TI CAEN, 2 septembre 2004
![](/application/asset/thumbnails/default.png?v=3.2.0)
CERCLAB - DOCUMENT N° 3274
TI CAEN, 2 septembre 2004 : RG n° 11-03-000962 ; jugement n° 04/1080
(sur appel CA Caen (1re ch. sect. civ. et com.), 22 juin 2006 : RG n° 04/02875)
TRIBUNAL D’INSTANCE DE CAEN
JUGEMENT DU 2 SEPTEMBRE 2004
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11-03-000962. Jugement n° 04/1080.
DEMANDEUR :
SA SPP
dont le siège social est [adresse], représentée par Maître DESQUESNES-PUYRAVAU Marie-Noëlle, avocat au barreau de CAEN
ET :
DÉFENDEUR :
Monsieur X.
demeurant [adresse], représenté par Maître DEJARDIN Ghislaine, avocat au barreau de CAEN
Madame Y.
demeurant [adresse] chez Monsieur et Mme Y., [ville], représentée par Maître LEBOCQ-CASTILLON, avocat au barreau de CAEN
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Président : MATER Anne, Juge d'Instance au Tribunal d'Instance de CAEN par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de CAEN en date du 7 avril 2004 et par ordonnances de Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de CAEN en date des 18 mai 2004 et 16 juin 2004
Greffier : CÔME Karine
PROCÉDURE : Date de la première évocation : 9 septembre 2004
Date des débats : 22 juin 2004
Date du délibéré : 2 septembre 2004
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] Par déclaration reçue au Greffe le 5 juin 2003, Madame Y. a formé opposition à une ordonnance rendue contre elle et Monsieur X., le 28 avril 2003, portant injonction de payer à la SA SPP les sommes de :
- 4.880,15 euros en principal, avec intérêts au taux de 8,59 % à compter du 22 novembre 2002,
- 100,00 euros à titre de clause pénale,
- 4,04 euros au titre des frais de mise en demeure.
Madame Y. demande au tribunal :
- à titre principal, de déclarer nulle la requête en injonction de payer,
- subsidiairement, de déclarer irrecevable cette requête affectée d'une fin de non recevoir,
- en tout état de cause, déclarer nul l'acte de signification d'ordonnance exécutoire du 27 mai 2003 dont le coût restera à la charge de l'huissier instrumentaire et déclarer nulle l'ordonnance d'injonction de payer.
Elle demande qu'en tout cas, la clause pénale soit jugée nulle, que la SA SPP soit déchue du droit aux intérêts et que les sommes versées par Madame Y. s'imputent sur le capital.
Madame Y. soutient notamment :
- que la requête en injonction de payer ne pouvait valablement être déposée par l'officine de recouvrement, le Groupement d'Intérêt Économique NEUILLY CONTENTIEUX, son mandat étant nul car affecté de différents vices (notamment erreur sur le siège social, absence de pouvoir spécial), que la requête est signée de manière illisible, qu'elle n'était pas accompagnée des pièces justificatives nécessaires,
- que l'offre de crédit ne porte pas la signature du prêteur et n'est pas datée par ce dernier et est également affectée de plusieurs vices au regard de la réglementation sur le crédit à la consommation : elle manque de lisibilité dans la mesure où la signature de l'emprunteur est apposée au recto et non au verso, alors que les clauses du contrat y figurent et celles-ci sont imprimées en caractère inférieur au corps huit qui est exigé ; en outre, ne sont pas reproduites les dispositions de l'article L. 311-10 du code de la consommation,
- qu'elle est fondée à se prévaloir du caractère abusif et usuraire de la clause pénale, nulle par ailleurs compte tenu de son manque de lisibilité.
Elle sollicite enfin la condamnation de la SA SPP à lui payer la somme de 700,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
[minute page 3] Aux termes de ses dernières écritures, elle demande qu'en application des dispositions de l'article 220 du Code civil, toute condamnation qui pourrait intervenir à son encontre soit prononcée conjointement avec Monsieur X.
Elle demande la condamnation de ce dernier aux dépens afférents à son appel en intervention forcée.
Monsieur X. demande au tribunal de dire qu'il n'a jamais contracté le crédit litigieux et en conséquence, débouter la SA SPP de l'ensemble de ses demandes articulées à son encontre.
À titre subsidiaire, il sollicite la comparution personnelle des parties aux fins de vérification d'écritures.
En toute hypothèse, il demande la condamnation in solidum de la SA SPP et de Madame Y. à lui payer 610,00 euros au titre du Nouveau Code de Procédure Civile, outre leur condamnation aux entiers dépens.
Il fait valoir qu'il s'est présenté sur l'instance dès l'opposition formée par Madame Y.
Il expose qu'il n'est pas le signataire de l'offre préalable de crédit, comme le prouvent les pièces qu'il verse aux débats, son épouse de l'époque ayant imité sa signature et ayant contracté ce crédit à son insu.
Il indique que dans d'autres dossiers, des mesures d'instruction ont révélé que Madame Y. signait au lieu et place de son époux ; que ce n'est que dans le cadre de la procédure de divorce qu'il a découvert les différents crédits ainsi souscrits.
Il conclut que faute par la SA SPP d'apporter la preuve de la destination ménagère des fonds, celle-ci devra être déboutée des demandes formées à son encontre.
La SA SPP demande au tribunal de :
- condamner Madame Y. solidairement avec Monsieur X. à lui payer la somme de 5.080,06 euros,
- dire que cette somme portera intérêts au taux d'ouverture du contrat,
- ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir,
- condamner Madame Y. et Monsieur X. à régler une somme de 228,67 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure,
- [minute page 4] condamner Madame Y. aux entiers dépens.
Par conclusions en date du 26 février 2004, elle répond point par point, de manière détaillée, aux divers moyens soulevés par Madame Y.
Le délibéré, fixé au 2 septembre 2004, a été rendu à cette date par la présente décision contradictoire et en premier ressort.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIVATION :
Sur la régularité de la requête aux fins d'injonction de payer, de l'ordonnance d'injonction de payer et de l'acte de signification :
L'opposition à une ordonnance d'injonction de payer formée devant le Tribunal d'Instance ayant rendu ladite ordonnance a pour effet d'ouvrir une instance de droit commun dans le cadre de laquelle le Tribunal statue sur la demande en recouvrement en application de l'article 1417 du Nouveau Code de Procédure Civile.
De ce fait, les moyens tirés de la nullité de la requête aux fins d'injonction de payer, de l'ordonnance d'injonction de payer et de l'acte de sa signification n'apparaissent d'aucun intérêt dans le cadre du présent litige.
Madame Y. ne précise d'ailleurs pas le fondement juridique en vertu duquel elle conclut à ces nullités et fins de non-recevoir.
Dans ces conditions, ces moyens, non fondés, seront écartés.
Sur la régularité de l'offre de crédit :
Le délai biennal de forclusion de l'article L. 311-37 du Code de la consommation s'applique à l'action engagée par l'emprunteur contre le prêteur à titre principal et reconventionnellement.
Le point de départ du délai pour agir en contestation de la régularité formelle de l'offre préalable se situe à la date de la signature de l'offre.
En l'espèce, l'offre litigieuse ayant été acceptée le 29 décembre 1999, Madame Y. est forclose à soulever l'irrégularité du contrat.
Il doit cependant être observé que cette dernière, tout en invoquant divers vices affectant l'offre de crédit au regard de la réglementation sur le crédit à la consommation, n'en tire aucune conséquence précise.
[minute page 5] Selon l'article L. 311-33 du Code de la consommation, seule la sanction de la déchéance du droit aux intérêts est encourue par le prêteur qui ne remet pas à l'emprunteur une offre préalable satisfaisant aux conditions prévues aux articles L. 311-8 et L. 311-13.
Dès lors, l'irrégularité de l'offre ne peut justifier l'irrecevabilité de la demande ou le débouté pur et simple du prêteur, comme demandé par Madame Y.
Ce moyen sera donc également écarté.
Sur la déchéance du droit aux intérêts :
Madame Y. demande au tribunal de prononcer la déchéance du droit aux intérêts à son profit, sans toutefois préciser le fondement juridique de cette demande.
Elle sera en conséquence déboutée de ce chef et à l'examen des pièces versées au dossier relativement au contrat de prêt souscrit le 29 décembre 1999, la SA SPP sera fondée à réclamer la somme suivante :
- mensualités échues impayées à la date de la déchéance du terme : 2.381,19 euros
- capital restant dû non échu à cette date : 2.498,96 euros
Total : 4.880,15 euros
outre les intérêts au taux contractuel de 8,59 % à compter du 22 novembre 2002.
Sur la clause pénale :
Par application de l'article 1152 du Code civil, le Tribunal estime d'office devoir réduire à néant l'indemnité de 8 % calculée sur le montant du capital restant dû s'agissant d'une clause pénale qui, cumulée avec les intérêts de retards alloués à la SA SPP, serait manifestement excessive.
La SA SPP sera donc déboutée de sa demande de ce chef.
Sur les demandes en ce qu'elles sont dirigées contre Mme Y. :
Madame Y. ne contestant pas avoir signé l'offre préalable de prêt personnel du 29 décembre 1999 sur la base de laquelle la SA SPP agit, sa condamnation au paiement de la somme ci-dessus énoncée de 4.880,15 euros avec intérêts au taux contractuel de 8,59 % à compter du 22 novembre 2002 doit être prononcée.
[minute page 6] Mme Y. demande toutefois à bénéficier de l'imputation préférentielle des paiements sur le capital, sans toutefois en préciser le fondement juridique.
Il sera observé que c'est en application de l'article 1244-1 du Code civil, en dehors des dispositions spécifiques relatives au droit de la consommation que n'évoque pas Madame Y., que le Juge peut prescrire une telle mesure.
En ce cas, il appartient au débiteur de justifier d'une situation nécessitant de tels aménagements de paiement de sa dette.
En l'absence de ces justificatifs, Madame Y. sera déboutée de sa demande d'imputation des paiements sur le capital.
Sur les demandes en ce qu'elles sont dirigées contre M. X. :
Monsieur X. conteste avoir signé l'offre préalable et indique que la signature qui lui est attribuée a en réalité été apposée par son épouse sans son accord.
La comparaison de la signature figurant sur l'offre préalable de crédit dans l'encadré « Acceptation de l'offre du titulaire », que Monsieur X. dénie, avec celles figurant sur différents documents produits aux débats par ce dernier met en évidence des dissemblances certaines.
Dans ces conditions, il convient de juger que la signature contestée ne peut être attribuée avec certitude à Monsieur X.
La SA SPP ne rapporte donc pas la preuve de l'acceptation par Monsieur X. de l'offre préalable sur laquelle elle fonde sa prétention.
Par ailleurs, il convient de constater qu'elle ne fournit aucune explication ni pièce justificative de nature à établir que l'emprunt par elle consenti l'a été pour faire face à des dépenses ménagères nécessaires.
Dans ces conditions, il n'y a pas lieu à appliquer à la présente condamnation la solidarité prévue à l'article 220 du Code civil.
Les demandes dirigées contre Monsieur X. seront donc rejetées.
Sur les dépens et l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :
Compte tenu de la solution apportée au litige, Madame Y. sera condamnée aux entiers dépens de l'instance.
[minute page 7] Il sera équitablement alloué à Monsieur X. la somme de 350,00 euros à laquelle seront condamnés au paiement in solidum la SA SPP et Madame Y., en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Madame Y. sera en outre condamnée à payer à la SA SPP une indemnité équitablement fixée à 200,00 euros, en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le tribunal,
STATUANT publiquement, contradictoirement et en premier ressort ;
CONDAMNE Madame Y. à payer à la SA SPP la somme de quatre mille huit cent quatre-vingt euros et quinze centimes (4.880,15 euros), outre les intérêts au taux de 8,59 % à compter du 22 novembre 2002, en vertu d'un contrat de prêt personnel souscrit auprès de ladite société le 29 décembre 1999 ;
DÉBOUTE la SA SPP de l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de Monsieur X. et du surplus de ses demandes à l'encontre de Madame Y. ;
CONDAMNE Madame Y. aux entiers dépens de l'instance ;
CONDAMNE in solidum la SA SPP et Madame Y. à payer à M. X. la somme de trois cent cinquante euros (350,00 euros) en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
CONDAMNE Madame Y. à payer à la SA SPP la somme de deux cent euros (200,00 euros) en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Ainsi jugé et prononcé en audience publique et après lecture la minute a été signée par le Juge et le greffier présent lors du prononcé.
Le Greffier Le Juge
- 5707 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Procédure - Recevabilité - Délai pour agir - Forclusion - Crédit à la consommation
- 6624 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Régime général - Obligations de l’emprunteur - Pénalités