TGI LYON (4e ch.) 4 novembre 2008
CERCLAB - DOCUMENT N° 3811
TGI LYON (4e ch.) 4 novembre 2008 : RG n° 07/10640
(sur appel CA Lyon (1re ch. civ. A), 29 avril 2010 : RG n° 08/08652)
Extrait : « Ce contrat était assorti de garanties complémentaires dont une garantie « dommages corporels du conducteur niveau I ». En page 24 des conditions générales du contrat figure la définition de cette garantie. […]. Il est indiqué en caractères gras que la garantie ne joue pas lorsque le conducteur perçoit un salaire et qu'il est victime d'un accident de travail ou de trajet - travail, puisqu'il est protégé par une législation particulière.
Il ne peut qu'être constaté que cette exclusion de garantie était clairement explicitée et que sa rédaction ne prêtait à aucune ambiguïté, d'autant plus qu'elle expliquait la raison pour laquelle elle ne jouait pas. En outre elle était libellée en caractères gras et donc particulièrement visibles. Elle répondait donc aux exigences de l'article L. 113-1 du Code des Assurances et ne peut dès lors être considérée comme abusive.
Monsieur X. soutient par ailleurs que cette clause était abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la consommation car créant un déséquilibre significatif à son détriment puisqu'elle n'avait vocation à le garantir qu'en cas d'accident de la circulation survenu un dimanche, seul jour où il ne travaillait pas.
Toutefois, il apparaît à l'examen des conditions particulières du contrat d’assurance automobile que Monsieur X. bénéficiait d'un contrat d'assurance tous risques, qui constituait la garantie principale, garantie pour laquelle il avait souhaité être assuré pour un usage promenade et trajet - travail. Il était donc couvert pour ces deux types d'usage, et notamment donc quand il utilisait son véhicule pour se rendre à son travail. A cette garantie principale, étaient adjointes des garanties « annexes » dont la garantie litigieuse laquelle excluait en ce qui la concerne l'accident survenu dans le cadre du travail. Cette garantie n'était pas pour autant illusoire puisque les accidents « trajets - travail » étaient couverts dans le cadre de la garantie principale.
Il en résulte que la clause litigieuse ne peut pas plus être considérée comme abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LYON
QUATRIÈME CHAMBRE
JUGEMENT DU 4 NOVEMBRE 2008
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 07/10640.
Le Tribunal de Grande Instance de LYON, statuant publiquement et en premier ressort, a rendu par mise à disposition au Greffe, en son audience de la Quatrième chambre du 4 novembre 2008 le jugement contradictoire suivant,
Après que l'instruction eut été clôturée le 10 juin 2008, et que la cause eut été débattue à l'audience publique du 16 septembre 2008 devant :
Président : Véronique BESSOU, Juge siégeant en qualité de Juge Unique,
Greffier : Martine JACQUIER,
Et après qu'il en eut été délibéré par le magistrat ayant assisté aux débats dans l'affaire opposant :
DEMANDEUR :
Monsieur X.,
né le [date] à [Ville] demeurant [adresse], représenté par Maître Joseph PALAZZOLO, avocat au barreau de LYON.
DÉFENDERESSE :
Société MAAF ASSURANCES, SA
dont le siège social est sis [adresse] avec établissement secondaire [adresse], Représentée par ses dirigeants légaux domiciliés audit siège représentée par Maître Corinne MICHEL, avocat au barreau de LYON.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :
Le 6 février 2003, Monsieur X. a été victime d'un grave accident de la circulation en dérapant sur une plaque de verglas alors qu'il conduisait son véhicule FORD FOCUS assuré auprès de la MAAF.
Estimant être en droit de bénéficier d'un capital de 192.848,01 euros au titre d'une garantie complémentaire accessoire à son contrat d'assurance automobile, Monsieur X., par exploit du 12 juillet 2007, a assigné la MAAF, qui lui refusait le bénéfice de cette garantie, devant le tribunal de grande instance de LYON aux fins de voir reconnaître son droit.
Aux termes de ses conclusions récapitulatives du 23 janvier 2008, Monsieur X. demande au Tribunal :
- à titre principal de condamner la MAAF à lui payer la somme de 197.200 euros au titre de la garantie dommages corporels du conducteur, outre intérêts au taux légal à compter du 30 mars 2007.
- à titre subsidiaire, de condamner la MAAF à lui payer une somme identique à titre de dommages et intérêts pour manquement à son devoir de conseil ;
- dans tous les cas, de condamner la MAAF à lui payer la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Il demande enfin que soit ordonnée l'exécution provisoire et que la MAAF soit condamnée aux dépens avec distraction.
Monsieur X. expose qu'il a souscrit auprès de la MAAF plusieurs contrats d'assurance : un contrat intitulé « individuelle accident », garantissant le versement d'un capital en cas d'incapacité permanente totale de l'assuré, et deux contrats d'assurance automobile relatifs à une RENAULT MEGANE et à une FORD FOCUS, assortis d'une garantie complémentaire intitulée « dommages corporels conducteurs niveau 1 » lui permettant de bénéficier en sa qualité de conducteur d'un capital en cas d'incapacité permanente.
Il indique qu'à la suite de son accident, qui a généré une Incapacité Permanente Partielle médicalement fixée à 88 %, la MAAF l'a indemnisé au titre de la garantie individuelle Accident mais qu'elle a refusé de lui verser le capital prévu en application de la garantie dommages corporels du conducteur, alors que son état d'invalidité lui permettait normalement d'en bénéficier.
Monsieur X. soutient en premier lieu que la clause d'exclusion de garantie qui lui oppose la MAAF pour refuser de l'indemniser est une clause abusive contraire aux dispositions des articles L. 113-1 du Code des Assurances et L. 132-1 du Code de la consommation.
Il explique que cette clause, qui écarte la garantie quand le conducteur est victime d'un accident de travail ou de trajet, son cas en l'espèce, est abusive quant à la forme aux motifs :
- [minute page 3] qu'elle n'est pas présentée et rédigée de manière claire et compréhensible tel que préconisé par le Code de la consommation ;
- qu'elle n'est pas présentée de façon à ce que l'assuré connaisse exactement les conditions de la garantie, en contravention avec les dispositions de l'article 113-1 du Code des Assurances ;
Il soutient qu'elle est également abusive quant au fond puisqu'elle crée un déséquilibre significatif à son détriment en contravention avec les dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation.
Monsieur X. expose ainsi :
- que dans le cadre du contrat principal d'assurance auto, il était assuré six jours sur sept à titre professionnel, puisqu'il travaillait six jours sur sept en qualité de Maître-nageur ;
- que la garantie dommages corporels conducteur complémentaire qu'il a souscrite est quasiment anéantie dans ses effets par la clause d'exclusion litigieuse puisqu'elle a pour effet d'exclure les accidents de trajet et qu'ainsi la garantie n'était susceptible de jouer que le dimanche.
Subsidiairement, il demande au Tribunal de retenir la responsabilité contractuelle de la MAAF pour manquement à son devoir de conseil et d'information au visa de l'article 1147 du Code Civil.
Monsieur X. rappelle que l'assureur est tenu à une obligation pré- contractuelle d'information et qu'il a la charge de rapporter la preuve qu'il a satisfait à cette obligation.
Il soutient qu'en l'espèce, la MAAF ne démontre pas avoir attiré son attention sur le fait que la garantie conducteur n'avait vocation à s'appliquer que dans un cadre très restreint, c'est-à-dire uniquement le dimanche.
Il ajoute qu'elle aurait dû lui conseiller une autre garantie puisqu'il conduisait principalement son véhicule pour se rendre à son travail.
Enfin, Monsieur X. sollicite des dommages et intérêts pour résistance abusive sur le fondement de l'article 1153 alinéa 4 du Code Civil, reprochant à l'assureur d'avoir versé le capital prévu dans le contrat « individuel accident » sans invoquer la clause d'exclusion qui existait pourtant, et d'avoir refusé sa garantie dans le second contrat où le capital prévu était beaucoup plus important.
Dans ses conclusions récapitulatives du 3 décembre 2007, la MAAF demande au Tribunal de débouter Monsieur X. de l'ensemble de ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure Civile.
Elle expose en premier lieu que son refus d'indemnisation résulte du libellé même de la définition de la garantie et non pas d'une cause d'exclusion de celle-ci.
Elle indique ainsi que la partie des conditions générales relative à la définition des garanties précise expressément en caractères clairs et apparents que la garantie ne joue pas en cas d'accident de travail ou de trajet puisque le conducteur est protégé par une législation [minute page 4] particulière.
Elle ajoute que Monsieur X. bénéficiait bien pour son véhicule d'une garantie tous risques y compris lorsqu'il utilisait son véhicule pour se rendre à son travail et que la garantie litigieuse était une garantie annexe.
Elle indique enfin que Monsieur X. a expressément accepté les conditions de la garantie.
Par ailleurs, la MAAF précise que si elle a réglé le capital au titre du contrat garantie individuelle accident, c'est parce que seuls les accidents de travail étaient exclus et non les accidents de trajet contrairement au second contrat.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DU JUGEMENT :
I - SUR L'EXISTENCE D'UNE CLAUSE ABUSIVE :
L'article L. 113-1 du Code des assurances dispose « les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police ».
Au sens de ces dispositions, l'exclusion doit être formalisée de façon claire, nette et précise afin que l'assuré sache exactement dans quels cas il n'est pas garanti.
En l'espèce, Monsieur X. bénéficiait d'un contrat d'assurance tous risques pour son véhicule FORD FOCUS, dont les conditions particulières et les conditions générales sont versées aux débats.
Ce contrat était assorti de garanties complémentaires dont une garantie « dommages corporels du conducteur niveau I ».
En page 24 des conditions générales du contrat figure la définition de cette garantie.
Il est expliqué qu'elle a pour objet de permettre, après un accident garanti, au conducteur assuré ou à ses proches, en cas de blessures [ou de] décès consécutifs à l'accident de percevoir une aide financière immédiate, des indemnités s'il est responsable et des avances de fonds s'il ne l'est pas.
Il est indiqué en caractères gras que la garantie ne joue pas lorsque le conducteur perçoit un salaire et qu'il est victime d'un accident de travail ou de trajet - travail, puisqu'il est protégé par une législation particulière.
Il ne peut qu'être constaté que cette exclusion de garantie était clairement explicitée et que sa rédaction ne prêtait à aucune ambiguïté, d'autant plus qu'elle expliquait la raison pour laquelle elle ne jouait pas.
En outre elle était libellée en caractères gras et donc particulièrement visibles.
[minute page 5] Elle répondait donc aux exigences de l'article L. 113-1 du Code des Assurances et ne peut dès lors être considérée comme abusive.
Monsieur X. soutient par ailleurs que cette clause était abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la consommation car créant un déséquilibre significatif à son détriment puisqu'elle n'avait vocation à le garantir qu'en cas d'accident de la circulation survenu un dimanche, seul jour où il ne travaillait pas.
Toutefois, il apparaît à l'examen des conditions particulières du contrat d’assurance automobile que Monsieur X. bénéficiait d'un contrat d'assurance tous risques, qui constituait la garantie principale, garantie pour laquelle il avait souhaité être assuré pour un usage promenade et trajet - travail.
Il était donc couvert pour ces deux types d'usage, et notamment donc quand il utilisait son véhicule pour se rendre à son travail.
A cette garantie principale, étaient adjointes des garanties « annexes » dont la garantie litigieuse laquelle excluait en ce qui la concerne l'accident survenu dans le cadre du travail.
Cette garantie n'était pas pour autant illusoire puisque les accidents « trajets - travail » étaient couverts dans le cadre de la garantie principale.
Il en résulte que la clause litigieuse ne peut pas plus être considérée comme abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation.
II - SUR LE MANQUEMENT AU DEVOIR DE CONSEIL ET D'INFORMATION :
Il est reproché à la MAAF de n'avoir pas attiré l'attention de son assuré sur les conditions restrictives de la garantie « dommages corporels du conducteur » dans le cadre de son obligation pré-contractuelle d'information et de conseil (1147 Code Civil).
Or force est de constater, à l'examen des conditions particulières du contrat, que Monsieur X. a apposé sa signature précédée de la mention « lu et approuvé » au-dessous d'une mention où il était expressément indiqué qu'il reconnaissait avoir reçu un exemplaire des conditions générales du contrat.
Il a donc nécessairement eu connaissance avant la souscription du contrat des conditions générales et par la même de la clause d'exclusion prévue au titre de la garantie « dommages corporels du conducteur ».
Compte-tenu de la rédaction claire et précise de cette clause et de son absence d'ambiguïté, il a nécessairement été en mesure d'en apprécier toute la portée.
Il en résulte qu'aucun manquement à son devoir de conseil et d'information ne peut être reproché à l'assureur.
Dans les conditions, Monsieur X. sera débouté de l'ensemble de ses demandes.
Enfin, compte tenu du contexte particulièrement douloureux du litige, il n’y a pas lieu de faire
[minute page 6] droit à la demande présentée par la MAAF au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort,
- Déboute Monsieur X. de l'ensemble de ses demandes,
- Déboute la MAAF de sa demande au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- Condamne Monsieur X. aux dépens dont distraction au profit de Maître MICHEL Corinne, Avocat,
Prononcé à la date de mise à disposition au Greffe par Madame Véronique BESSOU, Juge,
En foi de quoi, le présent jugement a été signé par Madame Véronique BESSOU, Juge, et le greffier présent lors du prononcé, Madame Michelle TRAIT.
Le GREFFIER Le PRÉSIDENT