CA Aix-en-Provence (11e ch. A), 11 septembre 2009
CERCLAB - DOCUMENT N° 3389
CA AIX-EN-PROVENCE (11e ch. sect. A), 11 septembre 2009 : RG n° 07/05698 ; arrêt n° 2009/485
Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2009-022702
Extraits : 1/ « Attendu que pour rejeter cette demande le premier juge, soulevant d'office ces moyens, a retenu que la clause imposant un préavis de six mois avant résiliation était abusive, en application de l'article L. 132-1 du code de la consommation, que l'indemnité due en cas de rupture anticipée constituait une clause pénale susceptible de réduction et que Mme X. était fondée à solliciter le rachat du matériel ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'acquisition d'un matériel informatique a un rapport direct avec l'activité professionnelle de médecin libéral exercée par Mme X., de sorte que les dispositions du code de la consommation relatives aux clauses abusives ne sont pas applicables à ce contrat ».
2/ « Attendu que Mme X. […] expose que les conditions particulières stipulent une durée initiale de 36 mois et que seules les conditions générales, écrites en « caractères microscopiques », […] ; Mais attendu que [… ; qu'aux termes de ces conditions, qui sont écrites en caractères lisibles et qui constituent la loi des parties, […] ».
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
ONZIÈME CHAMBRE SECTION A
ARRÊT DU 11 SEPTEMBRE 2009
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 07/05698. Arrêt n° 2009/485. ARRÊT AU FOND. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal d'Instance de MARTIGUES en date du 6 juin 2006 enregistré au répertoire général sous le n° 06/409.
APPELANTE :
Société LEASECOM,
agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, demeurant [adresse], représentée par la SCP BOTTAI-GEREUX-BOULAN, avoués à la Cour, Ayant pour avocat Maître Laurent CAUWEL, du barreau de PARIS
INTIMÉE :
Madame X. épouse Y.
née le [date] à [ville], demeurant [adresse], représentée par la SCP DE SAINT FERREOL-TOUBOUL, avoués à la Cour, Assistée de la SCP CAMPOCASSO S. - LAMBREY E., avocats au barreau d'AIX EN PROVENCE
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 3 juin 2009 en audience publique. Conformément à l’article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Robert PARNEIX, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de : Monsieur Robert PARNEIX, Président, Madame Danielle VEYRE, Conseiller, Madame Michèle RAJBAUT, Conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Mireille LESFRITH.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 septembre 2009.
ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 septembre 2009, Signé par Monsieur Robert PARNEIX, Président et Madame Mireille LESFRITH, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu le jugement rendu le 6 juin 2006 par le tribunal d'instance de Martigues qui a débouté la société Leasecom de ses demandes en paiement et ordonné la restitution du matériel loué à charge pour la société Leasecom de le récupérer au domicile de Mme X. ;
Vu l'appel formé par la société Leasecom le 2 avril 2007 ;
Vu les conclusions déposées le 6 février 2009 par l'appelante qui demande à la cour de réformer le jugement, de condamner Mme X. à lui payer 3.358,56 euros au titre des loyers impayés du 1er juin 2003 au 31 mai 2005, outre intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2005, 6.367,27 euros au titre des indemnités d'utilisation du 1er juin 2005 au 31 juillet 2007 et 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et d'ordonner la restitution sous astreinte du matériel ;
Vu les conclusions déposées le 24 février 2009 par Mme X., intimée, qui sollicite la confirmation du jugement, sauf en ce qu'il a laissé les dépens à sa charge et sauf à préciser que la restitution du matériel à la société Leasecom devra se faire sur autorisation écrite de la société BNP Paribas Lease Group ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR QUOI :
1) Sur les moyens relevés d'office par le tribunal :
Attendu que, selon contrat signé le 16 mai 2001 avec effet au 1er juin 2001, Mme X., médecin, a loué à la société Leasecom un équipement informatique moyennant un loyer mensuel de 1.535 euros hors taxes et pour une durée de 3 ans renouvelable ; qu'elle a dénoncé son engagement par lettre recommandée avec avis de réception du 29 janvier 2004 adressée à la société BNP Paribas Lease Group (la BNP), cessionnaire du matériel et du contrat ; que la société Leasecom, estimant cette résiliation tardive, a sollicité le paiement des loyers exigibles jusqu'au terme du contrat, soit le 31 mai 2005, et une indemnité d'utilisation du matériel au-delà de cette date ;
Attendu que pour rejeter cette demande le premier juge, soulevant d'office ces moyens, a retenu que la clause imposant un préavis de six mois avant résiliation était abusive, en application de l'article L. 132-1 du code de la consommation, que l'indemnité due en cas de rupture anticipée constituait une clause pénale susceptible de réduction et que Mme X. était fondée à solliciter le rachat du matériel ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'acquisition d'un matériel informatique a un rapport direct avec l'activité professionnelle de médecin libéral exercée par Mme X., de sorte que les dispositions du code de la consommation relatives aux clauses abusives ne sont pas applicables à ce contrat ;
Attendu, en second lieu, que le paiement des loyers jusqu'à l'expiration du contrat constitue la contrepartie de l'utilisation du matériel loué et ne s'analyse pas en une clause pénale ;
Attendu, enfin, que l'article 7 du contrat prévoit une faculté de cession du matériel au profit d'un tiers et non une faculté de rachat au bénéfice du locataire en fin de location ;
Attendu en conséquence que le jugement entrepris sera réformé ;
2) Sur la résiliation :
Attendu que Mme X. a adressé à la BNP une lettre recommandée avec avis de réception, datée du 29 janvier 2004, précisant notamment : « Je désire interrompre la location et vous demande la valeur de rachat » ; qu'elle expose que les conditions particulières stipulent une durée initiale de 36 mois et que seules les conditions générales, écrites en « caractères microscopiques », prévoient une reconduction tacite pour une durée de 12 mois à l'issue de la « durée irrévocable » sauf « si le locataire notifie au bailleur par écrit, au moins six mois avant le terme de la location, sa décision de ne pas poursuivre ladite location » ; qu'elle soutient qu'en raison de l'ambiguïté de ces clauses, sa lettre de résiliation doit être considérée comme valable et que le contrat a pris fin le 31 mai 2004 ;
Mais attendu que l'expression « durée initiale » implique une possibilité de reconduction de la location et doit s'interpréter à la lumière des conditions générales organisant les modalités de la poursuite et de la résiliation du contrat ; qu'aux termes de ces conditions, qui sont écrites en caractères lisibles et qui constituent la loi des parties, Mme X. devait adresser sa lettre de résiliation avant le 30 novembre 2003 ; qu'il s'ensuit que sa dénonciation du 29 janvier 2004 est tardive et que le contrat a été poursuivi jusqu'au 31 mai 2005 ;
Attendu que Mme X. soutient encore que, par suite de la cession du matériel et du contrat à la BNP, la société Leasecom n'a plus qualité pour agir en paiement des loyers ;
Mais attendu que la société Leasecom justifie par une facture du 3 mai 2004 (pièce n° 12) qu'elle a racheté le matériel à l'issue de la période irrévocable de location, conformément à la faculté offerte par l'article 11 des conditions générales ; qu'elle a donc qualité pour exiger le paiement des loyers impayés du 1er juin 2004 (et non 2003) au 31 mai 2005 qui s'élèvent à la somme non contestée de 3 358,36 euros (279,88 x 12) ;
Attendu que le jugement, qui a débouté la société Leasecom de sa demande en paiement, sera réformé ;
3) Sur l'indemnité d'utilisation :
Attendu que l'article 12 alinéa 2 des conditions générales est ainsi libellé : « Si le locataire ne restitue pas le matériel à l'expiration du contrat, il est redevable d'une indemnité égale aux loyers conventionnels jusqu'à la restitution du matériel » ;
Attendu que Mme X. soutient quelle n'a pu rendre le matériel loué, faute d'indication par le bailleur du numéro de restitution et faute d'autorisation écrite de la BNP, cessionnaire, de le remettre à la société Leasecom ;
Attendu, sur le premier point, que l'absence du numéro de restitution ne rendait pas impossible le retour du matériel et, sur le second point, que la société Leasecom, qui a racheté le matériel, est fondée à en solliciter la restitution sans l'autorisation de la BNP, les dispositions de l'article 7 alinéa 5 invoquées par l'intimée n'ayant plus vocation à s'appliquer ;
Mais attendu que l'article 12 alinéa 2 précité, qui prévoit la sanction applicable au locataire et l'indemnité accordée au bailleur en cas de retard dans la restitution du matériel, constitue une clause pénale laquelle, en application de l’article 1152 du code civil, peut être modérée même d'office par le juge si elle est manifestement excessive ;
Attendu, en l'espèce, que la somme réclamée à Mme X. (6.367,27 euros au 31 juillet 2007) apparaît manifestement excessive eu égard à la valeur du matériel qui était de 113,38 euros en mai 2004 et qui doit être entièrement amortie à ce jour ; que la résistance de Mme X. à restituer le matériel, en dépit des mises en demeure adressées par la société Leasecom les 11 mai, 27 juin et 15 septembre 2005, sera suffisamment sanctionnée par l'allocation d'une indemnité de 500 euros ; que l'indemnité d'utilisation sera réduite à ce montant ;
4) Sur la restitution du matériel :
Attendu qu'en application de l'article 12 du contrat, le matériel devra être restitué par Mme X. à ses frais et non enlevé à son domicile aux frais de la société Leasecom, comme l'a prescrit le jugement qui sera encore réformé de ce chef ;
Attendu que la société Leasecom justifiant de sa qualité de propriétaire, il n'y a pas lieu de subordonner cette restitution, ainsi que le réclame Mme X., à une autorisation de la BNP ;
Et attendu qu'il y a lieu de prononcer une astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard passé un délai de 30 jours à compter de la signification du présent arrêt, et ce pendant 30 jours, afin d'assurer son exécution et de mettre un terme au présent litige ;
5) Sur les demandes accessoires :
Attendu qu'il n'est pas justifié de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Et attendu que la partie perdante est condamnée aux dépens ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau ;
Condamne Mme X. à payer à la société Leasecom la somme de 3.358,56 euros au titre des loyers impayés du 1er juin 2004 au 31 mai 2005, outre intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2005, date de la mise en demeure et la somme de 500 euros au titre de l'indemnité d'occupation outre intérêts au taux légal à compter de ce jour ;
Ordonne la restitution par Mme X. du matériel loué dans un délai de 30 jours suivant la signification du présent arrêt sous peine, passé ce délai, d'une astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard pendant 30 jours ;
Déboute la société Leasecom du surplus de sa demande ;
Déboute les parties de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme X. aux dépens qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile ;
Et le président a signé avec la greffière.
La greffière Le Président