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CA GRENOBLE (1er pdt), 31 octobre 2013

Nature : Décision
Titre : CA GRENOBLE (1er pdt), 31 octobre 2013
Pays : France
Juridiction : Grenoble (CA), 1er Pdt
Demande : 13/00108
Date : 31/10/2013
Nature de la décision : Refus de suspension
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 6/08/2013
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4483

CA GRENOBLE (1er pdt), 31 octobre 2013 : RG n° 13/00108

Publication : Jurica

 

Extrait : « La société FRANFINANCE fait valoir que la distribution de contrats dégradés ou dénaturés pendant la procédure d'appel lui créerait un préjudice irréversible.

Or le seul fait de distribuer pendant la procédure d'appel des contrats différents de ceux distribués jusqu'à ce jour du fait de la suppression des clauses déclarés abusives ou illégales par le juge d'instance ne constitue pas en lui-même des conséquences manifestement excessives. Il convient d'ailleurs de relever que sur l'ensemble des clauses devant être supprimées, la société FRANFINANCE s'attache seulement à deux clauses, celle régissant les « Utilisations Particulières » et celle relative à la mention du bien acquis. Elle ne justifie pas que la modification de ces clauses nuirait au développement de sa clientèle ou perturberait l'équilibre du contrat au point que cela engendrerait des conséquences notamment financières manifestement excessives.

S'agissant de la situation de distorsion de concurrence allégué, la société FRANFINANCE ne démontre pas que le maintien ou non des clauses a un effet sur la concurrence entre les organismes financiers. Au demeurant, elle prétend que tous les organismes de crédit bénéficient de telles clauses mais ne produit les contrats que de deux sociétés.

Enfin, elle se contente d'alléguer que le coût d'adaptation du modèle de contrat s'élèverait à la somme de 3,25 millions sans verser aux débats le moindre commencement d'éléments de preuve.

En conséquence, faute pour la société FRANFINANCE de justifier que l'exécution provisoire ordonnée risque d'entraîner pour elle des conséquences manifestement excessives, elle sera déboutée de sa demande tendant à l'arrêt de l'exécution provisoire. »

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU 30 OCTOBRE 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 13/00108.

 

ENTRE :

DEMANDERESSE suivant assignation en référé du 6 août 2013 :

SA FRANFINANCE

représentée par Maître François MARTINEAU, avocat au barreau de PARIS, substitué par Maître Etienne GASTEBLED, avocat au barreau de PARIS

 

ET :

DÉFENDERESSE :

Association UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS QUE CHOISIR DE L'ISÈRE

représentée par Maître Christian BRASSEUR de la SCP CONSOM'ACTES, avocat au barreau de GRENOBLE

 

DÉBATS : A l'audience publique du 9 octobre 2013 tenue par Marie-Pierre FIGUET, conseillère déléguée par le premier président de la cour d'appel de Grenoble par ordonnance du 31 juillet 2013, assistée de M.A. BARTHALAY, greffier

ORDONNANCE : contradictoire, prononcée publiquement le 30 OCTOBRE 2013 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, signée par Marie-Pierre FIGUET, conseillère déléguée par le premier président et par M.A. BARTHALAY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Suivant jugement rendu le 20 juin 2013, le tribunal d'instance de Grenoble a ordonné à la société FRANFINANCE de préciser à son contrat de crédit renouvelable la possibilité de choix d'un crédit amortissable en lieu et place d'un crédit renouvelable dans les hypothèses légales et ce, dans le délai de 1 mois suivant le jugement sous astreinte de 150 euros par jour de retard à l'expiration du délai imparti, a déclaré certaines clauses abusives et illicites, a ordonné à la société FRANFINANCE de supprimer de son modèle type de contrat les clauses ci-dessus et ce dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision sous peine passé ce délai d'une astreinte de 300 euros par jour de retard, a interdit l'usage à l'avenir de telles dispositions contractuelles par la société FRANFINANCE, l'a condamnée à verser à l'UFC 38 à titre de dommages et intérêts pour le préjudice collectif la somme de 30.000 euros et pour le préjudice associatif la somme de 5.000 euros, a autorisé la publication du jugement aux frais du défendeur et a ordonné l'exécution provisoire du jugement limitée à hauteur d'un tiers pour les dommages et intérêts et à l'exclusion des publications.

La société FRANFINANCE a interjeté appel de cette décision le 4 juillet 2013.

Par acte du 6 août 2013, la société FRANFINANCE a assigné en référé l'Union Fédérale des Consommateurs Que choisir de l'Isère (UFC 38) pour voir ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement en ce qu'il ordonne à la société FRANFINANCE de supprimer une série de 13 clauses de son modèle type de contrat dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision sous peine passé ce délai d'une astreinte de 300 euros par jour de retard. Elle a fait valoir que l'exécution de la décision entraînerait pour elle un préjudice irréparable résultant de la distribution pendant la procédure d'appel de contrats de crédits renouvelables dénaturés et dégradés, de la création d'une situation de distorsion de concurrence inacceptable et des coûts excessifs de la modification du modèle type de contrat de crédit renouvelable.

Dans ses écritures déposées le 7 octobre 2013 reprises oralement à l'audience, la société FRANFINANCE a sollicité l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement rendu le 20 juin 2013 par le tribunal d'instance de Grenoble en ce qu'il lui ordonne de supprimer les 13 clauses suivantes de son modèle type de contrat :

- la clause relative aux conditions de révision du taux d'intérêt débiteur,

- à la description de l'objet du crédit renouvelable octroyé (absence de mention du bien financé),

- aux modalités de paiement des échéances du crédit,

- aux modalités d'expression de l'agrément de l'emprunteur,

- aux utilisations particulières dont l'emprunteur peut bénéficier,

- à la déclaration de santé de l'emprunteur,

- à la référence aux conditions particulières,

- à la référence au CCSP,

- à la révision du coût des assurances,

- à la résiliation du contrat dans l'hypothèse d'un refus de modification du coût de l'assurance,

- à la résiliation du contrat dans l'hypothèse d'un usage frauduleux de la carte bancaire associé au crédit,

- à l'usage d'informations nominatives recueillies auprès de l'emprunteur,

- à la cession du contrat par endos,

dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision sous peine passé ce délai d'une astreinte de 300 euros par jour de retard.

Elle a fait valoir que s'agissant des condamnations non pécuniaires, le risque de conséquences manifestement excessives s'apprécie au regard du danger d'un préjudice irréparable ou d'une situation irréversible pour le débiteur en cas d'infirmation. Elle a souligné le risque de distribuer des contrats dégradés ou dénaturés pendant la procédure d'appel, notamment dans la mesure où elle est contrainte de mentionner dans le contrat un bien déterminé constituant l'objet du financement ce qui peut entraîner un risque de requalification en contrat de crédit affecté. Elle a ajouté qu'elle va être privée définitivement de la clause régissant les « Utilisations Particulières » pour un nombre important de contrats distribués pendant la procédure d'appel ce qui lui créé un préjudice irréversible. Elle a aussi indiqué que ses concurrents bénéficient des clauses qu'elle doit supprimer ce qui est de nature à créer une distorsion de concurrence importante à son préjudice. Enfin, elle a fait état du coût excessif de la modification du modèle type (3,25 millions d'euros). Elle a également souligné l'absence de solvabilité suffisante de l'UFC pour l'indemniser des préjudices subis en cas de réformation.

Dans ses écritures déposées le 13 septembre 2013 reprises oralement à l'audience, l'Union Fédérale des Consommateurs Que choisir de l'Isère a conclu au rejet de la demande en arrêt de l'exécution provisoire et a demandé la condamnation de la société FRANFINANCE à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Elle a fait remarquer qu'interdire les abus voire les violations de la loi par un professionnel ne saurait avoir des conséquences manifestement excessives et que suspendre l'exécution provisoire reviendrait à autoriser le professionnel à continuer ses agissements irréguliers au détriment des consommateurs. Elle a indiqué que modifier un modèle type ne constitue pas une lourde opération ni dans ses modalités, ni dans son coût. Elle a souligné que la société FRANFINANCE se contente de procéder par affirmations et ne justifie ni des conséquences sur sa clientèle, ni des conséquences sur son chiffre d'affaires. S'agissant du préjudice résultant d'une distorsion de la concurrence, elle a relevé que ce sont au contraire les violations ou détournements de la loi qui créent des distorsions au détriment des professionnels qui eux la respectent.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

En application de l’article 524 du code de procédure civile, l'exécution provisoire ordonnée ne peut être arrêtée que si elle est interdite par la loi ou si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

La société FRANFINANCE fait valoir que la distribution de contrats dégradés ou dénaturés pendant la procédure d'appel lui créerait un préjudice irréversible.

Or le seul fait de distribuer pendant la procédure d'appel des contrats différents de ceux distribués jusqu'à ce jour du fait de la suppression des clauses déclarés abusives ou illégales par le juge d'instance ne constitue pas en lui-même des conséquences manifestement excessives. Il convient d'ailleurs de relever que sur l'ensemble des clauses devant être supprimées, la société FRANFINANCE s'attache seulement à deux clauses, celle régissant les « Utilisations Particulières » et celle relative à la mention du bien acquis. Elle ne justifie pas que la modification de ces clauses nuirait au développement de sa clientèle ou perturberait l'équilibre du contrat au point que cela engendrerait des conséquences notamment financières manifestement excessives.

S'agissant de la situation de distorsion de concurrence allégué, la société FRANFINANCE ne démontre pas que le maintien ou non des clauses a un effet sur la concurrence entre les organismes financiers. Au demeurant, elle prétend que tous les organismes de crédit bénéficient de telles clauses mais ne produit les contrats que de deux sociétés.

Enfin, elle se contente d'alléguer que le coût d'adaptation du modèle de contrat s'élèverait à la somme de 3,25 millions sans verser aux débats le moindre commencement d'éléments de preuve.

En conséquence, faute pour la société FRANFINANCE de justifier que l'exécution provisoire ordonnée risque d'entraîner pour elle des conséquences manifestement excessives, elle sera déboutée de sa demande tendant à l'arrêt de l'exécution provisoire.

La société FRANFINANCE sera condamnée aux entiers dépens et à payer la somme de 1.000 euros à l'Union Fédérale des Consommateurs Que choisir de l'Isère (UFC 38) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Nous, Marie-Pierre FIGUET, conseillère, déléguée par le premier président, statuant en référé, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Déboutons la société FRANFINANCE de sa demande tendant à l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement rendu le 20 juin 2013 par le tribunal d'instance de Grenoble.

Condamnons la société FRANFINANCE aux entiers dépens et à payer la somme de 1.000 euros à l'Union Fédérale des Consommateurs Que choisir de l'Isère (UFC 38) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le greffier                             La conseillère déléguée

M.A. BARTHALAY             M.P. FIGUET