CA PAU (1re ch.), 3 avril 2012
CERCLAB - DOCUMENT N° 3771
CA PAU (1re ch.), 3 avril 2012 : RG n° 10/04064 ; arrêt n° 12/1554
Publication : Jurica
Extrait : « […] - que dans ses écritures (page 4) la SA Gérance Générale Foncière indique qu'EDF ayant été contrainte de se séparer du patrimoine immobilier non affecté à la production d'électricité, les immeubles à usage d'habitation ont fait l'objet d'apports d'actifs à la société Gérance Générale Foncière dont l'activité a été de faire procéder à la vente de ce patrimoine et que la vente litigieuse est intervenue dans ce cadre.
Il résulte de ces constatations que la SA Gérance Générale Foncière exerce, conformément à son objet social statutaire et à titre principal et habituel, une activité dont le spectre balaie de manière exhaustive la totalité des opérations immobilières et qu'elle doit être qualifiée de professionnel de l'immobilier, la circonstance qu'elle a délégué à un tiers, dans le cadre d'un contrat de prestation de services, la préparation matérielle et juridique des cessions des logements vacants, demeurant sans incidence dans la mesure où elle relève d'un choix purement interne de gestion et d'organisation de ses services.
Il convient dès lors de faire application de la clause même de l'acte authentique précitée stipulant que le vendeur ne pourra se retrancher derrière les clauses d'exonération de garantie (dont la clause d'exclusion de garantie de contenance) envers l'acquéreur s'il venait à être considéré comme un professionnel de l'immobilier.
Il échet par ailleurs d'observer que la circonstance que les époux Y. sont eux-mêmes associés de diverses sociétés civiles immobilières et, pour l'époux, également gérant d'une société de marchands de biens doit demeurer sans incidence dès lors : - d'une part, qu'il n'est produit aucun élément permettant de qualifier M. X., coacquéreur indivis des époux Y., de professionnel de l'immobilier, - d'autre part, qu'il est expressément stipulé en page 2 de l'acte authentique qu'en vertu des dispositions de l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation, les biens étant destinés à l'habitation et l'acquéreur étant un non-professionnel de l'immobilier, ce dernier bénéficiait de la faculté de se rétracter, qu'il n'a pas exercé. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PAU
PREMIÈRE CHAMBRE
ARRÊT DU 3 AVRIL 2012
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 10/04064. Arrêt n° 12/1554. Nature affaire : Demande en garantie des vices cachés ou tendant à faire sanctionner un défaut de conformité.
ARRÊT : prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 3 avril 2012, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
APRÈS DÉBATS à l'audience publique tenue le 22 novembre 2011, devant : Monsieur CASTAGNE, Conseiller, faisant fonction de Président, chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Monsieur AUGEY, Conseiller, Madame BENEIX, Conseiller, assistés de Madame PEYRON, Greffier, présente à l'appel des causes.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi. Le Ministère Public a eu connaissance de la procédure le 16 mars 2011.
Dans l'affaire opposant :
APPELANTS :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], de nationalité française
Monsieur Y.
né le [date] à [ville], de nationalité portugaise
Madame Z. épouse Y.
née le [date] à [ville], de nationalité française
représentés par la SCP L. - L.-D. - M., avoués à la Cour, assistés de Maître D., avocat au barreau de BAYONNE
INTIMÉS :
SA GÉRANCE GÉNÉRALE FONCIÈRE
agissant poursuites et diligences en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, représentée par la SCP DE G. - D. - L., avoués à la Cour, assistée de Maître B., avocat au barreau de PARIS
SCP A. B. C.
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social
Monsieur A.
représentés par la SCP P. - L.-C., avoués à la Cour, assistés de la SCP K., avocats au barreau de PARIS
sur appel de la décision en date du 13 SEPTEMBRE 2010 rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BAYONNE
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu l'acte d'huissier de justice du 29 janvier 2009 par lequel M. X. et les époux Y. et Madame Z. ont, sur le fondement de l'article 1619 du code civil, fait assigner la SA Gérance Générale Foncière en paiement de la somme de 122.000 euros à titre de diminution, pour déficit de superficie de plus d'un vingtième, du prix de vente d'un bien immobilier constitué par un immeuble d'habitation formant le lot n° 2 du [adresse].
Vu l'acte d'huissier de justice du 11 septembre 2009 par lequel la SA Gérance Générale Foncière a fait appeler en garantie la SCP notariale A. B. C.,
Vu le jugement du 13 septembre 2010 par lequel le tribunal de grande instance de Bayonne a :
- dit que la clause d'exonération de garantie concernant la superficie du bien contenue dans l'acte de vente doit recevoir application,
- débouté les consorts X. - Y. de leurs demandes,
- mis hors de cause la SCP notariale,
- condamné les consorts X. - Y. aux dépens.
Vu la déclaration d'appel régularisée le 18 octobre 2010 par les consorts X. - Y.,
Vu les conclusions des parties,
Vu l'avis du ministère public, indiquant s'en rapporter, par mention au dossier en date du 16 mars 2011,
Vu l'ordonnance de clôture du 20 septembre 2011.
Dans leurs dernières conclusions déposées le 18 février 2011, les consorts X. - Y. demandent à la Cour, réformant le jugement entrepris, de condamner la SA Gérance Générale Foncière à leur payer, in solidum, la somme de 122.000 euros à titre de dommages-intérêts et celle de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec bénéfice de distraction au profit de la SCP L. - L.-D. - M.
Contestant les motifs du jugement déféré les ayant déboutés de leurs demandes en raison de l'existence d'une clause de non-garantie dont, selon le premier juge, la société venderesse, en sa qualité de non-professionnel de l'immobilier, pouvait se prévaloir et qui, en toute hypothèse, ne créait pas de déséquilibre dans les relations contractuelles entre cette société et les acquéreurs, eux-mêmes rompus aux pratiques de la négociation immobilière, les appelants soutiennent en substance :
- qu'une clause de non-garantie de désignation et de contenance telle que celle stipulée dans l'acte de vente ne peut dispenser les vendeurs de garantir les acquéreurs contre l'éviction d'une partie de la chose vendue,
- que la stipulation dans l'acte d'une clause contraire (aux termes de laquelle il est précisé que le vendeur ne pourra se retrancher derrière les clauses d'exonération de garantie envers l'acquéreur s'il venait à être considéré comme un professionnel de l'immobilier) impose d'interpréter l'acte en faveur de celui qui s'oblige, en l'espèce l'acquéreur et à l'encontre de celui qui a fait établir l'acte litigieux, en l'espèce la société venderesse, en charge de la liquidation d'une partie de l'important patrimoine immobilier d'EDF non affecté à l'activité de production d'électricité,
- qu'en toute hypothèse, la clause d'exclusion litigieuse doit s'analyser en une clause abusive au sens de l'article 2 du décret du 24 mars 1978 en ce qu'elle a pour objet ou pour effet de supprimer ou réduire le droit à réparation d'un non-professionnel en cas de manquement par le professionnel ayant contracté avec lui à l'une quelconque de ses obligations,
- que ce n'est que par une interprétation erronée des éléments de fait soumis à son appréciation (statuts sociaux, extraits Kbis, contrat de prestation conclu avec la SCP notariale A. B. C.) que le premier juge a pu considérer que la société Gérance Générale Foncière ne pouvait se voir reconnaître la qualité de professionnel du négoce immobilier,
- qu'inversement la circonstance que les époux Y. ont la qualité d'associés de trois sociétés civiles immobilières et que M. R. est également associé d'une société de marchands de biens doit demeurer sans incidence sur la solution du litige dès lors qu'il est acquis que leur coacquéreur, M. X., ne peut se voir reconnaître la qualité de professionnel de l'immobilier, que l'acquisition a été réalisée dans un but purement personnel et privé, exclusif de la reconnaissance de la qualité de professionnel,
- que la société venderesse ne pouvait ignorer que la superficie exacte du bien qu'elle vendait, était inférieure à celle énoncée dans l'acte ainsi que le mentionnait l'état hypothécaire du bien et les actes antérieurs de cession,
- que la réfaction de prix sollicitée correspond à la moyenne entre un calcul purement arithmétique basé sur le prix de vente au m² et l'évaluation de la perte financière résultant de la réduction des possibilités de construction supplémentaires en terme de surface habitable, selon des calculs précisés dans les conclusions des appelants auxquelles il convient de se référer purement et simplement pour la concision de l'exposé.
Dans ses dernières conclusions déposées le 28 juin 2011, la SA Gérance Générale Foncière demande à la Cour :
- à titre principal, de confirmer le jugement entrepris sauf en ses dispositions l'ayant condamnée à payer à la SCP A. B. C. la somme de 1.200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- subsidiairement, de condamner la SCP A. B. C. à la relever et garantir des condamnations qui seraient prononcées contre elle au profit des consorts X. - Y.,
- de condamner toute partie succombante à lui payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec bénéfice de distraction au profit de la SCP de G. - D. - L.
Elle soutient en substance :
1° - à titre principal, que la clause d'exclusion de garantie relative à la contenance du bien vendu est en soi licite et que cette clause ne peut en l'espèce être qualifiée d'abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation dès lors que n'est pas rapportée la preuve qu'elle crée un déséquilibre significatif imposé par un professionnel au sens de l'article L. 131-1 dudit code à des cocontractants ayant la qualité de non-professionnels ou de consommateurs dès lors :
- qu'il existe de ce chef une concession réciproque du vendeur et des acquéreurs à renoncer à se prévaloir d'un excédent ou d'un déficit de superficie pour modifier le prix de vente,
- que les acquéreurs, associés de diverses sociétés civiles immobilières et dont l'un d'eux est gérant d'une société de marchands de biens ne peuvent se voir reconnaître la qualité de non-professionnels ou de consommateurs, alors même qu'ils étaient assistés par leur propre notaire qui a rédigé l'acte authentique,
- qu'elle ne peut se voir reconnaître la qualité de professionnel de l'immobilier alors même qu'elle n'a été constituée que pour assurer la liquidation du patrimoine immobilier non productif d'EDF et qu'elle a délégué l'ensemble des missions y afférents à des professionnels du négoce immobilier dans le cadre d'un contrat de prestation de services global,
- que les appelants ne sont pas fondés à se prévaloir d'une jurisprudence relative à la garantie d'éviction laquelle est inapplicable en l'espèce.
2° - subsidiairement, que les appelants ne rapportent pas la preuve certaine et contradictoire de la différence de contenance par eux invoquée,
3° - qu'en toute hypothèse, la responsabilité de la SCP A. B. C. est engagée, au titre du contrat de prestation de services la liant à l'intimée qui lui imposait d'effectuer toutes diligences de quelque nature que ce soit, rendues nécessaires par le projet de vente et ce même si elles ne sont pas expressément visées au cahier des charges ou au contrat de prestation de services, alors même que la consultation des actes et documents cadastraux antérieurs révélait la difficulté concernant la contenance exacte du bien vendu.
Dans ses dernières conclusions déposées le 10 mai 2011, la SCP A. B. C. demande à la Cour de débouter la société Gérance Générale Foncière de toutes ses demandes à son encontre et de la condamner à lui payer la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec autorisation pour la SCP P. - L.-C. de procéder au recouvrement des dépens d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Elle soutient pour l'essentiel :
- qu'aucune faute ne peut être retenue à son encontre dès lors qu'elle n'avait aucune obligation de se procurer tous les actes antérieurs concernant l'immeuble objet de la vente ni de se rendre sur les lieux et que les deux derniers actes en sa possession, confirmés par un certificat d'urbanisme et un extrait cadastral, visaient la superficie mentionnée dans l'acte litigieux en sorte que l'erreur de contenance n'était pas décelable pour un praticien normalement diligent,
- que les appelants ne rapportent pas la preuve d'un quelconque préjudice dans le mesure où si le fait dommageable ne s'était pas produit, ils se seraient retrouvés dans la même situation puisqu'ils n'apportent pas la preuve qu'ils auraient réussi à obtenir une diminution corrélative du prix à laquelle se serait nécessairement opposée la société Gérance Générale Foncière et que leur préjudice ne consiste que dans une perte de chance,
- que le préjudice (éventuel) dont la société Gérance Générale Foncière sollicite réparation à son encontre consiste en une restitution partielle du prix de vente qui doit rester à sa charge sauf à consacrer un enrichissement sans cause.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
I - Sur l'action principale des consorts X. - Y. :
Les dispositions des articles 1626 à 1640 du code civil relatives à la garantie d'éviction sont inapplicables en l'espèce dès lors que les consorts X. - Y. ne se prévalent que d'un simple défaut de contenance de la parcelle acquise par rapport à la superficie annoncée dans l'acte de vente, lequel défaut ne peut être assimilé à une cause d'éviction au sens donné à ce terme par l'article 1626 du code civil.
L'acte authentique de vente du 4 février 2008 stipule (pages 7 et 8) :
- que l'acquéreur, sauf à tenir compte de ce qui peut être indiqué par ailleurs prendra les biens vendus dans l'état où ils se trouveront le jour de l'entrée en jouissance sans aucune garantie de la part du vendeur pour raison... soit même de la surface des biens vendus ou en cas d'immeuble bâti de celle du terrain sur lequel ils sont édifiés, la différence en plus ou en moins, s'il en existe, entre la contenance sus-indiquée et celle réelle, excédât-elle un vingtième devant faire le profit ou la perte de l'acquéreur, sans aucun recours contre le vendeur à ce sujet,
- que le vendeur ne pourra se retrancher derrière les clauses d'exonération de garantie envers l'acquéreur s'il venait à être considéré comme un professionnel de l'immobilier.
En l'espèce, l'examen du dossier permet de constater :
- qu'aux termes mêmes de ses statuts modifiés du 9 mars 2006, la SA Gérance Générale Foncière a pour objet social :
* la création et l'acquisition sous toutes formes, l'apport, l'échange, la vente, la location, tant comme preneuse que comme bailleresse, à court ou à long terme et, avec ou sans promesse de vente, la gérance, la transformation, l'aménagement, la mise en valeur et l'exploitation directe ou indirecte de tous immeubles bâtis ou non bâtis, fonds de commerce, usines, magasins et de tous bâtiments et constructions,
* l'étude, l'obtention, l'achat, la cessation, l'échange, l'exploitation, la vente, la concession de tous brevets, licences de brevets, procédés et secrets de fabrication, marques de fabrique et systèmes,
* toutes opérations industrielles, commerciales, financières, agricoles, mobilières et immobilières se rattachant directement ou indirectement à l'un des objets sus-énoncés ou à tous autres objets similaires ou connexes, le tout tant pour elle-même que pour le compte de tiers ou en participation,
* la participation directe ou indirecte dans toutes opérations de cette nature, soit par voie de création de sociétés, d'apport à des sociétés existantes, de fusion ou d'alliance avec elles, de cession ou de location à ces sociétés ou à toutes autres personnes de tout ou partie de ses biens et droits mobiliers et immobiliers, de souscriptions, achats et ventes de titres et droits sociaux, de commandites, d'avances, de prêts et autrement,
- que l'extrait Kbis du 18 janvier 2009 porte au titre de la description de l'activité sociale, la mention « opérations à caractère immobilier »,
- que dans ses écritures (page 4) la SA Gérance Générale Foncière indique qu'EDF ayant été contrainte de se séparer du patrimoine immobilier non affecté à la production d'électricité, les immeubles à usage d'habitation ont fait l'objet d'apports d'actifs à la société Gérance Générale Foncière dont l'activité a été de faire procéder à la vente de ce patrimoine et que la vente litigieuse est intervenue dans ce cadre.
Il résulte de ces constatations que la SA Gérance Générale Foncière exerce, conformément à son objet social statutaire et à titre principal et habituel, une activité dont le spectre balaie de manière exhaustive la totalité des opérations immobilières et qu'elle doit être qualifiée de professionnel de l'immobilier, la circonstance qu'elle a délégué à un tiers, dans le cadre d'un contrat de prestation de services, la préparation matérielle et juridique des cessions des logements vacants, demeurant sans incidence dans la mesure où elle relève d'un choix purement interne de gestion et d'organisation de ses services.
Il convient dès lors de faire application de la clause même de l'acte authentique précitée stipulant que le vendeur ne pourra se retrancher derrière les clauses d'exonération de garantie (dont la clause d'exclusion de garantie de contenance) envers l'acquéreur s'il venait à être considéré comme un professionnel de l'immobilier.
Il échet par ailleurs d'observer que la circonstance que les époux Y. sont eux-mêmes associés de diverses sociétés civiles immobilières et, pour l'époux, également gérant d'une société de marchands de biens doit demeurer sans incidence dès lors :
- d'une part, qu'il n'est produit aucun élément permettant de qualifier M. X., coacquéreur indivis des époux Y., de professionnel de l'immobilier,
- d'autre part, qu'il est expressément stipulé en page 2 de l'acte authentique qu'en vertu des dispositions de l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation, les biens étant destinés à l'habitation et l'acquéreur étant un non-professionnel de l'immobilier, ce dernier bénéficiait de la faculté de se rétracter, qu'il n'a pas exercé.
La différence de contenance de plus du vingtième est établie au regard du plan de bornage établi le 19 juin 2008, faisant état, après mesurage par géomètre-expert, d'une superficie de 1.158 m² (contre 1.417 m², tel qu'énoncé dans l'acte de vente), soumis à la libre discussion de parties et ne faisant l'objet d'aucune critique technique sérieuse et argumentée.
Il convient dès lors de faire application de l'article 1619 dernier alinéa du code civil aux termes duquel l'expression de la mesure ne donne lieu à aucun supplément de prix en faveur du vendeur pour l'excédent de mesure ni en faveur de l'acquéreur à aucune diminution du prix pour moindre mesure, qu'autant que la différence de la mesure réelle à celle exprimée au contrat est d'un vingtième en plus ou en moins, eu égard à la totalité de l'objet vendu.
La cession litigieuse constituant une vente pour un prix global, la diminution du prix pour moindre mesure sera calculée en proportion de la superficie effectivement manquante par rapport à la superficie énoncée dans l'acte de vente sur la base du prix global d'acquisition, sans qu'il y ait lieu de prendre en considération la valeur du mètre carré de surface habitable pour la détermination de laquelle les appelants ne produisent aucun élément objectif et vérifiable, soit la somme de 540.000 (euros) / 1.417 (m²) x 259 (m²) = 98/701 euros arrondie à 98.700 euros.
Il convient donc, réformant le jugement déféré, de condamner la SA Gérance Générale Foncière à payer aux consorts X. - Y. la somme de 98.700 euros au titre de la réduction du prix de vente, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2009, date de l'assignation introductive d'instance.
II - Sur l'appel en garantie contre la SCP A. B. C. :
La SCP A. B. C. est intervenue non en sa qualité d'officier public mais de simple prestataire de services, lié à la SA Gérance Générale Foncière par un contrat dit « d'ensemblier » aux termes duquel elle s'est vue confier mission de préparation des ventes, de commercialisation et d'achèvement du processus final de vente.
La mise en jeu de sa responsabilité contractuelle suppose la démonstration d'une faute de sa part, en lien direct de causalité avec un préjudice indemnisable souffert par la SA Gérance Générale Foncière.
Cette dernière fait grief à la SCP A. B. C. :
- d'avoir, alors qu'elle était aux termes mêmes du contrat de prestation de services, garante de la qualité des prestations des intervenants qu'elle pouvait se substituer, fait appel à une société de diagnostic qui s'est contentée de solliciter uniquement un certificat d'urbanisme d'informations, sans procéder au diagnostic en lui-même qui eût permis de révéler la différence de contenance de la parcelle litigieuse,
- de ne pas avoir commandé les actes antérieurs translatifs de la propriété de ladite parcelle qui révélaient une discordance avec les indications cadastrales de contenance.
L'examen du dossier, spécialement des actes successifs de translation de la propriété de la parcelle litigieuse, permet de constater que l'indication d'une contenance - erronée - de 1.417 m² apparaît pour la première fois dans un acte de cession du 29 janvier 1985 (dont les énonciations seront reproduites dans les actes postérieurs) alors que les actes antérieurs font état d'une superficie inférieure, de 1.187 m² (actes des 15 novembre 1980 et 24 décembre 1974) ou de 1.146 m² (acte du 18 novembre 1963).
Il y a lieu par ailleurs de constater que la fiche de renseignements hypothécaires sommaires urgents, [élément indispensable à la constitution d'un dossier de vente immobilière que le cahier des charges du contrat de prestation de services (page 7, page 9 : « constitution d'un dossier par bien » faisant référence au document 14 lui-même intitulé « descriptif du dossier de vente tenu par l'ensemblier » imposait à l'ensemblier d'inclure dans le dossier] porte annexion d'une fiche hypothécaire mentionnant une contenance de 1.187 m², en contradiction manifeste avec les informations cadastrales, révélant une différence de contenance de plus du vingtième.
Tenue aux termes mêmes du cahier des charges de collecter le(s) titre(s) de propriété (et donc pas seulement le dernier en date) ainsi que la fiche d'immeuble ou de propriétaire de la simple lecture attentive desquels s'évinçait la preuve d'une difficulté manifeste quant à la détermination de la contenance de la parcelle litigieuse, la SCP A. B. C. est donc nécessairement et en toute hypothèse fautive :
- soit de n'avoir pas récupéré ces documents,
- soit, les ayant collectés, de n'avoir pas décelé ladite difficulté.
La caractérisation d'une faute de la SCP A. B. C. doit cependant demeurer sans incidence dès lors :
- que la restitution de la partie du prix à laquelle le vendeur est condamné sur le fondement de l'article 1619 du code civil ne constitue pas par elle-même un préjudice indemnisable permettant une action en garantie,
- que la SA Gérance Générale Foncière limite ses demandes à l'encontre de la SCP A. B. C. à la seule prise en charge des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle au profit des consorts X. - Y., à l'exception de tout autre chef de préjudice éventuellement indemnisable.
Il convient donc, ajoutant au jugement déféré, de débouter la SA Gérance Générale Foncière de son appel en garantie contre la SCP C. - G. B. - B.
III - Sur les demandes accessoires :
La SA Gérance Générale Foncière sera condamnée aux entiers dépens d'appel et de première instance, avec autorisation pour la SCP L. - L.-D. - M. et pour la SCP P. - L.-C., de procéder au recouvrement des dépens d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
L'équité commande, réformant de ce chef le jugement entrepris, de condamner la SA Gérance Générale Foncière, en application de l'article 700 du code de procédure civile, à payer aux consorts X. - Y. d'une part et à la SCP A. B. C. d'autre part la somme de 3.000 euros chacun (soit globalement 6.000 euros) au titre des frais irrépétibles par eux exposés tant en première instance qu'en cause d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Vu le jugement du tribunal de grande instance de Bayonne en date du 13 septembre 2010,
En la forme, déclare recevable l'appel des consorts X. - Y.,
Au fond, réformant la décision entreprise :
- Condamne la SA Gérance Générale Foncière, sur le fondement de l'article 1619 du code civil, à payer à M. X. et aux époux M. et Mme Y. la somme de 98.700 euros (quatre vingt dix huit mille sept cents euros), augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2009,
- Déboute la SA Gérance Générale Foncière de son appel en garantie contre la SCP A. B. C.,
- Condamne la SA Gérance Générale Foncière, en application de l'article 700 du code de procédure civile, à payer aux consorts X. - Y. d'une part et à la SCP A. B. C. d'autre part la somme de 3.000 euros (trois mille euros) chacun (soit globalement 6.000 euros (six mille euros)) au titre des frais irrépétibles par eux exposés tant en première instance qu'en cause d'appel,
- Condamne la SA Gérance Générale Foncière aux entiers dépens d'appel et de première instance, avec autorisation pour la SCP L. - L.-D. - M. et pour la SCP P. - L.-C., de procéder au recouvrement des dépens d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par M. Castagné, Conseiller, faisant fonction de Président, et par Mme Peyron, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Mireille PEYRON Patrick CASTAGNE