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CA AIX-EN-PROVENCE (11e ch. B), 8 septembre 2011

Nature : Décision
Titre : CA AIX-EN-PROVENCE (11e ch. B), 8 septembre 2011
Pays : France
Juridiction : Aix-en-provence (CA), 11e ch. B
Demande : 10/09574
Décision : 2011/430
Date : 8/09/2011
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 21/05/2010
Numéro de la décision : 430
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3294

CA AIX-EN-PROVENCE (11e ch. B), 8 septembre 2011 : RG n° 10/09574 ; arrêt n° 2011/430 

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « A l'appui de son appel, X. épouse Y. fait valoir en premier lieu, qu'est abusive, la clause contractuelle distinguant le découvert utile et le découvert maximum autorisé mais pour étayer ses allégations, se borne à faire état d'autres décisions judiciaires n'ayant aucun rapport avec l'espèce, sans expliquer en quoi, dans son cas, cette condition de la convention-type qu'elle a acceptée puis reconduite en signant l'avenant, aurait un caractère léonin et porterait atteinte à ses intérêts de consommateur. Son moyen ne peut donc prospérer. »

2/ « Il résulte de la fiche d'informations personnelles établie le 26 novembre 2002, que X. épouse Y. se disant secrétaire comptable de profession, a déclaré que ses revenus mensuels s'élevaient à 523 euros et que son époux Y., directeur d'un cabinet comptable, également signataire de l'acte, percevait 3.072 euros par mois, si bien que les revenus globaux du foyer s'élevant à 3.595 euros pour des charges de 1.269 euros, ils étaient proportionnés au crédit accordé par la SA LASER COFINOGA suivant l'offre préalable datée du 7 novembre 2002. En outre compte tenu de leur profession respective, l'emprunteuse et son conjoint étaient en mesure de comprendre sans difficulté l'étendue et les conséquences de leur engagement. […]

Mais, à la différence de l'offre initiale, la signature du conjoint de X. épouse Y. ne figure pas sur l'original de l'acte produit aux débats et la SA LASER COFINOGA n'a pas demandé à l'emprunteuse de lui fournir des justificatifs de ses revenus alors qu'au moment de ce nouveau contrat, la cliente dont le compte permanent présentait un dépassement chronique du découvert disponible, s'engageait seule et ses facultés financières antérieures pouvaient avoir subi une baisse significative. Ce faisant, la SA LASER COFINOGA a causé un préjudice à X. épouse Y. résultant de la perte de chance de ne pas s'engager dans un emprunt qu'elle n'était pas en mesure de rembourser, et a contribué à aggraver l'endettement déjà important de celle-ci : il convient de faire droit à la demande de dommages-intérêts présentée par l'appelante et de condamner l'établissement financier, sur le fondement de l’article 1147 du code civil, à lui verser une somme de 9.000 euros. »

 

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

ONZIÈME CHAMBRE B

ARRÊT DU 8 SEPTEMBRE 2011

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 10/09574. Arrêt n° 2011/430.  Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal d'Instance de TOULON en date du 29 avril 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 11-08-2635.

 

APPELANTE :

Madame X. épouse Y.,

demeurant [adresse], représentée par la SCP COHEN GUEDJ, avoués à la Cour, plaidant par Maître Bernard AZIZA, avocat au barreau de TOULON

 

INTIMÉE :

SA LASER COFINOGA,

agissant poursuites et diligences de son représentant légal, dont le siège social est sis [adresse], élisant domicile en son [...], représentée par la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avoués à la Cour, ayant Maître Catherine FONTAN, avocat au barreau de TOULON

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 24 mai 2011 en audience publique. Conformément à l’article 785 du Code de Procédure Civile, Mme BRENGARD, conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de : Madame Marie Chantal COUX, Président, Monsieur Michel JUNILLON, Conseiller, Madame Marie-Florence BRENGARD, Conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mademoiselle Patricia POGGI.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 8 septembre 2011.

ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 8 septembre 2011, Signé par Madame Marie Chantal COUX, Président et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le jugement contradictoire en 1er ressort rendu le 29 avril 2010 par le Tribunal d'Instance de TOULON ayant fait droit à la demande de la SA LASER COFINOGA et condamnant X. épouse Y. à payer la somme de 17.145,10 euros, outre celle de 600 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

Vu l'appel interjeté par X. épouse Y. le 21 mai 2010 ;

Vu les conclusions récapitulatives de l'appelante régularisées le 26 octobre 2010 ;

Vu les uniques conclusions de la SA LASER COFINOGA déposées le 4 octobre 2010 ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L'appel sera déclaré recevable, les parties ne discutant pas de sa régularité et aucun élément du dossier ne commandant de relever d'office la fin de non-recevoir tirée de l'inobservation du délai de recours ;

Suivant offre préalable en date du 7 novembre 2002 acceptée le 26 novembre 2002, la SA LASER COFINOGA a consenti à X. épouse Y., pour une année renouvelable, un crédit par découvert en compte d'un montant maximum autorisé de 12.500 euros, la fraction disponible du découvert choisie par l'emprunteuse étant de 3.000 euros.

A compter de février 2003 au 2 octobre 2005, le compte a fonctionné avec un débit dépassant la fraction disponible.

Par avenant signé le 2 octobre 2005, les parties ont porté à 21.500 euros le découvert maximal autorisé et à 9.800 euros, la fraction immédiatement disponible de ce découvert.

A partir du 1er novembre 2006 le montant de 9.800 euros a été constamment dépassé.

Suivant assignation du 8 octobre 2008, la SA LASER COFINOGA a donc attrait X. épouse Y. devant le tribunal d'instance de TOULON, pour avoir paiement de la somme principale de 17.252,40 euros, outre intérêts contractuels et il a été fait droit à ses prétentions par le jugement déféré.

 

Sur la clause abusive,

A l'appui de son appel, X. épouse Y. fait valoir en premier lieu, qu'est abusive, la clause contractuelle distinguant le découvert utile et le découvert maximum autorisé mais pour étayer ses allégations, se borne à faire état d'autres décisions judiciaires n'ayant aucun rapport avec l'espèce, sans expliquer en quoi, dans son cas, cette condition de la convention-type qu'elle a acceptée puis reconduite en signant l'avenant, aurait un caractère léonin et porterait atteinte à ses intérêts de consommateur.

Son moyen ne peut donc prospérer.

 

Sur la forclusion de l'action,

X. épouse Y. invoque en second lieu la forclusion de l'action de la SA LASER COFINOGA.

Le délai biennal prévu par l’article L. 311-37 du code de la consommation court, dans le cas d'une ouverture de crédit reconstituable et assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, à compter de la première échéance impayée non régularisée, et le dépassement du découvert maximum convenu doit être tenu pour une échéance impayée manifestant la défaillance de l'emprunteur.

En l'espèce l'offre préalable de crédit acceptée par X. épouse Y. le 26 novembre 2002 portait sur un découvert autorisé disponible de 3.000 euros et non sur la somme de 12.500 euros laquelle correspond au maximum du découvert pouvant être autorisé sur demande spécifique de l'emprunteur, sous réserve qu'il ne se trouve pas dans l'un des cas visés à l'article II-6 du contrat.

Il ressort du document intitulé « RECONSTITUTION DU COMPTE PERMANENT » que le découvert maximum autorisé de 3.000 euros a été continuellement dépassé sans être restauré à compter du mois de février 2003 : or, ce dépassement qui manifeste la défaillance de l'emprunteur constitue le point de départ du délai biennal de forclusion prévu à l’article L. 311-37 du code de la consommation.

La régularisation de la situation par l’avenant du 2 octobre 2005 qui a porté la fraction disponible au niveau du découvert effectif du compte, n'interdit pas à l'emprunteuse de se prévaloir de la forclusion déjà acquise depuis février 2005 pour la période précédant ce réaménagement.

Ainsi la SA LASER COFINOGA qui n'a fait assigner X. épouse Y. que par acte d'huissier du 8 octobre 2008 est forclose en son action en paiement concernant le montant du débit du compte qui, à la date du 2 octobre 2005 s'élevait à la somme de 8952,88 euros.

Il est cependant constant que la fraction disponible de 9.800 euros fixée par l'avenant pour un montant total du découvert autorisé de 21.500 euros n'a été dépassé qu'à compter du mois de novembre 2006 de sorte que la demande de la SA LASER COFINOGA est recevable pour les sommes réclamées sur le fondement dudit avenant.

 

Sur l'absence d'information annuelle,

Les pièces produites par la SA LASER COFINOGA démontrent que contrairement à ce que prétend X. épouse Y., elle a reçu une information suffisante aux dates de reconduite du contrat initial, par l'envoi de relevés d'opérations mentionnant expressément et de manière à attirer l'attention du consommateur, les conditions du renouvellement annuel de sorte que les critiques de l'appelante à cet égard sont également sans fondement.

Aucune faute de la SA LASER COFINOGA n'ayant donc été établie, X. épouse Y. sera en conséquence, déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

 

Sur la violation du devoir de mise en garde,

Selon l'appelante, la SA LASER COFINOGA a enfreint ses obligations de conseil et de mise en garde en lui accordant le crédit en cause sans vérifier ses capacités réelles d'endettement et sans la prévenir des risques liés à la signature d'un emprunt.

Il résulte de la fiche d'informations personnelles établie le 26 novembre 2002, que X. épouse Y. se disant secrétaire comptable de profession, a déclaré que ses revenus mensuels s'élevaient à 523 euros et que son époux Y., directeur d'un cabinet comptable, également signataire de l'acte, percevait 3.072 euros par mois, si bien que les revenus globaux du foyer s'élevant à 3.595 euros pour des charges de 1.269 euros, ils étaient proportionnés au crédit accordé par la SA LASER COFINOGA suivant l'offre préalable datée du 7 novembre 2002.

En outre compte tenu de leur profession respective, l'emprunteuse et son conjoint étaient en mesure de comprendre sans difficulté l'étendue et les conséquences de leur engagement.

De même, l'avenant signé le 2 octobre 2005 modifiant les conditions substantielles de l'offre initiale en augmentant à la fois le découvert maximum autorisé et la fraction disponible, devait être proposé sous la forme d'une offre préalable d'ouverture de crédit et c'est précisément ce qu'a fait la SA LASER COFINOGA se conformant ainsi aux dispositions de l’article L. 311-9 du code de la consommation.

Mais, à la différence de l'offre initiale, la signature du conjoint de X. épouse Y. ne figure pas sur l'original de l'acte produit aux débats et la SA LASER COFINOGA n'a pas demandé à l'emprunteuse de lui fournir des justificatifs de ses revenus alors qu'au moment de ce nouveau contrat, la cliente dont le compte permanent présentait un dépassement chronique du découvert disponible, s'engageait seule et ses facultés financières antérieures pouvaient avoir subi une baisse significative.

Lors de la signature de l'avenant en cause, la SA LASER COFINOGA a donc agi avec une légèreté blâmable en ne s'assurant pas que l'emprunteuse avait les revenus nécessaires pour faire face à ce nouvel endettement, et ainsi le découvert immédiatement disponible est passé de 3.000 euros à 9.800 euros sans que l'établissement financier n'ait daigné recueillir la moindre information sur la situation pécuniaire de sa cliente.

Ce faisant, la SA LASER COFINOGA a causé un préjudice à X. épouse Y. résultant de la perte de chance de ne pas s'engager dans un emprunt qu'elle n'était pas en mesure de rembourser, et a contribué à aggraver l'endettement déjà important de celle-ci : il convient de faire droit à la demande de dommages-intérêts présentée par l'appelante et de condamner l'établissement financier, sur le fondement de l’article 1147 du code civil, à lui verser une somme de 9.000 euros.

 

Sur la créance de la SA LASER COFINOGA,

Malgré la faute commise par la S.A.LASER COFINOGA, X. épouse Y. reste redevable des sommes qu'elle ne conteste pas avoir utilisées et non remboursées sur le fondement de l'avenant passé le 2 octobre 2005.

L'appelante n'a pourtant pas apuré sa dette lorsqu'elle a pris connaissance le 17 mars 2008, de la mise en demeure qui lui a été envoyée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 13 mars 2008 l'informant de ce que la déchéance du terme du contrat était prononcée par la SA LASER COFINOGA et que les sommes empruntées devenaient immédiatement exigibles.

L'établissement financier qui a été contraint d'assigner sa débitrice en justice pour obtenir le recouvrement de sa créance, justifie donc suffisamment sa demande en paiement pour les sommes dues au titre de l’avenant du 2 octobre 2005.

D'après l'historique du compte permanent, c'est n'est qu'à compter du mois de novembre 2006 que le solde des opérations a dépassé le découvert autorisé de 9.800 euros pour atteindre en février 2008 la somme de 16.887,55 euros dont il faut déduire la partie éteinte par la forclusion (8.952,88 en octobre 2005) soit une dette de 7.934,67 euros, à laquelle il y a lieu d'ajouter le capital à échoir à cette date, 1341,25 euros.

Le montant de la clause pénale de 8 % sur le capital à échoir n'ayant pas de caractère manifestement excessif eu égard aux sommes dues par X. épouse Y., il sera donc également adjoint la somme de 107,30 euros (8 % de 1341,25 euros).

La dette contractuelle de X. épouse Y. s'élève donc à 9.383,22 euros (7.934,67 +1341,25+107,30).

En conséquence statuant après réformation du jugement, la Cour condamnera X. épouse Y. à payer la S.A.LASER COFINOGA la somme de 9.383,22 euros outre intérêts contractuels au taux annuel de 18,36 % sur la somme de 9.275,92 euros, depuis la mise en demeure réceptionnée le 17 mars 2008 et jusqu'à parfait paiement.

Les demandes présentées de part et d'autre au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile seront rejetées.

Il sera fait masse des dépens qui seront supportés pour moitié par chaque partie.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

La Cour statuant par mise à disposition au greffe, publiquement et contradictoirement

Reçoit l'appel,

Réformant la décision déférée et statuant à nouveau,

Condamne X. épouse Y. à payer à la S.A.LASER COFINOGA, la somme de 9.383,22 euros outre intérêts contractuels au taux annuel de 18,36 % sur la somme de 9.275,92 euros, depuis la mise en demeure réceptionnée le 17 mars 2008 et jusqu'à parfait paiement,

Condamne la SA LASER COFINOGA à payer à X. épouse Y. la somme de 9.000 euros à titre de dommages-intérêts,

Déboute les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires y compris celles portant sur les frais irrépétibles,

Fait masse des dépens qui seront supportés pour moitié par chacune des parties, les dépens d'appel pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER         LE PRÉSIDENT