CASS. COM., 12 février 2013
CERCLAB - DOCUMENT N° 4362
CASS. COM., 12 février 2013 : pourvoi n° 12-13603
Publication : Legifrance ; Bull. civ.
Extrait : « Mais attendu que l’état de dépendance économique se définit comme l’impossibilité, pour une entreprise, de disposer d’une solution techniquement et économiquement équivalente aux relations contractuelles qu’elle a nouées avec une autre entreprise ; qu’après avoir relevé que, même si la société DHL est leader dans le domaine des transports et du fret, sa part de marché dans les Côtes d’Armor et le Morbihan n’est pas dominante, de nombreux concurrents exerçant une activité similaire dans la région et le recours à la sous-traitance s’expliquant essentiellement par le fait qu’elle n’y dispose pas d’une implantation commerciale forte, l’arrêt retient que la société EAS fret, qui avait déjà d’autres clients, pouvait encore élargir sa clientèle, aucune clause d’exclusivité ne l’en empêchant ; qu’en l’état de ces constatations et appréciations, faisant ressortir l’absence d’obstacle juridique ou factuel à la faculté de diversification de la société EAS fret, et abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les première et troisième branches, la cour d’appel a pu retenir que cette société n’était pas en situation de dépendance économique à l’égard de la société DHL et a ainsi justifié sa décision ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 12 FÉVRIER 2013
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 12-13603.
DEMANDEUR à la cassation : Monsieur X., es qualité de liquidateur judiciaire de la société EAS fret, et M. Y., gérant de cette dernière
DÉFENDEUR à la cassation : Société DHL
M. Espel (président), président. Maître Foussard, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, avocat(s).
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 17 novembre 2011), que depuis 1996, la société EAS fret, spécialisée dans le ramassage, le transport et la livraison de colis et de documents, était le sous-traitant de la société DHL express France (la société DHL) dans la région des Côtes d’Armor, en dernier lieu en vertu d’un « contrat navette » et d’un « contrat d’opérateur intégré » ; qu’elle a été mise en redressement judiciaire le 14 février 2001 mais a pu bénéficier d’un plan de continuation ; que le 25 octobre 2004, la société DHL lui a notifié la rupture de leurs relations contractuelles avec un préavis de trois mois ; que le 22 décembre 2004, le plan de continuation a été résolu et la société EAS fret mise en liquidation judiciaire ; qu’estimant que cette liquidation était imputable à la société DHL, M. X., agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société EAS fret, et M. Y., gérant de cette dernière, l’ont assignée en paiement de dommages-intérêts, notamment pour abus de dépendance économique ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que M. X., ès qualités, et M. Y., ès qualités, font grief à l’arrêt du rejet de la demande, alors, selon le moyen :
1°/ que la relation de dépendance économique est caractérisée dès lors qu’il est établi qu’une entreprise se trouve dans l’impossibilité de substituer à son donneur d’ordre un ou plusieurs autres donneurs d’ordre lui permettant de faire fonctionner son entreprise dans des conditions techniques et économiques comparables ; que cette condition s’identifie à celle d’absence de solution alternative équivalente, qui constitue donc une condition nécessaire et suffisante à la caractérisation d’une relation de dépendance ; qu’au cas présent, la cour d’appel a considéré que la relation de dépendance économique supposait que soit établie non seulement l’absence de solution alternative équivalente mais également quatre autres conditions, à savoir « la part de l’entreprise dans le chiffre d’affaires de son partenaire, la notoriété de la marque, l’importance de la part de marché de ce partenaire, (…) et les facteurs ayant conduit à la situation de dépendance économique » (arrêt p. 5 par. 2) ; qu’en érigeant ainsi en conditions de l’état de dépendance économique ce qui ne peut s’analyser que comme des éléments d’un faisceau d’indices normalement uniquement énoncés pour appréhender la définition de la relation de dépendance, caractérisée dès l’instant où l’opérateur dépendant est privé de solution alternative équivalente, la cour d’appel a ajouté à la loi, violant ainsi l’article L. 442-6-I-2° du code de commerce dans sa rédaction applicable à la cause ;
2°/ que la possibilité de disposer d’une solution équivalente s’entend de la possibilité juridique mais aussi matérielle pour l’entreprise de développer des relations contractuelles avec d’autres partenaires ; qu’ainsi, cette possibilité ne saurait être déduite de la seule absence de clause d’exclusivité liant l’entreprise sous-traitante à son donneur d’ordre, l’impossibilité de disposer d’une solution alternative pouvant naître d’une impossibilité de fait due aux conditions de travail imposées par le donneur d’ordre au sous-traitant ; qu’au cas présent, pour considérer que la condition tenant à l’absence de solution alternative équivalente de la société EAS fret n’était pas remplie, la cour d’appel s’est contentée d’affirmer qu’« aucune exclusivité n’a été exigée de la part de la société EAS fret et qu’il lui appartenait donc de diversifier sa clientèle pour anticiper une rupture toujours possible des relations commerciales » (arrêt p. 5 par. 6) ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a réduit la condition d’absence de solution équivalente à la seule impossibilité juridique, violant ainsi l’article L. 442-6-I-2° du code de commerce dans sa rédaction applicable à la cause ;
3°/ que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu’au cas présent, les exposants avaient visé dans leurs conclusions d’appel et versé aux débats un courrier en date du 8 juin 1998 par lequel la société EAS fret exprimait son vif désaccord sur les nouvelles conditions financières qui lui étaient imposées par la société DHL ; qu’en affirmant néanmoins que la société EAS fret « n’a jamais remis en cause, de 1996 à 2004, les tarifs convenus avec DHL, la seule réclamation de son gérant, M. Y., concernant en 2004 le tarif de 165 euros par jour et par route pour le Morbihan » (arrêt p. 5 par. 9), sans examiner ni même viser ce document qui lui était soumis, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mais attendu que l’état de dépendance économique se définit comme l’impossibilité, pour une entreprise, de disposer d’une solution techniquement et économiquement équivalente aux relations contractuelles qu’elle a nouées avec une autre entreprise ; qu’après avoir relevé que, même si la société DHL est leader dans le domaine des transports et du fret, sa part de marché dans les Côtes d’Armor et le Morbihan n’est pas dominante, de nombreux concurrents exerçant une activité similaire dans la région et le recours à la sous-traitance s’expliquant essentiellement par le fait qu’elle n’y dispose pas d’une implantation commerciale forte, l’arrêt retient que la société EAS fret, qui avait déjà d’autres clients, pouvait encore élargir sa clientèle, aucune clause d’exclusivité ne l’en empêchant ; qu’en l’état de ces constatations et appréciations, faisant ressortir l’absence d’obstacle juridique ou factuel à la faculté de diversification de la société EAS fret, et abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les première et troisième branches, la cour d’appel a pu retenir que cette société n’était pas en situation de dépendance économique à l’égard de la société DHL et a ainsi justifié sa décision ; que le moyen, qui ne peut être accueilli en ses première et troisième branches, n’est pas fondé pour le surplus ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X., ès qualités, et M. Y., ès qualités, aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze février deux mille treize.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour M. X., ès qualités et M. Y.
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir débouté Maître X. ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL EAS FRET de sa demande tendant à voir condamner la société DHL au versement de 462.696,34 euros au titre du passif déclaré à la liquidation et de 200.000 euros au titre de la perte de chance de survie ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Aux motifs propres que « Maître X., ès qualités, et Monsieur Y. n’ont présenté en appel aucun moyen nouveau de droit ou de fait qui justifie de remettre en cause le jugement attaqué, lequel repose sur des motifs pertinents, non contraires à l’ordre public, résultant d’une analyse correcte des éléments de la procédure, notamment des pièces contractuelles et de la juste application de la loi et des principes régissant la matière ; que l’action des appelants est fondée en premier lieu sur les dispositions des articles L. 420-2 et L. 442-6-2° du code de commerce, à savoir la dépendance économique qui aurait été celle de la société EAS Fret vis à vis de la société DHL ; que l’article L. 442-6-2° du code de commerce dispose qu’ « engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : b) d’abuser de la relation de dépendance dans laquelle il tient un partenaire ou de sa puissance d’achat ou de vente en le soumettant à des conditions commerciales ou obligations injustifiées… » ; qu’or, Maître X., ès qualités, et Monsieur Y. ne démontrent pas que EAS Fret était dépendante économiquement de DHL et que cette dernière aurait abusé de cette dépendance économique en soumettant EAS FRET à des conditions tarifaires inacceptables ; qu’il convient de rappeler que la dépendance économique ne peut résulter que de l’impossibilité dans laquelle se trouve une entreprise de disposer d’une solution techniquement et économiquement équivalente aux relations contractuelles qu’elle a nouées, soit en qualité de client, soit en qualité de fournisseur avec une autre entreprise ; que les premiers juges ont, à juste titre, retenu que les cinq critères constitutifs de la dépendance économique, à savoir la part de l’entreprise dans le chiffre d’affaires de son partenaire, la notoriété de la marque, l’importance de la part de marché de ce partenaire, l’existence ou non de solutions alternatives et les facteurs ayant conduit à la situation de dépendance économique (choix stratégique ou obligé de la victime du comportement dénoncé), seul le critère de la notoriété de la marque était rempli en l’espèce ; que même si DHL est leader dans le domaine des transports et du fret, sa part de marché dans les Côtes d’Armor et le Morbihan n’est pas dominante, de nombreux concurrents exerçant une activité similaire dans la région, le recours par DHL à la sous-traitance se justifiant précisément essentiellement dans les secteurs géographiques où elle n’a pas d’implantation commerciale forte ; que s’agissant de la part de DHL dans le chiffre d’affaire d’EAS Fret, il convient de rappeler que cette dernière s’était engagée à ne pas dépasser 70 % de son chiffre d’affaires global avec DHL ; que son chiffre d’affaires ne résultait d’ailleurs pas uniquement de son activité avec DHL et qu’elle avait d’autres clients ; que par ailleurs, les appelants ne peuvent arguer de l’absence de solution alternative ou équivalente pour EAS Fret alors qu’aucune exclusivité n’a été exigée de sa part qu’il lui appartenait donc de diversifier sa clientèle pour anticiper une rupture toujours possible des relations commerciales ; qu’il est contradictoire de la part d’EAS Fret de se plaindre de tarifs imposés par DHL trop bas pour permettre une rentabilité de son activité et d’avoir postulé début 2004 pour être opérateur agrée de DHL dans le département du Morbihan, ce qui revenait à augmenter encore la part de DHL dans son chiffre d’affaires et donc ses difficultés ; que Maître X., ès qualités, et Monsieur Y. soutiennent, sans le prouver, que EAS Fret était soumise à des conditions commerciales intenables imposées par DHL qui refusait de prendre en compte son véritable seuil de rentabilité et la trompait sur la situation réelle du marché en Morbihan ; qu’à ce propos, il faut observer qu’outre le fait que EAS Fret n’a jamais produit d’analyse financière et comptable démontrant que les tarifs de DHL seraient inférieurs à son seuil de rentabilité, elle n’a jamais remis en cause, de 1996 à 2004, les tarifs convenus avec DHL, la seule réclamation de son gérant, Monsieur Y., concernant en 2004 le tarif de 165 € par jour et par route pour le Morbihan ; qu’or, ce tarif du Morbihan a été convenu entre DHL et Arcatime Caudan, cette dernière n’ayant jamais soutenu qu’il était inacceptable et l’ayant consenti à son sous-traitant EAS Fret sans bénéficier d’une quelconque marge ; qu’au demeurant, EAS avait répondu à l’appel d’offres de DHL en se positionnant à 165 €, Monsieur Y. ayant reconnu ultérieurement dans un courrier du 24 octobre 2004 que sa proposition était inadaptée et qu’il connaissait mal le secteur géographique pour lequel il avait postulé ; qu’ainsi EAS Fret ne rapporte pas la preuve de ce que DHL ait tenté de le tromper ; que quant aux litiges relatifs au paiement des factures de EAS fret qui ont pu opposer les deux sociétés, ils ne démontrent nullement un abus de dépendance économique par DHL ; qu’il faut encore ajouter que, si un abus de dépendance économique de EAS Fret par DHL avait existé, il n’aurait pas manqué d’être relevé par les organes de la procédure collective et le tribunal de commerce de Morlaix, qui n’auraient pas accepté la mise en place en mars 2003 d’un plan de continuation de l’entreprise avec apurement du passif ; qu’ainsi, les conditions juridiques de l’abus de dépendance économique ne sont pas remplies » (arrêt p. 4-6) ;
Et aux motifs éventuellement adoptés des premiers juges que « en ce qui concerne l’abus de dépendance économique, l’état de dépendance économique pour un distributeur se définit comme la situation d’une entreprise qui ne dispose pas de la possibilité de substituer à l’un de ses fournisseurs un ou plusieurs autres fournisseurs répondant à sa demande d’approvisionnement dans des conditions techniques et économiquement comparables ; qu’il s’en déduit que la seule circonstance qu’un distributeur réalise une part importante, voire exclusive de son approvisionnement auprès d’un seul fournisseur ne suffit pas à caractériser son état de dépendance économique au sens de l’article L. 420-2 du code de commerce ; que l’existence d’une situation de dépendance économique s’apprécie en fonction de cinq critères cumulatifs : la notoriété de la marque ou/et du produit ; la part de marché du fournisseur ; la part représentée par les produits du fournisseur dans le chiffre d’affaires du distributeur, l’absence de solution équivalente ou alternative et les facteurs ayant conduit à la situation de dépendance économique (choix stratégique ou « obligé » de la victime du comportement dénoncé) ; que la condition tenant à la notoriété de la marque est remplie ; qu’aucune de ces deux parties ne verse aux débats d’éléments démontrant ou pas que la part de marché de DHL dans les Côtes d’Armor et dans le Morbihan est dominante, ou même supérieure à celle de ses concurrents de même notoriété, et que, par conséquent, ce critère ne pourra en l’espèce être retenu ; que les écriture produites par EAS démontrent que son chiffre d’affaires ne résultait pas uniquement de son activité avec DHL, mais qu’elle avait d’autres clients ; qu’EAS ne justifie pas de l’absence de solution alternative ou équivalente pour EAS et de facteurs ayant conduit à la situation de dépendance économique ; qu’en effet, d’une part aucune exclusivité n’a été exigée d’EAS dans les contrats successifs liant les parties ; que d’autre part, il appartenait à EAS de diversifier sa clientèle et de ne pas se contenter de sa relation de sous-traitance avec DHL, et ce, d’autant plus si les tarifs imposés par cette dernière étaient jugés par elle trop bas, ce qui aurait dû la dissuader de postuler en 2004 pour être opérateur agrée de DHL dans le département du Morbihan, ce qu’elle n’a pas fait ; qu’aucun des critères, à l’exception de celui de la notoriété de DHL, n’est réuni pour définir la dépendance économique, et qu’il en découle que, sans dépendance économique, il ne peut y avoir d’abus de dépendance ; qu’en conséquence, le tribunal déboutera X. de sa demande en paiement de 462.696,34 € au titre du passif déclaré à la liquidation » (jugement p. 6-7) ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
1) Alors que la relation de dépendance économique est caractérisée dès lors qu’il est établi qu’une entreprise se trouve dans l’impossibilité de substituer à son donneur d’ordre un ou plusieurs autres donneurs d’ordre lui permettant de faire fonctionner son entreprise dans des conditions techniques et économiques comparables ; que cette condition s’identifie à celle d’absence de solution alternative équivalente, qui constitue donc une condition nécessaire et suffisante à la caractérisation d’une relation de dépendance ; qu’au cas présent, la cour d’appel a considéré que la relation de dépendance économique supposait que soit établie non seulement l’absence de solution alternative équivalente mais également quatre autres conditions, à savoir « la part de l’entreprise dans le chiffre d’affaires de son partenaire, la notoriété de la marque, l’importance de la part de marché de ce partenaire, (…) et les facteurs ayant conduit à la situation de dépendance économique » (arrêt p. 5 par. 2) ; qu’en érigeant ainsi en conditions de l’état de dépendance économique ce qui ne peut s’analyser que comme des éléments d’un faisceau d’indices normalement uniquement énoncés pour appréhender la définition de la relation de dépendance, caractérisée dès l’instant où l’opérateur dépendant est privé de solution alternative équivalente, la cour d’appel a ajouté à la loi, violant ainsi l’article L. 442-6-I-2° du code de commerce dans sa rédaction applicable à la cause ;
2) Alors que la possibilité de disposer d’une solution équivalente s’entend de la possibilité juridique mais aussi matérielle pour l’entreprise de développer des relations contractuelles avec d’autres partenaires ; qu’ainsi, cette possibilité ne saurait être déduite de la seule absence de clause d’exclusivité liant l’entreprise sous-traitante à son donneur d’ordre, l’impossibilité de disposer d’une solution alternative pouvant naître d’une impossibilité de fait due aux conditions de travail imposées par le donneur d’ordre au sous-traitant ; qu’au cas présent, pour considérer que la condition tenant à l’absence de solution alternative équivalente de la SARL EAS FRET n’était pas remplie, la cour d’appel s’est contentée d’affirmer qu’« aucune exclusivité n’a été exigée de la part de la SARL EAS FRET et qu’il lui appartenait donc de diversifier sa clientèle pour anticiper une rupture toujours possible des relations commerciales » (arrêt p. 5 par. 6) ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a réduit la condition d’absence de solution équivalente à la seule impossibilité juridique, violant ainsi l’article L. 442-6-I-2° du code de commerce dans sa rédaction applicable à la cause ;
3) Alors que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu’au cas présent, les exposants avaient visé dans leurs conclusions d’appel et versé aux débats un courrier en date du 8 juin 1998 par lequel la SARL EAS FRET exprimait son vif désaccord sur les nouvelles conditions financières qui lui étaient imposées par la société DHL EXPRESS ; qu’en affirmant néanmoins que la SARL EAS FRET « n’a jamais remis en cause, de 1996 à 2004, les tarifs convenus avec DHL, la seule réclamation de son gérant, M. Y., concernant en 2004 le tarif de 165 € par jour et par route pour le Morbihan » (arrêt p. 5 par. 9), sans examiner ni même viser ce document qui lui était soumis, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile.