CA COLMAR (3e ch. civ. A), 16 janvier 2012
CERCLAB - DOCUMENT N° 3554
CA COLMAR (3e ch. civ. A), 16 janvier 2012 : RG n° 10/06147 ; arrêt n° 12/0038
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Attendu qu'il résulte du bulletin d'inscription que « les frais de scolarité sont dus pour le cours complet même en cas d'interruption pour quelque cause que ce soit sauf cas de force majeure dûment reconnue. » ; que cette clause permettant l'interruption du versement des frais de scolarité en cas de force majeure répond aux exigences du code de la consommation notamment celles relatives aux clauses abusives, dès lors qu'elles ne procure pas à l'établissement scolaire un avantage excessif ».
2/ « qu'ainsi, il n'est pas établi que Mlle L. Y. ait été réellement allergique aux produits utilisés au sein de l'établissement d'enseignement, et que cet événement isolé ait constitué un empêchement insurmontable l'obligeant à interrompre immédiatement sa formation ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE COLMAR
TROISIÈME CHAMBRE CIVILE - SECTION A
ARRÊT DU 16 JANVIER 2012
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 3 A 10/06147. Arrêt n° 12/0038. Décision déférée à la cour : jugement rendu le 7 octobre 2010 par le tribunal d'instance de HAGUENAU
APPELANTE :
Madame Y. épouse X.
demeurant [adresse], Représentée par Maître Nathalie TELLOUCK (avocat au barreau de STRASBOURG) (bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2010/XXX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de COLMAR)
INTIMÉE :
SARL ECOLE PRIVEE DES CARRIERES DE LA MODE
ayant son siège social [adresse], Représentée par Maître Eric WEBER (avocat au barreau de STRASBOURG)
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 novembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme SCHNEIDER, conseiller, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Mme RASTEGAR, président de chambre, Mme SCHNEIDER, conseiller, M. JOBERT, conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : M. UTTARD
ARRÊT : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Mme F. RASTEGAR, président et M. Christian UTTARD, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu le rapport ;
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le 7 mai 2008, Mme X. a inscrit sa fille L. à un cycle de formation de 2 ans dispensé par la SARL Ecole Privée des Carrières de la Mode, prévoyant le paiement de 20 mensualités de 260 euros de septembre 2008 à avril 2010.
En réponse à une mise en demeure du 8 février 2009 faisant état des échéances impayées de janvier et février 2009, Mme X. a entendu résilier le contrat d'enseignement en faisant valoir que sa fille L. avait fait une allergie aux produits de beauté utilisés dans l'établissement et en produisant le certificat de son médecin traitant indiquant qu'elle « ne pouvait plus suivre ses cours dans l'école d'esthétique pour raisons médicales ».
La SARL Ecole Privée des Carrières de la Mode a requis et obtenu le 2 septembre 2009 une ordonnance d'injonction de payer enjoignant à Mme X. de lui payer la somme de 4.160 euros solde restant dû au titre du contrat souscrit.
Mme X. a formé opposition à cette ordonnance mais n'a pas comparu devant le tribunal d'instance de Haguenau.
Par jugement réputé contradictoire du 7 octobre 2010, le tribunal d'instance de Haguenau a condamné Mme X. à payer à la SARL Ecole Privée des Carrières de la Mode la somme de 4.160 euros avec intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2009.
Mme X. a régulièrement interjeté appel de ce jugement.
Vu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions de l'appelante Mme X. reçues au greffe le 20 juin 2011 tendant à l'infirmation du jugement déféré, à ce que la cour dise et juge que l'allergie subie suite à l'utilisation des produits fournis par l'EPCM constitue un cas de force majeure, dise et juge bien fondée la demande de résiliation du 12 février 2009, au besoin ordonne la résiliation du contrat d'apprentissage à compter du 25 décembre 2008 et condamne la SARL Ecole Privée des Carrières de la Mode au paiement d'une somme de 1.500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les conclusions de l'intimée la SARL Ecole Privée des Carrières de la Mode reçues au greffe le 14 avril 2011 tendant à la confirmation du jugement déféré et à l'allocation d'une somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les pièces de la procédure ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu qu'au soutien de son appel, Mme X. se prévaut d'un cas de force majeure ayant empêché sa fille L. de suivre l'enseignement à raison de l'allergie qu'elle a développée du fait de l'utilisation des produits de beauté fournis par la SARL Ecole Privée des Carrières de la Mode ;
qu'elle affirme que la preuve de cette allergie et de l'absence de tout antécédent médical est rapportée par les certificats médicaux, et que l'établissement d'enseignement n'a proposé aucune solution à l'élève.
Attendu qu'il résulte du bulletin d'inscription que « les frais de scolarité sont dus pour le cours complet même en cas d'interruption pour quelque cause que ce soit sauf cas de force majeure dûment reconnue. » ;
que cette clause permettant l'interruption du versement des frais de scolarité en cas de force majeure répond aux exigences du code de la consommation notamment celles relatives aux clauses abusives, dès lors qu'elles ne procure pas à l'établissement scolaire un avantage excessif ;
qu'il convient ainsi de déterminer si Mme X. justifie d'un cas de force majeure ayant empêché sa fille L. de poursuivre sa scolarité ;
que selon la jurisprudence (Cour de cassation, 1ère chambre civile du 10 février 1998 : pourvoi n° 96-13.316) « c'est justement qu'une cour d'appel qui constate qu'à raison de sa maladie, un élève qui avait conclu avec une école un contrat de formation n'avait pu suivre l'enseignement, considère que cette maladie irrésistible constitue un événement de force majeure bien que n'étant pas extérieur à cet élève » ;
qu'ainsi, l'événement constituant un cas de force majeure doit être irrésistible et insurmontable empêchant la poursuite de la scolarité, sans qu'il soit nécessaire de caractériser un événement « extérieur » à l'élève.
Attendu que pour justifier d'un événement de force majeure, Mme X. produit un certificat de son médecin traitant du 12 février 2009 indiquant que Mlle L. Y. ne pouvait plus poursuivre ses cours « pour raisons médicales » ainsi qu'un second certificat du 10 octobre 2008 établi par le Dr A., médecin au Centre Hospitalier de Haguenau indiquant que Mlle L. Y. présentait le 29 septembre 2008 vers 19 heures un angio-oedème du visage, des paupières et du haut du décolleté ayant pu être traité en moins de 24 heures par antihistaminique, et que cet épisode a eu lieu après qu'elle ait appliqué sur son visage les produits cosmétiques délivrés par l'école d'esthétique ;
que ce certificat précisait en outre que Mlle L. Y. n'avait pas d'antécédent connu d'allergie, et qu'il avait été demandé au responsable de la formation la composition des produit appliqués.
Attendu que le premier certificat est purement affirmatif et ne démontre en rien l'impossibilité de poursuivre l'enseignement ;
que le second certificat fait état d'un épisode allergique unique présenté le 29 septembre 2008 mais ne permet pas d'établir un lien de causalité certain entre cet événement et les produits cosmétiques appliqués ;
que surtout, il résulte du courrier de M. Y. du 12 février 2009 qu'après cet épisode allergique survenu le 29 septembre 2008, l'élève L. a poursuivi normalement sa formation jusqu'au 24 décembre 2008 sans qu'aucun incident médical ne soit signalé ;
que Mme X. ne justifie pas davantage s'être rapprochée de l'établissement de formation pour remédier à une quelconque difficulté qui aurait pu subsister au-delà du 24 décembre 2008, et qu'en définitive, elle ne justifie avoir informé la SARL Ecole Privée des Carrières de la Mode de l'incident survenu le 29 septembre 2008 que par courrier du 12 février 2009 en réponse à la mise en demeure qui lui était adressée ;
qu'ainsi, il n'est pas établi que Mlle L. Y. ait été réellement allergique aux produits utilisés au sein de l'établissement d'enseignement, et que cet événement isolé ait constitué un empêchement insurmontable l'obligeant à interrompre immédiatement sa formation ;
que le jugement déféré doit être confirmé.
Attendu qu'il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais exposés et non compris dans les dépens ;
qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
DÉCLARE l'appel recevable ;
Au fond le DIT mal fondé et le rejette ;
CONFIRME le jugement déféré ;
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme X. aux dépens d'appel.
Le greffier Le président