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TI CAEN, 27 septembre 2005

Nature : Décision
Titre : TI CAEN, 27 septembre 2005
Pays : France
Juridiction : Caen (TI)
Demande : 11-04-001818
Décision : 05/1604
Date : 27/09/2005
Nature de la décision : Admission
Décision antérieure : CA CAEN (1re ch. sect. civ. com.), 24 mai 2007
Numéro de la décision : 1604
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3275

TI CAEN, 27 septembre 2005 : RG n° 11-04-001818 ; jugement n° 05/1604 

(sur appel CA Caen (1re ch. sect. civ.), 24 mai 2007 : RG n° 05/03269)

 

TRIBUNAL D’INSTANCE DE CAEN

JUGEMENT DU 27 SEPTEMBRE 2005

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11-04-001818. Jugement n° 05/1604.

 

DEMANDEUR :

SA SOFICARTE

dont le siège est situé [adresse], représentée par SERL SALMON & Associés, avocat au barreau de CAEN

 

ET :

DÉFENDEURS :

Monsieur X.

demeurant [adresse], représenté par Maître SALAMA Pascale, avocat au barreau de CAEN

Madame [Y. épouse] X.

demeurant [adresse], représentée par Maître LOYGUE Coralie, avocat au barreau de CAEN

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Amie KHATER, Juge placée au Tribunal d'Instance de CAEN par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de CAEN en date du 13 juillet 2005 et par ordonnance de Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de CAEN en date du 22 juillet 2005

Greffier présent lors de la mise à disposition : CÔME Karine

PROCÉDURE : Date de la première évocation : 4 janvier 2005

Date des débats : 23 juin 2005

Date de la mise à disposition : 27 septembre 2005

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Par acte sous seing privé en date du 23 octobre 1996, la SA SOFICARTE a consenti à M. X. en qualité d'« emprunteur » et Mme Y. épouse X., en qualité d'« emprunteur conjoint », une offre préalable d'ouverture de crédit utilisable par fractions, à taux d'intérêt variable selon le montant du crédit utilisé.

Malgré mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception délivrée le 20 février 2004, plusieurs échéances sont restées impayées.

Une ordonnance rendue le 5 octobre 2004 par le Président du Tribunal d'Instance de CAEN a enjoint à Mme Y. épouse X. et M. X. de payer solidairement à la SA SOFICARTE les sommes de :

- 4.669,55 euros avec intérêts au taux légal de 15,28 % l'an à compter du 4 septembre 2004 sur la somme de 4.092,68 euros,

- 120,00 euros au titre de la clause pénale,

- les entiers dépens, outre 4,57 euros au titre des frais accessoires.

M. X. a formé opposition contre cette ordonnance dans les délais prescrits par la loi.

 

Aux termes de ses dernières écritures, la SA SOFICARTE demande au tribunal de condamner solidairement les époux X., avec exécution provisoire :

- au paiement de la somme de 4.978,55 euros outre les intérêts au taux contractuel de 15,28 % l'an sur la somme de 4.612,17 euros à compter du 16 avril 2004 jusqu'à parfait paiement,

- aux entiers dépens, outre une somme de 550,00 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Elle fait notamment valoir qu'il était expressément indiqué que le découvert initialement autorisé pouvait être révisé à la hausse comme à la baisse ; que les relevés détaillés reçus par les époux X. informaient ces derniers très précisément chaque mois de la situation sans qu'ils élèvent la moindre contestation ; qu'en outre, les dispositions de l'article L. 311-9 du Code de la consommation ont été respectées, de sorte que ne saurait être prononcée la déchéance du droit aux intérêts de l'organisme de crédit.

[minute page 3]

M. X. a conclu au débouté de l'ensemble des prétentions de la SA SOFICARTE et subsidiairement demande au tribunal de :

- condamner Mme Y. épouse X. à le garantir de toutes ses condamnations,

- prononcer la déchéance du droit aux intérêts de la SA SOFICARTE,

- lui accorder des délais de paiement à hauteur de 150,00 euros par mois.

M. X. ne conteste pas avoir souscrit l'emprunt en cause suite à l'achat par les époux d'un appareil électroménager, dans le cadre d'un paiement échelonné, ce qui a permis à Mme Y. épouse X. d'utiliser la facilité de paiement en résultant et de solliciter l'augmentation de la réserve disponible, ce sans en informer son époux.

Il expose par ailleurs que l'organisme prêteur n'a pas respecté les dispositions des articles L. 311-8 et L. 311-9 du Code de la consommation qui lui imposaient de matérialiser les augmentations du découvert par une nouvelle offre préalable de crédit sous peine de se voir déchu du droit aux intérêts.

M. X. ajoute que le prêteur avait l'obligation de préciser trois mois avant l'échéance du contrat les conditions de reconduction, ce qui a été omis de sorte que pour ce motif également doit être prononcée la déchéance du droit aux intérêts de l'organisme de crédit.

Enfin, il sollicite l'annulation de l'indemnité légale réclamée dans la mesure où le contrat n'était pas valable.

En tout état de cause, il sollicite que soit mis à la charge de son épouse le remboursement du dit emprunt dans la mesure où il n'a nullement utilisé les sommes litigieuses mais seule Mme Y. épouse X. en a profité pour ses besoins personnels et non à des fins nécessaires à la famille.

 

Mme Y. épouse X. a demandé au tribunal de :

- débouter M. X. de ses demandes tendant à être mis hors de cause et subsidiairement à obtenir la garantie de son épouse pour toute condamnation intervenant à son encontre ;

- [minute page 4] statuer ce que de droit sur la demande de la SA SOFICARTE pour le paiement de la somme principale de 4.978,55 euros et dire, en cas de condamnation, que les époux X. devront être solidairement tenus au paiement ;

- lui accorder les plus larges délais de paiement ;

- dire n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile à son encontre, la présente instance étant due au refus injustifié de M. X. de continuer à régler le remboursement de ce crédit.

Mme Y. épouse X. soutient, contrairement aux allégations de son époux, que l'emprunt a été souscrit par les deux époux pour les besoins du ménage en rappelant l'historique des comptes de la famille.

Elle affirme que M. X. était parfaitement au courant des dépenses engagées qui, pour la plupart, étaient soit des dépenses pour les besoins du couple, soit pour les besoins personnels de son époux.

Elle fait observer que son époux s'est comporté comme un tyran domestique, ce qui permet de comprendre pourquoi il tente de faire supporter à son épouse seule les emprunts qu'ils ont contractés ensemble.

Mme Y. épouse X. produit une attestation comptable qui, selon elle, démontre que les dépenses financées par les multiples crédits souscrits par les époux, dont le crédit en cause, étaient des dépenses d'entretien de la famille.

Elle soutient que M. X., sur lequel repose la charge de la preuve, n'apporte aucun élément tendant à démontrer qu'elle aurait utilisé seule le crédit SOFICARTE à d'autres fins que les besoins du ménage.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIVATION :

Sur le montant des sommes dues à la SA SOFICARTE :

Selon les dispositions de l'article L. 311-30 du code de la consommation, en cas de défaillance de l'emprunteur, le capital restant dû et les intérêts restés impayés deviennent immédiatement exigibles et produisent intérêts au taux du contrat jusqu'à parfait paiement.

[minute page 5] Il résulte des pièces versées aux débats dont notamment

- l'offre de crédit non rétractée dans le délai légal et signée par les époux X.,

- l'historique de compte,

- la mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 20 février 2004,

- le décompte conforme aux dispositions de l'article L. 311-30 du code de la consommation,

que le montant des échéances impayées s'élève à la somme de 939,13 euros le montant du capital emprunté s'élève à 3.153,55 euros, y compris les intérêts et indemnités prélevées.

Toutefois, il convient de rappeler que l'article L. 311-9 du Code de la consommation limite à un an renouvelable la validité de la convention d'ouverture de crédit et prévoit que le prêteur doit indiquer, trois mois avant l'échéance, les conditions de reconduction du contrat.

En application de l'article 1315 du Code civil, il appartient au prêteur de rapporter la preuve de la réalité de cette information.

A défaut, il encourt la sanction de la déchéance du droit aux intérêts, sauf pour la première année du contrat, puisque le contrat reconduit à l'issue du délai d'une année devient irrégulier faute de nouvelle offre.

En l'espèce, la SA SOFICARTE n'a apporté aucun élément de preuve lui permettant d'échapper à la sanction prévue de la déchéance du droit aux intérêts et en particulier, ne produit pas les relevés de compte qu'elle invoque et qui, selon elle, démontrerait qu'elle a effectivement informé l'emprunteur des conditions de reconduction du contrat trois mois avant chaque échéance annuelle.

Il y aura donc lieu de déduire des sommes dues toutes celles qui ont été décomptées au titre des intérêts à compter du mois de novembre 1997.

Seront également déduits l'ensemble des indemnités prélevées sur le compte qui n'ont pas un caractère contractuel.

Ces intérêts et frais qu'il convient de déduire s'élèvent, à l'examen de l'historique de compte, à la somme de 2.340,55 euros.

[minute page 6] Concernant l'indemnité légale de 8 %, celle-ci doit s'analyser comme une clause pénale au sens des dispositions de l'article 1152 du Code civil, de sorte que le juge peut, même d'office, la réduire si elle est manifestement excessive.

En l'espèce, compte tenu du préjudice réellement subi par la demanderesse„ il apparaît que l'application de cette clause pénale serait manifestement excessive.

Cette indemnité sera donc réduite à 100,00 euros.

Au total, il sera donc dû la somme de 1.852,13 euros se décomposant comme suit :

- échéances impayées : capital                          939,13 euros

- emprunté hors échéances impayées :              + 3.153,55 euros

- déduction des intérêts et frais au-delà d'un an :          - 2.340,55 euros

- clause pénale réduite :                                               + 100,00 euros

1.852,13 euros

Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 20 février 2004, date de la mise en demeure.

 

Sur la solidarité de la dette à l'égard de la SA SOFICARTE :

M. X. et Mme Y. épouse X. s'opposent sur le point de déterminer si les sommes dues à la SA SOFICARTE doivent être mises à la charge de Mme Y. épouse X. seule ou à la charge des deux époux solidairement.

A cet égard, il convient de faire observer que l'offre préalable de crédit souscrite auprès de la SA SOFICARTE a été signée

- par M. X. en qualité d' « emprunteur »,

- et par Mme Y. épouse X. en qualité d' « emprunteur conjoint ».

Il est en outre clairement stipulé sous les signatures de l'emprunteur et de l'emprunteur conjoint « qu'en acceptant la présente offre préalable dont il reconnaît rester en possession d'un exemplaire doté d'un formulaire détachable de rétractation, l'emprunteur conjoint devient à l'égard du prêteur co-débiteur [minute page 7] solidaire de l'emprunteur pour toutes sommes qui pourront être dues à SOFICARTE au titre de la présente offre ».

Dès lors, c'est au titre des stipulations contractuelles acceptées par chacune des parties et qui leur tiennent lieu de loi, qu'en application des dispositions de l'article 1134 du Code civil doit être considérée comme solidaire l'obligation de rembourser les sommes dues à la SA SOFICARTE.

Il n'est dès lors nullement besoin de déterminer le caractère ménager ou non des dépenses engagées avec les sommes empruntées à SOFICARTE pour retenir que M. X. et Mme Y. épouse X. sont tenus solidairement au remboursement des sommes dues au titre du crédit SOFICARTE souscrit le 23 octobre 1996 et ce, en exécution du contrat.

Par conséquent, M. X. et Mme Y. épouse X. seront condamnés solidairement à payer à la SA SOFICARTE la somme de 1.852,13 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 février 2004.

 

Sur les délais de paiement :

En application des dispositions de l'article 1244-1 du Code civil, le Juge peut échelonner le paiement des sommes dues, ce en considération de la situation du débiteur et des besoins du créancier.

Compte tenu des éléments du dossier et des justificatifs produits, il y aura lieu d'accorder tant à M. X. qu'à Mme Y. épouse X. des délais de paiement sur ce fondement et selon les modalités fixées au dispositif de la présente décision.

 

Sur les autres demandes :

L'exécution provisoire, nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire, sera ordonnée.

Compte tenu de la solution apportée au litige, seuls M. X. et la SA SOFICARTE succombant à l'instance, ils supporteront chacun pour moitié les dépens de l'instance, en ceux compris le coût de la procédure d'injonction de payer.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Mme Y. épouse X. les frais irrépétibles qu'elle a dû engager dans [minute page 8] le cadre de la présente instance, ce qui justifie de condamner M. X. à lui payer la somme de 150,00 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire et en premier ressort,

CONDAMNE M. X. et Mme Y. épouse X. solidairement à payer à la SA SOFICARTE la somme de mille huit cent cinquante deux euros treize centimes (1.852,13 euros) avec intérêts au taux légal à compter du 20 février 2004 ;

AUTORISE Mme Y. épouse X. à s'acquitter du montant de cette dette par vingt-trois versements mensuels de cinquante euros (50,00 euros) à compter du 15 octobre 2005 et une vingt-quatrième mensualité pour le solde restant dû ;

AUTORISE M. X. à s'acquitter du montant de cette dette par vingt-trois versements mensuels de cinquante euros (50,00 euros) à compter du 15 octobre 2005 et une vingt-quatrième mensualité pour le solde restant dû ;

DIT qu'à défaut de paiement d'une seule échéance, la totalité de la somme restant due redeviendra immédiatement exigible ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

ORDONNE l'exécution provisoire de la présente décision ;

CONDAMNE M. X. et la SA SOFICARTE à supporter, chacun pour moitié, les dépens de la présente instance, en ceux compris ceux de la procédure d'injonction de payer ;

CONDAMNE M. X. à payer à Mme Y. épouse X. la somme de cent cinquante euros (150,00 euros) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Ainsi jugé et prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de ce tribunal et après lecture, la minute a été signée par le Juge et le greffier présent lors de la mise à disposition.