CA BASTIA (ch. civ.), 21 mars 2012
CERCLAB - DOCUMENT N° 3909
CA BASTIA (ch. civ.), 21 mars 2012 : RG n° 11/00383
Publication : Legifrance
Extrait : « Contrairement à ce que soutient le prêteur dans son appel incident, c’est par de justes motifs que la cour adopte que le premier juge a considéré que toute modification du montant du crédit précédemment accordé devait être conclue dans les termes d’une nouvelle offre de crédit et qu’il a retenu que le prêteur n’établissait pas que l’emprunteuse ait été saisie d’une nouvelle offre de crédit lors de chaque augmentation du capital initialement emprunté.
Aux termes de l’article L. 311-37 du code de la consommation, les actions en paiement engagées devant le tribunal d’instance à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. En matière de crédit permanent comme en l’espèce, le dépassement non régularisé du montant contractuel de l’ouverture de crédit manifeste la défaillance de l’emprunteur et constitue le point de départ du délai de forclusion.
En l’espèce, au regard de l’historique produit par la société CDPG, le plafond contractuel initial de 400 euros a été dépassé en juin 2006 sans qu’aucune nouvelle offre préalable régulière n’ait été soumise au consentement de l’emprunteuse comme déjà indiqué et sans qu’aucune régularisation ne soit intervenue. Ce dépassement constitue dès lors le point de départ du délai de la forclusion biennale qui était en conséquence acquise en 2010 lorsque le prêteur a engagé son action en paiement dans le cadre d’une procédure d’injonction de payer. »
COUR D’APPEL DE BASTIA
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 21 MARS 2012
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11/00383. Décision déférée à la Cour : jugement du 2 mai 2011, Tribunal d’Instance de BASTIA : R.G. n° 11-10-0193.
APPELANTE :
Madame X.
née le [date] à [ville], [adresse], ayant pour avocat Maître Antoine-Paul ALBERTINI, avocat au barreau de BASTIA et Maître Gilles ANTOMARCHI, avocat au barreau de BASTIA (bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/XX du [date] accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BASTIA)
INTIMÉE :
SA CDGP PRIVILEGE RECOUVREMENT JUDICIAIRE
Prise en la personne de son représentant légal [adresse], ayant pour avocat Maître Jean Jacques CANARELLI, avocat au barreau de BASTIA et Maître Lyria OTTAVIANI, avocat au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 27 janvier 2012, devant Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre, chargé du rapport, les avocats ne s’y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre, Monsieur Philippe HOAREAU, Conseiller, Madame Marie-Paule ALZEARI, Conseiller
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame Marie-Jeanne ORSINI.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 21 mars 2012.
ARRÊT : Contradictoire, Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. Signé par Monsieur Pierre LAVIGNE, Président de chambre, et par Madame Marie-Jeanne ORSINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Par déclaration remise au greffe le 12 mai 2011, Madame X. a relevé appel du jugement du tribunal d’instance de BASTIA en date du 2 mai 2011 qui, statuant au contradictoire des parties et assorti de l’exécution provisoire, a constaté la mise à néant de l’ordonnance portant injonction de payer du 8 février 2010, a condamné l’appelante à payer à la société CDPG la somme de 4.931,43 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 13 octobre 2009 au titre d’une offre de crédit, a condamné l’appelante aux dépens.
Dans ses dernières conclusions déposées le 3 août 2011, Madame X. demande à la cour d’infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :
- constater le caractère abusif de la clause relative à la variation du montant du crédit dans l’offre préalable acceptée le 21 novembre 2005 et la déclarer non écrite,
- constater encore la forclusion de l’action en paiement de la société CDPG au titre de l’offre susvisée,
- débouter en conséquence la société CDPG de toutes ses demandes.
Dans ses ultimes conclusions déposées le 6 septembre 2011, la société CDPG demande à la cour de confirmer le jugement entrepris et, y ajoutant, de condamner l’appelante au paiement de la somme de 7.809,67 euros augmentée des intérêts contractuels au taux de 18,38 % sur la somme de 7.343,66 euros et d’une indemnité de 600 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 9 novembre 2011 ; l’affaire a été plaidée le 27 janvier 2012 puis mise en délibéré au 21 mars 2012, les parties régulièrement avisées.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR QUOI, LA COUR :
La cour se réfère à la décision entreprise et aux conclusions récapitulatives susdites pour plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties.
Il ressort des énonciations du contrat signé par les parties le 21 novembre 2005 que par cet acte la société CDPG a consenti à Madame X. une ouverture de crédit d’un montant initial de 400 euros. Il résulte des pièces produites que ce montant a été augmenté à 800 euros le 12 janvier 2006, à 1.300 euros le 12 octobre 2006, à 2.300 euros le 12 mars 2007, à 6.400 euros le 12 avril 2008.
Contrairement à ce que soutient le prêteur dans son appel incident, c’est par de justes motifs que la cour adopte que le premier juge a considéré que toute modification du montant du crédit précédemment accordé devait être conclue dans les termes d’une nouvelle offre de crédit et qu’il a retenu que le prêteur n’établissait pas que l’emprunteuse ait été saisie d’une nouvelle offre de crédit lors de chaque augmentation du capital initialement emprunté.
Aux termes de l’article L. 311-37 du code de la consommation, les actions en paiement engagées devant le tribunal d’instance à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.
En matière de crédit permanent comme en l’espèce, le dépassement non régularisé du montant contractuel de l’ouverture de crédit manifeste la défaillance de l’emprunteur et constitue le point de départ du délai de forclusion.
En l’espèce, au regard de l’historique produit par la société CDPG, le plafond contractuel initial de 400 euros a été dépassé en juin 2006 sans qu’aucune nouvelle offre préalable régulière n’ait été soumise au consentement de l’emprunteuse comme déjà indiqué et sans qu’aucune régularisation ne soit intervenue. Ce dépassement constitue dès lors le point de départ du délai de la forclusion biennale qui était en conséquence acquise en 2010 lorsque le prêteur a engagé son action en paiement dans le cadre d’une procédure d’injonction de payer.
L’appelante est donc fondée dans sa fin de non-recevoir. Par suite, il convient d’infirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions autres que celle mettant à néant l’ordonnance d’injonction de payer et, statuant à nouveau, de déclarer la société CDPG irrecevable en son action.
Les dépens de première instance et d’appel doivent être mis à la charge de cette dernière qui ne saurait dès lors bénéficier de l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Confirme le jugement déféré en ce qu’il a constaté la mise à néant de l’ordonnance d’injonction de payer du 8 février 2010 mais l’infirme dans toutes ses autres dispositions,
Statuant à nouveau,
Déclare la société CDPG irrecevable en son action en paiement,
La condamne aux dépens de première instance et d’appel,
La déboute de sa demande fondée sur l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
- 5745 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Conséquences sur l’issue du litige - Effet rétroactif - Point de départ d’une forclusion - Illustrations
- 6631 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 2 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Obligation de faire une offre