TGI BAR-LE-DUC (1re ch. civ.), 7 avril 2005
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 330
TGI BAR-LE-DUC (1re ch. civ.), 7 avril 2005 : RG n° 04/00335 ; jugement n° 114/04
(sur appel CA Nancy (1re ch. civ.), 17 avril 2007 : RG n° 05/01418 ; arrêt n° 872/07)
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BAR-LE-DUC
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT DU 7 AVRIL 2005
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 04/00335. Jugement n° 114/05.
PARTIES :
DEMANDEURS :
- Monsieur X.
né le [date], demeurant [adresse]
- Madame Y. épouse X.
née le [date], demeurant [adresse]
représentés par Maître Eric GUILLAUME, avocat au barreau de la MEUSE
DÉFENDERESSE :
Société AXA FRANCE VIE
dont le siège est [adresse], représentée par Maître Gérard LEGRAND, avocat au barreau de la MEUSE
COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
PRÉSIDENT : Bertrand MENAY
ASSESSEURS : Alicia VIVIER - Gwen KEROMNES
GREFFIER : Elisabeth CANUS
[minute page 2] Clôture prononcée le : 9 février 2005
DÉBATS : tenus à l'audience publique du : 24 février 2005.
Date de délibéré indiquée par le Président : 24 mars 2005 prorogé au 7 avril 2005
La cause a été débattue en audience publique devant Monsieur Bertrand MENAY, Juge Rapporteur, tenant seul l'audience sans opposition des avocats. Au cours du délibéré, Monsieur MENAY, Juge Rapporteur, a rendu compte au Tribunal des plaidoiries entendues à l'audience.
JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, prononcé publiquement et signé par le Président et le Greffier.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Suivant acte d'huissier en date du 21 avril 2004, Monsieur et Madame X. ont fait assigner la société AXA FRANCE VIE afin d'obtenir l'annulation de contrats d'assurance vie intitulés « formule autonomie » souscrits les 14 et 16 octobre 2002.
Ils indiquent que leur consentement a été vicié dans cette opération de modification de placements effectués auprès de la société UAP, absorbée par AXA.
Ainsi, ils indiquent n'avoir rien compris aux explications de l'agent qui les a démarchés et précisent que les nouveaux placements n'avaient pas les qualités qu'ils en attendaient et que possédaient les anciens. Ils croyaient, notamment, que les fonds étaient disponibles et les placements défiscalisés.
En outre, ils expliquent n'avoir reçu aucun formulaire de rétractation alors que l'opération a fait l'objet d'un démarchage à domicile.
Ils souhaitent donc obtenir le remboursement des sommes de 38.742 euros à Monsieur et 69.099 euros à Madame avec intérêts au taux de 4,50 %, avec une capitalisation annuelle, outre 3.000 euros au titre du préjudice moral, 3.000 euros au titre du préjudice financier et 2.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Ils demandent enfin le prononcé de l'exécution provisoire de la décision.
La société AXA FRANCE VIE réplique que le vice du consentement n'est nullement démontré.
Elle rappelle qu'une première souscription est intervenue, réalisée par chacun des époux, convenablement informé et destinataire des conditions du contrat quant à son fonctionnement, aux frais générés et aux modalités de rétractation.
[minute page 3] Elle souligne que cette souscription a été complétée quelques mois plus tard par un versement complémentaire et que les contrats ont fait l'objet de rachats partiels programmés trimestriellement.
Elle en déduit que les époux X. étaient parfaitement informés du fonctionnement des contrats et ne sauraient aujourd'hui les remettre en cause.
Elle conclut donc au débouté et à l'octroi de 2.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 9 février 2005.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DES MOTIFS :
Il résulte des explications des parties et des pièces versées aux débats que le 14 octobre 2002, Madame X., âgée de 70 ans, souscrivait une adhésion à un placement AXA « formule autonomie - Option Vie » pour un montant de 17.454,00 francs, dont à déduire les frais de dossier et d'adhésion.
Cette souscription se faisait par le ré-emploi de titres arrivant à échéance le 1er novembre 2002.
Le 16 octobre 2002, Monsieur X., âgé de 73 ans, souscrivait une adhésion à un placement AXA « formule autonomie - Option Vie » pour un montant de 15.196,00 francs, dont à déduire les frais de dossier et d'adhésion.
Cette souscription se faisait par le ré-emploi d'un contrat intitulé « Cadentiel » dont le rachat total était sollicité le même jour auprès de la même compagnie.
Le 13 janvier 2003, Monsieur et Madame X. effectuaient, chacun pour leur contrat, un versement complémentaire en ré-emploi de contrats.
Le 5 mai 2003, ils demandaient l'un et l'autre à bénéficier d'un rachat partiel, à concurrence de 740 euros par trimestre, qui donnaient lieu à l'établissement d'avenants aux contrats.
Enfin, par lettre du 15 octobre 2003, Monsieur et Madame X. faisaient valoir leur réclamation auprès de la société AXA en expliquant qu'en aucun cas ils n'avaient voulu souscrire de nouveaux contrats, mais au contraire, récupérer leurs fonds, en pensant que les documents que l'employé d'AXA leur faisait signer avaient cet objet.
[minute page 4] L'article 1109 du code civil invoqué par les époux X. à l'appui de leur contestation dispose que « il n'y a point de consentement valable, si le consentement n'a été donné que par erreur, ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol. »
Les époux X. ne situant nullement le vice de leur consentement sur le terrain de la violence, il convient d'envisager les notions d'erreur et de dol.
L'article 1110 du même code précise que « l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet. »
L'article 1116 du même code ajoute pour sa part que « le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté Il ne se présume pas, et doit être prouvé. »
En évoquant tout à la fois les qualités substantielles des contrats qu'ils ont signés, s'agissant notamment de la liquidité des fonds, du régime fiscal du placement, et l'habileté du démarcheur, agent de la compagnie, ou la transmission d'information erronée, notamment quant à l'arrivée à échéance des anciens placements, les époux X. situent donc leur action sur l'information ou le défaut d'information reçue en estimant avoir été victimes d'un dol.
Toutefois si leur âge avancé et respectable ainsi que l'objective complexité des produits financiers proposés les conduisent nécessairement à faire confiance au vendeur, ils n'établissent en rien que cette confiance ait été trompée.
En effet aucune de leur pièce ne permet de conforter leurs affirmations sur l'existence d'un manque d'information qui pourrait le cas échéant constituer la réticence dolosive, ou sur l'existence d'informations fallacieuses, qui pourraient constituer le cas échéant le mensonge formant le dol.
Les documents contractuels versés au dossier apparaissent parfaitement normaux et conformes aux exigences légales. Ils ont reçu la signature des intéressés qui reconnaissaient encore avoir été destinataires d'un double du contrat d'adhésion ainsi que des conditions générales se rapportant au contrat souscrit.
Enfin, les conditions générales reprennent effectivement, comme le soutient la compagnie AXA FRANCE VIE, page 12 chapitre 10-5, un modèle de lettre permettant d'opérer une rétractation de son engagement dans le mois de la signature.
Par ailleurs, il convient de noter leur silence pendant plusieurs mois avant finalement de réclamer un an après la souscription suite à l'intervention de leur fils.
Le tribunal note enfin que les demandeurs ne font l'objet d'aucune mesure de protection et disposent de toutes leurs facultés. Ceci leur permettait donc de comprendre la portée de l'acte qu'ils signaient et de solliciter tous les renseignements complémentaires de la compagnie AXA, de leur fils ou de toute autre personne compétente, si ce n'est avant de signer, à tout le moins dans le délai de rétractation.
[minute page 5] II ressort donc de ce qui précède que les époux X. ont bénéficié d'une information complète et loyale avant et au moment de s'engager.
Ils seront par conséquent déboutés de l'ensemble de leurs demandes.
Il serait inéquitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au profit de la défenderesse à hauteur de 1.000 euros.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort,
- DÉBOUTE Monsieur et Madame X. de l'ensemble de leurs prétentions ;
- les CONDAMNE à payer à la société AXA FRANCE VIE la somme de mille euros (1.000 euros) au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
- les CONDAMNE aux dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître Monique LEGRAND selon les formes de l'article 699 du nouveau code de procédure civile ;
Ainsi jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et nous avons signé avec le Greffier.
Le Président Le Greffier