CASS. CIV. 1re, 11 décembre 2013
CERCLAB - DOCUMENT N° 4633
CASS. CIV. 1re, 11 décembre 2013 : pourvoi n° 12-27172
Publication : Legifrance
Extrait : « Vu l’article L. 132-1 du code de la consommation ; Attendu que pour statuer comme il a été dit, l’arrêt retient également que compte tenu de l’importance du sinistre, du degré de sécurité attendu des assurances consenties et des discussions intervenues entre les parties, le délai de prescription d’un an était de nature à priver les époux X. de la possibilité de faire valoir leurs droits en justice, de sorte que la clause stipulant un tel délai créait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties justifiant de la déclarer abusive ; Qu’en statuant ainsi, quand le délai d’un an pour introduire une action en justice au titre des pertes et avaries, dont la constatation était possible dès la livraison du mobilier, n’empêchait pas ni ne rendait particulièrement plus difficile l’exercice par les consommateurs de leur droit à agir en justice, la cour d’appel a violé le texte susvisé ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 11 DÉCEMBRE 2013
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 12-27172.
DEMANDEUR à la cassation : Sociétés Mercator, Belmarine, Fortis Corporate Insurance, J. Verheyen et Nateus
DÉFENDEUR à la cassation : M. et Mme X.
M. Gridel (conseiller doyen faisant fonction de président), président. SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP de Nervo et Poupet, avocat(s).
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que suivant devis accepté le 23 mai 2006, M. et Mme X. ont conclu avec la société Axe 6 un contrat de déménagement ; que leur mobilier a été transporté à destination le 28 août 2006, une fraction de celui-ci ayant été endommagée après avoir été entreposée en garde-meuble ; que le 4 juin 2009, M. et Mme X. ont assigné les sociétés Avero Belgium et Belmarine, coassureurs de la société Axe 6, en réparation de leur préjudice consécutif à l’avarie du mobilier ; que les sociétés Nateus, J. Verheyen et Fortis Corporate Insurance, également coassureurs, sont intervenues volontairement à l’instance ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu l’article 1134 du code civil ;
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que pour déclarer recevable l’action engagée et condamner les coassureurs de la société Axe 6 à payer M. et Mme X. une certaine somme à titre de dommages-intérêts, l’arrêt retient, par motifs propres, que la clause du contrat de déménagement selon laquelle « les actions en justice pour avarie, perte ou retard auxquelles peut donner lieu le contrat de déménagement doivent être intentées dans l’année qui suit la livraison du mobilier » est d’interprétation stricte, en sorte qu’elle ne peut concerner le préjudice consécutif à la prestation de gardiennage prévue au contrat ;
CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Qu’en statuant ainsi, alors que cette clause, dépourvue d’ambiguïté, avait vocation à s’appliquer sans restriction aux différentes prestations du contrat de déménagement, le préjudice fût-il consécutif au gardiennage du mobilier, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu l’article L. 132-1 du code de la consommation ;
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que pour statuer comme il a été dit, l’arrêt retient également que compte tenu de l’importance du sinistre, du degré de sécurité attendu des assurances consenties et des discussions intervenues entre les parties, le délai de prescription d’un an était de nature à priver les époux X. de la possibilité de faire valoir leurs droits en justice, de sorte que la clause stipulant un tel délai créait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties justifiant de la déclarer abusive ;
CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Qu’en statuant ainsi, quand le délai d’un an pour introduire une action en justice au titre des pertes et avaries, dont la constatation était possible dès la livraison du mobilier, n’empêchait pas ni ne rendait particulièrement plus difficile l’exercice par les consommateurs de leur droit à agir en justice, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 13 septembre 2012, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris ;
Condamne M. et Mme X. aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille treize.
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyen produit par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour les sociétés Mercator, Belmarine, Fortis Corporate Insurance, J. Verheyen et Nateus
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Le moyen reproche à l’arrêt infirmatif attaqué D’AVOIR condamné les sociétés Avero, Belmarine, Nateus, J. Verheyen et Fortis à payer aux époux X. la somme de 29.657 euros à titre de dommages et intérêts et la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE, pour dire la prescription opposable aux époux X., le tribunal s’était fondé sur l’article 15 des conditions générales du contrat, jugé opposable aux demandeurs ; que le tribunal n’avait donc pas retenu le fractionnement entre la partie « transport » et la partie « garde-meubles », invoquée par les demandeurs ; que de jurisprudence constante, le contrat de déménagement n’était pas assimilé à un contrat de transport, dès lors que son objet n’était pas limité à cette prestation, comme en l’espèce ; qu’il était tout aussi constant que le sinistre s’était produit pendant la période de stockage ; que les règles spéciales applicables en matière de contrat de transport n’étaient pas applicables ; qu’il était cependant incontestable que le contrat comportait une clause limitant la prescription applicable dans les termes suivants : « les actions en justice pour avarie, perte, retard auxquelles peut donner lieu le contrat de déménagement doivent être intentés dans l’année suivant la livraison » ; que les époux X. ne pouvaient pas prétendre que cette clause ne leur avait pas été soumise ; que cette limitation, licite au demeurant, de la prescription applicable aux prestations effectuées par Axe 6 était nécessairement d’interprétation stricte ; que d’une part, le sinistre était survenu plus d’un mois après la livraison des meubles à Lille, à l’occasion d’un déplacement de container étranger à la prestation de transport ; que le sinistre était intervenu au cours de pures opérations de gardiennage ; que dès le mois de décembre 2006, les époux X. avaient déploré l’absence de mobilisation de la société Axe 6 et avaient demandé à leur partenaire qu’une réparation puisse survenir dans les plus brefs délais ; que les assureurs, à quelques jours de l’échéance de la prescription, telle que prévue par l’article 15 du contrat, avaient annoncé une proposition d’indemnisation ; que compte tenu de l’importance du sinistre, du degré de sécurité attendu des assurances consenties aux époux X., des discussions intervenues entre les parties, le délai d’un an était de nature à créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et à priver ainsi les époux X. de la possibilité de faire valoir leurs droits en justice, alors qu’ils étaient victimes d’un sinistre grave qui ne leur était nullement imputable ; que la clause contenue à l’article 15 du contrat, de par son interprétation stricte et compte tenu du déséquilibre qu’elle a créée dans le champ contractuel, devait être déclarée abusive et inopposable aux époux X. ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ALORS QUE la Cour d’appel a elle-même constaté que le contrat liant les parties contenait la clause suivante : « les actions en justice pour avarie, perte, retard auxquelles peut donner lieu le contrat de déménagement doivent être intentés dans l’année suivant la livraison » et que cette clause était opposable aux demandeurs et licite ; qu’elle était également parfaitement claire ; que la Cour d’appel ne pouvait refuser de l’appliquer, sous prétexte qu’elle devait être d’ « interprétation stricte », compte tenu de l’importance du sinistre et du « degré de sécurité » attendue par les époux X. ; que la Cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil ;
ET ALORS QUE la clause réduisant à un an après la livraison, le délai pour introduire une action contre une entreprise de déménagement, à raison des pertes et avaries, n’a pas pour effet d’empêcher ou de rendre plus difficile l’exercice du droit du consommateur d’agir en justice ; qu’elle n’a donc pas, en soi, de caractère abusif ; que la Cour d’appel ne pouvait donc en paralyser l’effet, sous prétexte que le montant du sinistre était important ou que les clients attendaient un « degré de sécurité » des assureurs ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la Cour d’appel a violé l’article L. 132-1 du code de la consommation.