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CA GRENOBLE (1er pdt - réf.), 6 mars 2013

Nature : Décision
Titre : CA GRENOBLE (1er pdt - réf.), 6 mars 2013
Pays : France
Juridiction : Grenoble (CA), 1er Pdt
Demande : 13/00001
Date : 6/03/2013
Nature de la décision : Suspension
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 27/12/2012
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4311

CA GRENOBLE (1er pdt - réf.), 6 mars 2013 : RG n° 13/00001 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu qu'il résulte des motifs du jugement que le tribunal n'a procédé qu'à l'étude du modèle-type dans sa version 2008 et que la société Gignoux-Lemaire a effectué une mise à jour de ses contrats le 7 mai 2010 pour tenir compte d'un arrêté dit Novelli et du décret n° 2010-391du 20 avril 2010 ;

Attendu que l'exécution du jugement conduirait la société Gignoux-Lemaire à procéder à la réfection d'un contrat de mandat de syndic dans sa version 2008 par suppression de 9 clauses jugées illicites ou abusives ; qu'une telle réfection, alors d'une part que l'appréciation du caractère abusif ou illicite de ces clauses n'est pas définitive, et d'autre part que la société Gignoux-Lemaire indique que cette version 2008 n'est plus en vigueur depuis près de trois ans puisque la mise à jour des contrats a été effectuée en 2010 comme l'a relevé le tribunal, aurait des conséquences manifestement excessives ;

Attendu que la société Gignoux-Lemaire ne soutient pas que l'exécution des condamnations financières aurait des conséquences manifestement excessives et n'établit pas qu'il existerait un risque de non-restitution en cas d'infirmation du jugement ».

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU 6 MARS 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 13/00001.

 

ENTRE :

DEMANDERESSE suivant assignation en référé du 27 décembre 2012 :

SAS GIGNOUX LEMAIRE,

prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège, représentée par la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat postulant au barreau de GRENOBLE, plaidant par Maître Michel PONSARD et Maître Nizar LAJNEF, avocats au barreau de PARIS

 

ET :

DÉFENDERESSE :

Association UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR DE L'ISÈRE,

prise en la personne de son président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège, représentée par Maître Christian BRASSEUR, avocat au barreau de GRENOBLE

 

DÉBATS : A l'audience publique du 23 janvier 2013 tenue par Gérard MEIGNIÉ, premier président, assisté de M.A. BARTHALAY, greffier

ORDONNANCE : contradictoire ; prononcée publiquement le 6 MARS 2013 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ; signée par Gérard MEIGNIÉ, premier président et par M.A. BARTHALAY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par un jugement du 17 septembre 2012, le tribunal de grande instance de Grenoble :

- a déclaré illicites ou abusives 9 clauses du contrat type de syndic de la société Gignoux Lemaire dans sa version 2008 et les a réputées non écrites ;

- a ordonné leur suppression - dans la mesure où cela n'aura pas déjà été fait dans la version 2010 du contrat - dans un délai de six mois à compter du jugement, sous peine d'une astreinte provisoire de 800 euros par jour de retard pendant deux mois ;

- a condamné la société Gignoux Lemaire à verser à l'UFC Que Choisir de l'Isère la somme de 8.000 euros en réparation du préjudice collectif, 3.000 euros en réparation du préjudice associatif et la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

- a ordonné la publication du jugement par extraits inventoriant les clauses écartées, dans la limite totale de 1.500 euros par publication, et ce, dans les journaux « les Affiches de Grenoble », le « Dauphiné Libéré » et « Paru Vendu » ;

- a également ordonné à la société Gignoux Lemaire de créer dans le mois de la signification du jugement un lien Internet sur son site reprenant le dispositif du jugement.

Ce jugement a été assorti de l'exécution provisoire à l'exception des dispositions relatives aux mesures de publicité par voie de presse ou d'Internet.

La société Gignoux Lemaire a interjeté appel du jugement.

Considérant que l'exécution provisoire aurait pour elle des conséquences manifestement excessives et qu'elle conduirait à une violation de la loi, la société Gignoux Lemaire a fait assigner en référé par acte du 27 décembre 2012 l'association UFC Que Choisir de l'Isère pour obtenir l'exécution provisoire ainsi que le paiement d'une somme de 5.000 euros en vertu de l’article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de ses demandes, elle a notamment fait valoir :

- qu'elle gérait 301 copropriétés ; que pour exécuter le jugement, elle devait modifier 301 contrats, tous différents ;

- que cette modification impliquait la réunion de 301 assemblées générales extraordinaires, conformément aux dispositions de l’article 29 du décret du 17 mars 1967, puis la renégociation et la signature de chacun des nouveaux contrats avec l'ensemble des 10.000 copropriétaires ;

- que chacune de ces assemblées générales représentait un coût global de 100 euros ;

- qu’eu égard à la mise en conformité des contrats avec le jugement, il y aura lieu de convoquer individuellement chacun des copropriétaires ; qu'elle risquait de subir une résiliation des contrats alors que le jugement n'était pas définitif ; que cette publicité indirecte lui serait donc particulièrement dommageable alors que le tribunal avait écarté toutes les mesures de publication du jugement ;

- qu'elle avait adopté un nouveau contrat le 7 mai 2010 pour mettre les clauses du précédent contrat en conformité avec l'arrêté Novelli du 19 mars 2010 ;

- que le tribunal n'avait procédé qu'à l'étude du contrat dans sa version 2008 alors que celui-ci n'était plus en vigueur depuis trois ans ;

- qu'exécuter le jugement du 17 septembre 2012 revenait à l'appliquer au contrat de 2010 pour lequel le tribunal n'était pas saisi ; que le fait pour le tribunal de statuer sur le contrat de 2010 contrevenait aux dispositions de l’article 5 du code de procédure civile ; que l'exécution provisoire conduirait à une violation de la loi.

Elle a encore répliqué :

- qu'elle ne pourrait attendre l'expiration des contrats en cours pour diffuser le contrat modifié en application du jugement du 17 septembre 2012 ; qu'il y aurait inégalité de traitement ;

- qu'elle serait alors contrainte d'appliquer le jugement aux contrats en cours ; ce qui n'était pas admissible au regard de la jurisprudence de la Cour de cassation ;

- qu'elle risquait alors de voir les copropriétaires résilier le contrat de syndic alors que le jugement n'était pas définitif ;

- que le risque de survenance d'un préjudice important était bien réel ;

- que l’illicéité des clauses n'était nullement acquise ;

- que la suspension de l'exécution provisoire ne créait aucun avantage concurrentiel pour elle.

L'UFC Que Choisir de l'Isère a conclu au rejet de la demande ainsi qu'au paiement d'une somme de 2.000 euros en vertu de l’article 700 du code de procédure civile en soulignant :

- que la demanderesse procédait par affirmations sans établir la preuve de ses allégations ;

- que le premier président n'avait pas qualité pour apprécier l'existence d'une violation prétendue de la loi ;

- que l'existence de conséquences manifestement excessives n'était pas établie ; qu'au contraire, c'était bien l'existence de clauses abusives qui générait pour le professionnel qui les utilisait un avantage économique usurpé ;

- que la modification décidée du contrat type n'avait rien d'irrémédiable dès lors que les contrats sont régulièrement modifiés, du moins chaque année, à la faveur de la durée limitée des fonctions de syndic ;

- qu'il n'y aura pas lieu de modifier les 320 contrats en cours puisque la décision du 17 septembre 2012 n'avait pas vocation à s'appliquer aux tiers ;

- qu'il n'y aura pas davantage à réunir 301 assemblées générales ; que nul ne l'avait demandé ;

- que la modification imposée du modèle type de contrat ne constituait pas un travail considérable, d'un coût irréversible ;

- que l'article 29 du décret n'imposait nullement la réunion d'assemblées générales ;

- que la cour d'appel n'était pas saisie du nouveau contrat établi en 2010 ; que cette version n'avait pas été versée aux débats ;

- qu'en tout état de cause, si les clauses litigieuses avaient été supprimées par l'effet du contrat de 2010, l'exécution provisoire ne causait aucun préjudice.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :

Attendu que par jugement du 17 septembre 2012 le tribunal de grande instance de Grenoble a déclaré irrecevables les demandes relatives au contrat-type de mandat de syndic dans sa version 2006, ordonné la publication du jugement, condamné la société Gignoux-Lemaire à payer à l'association UFC 38 diverses indemnités et ordonné « la suppression... de la totalité des clauses déclarées abusives ou illicites de son contrat-type.... et ce en tant que de besoin dès lors que cette suppression n'est pas intervenue lors de l'édition du nouveau-modèles type non critiqué en date du 7 mai 2010 dans un délai de 6 mois à compter de la signification du présent jugement, et ce, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 800 euros par jour de retard pendant une durée de 2 mois » ;

Attendu que l'exécution provisoire du jugement a été ordonnée « à l'exception des mesures de publicité par voie de presse et sur le site internet de la défenderesse » ; que toutefois, la publicité par voie de presse a été réalisée le 23 novembre 2012 malgré l'appel interjeté le 19 octobre 2012 ;

Attendu qu'il résulte des motifs du jugement que le tribunal n'a procédé qu'à l'étude du modèle-type dans sa version 2008 et que la société Gignoux-Lemaire a effectué une mise à jour de ses contrats le 7 mai 2010 pour tenir compte d'un arrêté dit Novelli et du décret n° 2010-391du 20 avril 2010 ;

Attendu que l'exécution du jugement conduirait la société Gignoux-Lemaire à procéder à la réfection d'un contrat de mandat de syndic dans sa version 2008 par suppression de 9 clauses jugées illicites ou abusives ; qu'une telle réfection, alors d'une part que l'appréciation du caractère abusif ou illicite de ces clauses n'est pas définitive, et d'autre part que la société Gignoux-Lemaire indique que cette version 2008 n'est plus en vigueur depuis près de trois ans puisque la mise à jour des contrats a été effectuée en 2010 comme l'a relevé le tribunal, aurait des conséquences manifestement excessives ;

Attendu que la société Gignoux-Lemaire ne soutient pas que l'exécution des condamnations financières aurait des conséquences manifestement excessives et n'établit pas qu'il existerait un risque de non-restitution en cas d'infirmation du jugement ;

Attendu enfin que l'équité ne justifie pas qu'il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Nous, Gérard Meignié, premier président de la cour d'appel de Grenoble, statuant en référé, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Arrêtons l'exécution provisoire du jugement du tribunal de grande instance de Grenoble du 17 septembre 2012 uniquement en ce qu'il a ordonné la suppression sous astreinte des clauses déclarées abusives ou illicites du contrat-type (version 2008),

Rejetons la demande d'arrêt de l'exécution provisoire des condamnations financières,

Disons n'y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

Laissons les dépens à la charge de la société Gignoux Lemaire.

Le greffier                             Le premier président

M.A. BARTHALAY             G. MEIGNIÉ