, le Tribunal s’est contredit en leur donnant force obligatoire au motif, erroné, d’un « accord entre les parties » pour l’appliquer ; que néanmoins, la loi n’entend pas que les juges, en plafonnant les délais à respecter par l’auteur de la rupture, aboutissent paradoxalement à accorder à la victime du déréférencement moins que ce à quoi elle pourrait prétendre en l’absence d’accord. L’existence d’un accord interprofessionnel ne dispense pas la juridiction saisie d’examiner de façon concrète si le préavis était suffisant pour permettre au partenaire de trouver une solution alternative. Par suite, les délais de préavis figurant dans l’accord FMB-UNIBAL ne sont pas des délais maximums de préavis mais « des références à respecter », ce qui signifie qu’il s’agit de délais minimums s’imposant aux signataires. Ceci résulte des termes de l’accord, ainsi que des dispositions de l’article L. 442-6 5° du code de commerce, aux termes desquelles l’auteur de la rupture doit tenir compte à la fois de la durée de la relation commerciale et respecter “la durée minimale de préavis déterminée”, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels”. Il faut ajouter que l’accord FMB/UNIBAL fixe des durées de préavis qui ne tiennent pas compte de la situation de dépendance économique dans laquelle la victime de la rupture peut se trouver, ainsi que cela résulte expressément du préambule de l’accord. Ceci ne peut être interprété comme créant une exception aux dispositions légales sur la dépendance économique. Une telle conclusion n’aurait aucun fondement juridique, alors surtout que l’abus de dépendance économique fait l’objet d’une disposition distincte de l’article L. 442-6 I 5° ; qu’aux termes de l’accord UNIBAL/FMB, un préavis d’une durée comprise entre 6 et 12 mois doit être respecté lorsque les relations commerciales ont duré plus de 5 ans et que le déréférencement porte sur 75 % à 100 % du chiffre d’affaires total réalisé entre les parties. Dans le cas présent, le délai indicatif était par conséquent d’une année ; mais il pouvait varier à la hausse, sur la preuve de la dépendance économique du fournisseur et de l’ancienneté réelle de la relation commerciale, dont il va être maintenant traité.

2° - Sur la dépendance économique de TOMECANIC ; que chacun des critères jurisprudentiels de la dépendance économique sont remplis dans le cas présent : - la part du chiffre d’affaires réalisé avec BRICO-DEPOT et CASTORAMA est très importante ; TOMECANIC est en droit d’écrire, au vu des faits énoncés en tête du présent arrêt et que CASTORAMA n’a même pas cherché à contredire, que « le poids de CASTORAMA dans le chiffre d’affaires de TOMECANIC doit être mesuré en prenant en considération le poids de l’ensemble CASTORAMA + BRICO-DEPOT. Cet ensemble pesait jusqu’au début 2006 % de l’activité totale de TOMECANIC. Même isolée de BRICO-DEPOT, la part de CASTORAMA dans le chiffre d’affaires de TOMECANIC demeure très importante (environ 25 % du chiffre d’affaires global hors RFA) ; que CASTORAMA et BRICO-DEPOT représentent la première enseigne du marché français du bricolage, avec une part de marché s’élevant en 2006 à plus de 35 % dans le circuit de la grande distribution, lequel est largement prédominant (67 % du marché total) ; que dans son avis N°97A04 du 21 janvier 1997, le Conseil de la Concurrence a dressé un bilan du degré de concentration atteint en France en 1996 dans le secteur de la grande distribution. S’agissant du secteur du bricolage, il a relevé « qu’un vaste mouvement de concentration a favorisé l’émergence de quelques grandes enseignes (Leroy Merlin, Castorama, Mr Bricolage, Bricomarché…) qui détiennent la majeure partie du marché ». Le poids de CASTORAMA et de BRICODEPOT dans son chiffre d’affaires est le reflet du poids de ces deux entreprises sur le marché. CASTORAMA et BRICO-DEPOT sont avec LEROY MERLIN les 3 premières enseignes sur le marché français » ; que CASTORAMA relève que le chiffre d’affaires de TOMECANIC aurait seulement baissé de moins de 10 % en 2006 par rapport à 2005, alors qu’en 2006, les relations avec BRICO-DEPOT se sont terminées totalement et celles avec CASTORAMA partiellement. Assimilant cette baisse à un quasi-maintien du chiffre d’affaires de TOMECANIC, elle en conclut que TOMECANIC serait parvenue à compenser sans difficultés la perte de 41 % du chiffre d’affaires représentée par CASTORAMA et BRICO-DEPOT. Cette affirmation est contraire à la réalité car les relations avec CASTORAMA se sont poursuivies en 2006 sauf pour l’outillage à mains déréférencé au 1er septembre 2006. C’est donc sur l’année 2007 que la perte du chiffre d’affaires subie par TOMECANIC se mesure pleinement. La perte du chiffre d’affaires de TOMECANIC (hors BENETIERE) est de l’ordre de - 40% en 2007 par rapport à 2006, ainsi que TOMECANIC en justifie (Pièce Tomecanic N° 119) ; que TOMECANIC était par conséquent dans une situation de dépendance économique importante à l’égard de BRICODEPOT et CASTORAMA.

2° bis - Sur le différend avec BRICODEPOT ; que vainement CASTORAMA cherche à faire ignorer par la Cour des termes du différend parallèle avec BRICODEPOT ; que certes les deux instances sont demeurées distinctes sur le plan procédural. Certes les deux sociétés sont juridiquement distinctes. Certes encore, leurs activités sont identiques mais destinées à des clientèles différentes : le bricoleur dans le cas de CASTORAMA, le professionnel dans le cas de BRICODEPOT ; que dans l’analyse d’une rupture, il n’est pas possible de gommer le contexte économique : en quoi, TOMECANIC est en droit de faire valoir, pour l’examen de sa dépendance comme pour l’évaluation des conséquences de la rupture, la gémellité des deux entités BRICODEPOT/CASTORAMA.

3° - Sur la durée de la relation commerciale ; que le Tribunal a estimé que les relations entre les parties avaient été d’environ 30 ans. CASTORAMA ne cherche pas à avancer un chiffre moindre (ses conclusions, paragraphe 1.3, évoquent “de nombreuses années”).

4° Sur la durée en conséquence du préavis ; qu’en raison tant de la dépendance économique de son fournisseur par rapport à elle, qui en avait une exacte conscience, et par rapport à la durée très longue de la relation commerciale, la société CASTORAMA ne pouvait pas se contenter de retenir le haut de la fourchette prévue dans l’accord UNIBAL/FMB. La durée de 5 années envisagée par l’accord UNIBAL/FMB est très inférieure à la période longue (30 ans) pendant laquelle TOMECANIC a livré CASTORAMA ; que celle-ci devait encore tenir compte de l’ensemble des circonstances de l’espèce, et en particulier de la situation de dépendance économique dans laquelle TOMECANIC se trouvait à son égard. Elle devait également tenir compte des investissements réalisés par TOMECANIC tout au long des relations par TOMECANIC pour adapter son outil industriel aux demandes spécifiques de CASTORAMA et du temps nécessaire à sa reconversion, compte tenu de l’absence de source alternative comparable sur le marché. CASTORAMA devait ainsi s’assurer que la durée minimale préconisée par l’accord UNIBAL-FMB était suffisante au regard des dispositions des articles L.442-6, I, 5° et L.442-6-I-2°b) du Code de Commerce, l’accord UNIBAL/FMB ne pouvant donner moins que ce qui est accordé par la loi ; qu’en définitive, c’est un délai minimum de 18 mois qui aurait dû être observé dans le cas présent par BRICO-DEPOT eu égard à : - la durée des relations commerciales entre les parties, -l’ensemble des investissements réalisés par TOMECANIC pour satisfaire la demande de CASTORAMA, -la concomitance avec le déréférencement total de TOMECANIC par CASTORAMA, société du même groupe que BRICO-DEPOT, -l’importance du chiffre d’affaires déréférencé dans le chiffre d’affaires total de TOMECANIC (plus de 40 %), -la situation de dépendance économique de TOMECANIC à l’égard de CASTORAMA + BRICO-DEPOT, qui constitue une circonstance aggravante de la rupture brutale des relations.

5° -Sur la différence de durée et de point de départ du préavis selon les produits ; qu’ainsi que l’ont indiqué les premiers juges, la loi ne prévoit d’augmentation du délai de préavis pour les produits MDD que s’agissant des préavis très brefs. Telle n’est pas la circonstance de l’espèce ; que quant au point de départ de chaque préavis, les premiers juges ont retenu la date du 28 juin 2005. Cette date n’est que celle de l’annonce d’un appel d’offre pour certains des produits fournis par TOMECANIC à CASTORAMA. Cette annonce (contrairement à ce que fera BRICODEPOT) ne comporte aucune menace de déréférencement, ainsi qu’il a été dit dans l’exposé des faits qui commence le présent arrêt ; que dès lors, ce sont les deux LRAR, d’une du 18 novembre 2005, l’autre du 2 mars 2006, qui constituent les points de départ des préavis.

6° -Sur le doublement du préavis ; qu’en application de l’article L.442-6, I, 5° du code de commerce, tel que modifié par la loi du août 2005, la durée minimale de préavis est doublée dans le cas de rupture résultant d’une mise en concurrence par enchères à distance dans les cas où la durée du préavis initial est de moins de 6 mois et elle est d’au moins un an dans les autres cas ; que les circonstances de l’espèce n’ont pas mis en œuvre le processus des enchères à distance, qui use de la voie électronique et non pas de la soumission par courrier.

7° - Sur le caractère brutal de la rupture ; que l’accord FMB/UNIBAL requiert que l’annonce de toute rupture des relations commerciales soit précédée d’une rencontre entre interlocuteurs pouvant engager la responsabilité de l’entreprise, provoquée par la partie ayant pris cette décision afin d’en exposer les raisons à l’autre partie. Cet entretien doit être suivi de l’envoi d’une lettre recommandée confirmant ses raisons qui aux termes de l’accord FMB/UNIBAL marque le point de départ du délai de préavis ; que TOMECANIC ne justifie pas que CASTORAMA ait manqué au respect de ces formes requises par cet accord, plus protectrices que les dispositions de l’article L .442-6, 5° du code de commerce » (cf. arrêt pp. 3 à 6) ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Alors, d’une part, qu’en vertu de l’article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, la rupture d’une relation commerciale établie ne peut intervenir sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels ; que le délai de préavis fixé par l’accord interprofessionnel qui tient compte de l’ancienneté des relations commerciales, s’impose au juge, qui ne peut refuser de l’appliquer au motif qu’il serait insuffisant ; que dès lors, en décidant que l’existence d’un accord interprofessionnel ne dispense pas le juge du pouvoir d’apprécier si le délai est suffisant, et en décidant que les préavis accordés, pourtant conformes à l’accord interprofessionnel FMB-UNIBAL, étaient insuffisants la Cour d’appel a violé l’article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce et l’accord FMB-UNIBAL ;

Alors d’autre part, qu’en tout état de cause, en décidant que les délais de préavis prévus par l’accord interprofessionnel FMB-UNIBAL étaient tous des délais minima s’imposant aux signataires, alors que l’accord prévoit des fourchettes de délais, ce qui exclut que la fourchette haute puisse être un délai minimum, la Cour d’appel a violé l’article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce et l’accord FMB-UNIBAL ;

Alors de troisième part, en outre que, la durée des relations antérieures est le seul critère à prendre en compte pour apprécier si le préavis est suffisant, depuis la modification de l’article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce par la loi NRE du 15 mai 2001 ; qu’en décidant que le délai maximal de l’accord interprofessionnel FMB-UNIBAL pouvait être dépassé , compte tenu de la dépendance économique de TOMECANIC à l’égard de CASTORAMA et de BRICO-DEPOT, et des investissements réalisés par TOMECANIC au cours de ses relations avec CASTORAMA pour tenir compte des demandes spécifiques de cette dernière, la Cour d’appel a violé l’article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;

Alors, de quatrième part en tout état de cause, que l’état de dépendance économique se définit comme la situation d’une entreprise qui ne dispose pas de la possibilité de substituer à son ou ses distributeurs un ou plusieurs distributeurs répondant à sa demande d’approvisionnement dans des conditions techniques et économiques comparables ; qu’en l’espèce, tenant compte du chiffre d’affaires fait par TOMECANIC auprès de CASTORAMA et de BRICO-DEPOT, la Cour d’appel a relevé qu’il représentait début 2006, 41 % de l’activité totale de TOMECANIC ; que tenant compte d’un avis du Conseil de la concurrence du 21 janvier 1997, fondé sur le marché en 1996, elle en a déduit que CASTORAMA, BRICO-DEPOT, et LEROY MERLIN étaient les trois premières enseignes sur le marché français et qu’il n’y avait donc pour TOMECANIC pas de source alternative comparable sur le marché ; qu’en statuant ainsi, sans rechercher comme elle y était invitée si le fournisseur ne disposait pas en 2006, et non en 1996, de solutions alternatives qu’il n’avait pas mises en œuvre, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;

Alors, de cinquième part, qu’en évaluant le préjudice de reconversion consistant dans l’obligation pour TOMECANIC de rechercher de nouveaux marchés à la somme de 30.000 euros, la Cour d’appel, qui a par-là même constaté que l’effort à faire par TOMECANIC pour trouver de nouveaux débouchés était insignifiant, ce dont il résultait que TOMECANIC n’était pas en état de dépendance économique à l’égard de CASTORAMA, et qui a pourtant admis cet état de dépendance, n’a pas tiré les conséquences légales de ces propres constatations, violant ainsi l’article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;

Alors encore qu’en tout état de cause, il n’y a de dépendance économique qu’à la condition que l’importance de la part du distributeur dans le chiffre d’affaires du fournisseur ne résulte pas du choix de ce dernier qui s’abstient délibérément de diversifier ses débouchés ; qu’en l’espèce, la société Castorama avait soutenu dans ses conclusions d’appel que TOMECANIC avait crée la situation dans laquelle elle se trouve aujourd’hui, faute d’avoir cherché de nouveaux débouchés (concl. p. 19) ; qu’en décidant que TOMECANIC était en état de dépendance économique sans rechercher si l’importance de la part de BRICO-DEPOT dans le chiffre d’affaires de TOMECANIC ne résultait pas d’un choix de TOMECANIC, qui avait refusé de diversifier davantage ses débouchés, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L.442-6 I 5° du Code de commerce ;

Alors enfin qu’ en appréciant la situation de dépendance économique de TOMECANIC à l’égard à la fois de CASTORAMA et de BRICO-DEPOT, tout en constatant qu’il s’agit de deux personnes juridiques distinctes qui sont des sociétés sœurs, sans rechercher si CASTORAMA et BRICO-DEPOT ont mené une action concertée pour déréférencer TOMECANIC à une année d’intervalle, ou si les deux sociétés sœurs étaient privées d’autonomie dans leur politique commerciale, la Cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce.

 

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l’arrêt d’avoir condamné CASTORAMA à payer à TOMECANIC les sommes de 1.057.874,96 euros à titre de perte de marge brute du fait du non-respect du préavis, 30.000 euros en réparation du préjudice de reconversion, et 40.000 euros en réparation du préjudice d’image ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Aux motifs que « la perte subie par TOMECANIC comprend la marge brute qui aurait dû être réalisée par TOMECANIC pendant la durée du préavis qui n’a pas été observée ; un préjudice économique de reconversion ; une atteinte à l’image ; que la perte de marge sera calculée sur 8 mois et demi (18 mois de préavis dû moins 9 mois et demi de préavis observé) pour les produits visés dans l’annexe à la lettre de rupture du 18 novembre 2005 ; et sur 6 mois (18 mois moins 12 mois de préavis observé) pour les autres produits concernés par la lettre du 2 mars 2006 ; que TOMECANIC avance, sans être clairement contredite, le chiffre mensuel de 75.950 euros pour les produits déréférencés en 2005, et de 68.716,66 euros pour les produits déréférencés en 2006. Ses pièces n° 38 à 40 corroborent cette évaluation ; que le total dû par CASTORAMA atteint dès lors 1.057.874,96 euros ; que le préjudice de reconversion qui consiste dans l’obligation pour TOMECANIC de rechercher de nouveaux marchés et d’y adapter au besoin son outil de production, ne doit pas faire double emploi avec l’abus de dépendance économique dont il sera question plus loin et qui a pu amener TOMECANIC à se conformer profondément aux attentes de CASTORAMA pendant trente ans. La Cour allouera à TOMECANIC à titre d’indemnisation de son préjudice financier et économique, raisonnablement estimés à 30.000 euros ; que le préjudice de perte d’image doit être réparé car la distribution des produits de TOMECANIC dans les magasins CASTORAMA leur donnait une notoriété qui se trouve aujourd’hui perdue. La clientèle habituelle de CASTORAMA étant celle des particuliers, très sensibles à la marque et à l’origine française des produits, le préjudice d’image à TOMECANIC est élevé. Il sera alloué à ce titre des dommages et intérêts de 40.000 euros » ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Alors, d’une part, que la notification par CASTORAMA le 28 juin 2005 de son recours à un appel d’offres pour choisir ses fournisseurs, manifestait son intention de ne pas poursuivre les relations contractuelles dans les conditions antérieures et faisait ainsi courir le délai de préavis qui avait par conséquent duré 15 mois, de telle sorte que la perte de marge indemnisable n’était que de 3 mois, la cour d’appel qui a néanmoins fixé le point de départ du premier déréférencement partiel au 18 novembre 2005, date de la notification de l’échec de TOMECANIC à l’appel d’offres organisé par CASTORAMA, pour indemniser un préjudice de 8 mois et demi de perte de marge pour les produits considérés, n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles L. 442-6, I, 5° du Code de commerce et 1382 du Code civil.

Alors, d’autre part, que le préjudice causé par la rupture brutale de relations commerciales établies s’entend uniquement de la perte de marge pendant le préavis qui n’a pas été exécuté ; qu’il ne peut en aucun cas être le préjudice dû au principe même de la cessation des relations contractuelles ; que dès lors en l’espèce, en indemnisant le préjudice de reconversion et le préjudice de perte d’image de TOMECANIC, la Cour d’appel a violé les articles L. 442-6, I, 5° du Code de commerce et 1382 du Code civil.

 

TROISIÈME MOYEN DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Il est fait grief à l’arrêt d’avoir dit que la société CASTORAMA a abusé de la situation de dépendance économique dans laquelle se trouve la société TOMECANIC et que la société CASTORAMA a manqué à son obligation de renégocier de bonne foi ses tarifs en 2005 et 2006, et de l’avoir condamnée à payer à TOMECANIC 25.000 euros de ce chef ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Aux motifs qu’ « il résulte de l’exposé des faits par la Cour et de l’analyse des conditions de la rupture brutale, ci-dessus, que TOMECANIC était en état de dépendance économique par rapport à CASTORAMA et plus globalement par rapport au groupe CASTORAMA, TOMECANIC fait la preuve que tout au long des relations commerciales CASTORAMA a abusé de cette dépendance économique, l’abus apparaissant du seul fait des sacrifices imposés au fournisseur pour finalement rompre dans des conditions illicites ; qu’il est ainsi avéré que CASTORAMA a exigé de son fournisseur des prix stables qui ne tenaient pas compte de l’augmentation du coût des matières premières. Les autres prétentions de TOMECANIC (conditions de paiement normales, avantages sans contrepartie) ne sont étayées par aucune pièce ; que s’agissant du refus de réviser les tarifs en 2005 et en 2006 après avoir imposé à TOMECANIC une baisse importante des prix, CASTORAMA a manqué à la bonne foi contractuelle en refusant de renégocier les prix, compte tenu de l’évolution du cours des matières premières survenue postérieurement, sans que les parties aient pu le prévoir. Le refus de prendre en considération la demande de révision des tarifs a coûté en 2005 et 2006 près de euros de perte de marge à TOMECANIC, chiffre que Castorama est en peine de contester de manière pertinente. Mais il faut tenir compte de ce que si elle s’était obligée à réviser ses tarifs au profit de TOMECANIC, Castorama aurait sans doute perdu en chiffre d’affaires et diminué ses commandes. Castorama sera condamnée à payer à TOMECANIC la somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi suite à son manquement à l’obligation de renégocier de bonne foi les tarifs ; qu’en revanche, la demande de 8.503 euros pour frais exposés à l’occasion de l’ouverture de magasins CASTO est nouvelle en cause d’appel et comme telle irrecevable » (cf. arrêt p. 7) ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Alors, d’une part, que l’état de dépendance économique se définit comme la situation d’une entreprise qui ne dispose pas de la possibilité de substituer à son ou ses distributeurs un ou plusieurs distributeurs répondant à sa demande d’approvisionnement dans des conditions techniques et économiques comparables ; qu’en l’espèce, tenant compte du chiffre d’affaires fait par TOMECANIC ou de CASTORAMA et de BRICODEPOT, la Cour d’appel a relevé qu’il représentait début 2006, 41 % de l’activité totale de TOMECANIC ; que tenant compte d’un avis du Conseil de la concurrence du 21 janvier 1997, fondé sur le marché en 1996, elle en a déduit que CASTORAMA, BRICO-DEPOT et LEROY MERLIN étaient les trois premières enseignes sur le marché français, et qu’il n’y avait donc pour TOMECANIC pas de source alternative comparable sur le marché ; qu’en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le fournisseur ne disposait pas en 2006, et non en 1996, de solutions alternatives qu’il n’avait pas mises en œuvre, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 442-6-I, 2 b) du Code de commerce ;

Alors, de deuxième part, que (subsidiaire) en évaluant le préjudice de reconversion consistant dans l’obligation pour TOMECANIC de rechercher de nouveaux marchés à la somme de 30.000 euros, la Cour d’appel, qui a par là-même constaté que l’effort à faire par TOMECANIC pour trouver de nouveaux débouchés était insignifiant, ce dont il résultait que TOMECANIC n’était pas en état de dépendance économique à l’égard de CASTORAMA, n’a pas déduit les conséquences légales de ces constatations au regard de l’article L. 442-6-I, 2 b) du Code de commerce ;

Alors de troisième part que (subsidiaire) en appréciant la situation de dépendance économique de TOMECANIC à l’égard à la fois de CASTORAMA et de BRICO-DEPOT, tout en constatant qu’il s’agit de deux personnes juridiques distinctes qui sont des sociétés sœurs, sans rechercher si CASTORAMA et BRICO-DEPOT ont mené une action concertée à l’égard de TOMECANIC, ou si les deux sociétés sœurs étaient privées d’autonomie dans leur politique commerciale, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 442-6-I, 2 b) du Code de commerce ;

Alors de quatrième part qu’il ne saurait y avoir d’abus à refuser de négocier à la hausse, au seul préjudice des consommateurs, un prix consenti par un fournisseur à son distributeur, dans un contrat-cadre annuel, dès lors que l’augmentation du prix demandée permettrait uniquement au fournisseur de conserver une marge confortable et de pratiquer des prix nettement moins concurrentiels que ceux pratiqués par les fournisseurs concurrents, qui subissent comme lui l’augmentation de la matière première ; qu’en l’espèce, la Cour d’appel a constaté que si CASTORAMA avait accepté la hausse de tarif de TOMECANIC, en cours de contrat-cadre, CASTORAMA aurait perdu en chiffre d’affaires car elle aurait vendu moins, les prix pratiqués par les autres enseignes livrées par des fournisseurs concurrents de TOMECANIC étant plus compétitifs ; que dès lors, en décidant qu’il y avait abus à refuser de se soumettre à des prix non concurrentiels, la Cour d’appel a violé l’article L. 442-6-I, 2 b) du Code de commerce, et 1134 alinéa 3 du Code civil.

 

QUATRIÈME MOYEN DE CASSATION

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Il est fait grief à l’arrêt d’avoir débouté CASTORAMA de sa demande de paiement par TOMECANIC de la somme de 477.456,57 euros TTC, au titre de la ristourne de 15 % pour les années 2006 et 2007,

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Aux motifs que « Castorama avait formé une demande reconventionnelle à hauteur de 372.575,41 euros TTC, après compensation entre les sommes qu’elle reconnaissait devoir à TOMECANIC pour 104.881,16 euros TTC (factures) et les sommes dont elle prétendait qu’elles lui seraient dues par TOMECANIC au titre de la ristourne de 15 % pour les années 2006 et 2007 (477.456,57 euros TTC) ; que le Tribunal a accueilli la première demande (factures), avec cette précision que la créance de TOMECANIC s’élevait en réalité à 107.439,98 euros TTC ; que le point important de la demande reconventionnelle de CASTORAMA portait sur le paiement de la remise de fin d’année pour 2006 et 2007 ; que TOMECANIC contestait devoir à BRICO-DEPOT cette remise partiellement pour 2006 et en totalité pour 2007 ; qu’à l’appui de sa position, TOMECANIC faisait valoir qu’elle ne saurait être tenue de verser une remise qui avait pour contrepartie son référencement, alors qu’elle a subi un déréférencement de ses produis en 2005 et 2006 ; que le jugement a rejeté la contestation soulevée par TOMECANIC et fait droit à la demande de BRICODEPOT, en relevant que « les produits de la SA TOMECANIC BENETIERE ont bien figuré dans les rayons de CASTORAMA jusqu’au terme de la période de préavis, soit mars 2007 » ; que la Cour infirmera le jugement sur ce point. En effet, aux termes de l’accord commercial conclu en 2005, la ristourne de fin d’année consistait dans une remise liée à la négociation commerciale, au référencement et à la codification des produits centralisés. Or CASTORAMA a notifié à TOMECANIC son déréférencement par lettre R.A.R. du 18 novembre 2005. En application des règles relatives aux contrats (articles 1134 et 1183 et suivants du code civil), le déréférencement prive la remise de son objet pour 2006 et 2007, mais pas pour 2005 ; que cependant, BRICO-DEPOT ne saurait exiger le versement d’une remise qui est contraire aux dispositions de l’article L.442-6 I 10 et 20 du code de commerce en raison de son caractère manifestement disproportionné et discriminatoire ; qu’en effet, du fait de l’état de dépendance économique dans lequel TOMECANIC était à son égard, BRICO-DEPOT et CASTORAMA ont obtenu d’elle un avantage qui n’a pas d’équivalent chez les autres clients de TOMECANIC. Certes ces clients réalisent un chiffre d’affaires moins important mais, dans tous les cas, le taux des remises de fin d’année est inférieur à 8 %, ce qui fait ressortir le caractère manifestement disproportionné du taux obtenu par BRICO-DEPOT et CASTORAMA ; qu’en conséquence, TOMECANIC ne saurit être tenue de régler les remises litigieuses. Elle ne prétend pas à restitution de RFA qui auraient été payées à tort par elle : il lui en sera donné acte » (cf. arrêt p. 8) ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Alors d’une part, qu’en affirmant que les remises faites à CASTORAMA étaient de 15 % et celles des autres clients étaient de 8 %, sans fonder sa décision sur aucun élément de nature à établir ces taux de remise, la Cour d’appel a privé sa décision de motifs, violant ainsi l’article 455 du Code de procédure civile ;

Alors d’autre part qu’en tout état de cause en vertu de l’article L. 442-6-I, 1° et 2° du Code de commerce, n’est pas illicite le fait pour un distributeur d’obtenir de son fournisseur la rémunération de services effectivement rendus ; qu’en l’espèce, CASTORAMA avait souligné dans ses conclusions d’appel sur le fait que les ristournes que TOMECANIC avait accepté de lui payer pour 2006 et 2007, correspondaient aux services rendus par CASTORAMA, services différents de ceux rendus par les autres clients de TOMECANIC ; qu’en décidant que ces ristournes étaient disproportionnées et discriminatoires, au seul motif que les ristournes de CASTORAMA étaient de 15 % et que les autres clients n’obtenaient qu’une remise de 8 %, sans rechercher si les services rendus par CASTORAMA n’étaient pas plus importants que ceux rendus par les autres clients, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé.