CA MONTPELLIER (1re ch. sect. B), 22 mai 2013
CERCLAB - DOCUMENT N° 4468
CA MONTPELLIER (1re ch. sect. B), 22 mai 2013 : RG n° 11/08399
Publication : Jurica
Extrait : « Aux termes de l’article 1147 du code civil, […]. Aux termes de l’article 1150 du code civil, […]. Il s'évince de ces dispositions que les clauses contractuelles limitatives d'indemnisation, sous réserve qu'elles ne soient pas abusives, sont licites et doivent en principe trouver application, mais que le débiteur ne peut s'en prévaloir en cas de faute lourde ou de dol.
Alors qu'en l'espèce des clauses du contrat de déménagement, expressément et clairement limitatives du droit à indemnisation, sont opposés tant par l'appelant que par ses assureurs, le premier juge a omis, avant d'examiner les postes de préjudices tels que sollicités par les demandeurs, d'analyser si la faute de la société de déménagement constituait une faute lourde susceptible d'évincer ces clauses limitatives. Or, ces clauses contenues aux articles 12, 13 et 14 des conditions générales du contrat de déménagement définissant la responsabilité de l'entreprise, limitent la responsabilité aux cas de retard (article 12) et de pertes et avaries (article 13) et limitent en conséquence l'indemnisation des préjudices tant dans la définition des postes (retard, pertes et avaries) que dans le quantum. En effet, l'article 14, relatif à l'indemnisation pour pertes et avaries stipule notamment que cette indemnisation intervient dans la limite du préjudice matériel prouvé et des conditions particulières de la garantie DEMECO choisie, fixant le montant de l'indemnisation maximum pour la totalité du mobilier et pour chaque objet ou élément de mobilier ou figurant sur une liste valorisée.
Il s'en évince que l'indemnisation pour pertes et avaries n'est pas différente en cas de responsabilité contractuelle pour faute prouvée ou dans le cas de celle résultant d'une présomption : dans les deux hypothèses, seul le préjudice matériel est indemnisable, et ce dans la double limite de la déclaration de valeur dès lors qu'elle existe (ou à défaut de l'indemnisation maximum consentie) qui constitue le plafond de l'indemnité et du préjudice prouvé. Dès lors, il ne suffit pas pour faire échec à ces clauses limitatives de démontrer une faute contractuelle, encore faut-il la caractériser comme constituant à minima une faute lourde. C'est donc à tort que le premier juge qui a fait intégralement droit aux demandes d'indemnisations des préjudices tels que résultant du règlement effectué par la MAIF, y compris pour des préjudices immatériels et imprévisibles, a cru pouvoir se dispenser de cette analyse préalable. »
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
PREMIÈRE CHAMBRE SECTION B
ARRÊT DU 22 MAI 2013
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11/08399. Décision déférée à la Cour : Jugement du 8 NOVEMBRE 2011 - TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER : R.G. n° 08/04547.
APPELANTE :
SARL AT OCEAN INDIEN exerçant à l'enseigne DEMECO
représentée par son représentant légal domicilié ès qualités audit siège social, représentée par la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants et Maître Philippe GODIN, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
INTIMÉS :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], de nationalité Française, représenté par la SCP LAFONT - GUIZARD - CARILLO, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant
Madame Y. épouse X.
née le [date] à [ville], de nationalité Française,
[adresse], représentée par la SCP LAFONT - GUIZARD - CARILLO, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant
MARSH
prise en la personne de son président du conseil d'administration en exercice, représentée par la SCP ERIC NEGRE, MARIE CAMILLE PEPRATX NEGRE, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants et Maître Fabrice RENAUDIN, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant
Société AVERO BELGIUM
société de droit étranger, représentée en la personne de son gérant domicilié ès qualités audit siège social, représentée par la SCP ERIC NEGRE, MARIE CAMILLE PEPRATX NEGRE, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants et Maître Fabrice RENAUDIN, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant
Société NATEUS
société de droit étranger, représentée en la personne de son gérant, domicilié ès qualités audit siège social, représentée par la SCP ERIC NEGRE, MARIE CAMILLE PEPRATX NEGRE, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants et Maître Fabrice RENAUDIN, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant
Société BELMARINE
représentée en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège social, représentée par la SCP ERIC NEGRE, MARIE CAMILLE PEPRATX NEGRE, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants et Maître Fabrice RENAUDIN, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant
Société J. VERHEYEN
société de droit étranger, représentée en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège social, représentée par la SCP ERIC NEGRE, MARIE CAMILLE PEPRATX NEGRE, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants et Maître Fabrice RENAUDIN, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant
Société FORTIS CORPORATE INSURANCE
société de droit étranger, représentée en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège social, représentée par la SCP ERIC NEGRE, MARIE CAMILLE PEPRATX NEGRE, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants et Maître Fabrice RENAUDIN, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant
COMPAGNIE D'ASSURANCES MUTUELLE ASSURANCE DES INSTITUTEURS DE FRANCE - MAIF
société d'assurances à forme mutuelle et cotisation variable, dont le siège social est à NIORT (79) agissant en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités audit siège social [adresse], représentée par la SCP LAFONT - GUIZARD - CARILLO, avocats au barreau de MONTPELLIER
SA CMA CGM
représentée par la SCP JANBON - GALLOY, avocats au barreau de MONTPELLIER
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 13 février 2013
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 6 MARS 2013, en audience publique, Madame Chantal RODIER ayant fait le rapport prescrit par l’article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de : Monsieur Mathieu MAURI, Président, Madame Chantal RODIER, Conseiller, Madame Marianne FEBVRE-MOCAER, Vice-Présidente placée déléguée par ordonnance de Monsieur le Premier Président du 7 janvier 2013, qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Madame Myriam RUBINI
L'affaire mise en délibéré au 10 avril 2013 a été prorogée au 15 mai puis au 22 mai 2013.
ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile ; - signé par Monsieur Mathieu MAURI, Président, et par Madame Myriam RUBINI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Selon devis n° 9XX5/1 accepté le 10 avril 2007, Monsieur et Madame X. confiaient à la société AT Océan Indien, exerçant sous l'enseigne DEMECO, le déménagement de leurs meubles et véhicules depuis leur domicile dans l'île de la Réunion jusqu'à leur nouveau domicile à Montpellier. Ce déménagement était organisé pour commencer le 22 juin 2007 et une facture était établie le 19 juin 2007.
La société AT Océan Indien (ATOI) empotait les meubles le 22 juin 2007 sous conteneur ECMU n° 97YY87, fourni par la société CMA CGM en sa qualité de transporteur maritime. La société AT Océan Indien établissait et signait la lettre de voiture et confiait le conteneur au transporteur maritime.
La société CMA CGM procédait ensuite à l'embarquement du conteneur le 28 juin 2007 pour un débarquement prévu au port de Fos sur Mer.
Le 10 août 2007, le conteneur était déchargé par la société PROLOG International, puis transporté par la société SE GTM depuis le port de Fos sur Mer jusqu'aux locaux de la SARL DFT, situés [adresse].
La SARL DFT réceptionnait le conteneur le 13 août 2007 et constatait à son ouverture de très importants dommages de moisissures et d'humidité.
La SARL DFT avertissait immédiatement la société PROLOG International, laquelle, par fax du 13 août 2007 émettait des réserves tant auprès de la société AT Océan Indien que de la société CMA CGM. Elle confirmait ces réserves par courriers recommandés en date du 14 août 2007.
Les époux X. [obtenaient] par ordonnance du juge des référés du 25 septembre 2007 l'instauration d'une mesure d'expertise confiée à Monsieur Fourcade.
* * *
Parallèlement aux opérations d'expertise, les époux X. et leur assureur la MAIF faisaient délivrer, par actes des 7 et 8 août 2008, assignation devant le tribunal de grande instance de Montpellier à :
- la SARL AT Océan Indien, soit le déménageur,
- la SA CMA CGM, soit le transporteur maritime et fournisseur du conteneur,
- la SARL PROLOG international, chargée du débarquement à Fos sur mer,
- la société MARSH, courtier auprès duquel une assurance avait été souscrite par la SARL AT Océan Indien.
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Par exploit du 4 septembre 2008, La société MARSH ainsi que les 5 compagnies d'assurance, sociétés de droit belge, que sont AVERO BELGIUM, NATEUS, BELMARINE, FORTIS CORTORATE INSURANCE, et VERRAYEN auprès desquelles le courtier MARSH avait assuré la SARL AT Océan et lesquelles intervenaient volontairement, appelaient en garantie le transporteur maritime, soit la SA CMA CGM.
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Par acte d'huissier du 30 octobre 2008, la société CMA CGM appelait à son tour en garantie les sociétés suivantes :
- la SARL AT Océan Indien,
- la SARL PROLOG international
- la société MARSH,
- les 5 compagnies d'assurance de droit belge, AVERO BELGIUM, NATEUS, BELMARINE, FORTIS CORTORATE INSURANCE, et VERRAYEN.
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Par ordonnance du 18 juin 2009 les appels en garantie étaient joints à l'affaire principale.
Le rapport d'expertise était déposé le 30 octobre 2008.
En cours d'instance, les époux X. et leur assureur la MAIF sollicitaient la condamnation de :
- la SARL AT Océan Indien,
- la société MARSH,
- les 5 compagnies d'assurance de droit belge, AVERO BELGIUM, NATEUS, BELMARINE, FORTIS CORTORATE INSURANCE, et VERRAYEN,
- la SA CMA CGM.
En revanche, les demandeurs - les époux X. et leur assureur - ne formaient plus de demande à l'encontre de la société PROLOG Internationale, sa responsabilité dans le dommage n'ayant pas été retenue par l'expert.
Les parties concluaient au fond en lecture du rapport d'expertise.
Seule la SARL SEGTM, à laquelle - tout comme à la SARL DFT - l'assignation avait été dénoncée à la requête de la SARL PROLOG international, n'était pas représentée.
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Par jugement réputé contradictoire du 8 novembre 2011, le tribunal de grande instance de MONTPELLIER a :
- débouté la SARL AT Océan Indien, la SARL PROLOG international, la SARL DFT de leur demande tendant à voir déclarer nulle l'assignation introductive d'instance délivrée à la requête de M. et Mme X. et la MAIF,
- jugé recevables les demandes de M. et Mme X. et la MAIF,
- déclaré la SARL AT Océan Indien, exerçant à l'enseigne DEMECO, responsable du préjudice de M. et Mme X. et la MAIF,
- condamné la SARL AT Océan Indien à payer :
- à la MAIF la somme de 121.956,88 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du paiement ayant donné lieu à quittances subrogatives,
- M. et Mme X. la somme de 9.745,48 euros,
- à la MAIF et M. et Mme X. la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
- débouté M. et Mme X. et la MAIF du surplus de leur demande,
- condamné la SARL AT Océan Indien à payer à la SARL PROLOG International la somme de 2.332,41 euros assortie des intérêts au taux légal avec capitalisation en application de l’article 1154 du code civil,
- débouté les parties de toutes autres demandes réciproques au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SARL AT Océan Indien aux dépens, en ce compris les frais d'expertise.
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APPEL
La SARL AT Océan Indien, exerçant à l'enseigne DEMECO, a relevé appel de ce jugement par déclaration du 8 décembre 2011 à l'encontre de :
- M. et Mme X. et la MAIF,
- la SA CMA CGM.
Cette affaire était enregistrée sous le n° 11.08399.
Par acte du 7 mai 2012, M. et Mme X. et la MAIF ont signifié un appel provoqué, dans le dossier n° 11/08399 à :
- la société MARSH,
- les 5 compagnies d'assurance de droit belge, AVERO BELGIUM, NATEUS, BELMARINE, FORTIS CORTORATE INSURANCE, et VERRAYEN.
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La SARL AT Océan Indien a inscrit un deuxième appel le 9 février 2012 en intimant :
- à nouveau : M. et Mme X. et la MAIF, la SA CMA CGM,
- mais aussi cette fois : la société MARSH et les 5 compagnies d'assurance de droit belge, AVERO BELGIUM, NATEUS, BELMARINE, FORTIS CORTORATE INSURANCE, et VERRAYEN.
Cette affaire a été enregistrée sous le n°12/01002.
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Par ordonnance du 15 novembre 2012, les deux affaires ont été jointes sous le sous le n° 11/08399.
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Dans ses dernières conclusions en date du 11 février 2013 la SARL AT Océan Indien, exerçant à l'enseigne DEMECO demande à la cour :
D'infirmer le jugement et statuant à nouveau de :
- Dire et déclarer la MAIF et les époux X., irrecevables et mal fondés en leurs demandes dirigées à son encontre, et les en débouter,
- S'entendre la MAIF et les époux X. condamner à lui payer la somme de 10.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
- Les condamner aux dépens de première instance et d'appel,
Subsidiairement
Juger que l'indemnité pouvant être mise à sa charge ne saurait excéder la somme de 30.150 euros,
Et très subsidiairement, celle de 63.421,56 euros
- Dire que les sociétés MARSH et les 5 compagnies d'assurance, AVERO BELGIUM, NATEUS, BELMARINE, FORTIS CORTORATE INSURANCE, et VERRAYEN, et la société CMA CGM mal fondées en leurs moyens de défense aux demandes formées par les époux X. et la MAIF,
- S'entendre des sociétés MARSH, AVERO BELGIUM, NATEUS, BELMARINE, FORTIS CORTORATE INSURANCE, et VERRAYEN, et CMA CGM condamnées à lui payer la somme de 10.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
- Et les condamner au paiement des dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement direct pour ceux d'appel au profit de la SCP AUCHE-HEDOU, en application de l’article 699 du code de procédure civile.
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Dans leurs dernières conclusions en date du 7 mai 2012 M. et Mme X. et la MAIF demandent à la cour au visa des articles 1147, 1134 du code civil, de l’article L. 132-5 du code de commerce, L. 132-1 du code de la consommation, L. 3-1 du code des assurances, de l’article L. 121-12 du code des assurances, de :
Confirmer le jugement en ce qu'il a :
- déclaré recevable l'action de la MAIF,
- déclaré la société SARL AT Océan Indien responsable des dommages subis,
- condamné la SARL AT Océan Indien à payer :
- à la MAIF la somme de 121.956,88 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du paiement ayant donné lieu à quittances subrogatives,
- à M. et Mme X. la somme de 9.745,48 euros,
- à la MAIF et M. et Mme X. la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Faisant droit à leur appel incident contre :
- d'une part CMA CMG (le transporteur maritime)
- d'autre part le courtier MARSH, et les 5 compagnies d'assurances AVERO BELGIUM, NATEUS, BELMARINE, FORTIS CORTORATE INSURANCE, et VERRAYEN,
Infirmer le jugement et dire que la responsabilité de la SA CMA CMG est engagée sur le fondement de l’article 27 de la loi n° 66-420 du 18 juin 1966,
Infirmer le jugement et juger que les assureurs doivent intégralement garantir ATOI tant au titre de la garantie responsabilité civile qu'au titre de la garantie des facultés maritimes,
Condamner en conséquence in solidum la SARL AT Océan Indien, la société MARSH, les 5 compagnies d'assurances AVERO BELGIUM, NATEUS, BELMARINE, FORTIS CORTORATE INSURANCE, et VERRAYEN, et la société SA CMA CMG à payer :
- à la MAIF la somme de 121.956,88 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du paiement ayant donné lieu à quittances subrogatives,
- M. et Mme X. la somme de 9.745,48 euros,
Condamner les mêmes à leur verser 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Et aux dépens, avec application de l’article 699 du code de procédure civile pour la SCP LAFONT, CARILLO, GUIZARD
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Dans leurs dernières conclusions en date du 4 février 2013 la société MARSH et les 5 compagnies d'assurance, AVERO BELGIUM, NATEUS, BELMARINE, FORTIS CORTORATE INSURANCE, et VERRAYEN demandent à la cour de :
Débouter la société AT Océan Indien (ATOI) de son action à leur encontre étant des demandes nouvelles irrecevables en appel ;
Débouter la société AT Océan Indien (ATOI) de son action à leur encontre étant irrecevable pour cause de prescription biennale ;
Subsidiairement :
Mettre la société MARSH hors de cause,
Débouter la MAIF et les époux X. de leurs entières demandes comme irrecevables pour défaut d'intérêt et de qualité à agir,
A titre plus subsidiaire, limiter les réclamations des demandeurs à l'encontre de la société ATOI à 30.150 euros (limitation contractuelle de garantie à 450 euros/m3),
A titre infiniment subsidiaire, limiter les réclamations des demandeurs à l'encontre de la société ATOI à 77.213,02 euros (montant retenu par l'expert),
En tout état de cause, débouter tout réclamant de ses entières demandes à leur encontre,
Condamner la société CMA CGM à relever et garantir les 5 compagnies d'assurance concluantes de toutes condamnations qui pourraient éventuellement être prononcées à leur encontre, tant en principal, accessoires, intérêts de droit, frais irrépétibles et dépens,
Condamner tout succombant à leur verser la somme de 10.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SCP Nègre-Pepratx, en application de l’article 699 du code de procédure civile.
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Dans ses dernières conclusions en date du 24 janvier 2013, la société CMA CGM demande à la cour de :
Débouter les appelants de leur appel en garantie à son encontre,
Confirmer le jugement entrepris,
Condamner la société AT Océan Indien et/ou les époux X. et/ou tout autre succombant à lui régler une somme de 5.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
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L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 février 2013.
Le 11 février, deux jours avant l'ordonnance de clôture, la SARL AT Océan Indien, appelante déposait de nouvelles conclusions.
Par conclusions du 13 février 2013, la société MARSH et les 5 compagnies d'assurance, sociétés de droit belge, AVERO BELGIUM, NATEUS, BELMARINE, FORTIS CORTORATE INSURANCE, et VERRAYEN, déposaient des conclusions d'incident de rejet, motifs pris que les conclusions de l'appelante étaient déposées 2 jours avant la clôture ce qui ne leur permettait pas de répondre.
Par conclusions en réponse sur incident de rejet de ses dernières conclusions, la SARL AT Océan Indien, appelante faisait observer que les intimés avaient déposé leurs dernières conclusions les 30 janvier et 14 février 2013, de sorte que cela ne lui laissait guère de temps pour répondre ; que les intimés ne caractérisent pas de circonstances particulières qui les empêchent de répondre à nouveau en demandant la révocation de l'ordonnance de clôture.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS :
I - Sur l'incident de procédure :
En l'absence d'atteinte au principe du contradictoire par les conclusions de l'appelante déposées 2 jours avant la clôture, en ce qu'elles faisaient suite à des conclusions de plusieurs parties intimées, l'incident est rejeté et toutes les conclusions avant clôture sont admises.
II - Sur les fins de non-recevoir :
La compagnie d'assurance la MAIF, en produisant les conditions générales et particulières de la police d'assurance souscrite par les époux X. auprès d'elle, démontre que ce contrat couvrait les risques de ce déménagement. Elle justifie d'avoir indemnisé les époux X. de sorte qu'elle est subrogée dans les droits de ceux-ci à hauteur des quittances subrogatives qu'elle produit, ce qui démontre son intérêt à agir.
Le premier juge a justement rappelé les dispositions spéciales de l’article L. 121-12 du code des assurances applicables en la matière et aux termes desquelles « l'assureur qui a payé l'indemnisation d'assurance est subrogé jusqu'à concurrence de cette indemnité dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ». Ce texte trouve application quel que soit le fondement de la responsabilité, et donc en l'espèce s'agissant de la responsabilité contractuelle.
Les fins de non-recevoir tirées du défaut de qualité et d'intérêt à agir seront donc en voie de rejet et le jugement confirmé sur ce point.
Par ailleurs les fins de non-recevoir opposées par la société MARSH et les 5 compagnies d'assurances à la société AT Océan Indien sont sans objet, cette dernière, au vu de ses dernières conclusions, s'étant abstenue de former appel en garantie à leur encontre.
III - Sur la responsabilité contractuelle :
Sur l'expertise :
[1.] Le rapport d'expertise judiciaire, réalisé au contradictoire des parties, procédant à une analyse objective des données de fait de la cause, à une étude complète et détaillée des questions posées dans sa mission, et retenant des conclusions sérieusement motivées par des arguments techniques, doit servir sur le plan technique de support à la décision relativement au litige opposant les parties.
L'expert a répondu de façon complète, argumentée et détaillée aux dires des parties.
Cette expertise a permis d'établir les éléments suivants :
- les biens transportés dans le conteneur consistaient en des colis, des meubles, deux véhicules et un scooteur pour lesquels aucune réserve n'a été émise lors de l'embarquement.
- l'empotage des biens a été effectué à la Réunion par temps sec et les moisissures constatées lors de l'ouverture du conteneur ne sont pas imputables aux conditions climatiques lors du chargement.
- le conteneur était scellé lors de sa remise au terminal des conteneurs à pointe des Galets à la Réunion le 22 juin 2007 et a été embarqué le 28 juin 2007.
- il a été déchargé à Port Kelang en Malaisie le 6 juillet 2007 où il a séjourné 10 jours en escale dans des conditions de stockage non connues.
- le 16 juillet 2007, il était embarqué sur un autre navire qui l'a transporté jusqu'à Fos-sur-mer où il est arrivé le 4 août 2007 et livré à son destinataire le 10 août 2007.
- des moisissures généralisées étaient constatées à l'ouverture du conteneur sur l'ensemble du mobilier, des effets emballés ainsi que sur les véhicules.
- le conteneur a été constaté vide et sans dommage le 13 août 2007, notamment exempt de trous, la société PROGECO n'ayant dû procéder qu'à un simple nettoyage, selon devis du 13 août 2007. Le constat du conteneur fermé lors de son débarquement à Fos le 4 août 2007 indiquait : « aucune réserve »
- les tests effectués au nitrate d'argent ont permis d'éliminer l'hypothèse de pollution par eau de mer.
- les traces d'humidité proviennent dès lors d'un excès de condensation généralisée : cette condensation intérieure très importante est consécutive à des conditions climatiques tropicales à très forte humidité à Port Kelang en Malaisie et à des variations de températures durant le transport par mer.
- la ventilation était insuffisante et déficiente compte-tenu de l'entassement des colis.
Aux termes de ses conclusions, l'expert a pu déterminer la cause du sinistre comme résultant des éléments suivants : « La ventilation dans le conteneur était insuffisante et déficiente compte tenu de l'entassement des colis », et compte tenu de la condensation générée par les différences de températures prévisibles sur les étapes du trajet, « il appartenait à AT Océan Indien de prendre toutes dispositions utiles à l'empotage du conteneur pour préserver les biens des époux X. en assurant notamment une parfaite ventilation à l'intérieur, ce qui manifestement à notre avis n'a pas été réalisé, et en utilisant en quantité suffisante des absorbeurs d'humidité usuellement employés »
2. Au regard de ces éléments, la faute contractuelle de la société AT Océan Indien est caractérisée en ce que :
- tant l'humidité du climat de l'escale en Malaisie que les variations de températures au cours du trajet étaient des circonstances connues ou à tout le moins prévisibles, de sorte qu'en sa qualité de professionnel en charge de l'organisation du déménagement, elle a commis une faute contractuelle d'analyse en négligeant de les prendre en compte pour définir la méthode d'empotage.
- en conséquence de ce défaut d'analyse du trajet, elle n'a pas mis en nombre suffisant dans le conteneur et dans les cartons les absorbeurs d'humidité que l'on place usuellement dans cette hypothèse. Au regard de l'entassement des colis, elle n'a pas assuré comme elle aurait dû le faire, une ventilation suffisante à l'intérieur du conteneur.
3. Sur le caractère exonératoire de cette faute pour le transporteur maritime :
Aux termes de l’article L. 5422-12 du code des transports maritimes, issu de l’article 27 G de la loi du 18 juin 1966, le transporteur est responsable des pertes ou dommages subis par la marchandise depuis la prise en charge jusqu'à la livraison, à moins qu'il prouve que ces pertes ou dommages proviennent de l'une des causes énumérées à cet article, et notamment en son 6°, des fautes du chargeur, notamment dans l'emballage, le conditionnement ou le marquage des marchandises.
En l'espèce, la faute caractérisée de la société de déménagement AT Océan Indien, qui est en l'espèce le chargeur, dans la préparation, est établie par l'expertise, ce qui exonère de toute responsabilité de la société CMA CGM qui s'en prévaut.
C'est bien le déménageur, et non le transporteur maritime qui n'est que l'un de ses délégataires de prestations, qui prévoit l'ensemble du parcours du déménagement. La société AT Océan Indien n'ignorait pas la nécessaire escale en Malaisie, puisque déjà 4 mois avant le début du déménagement, la ligne directe était supprimée. En outre, le débarquement a eu lieu bien avant la date initialement prévue, de sorte que l'escale en Malaisie aurait pu être encore plus longue que 10 jours, ce qui démontre de plus fort la connaissance que la société de déménagement avait de cette escale.
Le dommage est donc imputable à la faute exclusive de la société de déménagement, laquelle doit prévoir les conditions d'empotage en fonction du trajet qu'elle étudie elle-même. Elle remet au transporteur un conteneur scellé avant son chargement, dont celui-ci ignore les conditions d'empotage, les modalités d'entassement et de calage des colis, les conditions de ventilation interne du containeur et les précautions prises ou non concernant les absorbeurs d'humidité.
Les dommages, dus au phénomène dit de « buée de cale », dès lors qu'ils sont consécutifs à un défaut de ventilation dans le conteneur lui-même et à un manque d'absorbeurs d'humidité qui n'ont pas été placés dans celui-ci par le chargeur en nombre suffisants, ne sont pas imputables au transporteur mais à seule la faute du chargeur.
En outre, à aucun moment l'étanchéité du conteneur n'a fait l'objet de réserves, ni au départ, ni à l'arrivée par les intermédiaires, tandis que, par ailleurs, les tests pratiqués par l'expert excluent toute imputation de dommage à de l'eau de mer, de sorte que la responsabilité de la société CMA CGM ne peut davantage être engagée à raison d'un défaut de qualité du conteneur dont elle est le fournisseur.
C'est donc à bon droit que le premier juge a retenu la responsabilité contractuelle de la société AT Océan Indien et mis hors de cause la société CMA CGM.
Le jugement sera donc confirmé sur ces points.
Sur l'analyse des documents contractuels de déménagement et sur les préjudices indemnisables :
Sur l'existence de clauses limitatives d'indemnisation :
Aux termes de l’article 1147 du code civil, le débiteur est condamné s'il y a lieu au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise fois de sa part.
Aux termes de l’article 1150 du code civil, le débiteur n'est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou que l'on a pu prévoir lors du contrat, lorsque ce n'est point par son dol que l'obligation n'a point été exécutée.
Il s'évince de ces dispositions que les clauses contractuelles limitatives d'indemnisation, sous réserve qu'elles ne soient pas abusives, sont licites et doivent en principe trouver application, mais que le débiteur ne peut s'en prévaloir en cas de faute lourde ou de dol.
Alors qu'en l'espèce des clauses du contrat de déménagement, expressément et clairement limitatives du droit à indemnisation, sont opposés tant par l'appelant que par ses assureurs, le premier juge a omis, avant d'examiner les postes de préjudices tels que sollicités par les demandeurs, d'analyser si la faute de la société de déménagement constituait une faute lourde susceptible d'évincer ces clauses limitatives.
Or, ces clauses contenues aux articles 12, 13 et 14 des conditions générales du contrat de déménagement définissant la responsabilité de l'entreprise, limitent la responsabilité aux cas de retard (article 12) et de pertes et avaries (article 13) et limitent en conséquence l'indemnisation des préjudices tant dans la définition des postes (retard, pertes et avaries) que dans le quantum.
En effet, l'article 14, relatif à l'indemnisation pour pertes et avaries stipule notamment que cette indemnisation intervient dans la limite du préjudice matériel prouvé et des conditions particulières de la garantie DEMECO choisie, fixant le montant de l'indemnisation maximum pour la totalité du mobilier et pour chaque objet ou élément de mobilier ou figurant sur une liste valorisée.
Il s'en évince que l'indemnisation pour pertes et avaries n'est pas différente en cas de responsabilité contractuelle pour faute prouvée ou dans le cas de celle résultant d'une présomption : dans les deux hypothèses, seul le préjudice matériel est indemnisable, et ce dans la double limite de la déclaration de valeur dès lors qu'elle existe (ou à défaut de l'indemnisation maximum consentie) qui constitue le plafond de l'indemnité et du préjudice prouvé.
Dès lors, il ne suffit pas pour faire échec à ces clauses limitatives de démontrer une faute contractuelle, encore faut-il la caractériser comme constituant à minima une faute lourde.
C'est donc à tort que le premier juge qui a fait intégralement droit aux demandes d'indemnisations des préjudices tels que résultant du règlement effectué par la MAIF, y compris pour des préjudices immatériels et imprévisibles, a cru pouvoir se dispenser de cette analyse préalable.
Sur l'existence d'une faute lourde et sur l'absence de faute dolosive :
Il n'est certes pas soutenu par les époux X. et la MAIF que la négligence grave de la société de déménagement puisse constituer une faute dolosive, mais ils exposent qu'elle constitue une faute lourde, laquelle est suffisante pour mettre en échec les limitations contractuelles et élargir la réparation des préjudices.
Il est certain que la totalité des biens transportés ont subis l'avarie de l'humidité prolongée ayant généré des moisissures au cours du trajet, de sorte que le préjudice matériel concerne la totalité des meubles et objets du déménagement dont une partie importante s'avère irrécupérable.
La lourdeur de la faute se déduit en partie de ces conséquences, mais consiste également dans le comportement du professionnel lequel a, de façon flagrante, manqué de réflexion dans la préparation du déménagement en négligeant des paramètres importants, puis a dans sa mise en œuvre a manqué aux règles de l'art, en omettant de se préoccuper de la ventilation nécessaire à l'intérieur du conteneur et de placer des absorbeurs d'humidité que l'expert qualifie pourtant d'usuels, tant le cas est connu. Le phénomène de buée de cale est en effet si connu dans la profession que les parties n'ont pas manqué de discuter cette question au cours de l'expertise. L'expert a bien qualifié à cet égard ces dommages matériels de prévisibles, en ce que le lieu et la durée de l'escale comme les conditions d'humidité et de température habituelles en Malaisie sont des éléments connus ou prévisibles. La société AT Océan Indien, est un professionnel exerçant en outre en milieu insulaire et dans des zones tropicales, de sorte que les spécificités des déménagements par voie maritime lui sont connues, ce qui rend son comportement négligent d'autant plus inexcusable.
En conséquence de cette faute lourde caractérisée, l'indemnisation ne sera pas limitée aux seuls préjudices matériels et de retard des articles 12 à 14 du contrat.
Cependant, en l'absence de faute dolosive, seuls les préjudices prévus ou prévisibles lors de la conclusion du contrat peuvent donner lieu, en application des dispositions de l’article 1150 du code civil, à une indemnisation dans le cadre de la responsabilité contractuelle.
Sur l'évaluation en conséquence des préjudices indemnisables :
Sur le préjudice matériel :
Pour calculer ce préjudice, l'expert s'est fondé sur la déclaration de valeur effectuée par les époux X. pour déterminer le plafond indemnitaire de référence de chaque bien, et y a appliqué les coefficients de vétusté correspondant.
Il est constant que lorsque le client a fait une déclaration de valeur, ce document contractuel se substitue à l'évaluation antérieure du devis. Pour être prise en compte, il suffit qu'elle ait été signée et remise au déménageur avant le déménagement.
En l'espèce, le document produit par les victimes en leur pièce 23, constitue bien la déclaration de valeur contractuelle : établie sur papier à en-tête DEMECO avec une liste de tous les meubles et effets dépassant la somme de 46 euros, pièce par pièce comme il est d'usage, la valeur globale garantie étant de 103.030 euros et celle des véhicules de 21.100 euros. Datée du 20 juin 2006, soit deux jours avant le début des opérations de déménagement, elle se substitue au devis établi le 17 avril 2007.
Contrairement à ce que soutient l'appelante, qui ne conteste pas par ailleurs sa remise, ce document contractuel, quand bien même il a été également utilisé lors de la déclaration de douane pour justifier du contenu du conteneur, n'était cependant pas établi à cette fin, mais bien à celle de déterminer, entre les parties, les valeurs particulières d'objets ciblés et la valeur globale garantie.
L'argument d'une absence de modification du devis est inopérante en ce que la déclaration de valeur n'était pas de nature à modifier le coût du déménagement, lequel résulte essentiellement de la distance entre la Réunion et la Métropole, du transport maritime délégué à un partenaire, et de la prestation déménagement « 3 étoiles » caractérisée par « l'emballage et le déballage de toutes vos affaires et non uniquement du fragile ». Le fait que tel ou tel meuble soit listé dans la déclaration de valeur comme ayant une valeur unitaire supérieure à celle résultant du volume exprimé en m3 était sans incidence en définitive sur le coût total du déménagement lui-même.
Par ailleurs, si la lettre de voiture ne mentionne pas les montants de la déclaration de valeur, il en mentionne cependant l'existence ainsi que celle d'un plafond d'indemnisation à 46 euros par objet non listé sur cette déclaration de valeur.
L'appelant et ses assureurs sont donc mal fondés à contester cette déclaration de valeur, laquelle a pu utilement servir de base aux calculs de l'expert.
En considération des dires portant sur la maladie de Monsieur X., consistant en une contre-indication médicale - qualifiée de vitale - de contact avec les moisissures et spores, l'expert a répondu aux dires des parties sur ce point, en proposant trois évaluations possibles :
- Sans tenir compte de l'état de santé de la famille X. : 54.004,14 euros (incluant le coût de nettoyage des tapis, vêtements, literies pour les rendre récupérables)
- En tenant compte que seul le mobilier (meubles, vaisselle, argenterie) peut être récupérable avec un nettoyage approprié : 61.117 euros
- En tenant compte de la mise au rebut de tous les biens : 81.576 euros.
Dans ces trois calculs, les véhicules repris par la MAIF à l'état d'épave sont considérés par l'expert comme étant en toutes hypothèses économiquement irrécupérables, et ce indépendamment de la contre-indication médicale de Monsieur X. à la présence de spores et moisissures.
Force est de constater que n'est pas prévisible pour le déménageur la circonstance qu'un des membres de la famille X. ait une incompatibilité médicale à tout contact avec les moisissures : le fait que les époux X. aient, pour cette raison, dû se séparer du mobilier et des effets estimés par l'expert comme récupérables avec un nettoyage approprié, ne peut être opposé à l'appelante.
En effet, alors qu'aucune faute dolosive n'est même seulement alléguée, et que la faute lourde est inefficace pour évincer la limitation aux préjudices prévisibles résultant de l'application de l’article 1150 du code civil en matière de responsabilité contractuelle, c'est donc à tort que le premier juge a retenu l'évaluation de ce préjudice à hauteur de 91.020 euros, en ne se fondant d'ailleurs sur aucune des propositions de l'expert, et en se contentant de faire droit aux demandes, motifs pris du versement par la MAIF des sommes de 77.677 euros pour le mobilier et 13.343 euros pour les véhicules.
Le jugement sera donc infirmé sur ce point et tenant l'absence de faute dolosive, le préjudice matériel sera établi à la somme de 54.004,14 euros, faisant abstraction de la circonstance imprévisible de l'état de santé de membres de la famille X.
Sur l'indemnisation des préjudices résultant du retard dans la remise des meubles en raison des nécessités d'une expertise :
Les frais de garde-meubles sont consécutifs à la nécessité de l'expertise mais leur indemnisation ne se justifie pas au-delà de la fin de cette mesure, de sorte qu'ils ne seront pris en compte que pour le montant arrêté par l'expert au mois d'août 2008 à la somme de 16.047,56 euros. Cette prise en charge est conforme à l'application de l'article 12 du contrat relatif au préjudice résultant du retard.
Le préjudice de jouissance du mobilier pendant un an, fort justement retenu par l'expert à hauteur de 300 euros par mois, est prévisible dès lors que des avaries rendent ce mobilier inutilisable en l'état et que part ailleurs les nécessités d'une expertise génèrent son immobilisation en garde meubles. Ce préjudice qui peut en outre être rattaché aux frais résultant du retard de l'article 12, s'établit donc à la somme de 3.600 euros.
Les frais divers (frais d'hôtel et de restaurant de 953 euros, de location de voiture pour 192 euros, et de documents pour 115 euros) sont également des préjudices liés au retard et aux nécessités de l'expertise rattachables aux préjudices indemnisables au titre de l'article 12 du contrat.
Sur les autres préjudices :
Dès lors qu'une famille effectue un déménagement complet pour un nouveau domicile et emporte avec elle tous ses souvenirs, le préjudice moral et affectif résultant pour elle de la perte partielle ou totale de biens dotés d'une valeur affective, est prévisible au moment de la conclusion du contrat par l'effet d'une présomption des faits de l'homme. En conséquence, ce préjudice immatériel est indemnisable du seul fait de la faute lourde caractérisée, et ce même en l'absence de tout dol.
Ce préjudice dont le principe de l'indemnisation était laissé par l'expert à l'appréciation de la juridiction était estimé par celui-ci à la somme de 2.000 euros qui sera retenue par la cour.
Le jugement sera sur ce point confirmé.
Par ailleurs, c'est à bon droit que le premier juge n'a pas fait droit à la demande de préjudice formée par les époux X. pour l'attente subie jusqu'à leur indemnisation par la MAIF et les contrariétés afférentes à tout litige judiciaire.
En définitive, les préjudices indemnisables par la société de déménagement dans le cadre de sa responsabilité contractuelle compte-tenu de sa faute lourde mais de l'absence de faute dolosive s'établit à :
Préjudice matériel (article 14 du contrat) : 54.004,14 euros
(Inférieur à la déclaration de valeur)
Préjudices liés au retard (article 12 du contrat) : 20.907,56 euros (= 16.047,56 euros + 3.600 euros + 953 euros + 192 euros + 115 euros)
Préjudice immatériel (indemnisable en raison de la faute lourde) : 2.000 euros
Total = 76.911,70 euros.
Or, les époux X. ont déjà été indemnisés par la MAIF à hauteur de 91.020 euros et lui ont délivré quittance subrogative pour ce montant.
En conséquence, les époux X. qui ont déjà perçu par la MAIF une somme couvrant pleinement le montant totalisé de leurs préjudices indemnisables, verront leurs demandes en voie de rejet.
Seule la MAIF, subrogée dans leurs droits reste créancière en application de cette subrogation.
La société AI Océan Indien sera donc condamnée à régler à la MAIF la somme de 76.911,70 euros.
Le jugement sera donc, par motifs ajoutés, confirmé sur le principe de la condamnation prononcée, mais infirmé en son montant.
IV - Sur l'action directe et sur l'analyse des contrats d'assurance :
Force est de constater, qu'en dépit des nombreux appels en garantie croisés existant dans le litige, la société AT Océan Indien n'a quant à elle jamais appelé ses assureurs en garantie. Ne l'ayant pas fait devant le premier juge, il s'évince de ses dernières conclusions qu'elle s'abstient de le faire en cause d'appel.
Dès lors, la condamnation in solidum avec l'assuré, de la société MARSH et/ou des 5 compagnies d'assurances de droit belge, ne peut être fondée que sur l'action directe des époux X. et de la MAIF, réitérée en leur appel incident, qui ont envers celles-ci pour les époux X. la qualité de victimes ou tiers lésé et pour la MAIF la qualité de subrogé dans les droits de la victime.
Aux termes de l'article L. 124-3 du code des assurances le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.
Aux termes de l'article L. 112-6 du même code, l'assureur peut opposer au porteur de la police ou au tiers qui en invoque le bénéfice les exceptions opposables au souscripteur originaire.
Il s'évince de la combinaison de ces deux articles que le droit de la victime puise sa source et trouve sa mesure dans le contrat d'assurance.
Dès lors, dans le cadre de cette action directe, les tiers lésés que sont les époux X., et la MAIF en qualité d'assureur partiellement subrogé dans leurs droits, peuvent se prévaloir des différents contractuels liant la société de déménagement à ses assureurs, et ces derniers peuvent leur opposer toutes les exceptions, limitations de garantie et exclusions de garantie qui s'en évincent.
Il est produit en pièce 12 par la société AT Océan Indien, les conditions particulières et générales du contrat d'assurance souscrit par elle auprès du groupe MARSH SA le 1er juillet 2002 à échéance principale du 1er janvier de chaque année, lequel est renouvelable par tacite reconduction, ainsi que l'avenant de 2007, signé le 8 décembre 2006. La société MARSH y est définie comme l'intermédiaire souscripteur et le courtier. Ce contrat d'assurances est intitulé comme un contrat portant à la fois sur l'assurance sur les facultés (assurances dommages) et l'assurance responsabilité contractuelle des professionnels du transport.
Le contrat précise que les garanties complémentaires ou spécifiques doivent être communiquées préalablement au début des opérations par le moyen du minitel ou à défaut par fax, ou autre moyen probatoire.
Il ressort de l'analyse de ce contrat qu'il couvre :
Volume 1 : L'assurance de l'activité de déménageur comprenant :
- Une assurance responsabilité contractuelle avec un plafond de garantie de 35.000 euros
- une assurance sur facultés déménagement de particuliers / garanties dommages : garanti sur déclaration préalable au premier franc avec un engagement maximum de l'assureur de 320.000 euros et une franchise de 150 euros par sinistre ou évènement.
Volume 2 : assurance responsabilité contractuelle des professionnels de transport (qui ne concerne pas le présent litige).
Volume 3 : facultés maritimes et aériennes avec une franchise de 150 euros : tous risques tels que défini dans la police française d'assurance sur facultés ; cette garantie n'est accordée que pour les mobiliers usagés de particuliers et en aucun cas pour d'autres marchandises sauf accord particulier.
Volume 4 relatif aux dispositions communes applicables aux chapitres précédents traitant de la responsabilité contractuelle et précisant notamment que sont garanties :
Article 11 : faute lourde ou dol : capital garanti 160.000 euros.
Le premier juge a fait une analyse erronée de l'avenant de 2007, lequel n'apporte aucune résiliation expresse de tout ou partie de ce contrat, mais ne fait qu'actualiser les primes et tarifs qui ont lieu de l'être.
Il est constant qu'aucune résiliation ne peut être tacite et c'est donc à tort que le premier juge a, par un raisonnement a contrario inapproprié, déduit de ces nouvelles conditions tarifaires que la présence sur ce document d'une mention de tarif de la responsabilité contractuelle pour les déménagements terrestres exclurait la garantie de responsabilité contractuelle dans le cas des déménagements par voie maritime.
Au contraire, les conditions particulières du contrat ne spécifient nullement que la responsabilité contractuelle ne concernerait qu'exclusivement les déménagements par voie terrestre.
La responsabilité contractuelle est bien couverte pour l'activité de déménagement des particuliers, quel que soit le transport utilisé et par ailleurs, l'assurance dommages a été souscrite par la société de déménagement auprès du même assureur, y compris pour les trajets par voie maritime.
Dès lors que la société AT Océan Indien a contracté une extension de garantie en cas de faute lourde ou dolosive, il est bien évident qu'a fortiori l'assureur le couvre également en responsabilité contractuelle.
S'agissant de la garantie responsabilité contractuelle, les assureurs belges et la SA MARSH Assurances opposent l'exclusion de cette garantie, du fait d'une limitation de celle-ci aux déménagements dont la durée n'excède pas 45 jours, alors qu'en l'espèce le déménagement a duré davantage pour avoir commencé le 22 juin 2007 et s'être poursuivi jusqu'à l'ouverture du conteneur le 13 août 2007.
Cependant, cette exclusion de garantie n'est pas absolue puisqu'il peut y être dérogé par la souscription d'une garantie supplémentaire ainsi que mentionné Volume 1, titre 1, article II-4 en page 3 des conditions générales du contrat d'assurance, et ce pour porter la durée totale du déménagement à 90 jours.
Or, les époux X. justifient que la société AT Océan Indien a bien faxée à la SA MARSH assurances le 21 juin à 18h23 un document précisant : le début de leur déménagement le 22 juin 2013, la voie maritime empruntée, l'assurance de deux véhicules automobiles et un scooteur ainsi qu'un volume de mobiliers de 45 m3 pour une valeur de 450 euros / m3, et sur laquelle est en outre mentionné une assurance « MAIF ».
Dans ces conditions, la SA MARSH et les 5 compagnies belges n'expliquent pas, alors que les époux X. avaient clairement déjà souscrit une assurance dommages auprès de la MAIF, pour quelle autre raison qu'une extension de garantie cette souscription complémentaire aurait été faite. Il est présumé que, faute d'autre explication probante sur ce point, cette souscription ne peut avoir pour objectif que celui de contracter une extension de garantie, notamment concernant la durée du déménagement, et ce d'autant qu'en l'état de la suppression d'une ligne directe pour la métropole, une escale s'avérait nécessaire.
Alors que la Société AT Océan Indien ne conteste pas la remise par les époux X. d'une déclaration de valeur signée le 20 juin 2007, mais en discutent seulement sa portée, les assureurs sont mal fondés à la méconnaitre pour tenter de réduire l'indemnisation du préjudice matériel.
La SA MARSH assurances et les 5 compagnies de droit belge font encore valoir que le plafond de leur garantie en matière de responsabilité contractuelle est de 35 000 euros avec une franchise de 150 euros, ainsi que mentionné en page 4 des conditions particulières de la police d'assurance.
Cependant, cette limitation est en l'espèce inopérante, puisqu'il est établi que la Société AT Océan Indien a commis une faute lourde, et qu'elle a souscrit, au volume 4 article 11, une extension de garantie, concernant les dispositions communes applicables aux chapitres précédents traitant de la responsabilité contractuelle et précisant notamment la garantie pour le risque de faute lourde ou dol d'un capital de 160.000 euros.
Force est de constater que ce capital garanti est largement supérieur à la condamnation prononcée à l'encontre de leur assurée, la Société AT Océan Indien, de sorte que condamnation in solidum des assureurs avec l'assurée n'aura pas à être cantonné à un montant inférieur.
Dès lors, c'est vainement que les compagnies d'assurances belges discutent leur garantie, notamment en opposant des exclusions de garanties relatives à la police d'assurances des facultés maritimes, puisque c'est sur le fondement de la garantie « responsabilité contractuelle » qu'elles sont recherchées.
En définitive, compte-tenu des garanties en présence et du fondement de l'action directe sur la responsabilité contractuelle, les assureurs de la société AT Océan Indien seront tenus in solidum avec leur assurée envers la MAIF pour la totalité de la somme de 76.911,70 euros.
Sur la mise hors de cause de la SA MARSH :
Il est constant et établi par plusieurs pièces des parties que la SA MARSH n'est pas une compagnie d'assurance, mais le souscripteur et le courtier. En conséquence, il y a lieu de faire droit à sa mise hors de cause, puisque ce sont en réalité les 5 compagnies d'assurance de droit belge qui sont les assureurs de la société AT Océan Indien et que celles-ci sont intervenues volontairement dans la procédure à ses côtés, de sorte que leurs raisons sociales et adresses sont pleinement connues des parties.
En définitive, il sera prononcé une condamnation in solidum de la société AT Océan Indien, exerçant à l'enseigne DEMECO et des compagnies d'assurance AVERO BELGIUM, NATEUS, BELMARINE, FORTIS CORTORATE INSURANCE, et VERRAYEN à payer à la MAIF, subrogée dans les droits des époux X. la somme de 76.911,70 euros.
Les demandes plus amples ou contraires des parties seront en voie de rejet.
Sur les autres demandes :
La société AT Océan Indien, exerçant à l'enseigne DEMECO et les compagnies d'assurance AVERO BELGIUM, NATEUS, BELMARINE, FORTIS CORTORATE INSURANCE seront condamnées in solidum à verser la somme de 1000 euros à la société CMA CGM au titre de ses frais irrépétibles d'appel. Les autres demandes réciproques sur le même fondement seront en voie de rejet.
Les mêmes seront condamnées in solidum aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise, réformant le jugement sur les dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
La COUR, par arrêt contradictoire,
Rejette l'incident,
Confirme le jugement en ses dispositions relatives à :
- la recevabilité de l'action de la MAIF et celle des demandes,
- la responsabilité contractuelle de la société AT Océan Indien, exerçant à l'enseigne DEMECO,
- l'exonération de responsabilité et la mise hors de cause de la société CMA CGM,
- la mise hors de cause du courtier SA MARSH,
- les frais irrépétibles de première instance,
L'infirme pour le surplus,
Et statuant à nouveau de ces chefs infirmés et y ajoutant :
Condamne in solidum la société AT Océan Indien, exerçant à l'enseigne DEMECO et les compagnies d'assurance AVERO BELGIUM, NATEUS, BELMARINE, FORTIS CORTORATE INSURANCE, et VERRAYEN à payer à la MAIF, subrogée dans les droits des époux X., la somme de 76.911,70 euros,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
Condamne in solidum la société AT Océan Indien, exerçant à l'enseigne DEMECO et les compagnies d'assurance AVERO BELGIUM, NATEUS, BELMARINE, FORTIS CORTORATE INSURANCE, et VERRAYEN à verser à la société CMA CGM la somme de 1000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel,
Condamne in solidum la société AT Océan Indien, exerçant à l'enseigne DEMECO et les compagnies d'assurance AVERO BELGIUM, NATEUS, BELMARINE, FORTIS CORTORATE INSURANCE, et VERRAYEN aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
CR/MR