TGI ANGERS (1re ch.), 22 mars 2010
CERCLAB - DOCUMENT N° 4247
TGI ANGERS (1re ch.), 22 mars 2010 : RG n° 08/01575
Publication : Lexbase
Extrait : « Concernant l'atteinte aux intérêts collectifs, celui-ci ne se confond pas avec la somme des intérêts individuels des consommateurs, de sorte qu'aucune victime n'a à être particulièrement identifiée et que l'intérêt collectif est atteint toutes les fois qu'une disposition législative ou réglementaire entrant dans le cadre de la protection des consommateurs n'a pas été respectée. Le risque de provoquer des victimes potentielles suffit donc à caractériser l'atteinte à l'intérêt collectif. »
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D’ANGERS
PREMIÈRE CHAMBRE
JUGEMENT DU 22 MARS 2010
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 08/01575. Assignation : 26 mai 2008. Ordonnance de clôture : 19 novembre 2009. Code [Nac] 57B 0A : Demande en réparation des dommages causés par un intermédiaire.
DEMANDEUR :
L'UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS - QUE CHOISIR (UFC - QUE CHOISIR),
dont le siège social se situe [adresse], prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit Siège ; Représentée par la SELARL AVOCONSEIL (Maître P. HUGEL), Avocat postulant au Barreau d'ANGERS assisté par Maître J. FRANCK, Avocat plaidant au Barreau de PARIS
DÉFENDEURS :
1° La SAS T.,
immatriculée au RCS de [ville] sous le n° 422.XX, dont le siège social se situe [adresse] à [ville C.], prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit Siège ; Représentée par la SCP AVOCATS CONSEILS RÉUNIS (Maître E. DE MASCUREAU), Avocat au Barreau d'ANGERS
2° La SAS T.ANJOU,
immatriculée au RCS de [ville] sous le n° 481.XX, dont le siège social se situe [adresse] à [ville C.], prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit Siège ; Représentée par la SCP AVOCATS CONSEILS RÉUNIS (Maître E. DE MASCUREAU), Avocat au Barreau d'ANGERS
DÉBATS : À l'audience du 25 janvier 2010,
Composition du Tribunal :
Président : Madame E. JOUVENET, Première Vice-Présidente, statuant comme JUGE UNIQUE ;
Greffier : Madame V. BODIN,
À l'issue de l'audience, le Président a fait savoir aux parties que le jugement serait rendu le 22 MARS 2010 ;
JUGEMENT DU 22 MARS 2010 rendu à cette audience par mise à disposition au Greffe (en application de l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile), par Madame E. JOUVENET, Première Vice-Présidente, contradictoire, signé par Madame E. JOUVENET, Première Vice-Présidente, et par Madame V. BODIN, Greffier ;
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] FAITS ET PROCÉDURE :
L'UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS - QUE CHOISIR (dite UFC - QUE CHOISIR) est une association agréée pour exercer sur le plan national les droits reconnus aux associations agréées de consommateurs et agit pour protéger les droits de ces derniers au regard de la réglementation applicable aux professionnels.
Depuis 1996, le législateur, par des lois successives, a imposé au vendeur d'un bien immobilier de nombreuses obligations de diagnostic sur d'éventuels vices cachés présentés par le bien (amiante, insectes xylophages, plomb, performance énergétique, surface...). Ce nouveau cadre juridique a permis l'essor de nouvelles activités de diagnostic technique.
Dans le cadre de l'activité des diagnostiqueurs, le législateur a imposé aux entreprises et personnes l'exerçant une obligation de compétence, d'assurance, d'indépendance et d'impartialité totales vis-à-vis des vendeurs ou de leurs mandataires pour garantir la fiabilité du diagnostic et éviter le diagnostic de complaisance.
Les Sociétés T. et T.ANJOU sont des entreprises de diagnostiqueurs immobiliers qui exercent sous l'enseigne ALLO D. qui a mis en place un programme de fidélisation à points « les diag’s » que les agences immobilières gagnent à chaque règlement de diagnostic technique réalisé par son entremise et qui peuvent être qualifiés de commissions d'apports d'affaire.
Par acte du 26 mai 2008, l'UFC - QUE CHOISIR a fait assigner les Sociétés T. et T.ANJOU devant le Tribunal de Grande Instance d'ANGERS pour les voir condamner sous astreinte à cesser cette pratique de commissionnement violant l'obligation d'impartialité et d'indépendance imposée par la loi aux diagnostiqueurs et à réparer le préjudice indûment porté à la collectivité des consommateurs.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
L'UFC - QUE CHOISIR conclut, en premier lieu, à la recevabilité de son action sur le fondement de l'article L. 421 du Code de la consommation qui prévoit la possibilité pour une association agréée d'exercer une action d'intérêt collectif, en l'espèce celui des consommateurs, sous la condition que les faits dénoncés soient susceptibles d'une qualification pénale. Ainsi, les pratiques de commissionnement litigieuses seraient de nature à créer un risque de partialité et de manque d'indépendance, donc constituant une infraction pénale formelle susceptible d'avoir un retentissement sur la collectivité des consommateurs et donc suffisante à caractériser l'intérêt collectif exigé par le texte sus visé sans qu'il soit nécessaire de démontrer une atteinte effective.
Au fond, l'UFC - QUE CHOISIR expose que :
- les articles L. 271-6 et R. 271-3 du Code de la Construction et de l'Habitation sanctionnent par une contravention de 5ème classe le manquement du diagnostiqueur à son obligation d'indépendance et d'impartialité dans le but d'obtenir la réalisation d'un diagnostic objectif, obligation rappelée par le Conseil National de la Consommation (dit CNC) et la Fédération Interprofessionnelle du Diagnostic ;
- le système de rétribution des mandataires des vendeurs mis en place par les Sociétés défenderesses contrevient à ces prescriptions légales, dans la mesure où il crée un lien susceptible de porter atteinte à l'impartialité et l'indépendance des diagnostiqueurs ;
- la limite à 7 % du commissionnement litigieux serait en réalité dépassée en raison de l'octroi d'autres avantages ;
- tant la doctrine la plus récente que la Direction Générale de la Concurrence, Consommation et Répression des Fraudes (dite DGCCRF) prohibent désormais les pratiques de commissionnement mises en place par les diagnostiqueurs immobiliers ;
- la réponse ministérielle invoquée par les défenderesses est dépourvue de toute valeur normative.
L'UFC - QUE CHOISIR argue enfin d'un préjudice porté à l'intérêt collectif des consommateurs lourd de conséquence en ce qu'il touche à leur santé en matière de diagnostic de plomb, amiante ou d'installation de gaz ou à leur situation économique s'agissant de la présence d'insectes xylophages qui peuvent être à l'origine de graves dégâts.
[minute page 3] L'UFC - QUE CHOISIR demande au Tribunal :
- d'enjoindre aux Sociétés T. et T.ANJOU de cesser, sous astreinte de 10.000 € par jour de retard après expiration d'un délai de 8 jours à compter de la signification de la décision à intervenir, d'utiliser le système de commissionnement destinés à fidéliser les agences immobilières,
- de condamner solidairement les Sociétés T. et T.ANJOU au paiement de la somme de 50.000 € à l'UFC - QUE CHOISIR à titre de dommages et intérêts,
- de condamner les Sociétés T. et T.ANJOU à la publication d'un communiqué judiciaire dans trois journaux nationaux,
- de condamner les Sociétés T. et T.ANJOU à l'envoi, sous contrôle d'huissier, d'une lettre reprenant les termes du communiqué à l'ensemble des agences immobilières clientes du réseau Allo D., sous astreinte de 10.000 € par jour de retard à l'expiration d'un délai de 8 jours à compter de la signification de la décision à intervenir,
- de condamner solidairement les Sociétés T. et T.ANJOU à payer à l'UFC - QUE CHOISIR la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- de condamner solidairement les Sociétés T. et T.ANJOU aux entiers dépens,
- d'ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir.
Les Sociétés T. et T.ANJOU concluent à l'irrecevabilité de l'action, au motif qu'en application de l'article L. 421-1 du Code de la consommation, celle-ci serait subordonnée à l'existence d'une infraction pénale portant atteinte à l'intérêt collectif des consommateurs, que la preuve d'aucune infraction concrète ne serait rapportée, la demanderesse se bornant à faire état de risques potentiels d'atteinte à l'impartialité et à l'indépendance des concluantes.
Au fond, les Sociétés T. et T.ANJOU soutiennent que :
- la pratique est parfaitement autorisée en matière commerciale et est donc compatible avec la profession de diagnostiqueur immobilier qui relève du statut de commerçant ;
- l'esprit des textes réglementant la profession de diagnostiqueur immobilier et instaurant une obligation d'indépendance et de partialité [N.B. conforme à la minute : lire « impartialité »] dans l'établissement du diagnostic n'interdit pas de rétribuer les prescripteurs en contrepartie de l'apport d'affaires effectué, dès lors que le rapport de diagnostic est conforme à la réalité ;
- le CNC, dans ses recommandations en matière d'indépendance et d'impartialité, ne prohibe pas le versement d'une commission d'intermédiation correspondant à un service apporté par l'agent immobilier ;
- une réponse du Ministère du Logement aurait déclaré licite la pratique du commissionnement.
Les Sociétés défenderesses font enfin valoir que, dans les faits, elles n'ont pas manqué à leur obligation d'indépendance et de partialité, dès lors que le commissionnement pratiqué de l'ordre de 7 % du montant de la prestation réalisée n'est ni abusif ; ni excessif, que le commercial est totalement détaché du technique dans leur organisation interne et que la preuve d'un quelconque défaut d'objectivité dans la rédaction de diagnostics n'est pas rapportée.
Les Sociétés T. et T.ANJOU demandent au Tribunal :
- à titre principal, de déclarer l'action de l'UFC - QUE CHOISIR irrecevable, à titre subsidiaire, de débouter l'UFC - QUE CHOISIR,
- en tout état de cause, de condamner l'UFC - QUE CHOISIR au paiement de la somme de 4.500€ en application de l'article 700 du Code de procédure civil et aux entiers dépens.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
Sur la recevabilité :
L'article L. 421-1 du Code de la consommation dispose que : « Les associations régulièrement déclarées ayant pour objet statutaire explicite la défense des intérêts des consommateurs peuvent, si elles ont été agréées à cette fin, exercer les droits reconnus à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs ».
L'article L. 421-2 du Code de la consommation dispose que : « Les associations de consommateurs mentionnées à l'article L. 421-1 et agissant dans les conditions précisées à cet article peuvent demander à la juridiction civile, statuant sur l'action civile, ou à la juridiction répressive, [minute page 4] statuant sur l'action civile, d'ordonner au défenseur ou au prévenu, le cas échéant sous astreinte, toute mesure destinée à faire cesser des agissements illicites ou à supprimer dans le contrat ou le type de contrat proposé aux consommateurs une clause illicite ».
Ces dispositions, sur lesquelles la présente action est fondée, ouvrent aux associations régulièrement déclarées et agréées pour la défense des intérêts des consommateurs le droit d'agir en justice dans le cadre d'une action civile au delà même d'un préjudice propre à l'association.
Outre les conditions liées à la déclaration et à l'agrément de l'association, conditions dont la réunion ne pose pas de difficultés en l'espèce, cette action civile dans l'intérêt collectif des consommateurs prévue par l'article L. 421-1 du Code de la consommation suppose la réunion de deux autres conditions : que les faits soient constitutifs d'une infraction pénale d'une part et qu'ils soient de nature à porter atteinte à l'intérêt collectif des consommateurs d'autre part.
Concernant la qualification pénale, l'article L. 271-6 du Code de la Construction et de l'Habitation met à la charge des diagnostiqueurs une obligation d'indépendance et d'impartialité. Les atteintes à ces obligations sont réprimées par l'article R. 271-3 du Code de la Construction et de l'Habitation qui les qualifient de contravention de 5ème classe. De la sorte, les faits de violation de l'obligation d'indépendance et d'impartialité mis en avant par l'UFC - QUE CHOISIR sont bien des faits susceptibles de revêtir une qualification pénale. La question de la matérialité des faits, à savoir l'existence ou non de la violation des obligations d'indépendance ou d'impartialité par les entreprises de diagnostic en cause relève de l'appréciation du fond du droit et n'est pas un critère de recevabilité de l'action.
Concernant l'atteinte aux intérêts collectifs, celui-ci ne se confond pas avec la somme des intérêts individuels des consommateurs, de sorte qu'aucune victime n'a à être particulièrement identifiée et que l'intérêt collectif est atteint toutes les fois qu'une disposition législative ou réglementaire entrant dans le cadre de la protection des consommateurs n'a pas été respectée. Le risque de provoquer des victimes potentielles suffit donc à caractériser l'atteinte à l'intérêt collectif.
En l'espèce, l'article L. 271-6 du Code de la Construction et de l'Habitation instaurant une obligation d'indépendance et d'impartialité à la charge des entreprise de diagnostic est une disposition visant à la protection des acquéreurs immobiliers, catégorie particulière et importante en nombre de consommateurs. Ainsi, la violation de cette disposition constitue donc une atteinte à l'intérêt collectif de ces derniers.
L'action de l'UFC - QUE CHOISIR portant sur la violation des obligations d'indépendance et d'impartialité par les entreprises de diagnostic est donc recevable puisque les faits allégués sont constitutifs d'une infraction pénale et portent atteinte à l'intérêt collectif des consommateurs.
Sur la violation de l'obligation d'indépendance et d'impartialité :
En application de l'article L. 271-6 du Code de la Construction et de l'Habitation, une entreprise de diagnostic « ne doit avoir aucun lien de nature à porter atteinte à son impartialité et à son indépendance ni avec le propriétaire ou son mandataire qui fait appel à elle ».
Une atteinte effective n'est donc pas requise dans le cadre de cette prohibition. En effet, il suffit que les pratiques soient « de nature » à porter atteinte à l'impartialité et à l'indépendance de l'entreprise de diagnostic.
En d'autres termes, le diagnostiqueur doit rester libre d'accepter ou de refuser une commande de diagnostic et doit pouvoir réaliser ses opérations de diagnostic sans influence et de façon parfaitement objective.
Il convient ainsi de rechercher si le lien créé entre l'entreprise de diagnostic et le mandataire du propriétaire du bien (l'agent immobilier) par la pratique du commissionnement est de nature à influencer l'entreprise et à nuire à son impartialité.
En l'espèce, les pratiques litigieuses consistent en un système de commissionnement dont l'objet est la rémunération de la fidélité des professionnels en relation commerciale avec les entreprises de diagnostic.
ALLO D. édite un catalogue de fidélité et les entreprises exerçant sous cette enseigne, dont les Sociétés T. et T.ANJOU, s'engagent en ces termes :
« Désormais votre fidélité vous fait gagner des points à chaque diagnostic » [minute page 5] « le principe est simple : à chaque règlement de diagnostic effectué grâce à vous, vous gagnez des diag's que vous pouvez convertir ensuite en chèques cadeaux Total ou Kadeos. »
« ALLO D. verse des commissions à ses prescripteurs en contrepartie du service qu'ils apportent pour la réalisation de diagnostics immobiliers. Ces commissions sous forme de chèques cadeau sont versées trimestriellement en pourcentage du volume d'activité apporté. »
Il n'est pas contestable que les entreprises de diagnostic ont le statut de commerçants et qu'en matière commerciale, les pratiques de commissionnement sont licites.
Le problème est de savoir si les pratiques dont s'agit, certes licites, ne sont pas de nature à porter atteinte à l'objectivité du diagnostiqueur au regard des obligations que le législateur lui impose.
À cet égard, les résultats d'un diagnostic technique peuvent dissuader un acheteur potentiel d'acquérir le bien et la crainte de faire manquer son affaire à l'agent immobilier et, par voie de conséquence, de le perdre comme client peut inciter le diagnostiqueur à minimiser ou taire un diagnostic défavorable.
La pratique du commissionnement place ainsi le diagnostiqueur en position de dépendance économique vis-à-vis de son donneur d'ordres en raison du flux de clients potentiels qu'elle génère et une telle dépendance est par définition incompatible avec l'exigence d'indépendance et d'impartialité.
Les Sociétés défenderesses tentent de s'affranchir de ce risque de dépendance en mettant en exergue le faible pourcentage, soit 7 % maximum du montant des prestations réalisées, des commissionnements. Toutefois, un tel pourcentage qui n'est pas négligeable, suffit à établir des relations d'affaires stables et durables entre les agences immobilières et les entreprises de diagnostic. Or, c'est cette stabilité des relations entre les deux Sociétés qui est une entrave à l'indépendance et à l'impartialité des entreprises de diagnostics en ce sens que les entreprises de diagnostic peuvent être tentées de réaliser des diagnostics optimistes afin de s'assurer la confiance des agences immobilières et ainsi maintenir la durabilité de leurs rapports commerciaux. Une telle tentation n'existerait pas hors le cadre des commissionnements puisqu'alors le choix des agences immobilières ne serait plus guidé par un intérêt financier.
Les défenderesses font valoir qu'un équilibre serait trouvé par l'organisation structurelle de leur entreprise, à savoir la séparation entre le service commercial qui prend les commandes et le service technique qui réalise les diagnostics. Mais elles ne démontrent par aucune pièce la réalité de cette organisation dont la parfaite étanchéité reste en outre très douteuse.
La pratique du commissionnement des agences immobilières par les entreprises de diagnostic constitue donc une violation des obligations d'indépendance et d'impartialité mises à la charge des diagnostiqueurs à laquelle il convient de mettre un terme en enjoignant aux Sociétés T. et T.ANJOU de cesser d'utiliser la pratique des commissionnements dans un délai de un mois et ce, sous astreinte de 5.000 € par jour de retard à l'expiration de ce délai.
Sur le préjudice :
Le législateur a édicté une obligation d'indépendance et d'impartialité du diagnostiqueur immobilier pour protéger les consommateurs acquéreurs de biens d'éventuels mauvais diagnostics donnés dans en considération d'un intérêt financier.
De tels diagnostics peuvent être lourds de conséquences pour la santé du consommateur quand il s'agit de diagnostic d'amiante, de plomb ou de l'état d'une installation de gaz ou pour sa situation économique, quand il s'agit de diagnostic sur la présence d'insectes xylophages génératrice de dégâts importants.
En conséquence, la pratique des commissionnements porte préjudice à la collectivité des consommateurs en ce qu'elle ne garantit pas l'impartialité et l'indépendance du diagnostiqueur immobilier.
Ce préjudice collectif d'ordre moral et distinct du préjudice personnel de la victime directe d'une infraction sera justement réparé par l'allocation d'une somme de 15.000 € à titre de dommages et intérêts.
[minute page 6] Les Sociétés T. et T.ANJOU seront en outre condamnées à la publication d'un communiqué judiciaire sur la présente décision ainsi qu'a l'envoi d'une lettre aux agences immobilières clientes du réseau ALLO D. et ce, dans les termes du dispositif ci-après.
Sur les demandes annexes :
Il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de la demanderesse les frais non taxés. Il lui sera alloué, à ce titre, la somme de 4.000 €.
La demande adverse du même chef sera rejetée.
Les défenderesses, qui succombent, seront condamnées aux dépens.
L'exécution provisoire, nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire, sera ordonnée.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal, statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort,
DÉCLARE recevable l'action de l'UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS - QUE CHOISIR (UFC - QUE CHOISIR),
FAIT injonction aux SAS T. et T.ANJOU de cesser les pratiques de commissionnement destinées à rétribuer les agences immobilières et utilisées dans le cadre du réseau ALLO D. et ce, dans un délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement et sous astreinte de 5.000 € par jour de retard à l'expiration de ce délai,
CONDAMNE les SAS T. et T.ANJOU à payer à l'UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS - QUE CHOISIR (UFC - QUE CHOISIR) la somme de quinze mille euros (15.000) à titre de dommages et intérêts,
CONDAMNE les SAS T. et T.ANJOU à publier à leurs frais un communiqué judiciaire dans trois journaux nationaux au choix de l'UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS - QUE CHOISIR (UFC - QUE CHOISIR) et dans les termes suivants :
« À la requête de l'UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS - QUE CHOISIR (UFC - QUE CHOISIR), le Tribunal de Grande Instance d'ANGERS a condamné les SAS T. et T.ANJOU exerçant, sous l'enseigne ALLO D., l'activité de diagnostiqueur immobilier à cesser de rétribuer par voie de commissionnements les agences immobilières faisant appel à leurs services afin de garantir l'impartialité de leurs diagnostics »,
CONDAMNE les SAS T. et T.ANJOU à envoyer, sous contrôle d'huissier, une lettre reprenant les termes de ce communiqué à l'ensemble des agences immobilières clientes du réseau ALLO D. et ce, dans un délai d'un mois à compter du présent jugement et sous astreinte de 5.000 € par jour de retard à l'expiration de ce délai,
CONDAMNE les SAS T. et T.ANJOU à payer à l'UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS - QUE CHOISIR (UFC - QUE CHOISIR) la somme de quatre mille euros (4.000) en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
ORDONNE l'exécution provisoire,
CONDAMNE les Sociétés défenderesses aux dépens, qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
Jugement rendu par mise à disposition au Greffe le VINGT DEUX MARS DEUX MIL DIX par Madame E. JOUVENET, Première Vice-Présidente, assistée de Madame V. BODIN, Greffier, lesquelles ont signé la minute du présent jugement.
Le Greffier, Le Président,
Madame V. BODIN, Madame E. JOUVENET.