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CA AMIENS (1re ch. civ.), 18 décembre 2013

Nature : Décision
Titre : CA AMIENS (1re ch. civ.), 18 décembre 2013
Pays : France
Juridiction : Amiens (CA), 1re ch.
Demande : 12/00080
Décision : 13/530
Date : 18/12/2013
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 5/01/2012
Numéro de la décision : 530
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4636

CA AMIENS (1re ch. civ.), 18 décembre 2013 : RG n° 12/00080 ; arrêt n° 530 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Le syndicat des copropriétaires intimé ne conteste pas que les parties communes qu'il administre sont approvisionnées en eau potable par la société Lyonnaise des Eaux. Force est de constater que s'il invoque l'existence d'une convention d'individualisation signée entre les services de la société Lyonnaise des Eaux de France et lui-même, il ne produit pas un tel document, dont l'appelante conteste l'existence, indique ne pas être en mesure de le produire et ne fournit même aucune indication sur la date à laquelle la convention aurait été signée par les parties, si ce n'est au conditionnel dans sa toute dernière note qui évoque l'année 1980. […]

Or, il ressort du règlement du service public de distribution d'eau potable produit aux débats et qui, en tant qu'acte administratif réglementaire annexé au marché public signé par la société Lyonnaise des Eaux de France avec la Communauté de l'Agglomération Creilloise, s'impose aux parties ainsi qu'au juge judiciaire qui n'a pas compétence de son propre chef pour en examiner la légalité - notamment de l'article des conditions particulières dénommé « mesures et facturation des consommations particulières », que « le propriétaire est redevable : des consommations communes relevées sur les compteurs spécifiques, de la consommation enregistrée au compteur général après déduction des consommations relevées ou estimées sur les compteurs individuels et spécifiques, des abonnements correspondants ».

Il est également indiqué aux conditions générales (article 3.4) que « si le relevé n'a pu être réalisé, la consommation est estimée sur la base de la consommation de l'année précédente ou de la période correspondante de l'année précédente. Le compte du client est régularisé à l'occasion du relevé suivant ».

Il est certes énoncé au même article qu' « en cas d'inaccessibilité du compteur (compteur situé à l'intérieur de l'unité d'habitation et client absent ou refusant l'accès au lieu...) (...), le Service de l'eau potable peut imposer la mise en place d'un système de radio-relevé (...) » mais cette prérogative ne peut être invoquée, pour se soustraire à ses obligations, par le Syndicat des copropriétaires auquel il appartenait, le cas échéant, de demander au concessionnaire l'installation de compteurs spécifiques correspondant à ses propres consommations (chaufferie, arrosage, nettoyage des parties communes, etc.), le compteur général n'étant alors là que pour faire foi de la consommation réelle de l'ensemble des abonnés (syndicat et occupants). »

 

COUR D’APPEL D’AMIENS

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 18 DÉCEMBRE 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 12/00080. Arrêt n° 530. Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SENLIS DU PREMIER AVRIL DEUX MILLE HUIT.

 

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE :

SA LYONNAISE DES EAUX DE FRANCE

agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié audit siège, Représentée et plaidant par Maître Pierre LE TARNEC, avocat au barreau de SENLIS

 

INTIMÉ :

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES RÉSIDENCE PRIVÉE LA Y.

Représenté par son syndic le cabinet LOISELET DAIGREMONT, Représenté par Maître Jérôme LE ROY, avocat au barreau d'AMIENS, Plaidant par Maître LEQUILLERIER, avocat au barreau de SENLIS

 

DÉBATS & DÉLIBÉRÉ : L'affaire est venue à l'audience publique du 17 septembre 2013 devant la cour composée de M. Lionel RINUY, président de chambre, M. Raymond LEVY et Mme Valérie DUBAELE, conseillers, qui en ont ensuite délibéré conformément à la loi.

A l'audience, la cour était assistée de Mme Monia LAMARI, greffier.

Sur le rapport de M. RINUY et à l'issue des débats, l'affaire a été mise en délibéré et le président a avisé les parties de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 19 novembre 2013, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

PRONONCÉ : Les parties ont été informées par RPVA de la prorogation du délibéré au 18 décembre 2013 pour prononcé de l'arrêt par sa mise à disposition au greffe.

Le 18 décembre 2013, l'arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par M. Lionel RINUY, président de chambre, et Mme Monia LAMARI, greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DÉCISION :

La société Lyonnaise des Eaux de France, délégataire du service public de distribution d'eau potable de la Ville de Creil suivant contrat passé avec la commune d'agglomération approvisionne depuis 1961 le Domaine des X., devenue la Résidence privée, la Y., composé de douze immeubles collectifs en copropriété.

Un litige est survenu entre la société Lyonnaise des Eaux de France et le syndicat des copropriétaires à propos du système de facturation qui impute au syndicat les consommations résultant de la différence entre la consommation relevée sur le compteur général de l'immeuble et l'ensemble des consommations relevées sur les compteurs divisionnaires des occupants des dits appartements, la consommation faisant l'objet de compensation le semestre suivant pour les compteurs divisionnaires qui n'ont pas fait l'objet de relevé lors du semestre précédent.

Le syndicat des copropriétaires refusant de payer les factures qui lui sont adressées et ce, malgré une mise en demeure adressée par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 1er février 2007, la société Lyonnaise des Eaux de France l'a fait assigner en paiement le 23 mai 2007 devant le tribunal de grande instance de Senlis.

Par un jugement du 1er avril 2008, le tribunal de grande instance de Senlis a débouté la société Lyonnaise des Eaux de France de ses demandes et l'a condamnée aux dépens ainsi qu'à payer une indemnité de 1.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au syndicat des copropriétaires.

Par déclaration déposée au greffe le 22 mai 2008, la société Lyonnaise des Eaux de France a interjeté appel de cette décision et, aux termes de ses écritures du 6 mai 2009, demandé à la Cour, au visa des articles 1101 et 1203 du code civil, d'infirmer le jugement attaqué dans toutes ses dispositions et de condamner le syndicat des copropriétaires Résidence Privée la Y. à lui payer la somme de 130.832,34 euros avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2007 jusqu'au parfait paiement, et ce, sous réserve des consommations ultérieures ainsi qu'au paiement d'une somme de 2.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Le syndicat des copropriétaires a conclu, le 1er avril 2009, à titre principal à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et à titre subsidiaire à la prescription de la réclamation de l'appelante pour la période antérieure au 30 mai 2002 et à sa condamnation à une indemnité de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Aux termes de l'arrêt rendu le 28 janvier 2010, la Cour d'appel d'Amiens a infirmé le jugement attaqué en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, a condamné le syndicat des copropriétaires Résidence Privée La Y. à payer à la société Lyonnaise des Eaux de France la somme de 130.832,34 euros avec intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2007, correspondant au montant total des factures récapitulées dans le tableau produit en pièce n° 3 par l'appelante, et une indemnité de 2.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens tant de première instance que d'appel, faisant application de l’article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP Tetelin Marguet & de Surirey, société d'avoués, pour la part des dépens dont elle a fait l'avance sans en avoir préalablement reçu provision.

Le Syndicat des copropriétaires résidence privée la Y. a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt.

Par un arrêt du 13 décembre 2011, la Troisième Chambre civile de la Cour de cassation a cassé et annulé, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 janvier 2010, entre les parties par la Cour d'appel d'Amiens, remis, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt, et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la Cour d'appel d'Amiens autrement composée, a condamné la société Lyonnaise des Eaux de France aux dépens, vu l’article 700 du code de procédure civile, a condamné la société Lyonnaise des Eaux de France à payer au Syndicat des copropriétaires résidence privée la Y. à Creil la somme de 2.500 euros et rejeté la demande de la société Lyonnaise des Eaux de France, dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation l'arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé.

La société Lyonnaise des Eaux de France a sollicité, le 5 janvier 2012, la réinscription de l'affaire au rôle d'une Chambre civile de la Cour d'appel d'Amiens, annexant à sa demande copie du jugement, de l'arrêt de la Cour d'appel du 28 janvier 2010 et de l'arrêt de la Cour de cassation.

Pour l'exposé des moyens des parties, qui seront examinés dans les motifs de l'arrêt, il est renvoyé aux conclusions transmises par RPVA le 7 février 2013 par la société Lyonnaise des Eaux de France et le 14 juin 2013 par le Syndicat des copropriétaires résidence privée la Y.

La société Lyonnaise des Eaux de France demande à la Cour, vu les articles 1101 et 1203 du code civil, vu les dispositions du règlement du service d'eau potable, d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 1er avril 2008 par le tribunal de grande instance de Senlis et de s'entendre le Syndicat des copropriétaires résidence privée la Y. condamné à lui payer la somme de 130.832,34 euros, avec intérêts de droit à compter du 1er février 2007 jusqu'au parfait paiement et sous réserve des consommations ultérieures, et la somme de 2.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SCP d'avocats Drye - de Bailliencourt - Le Tarnec - Maigret, avocats aux offres de droit.

Le Syndicat des copropriétaires résidence privée la Y. demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de débouter la société Lyonnaise des Eaux de l'ensemble de ses réclamations, à titre subsidiaire, si par impossible la Cour considérait que le règlement de distribution de l'eau dont excipe la Lyonnaise des Eaux, lui est opposable, et que son interprétation l'autorise à lui réclamer le paiement des consommations des autres abonnés, dire pareille clause abusive au sens des dispositions de la loi de 1978 sur les clauses abusives, et en conséquence, prononcer la nullité de cette clause, à titre infiniment subsidiaire, et si par impossible la Cour considérait que le juge de l'action ne saurait être le juge de l'exception, la solution à la question posée sur la nullité de la clause n'étant pas aussi claire qu'il y paraît, alors, en vertu des principes régissant la séparation des pouvoirs, renvoyer sur question préjudicielle à la juridiction administrative, le soin d'apprécier la légalité du règlement de distribution de l'eau, prévoyant que le propriétaire est redevable de la consommation enregistrée au compteur général, après déduction des consommations relevées ou estimées sur les compteurs individuels et spécifiques des valeurs correspondantes, par référence aux dispositifs légaux de la loi de 1978 sur les clauses abusives, si par impossible enfin, la Cour déclarait la Lyonnaise des Eaux recevable et fondée en son appel, et infirmait la décision entreprise, alors dire que l'action est prescrite pour la période antérieure au 1er janvier 2003, en conséquence, dire que le montant des réclamations de la Lyonnaise des Eaux sera diminué de la somme de 12.563,79 euros, montant des factures prescrites, surseoir à statuer sur le solde exigible jusqu'à ce qu'il soit précisé à quelle période de consommation correspondent les factures postérieures au 1er janvier 2003, condamner la société Lyonnaise des Eaux en tous les dépens, outre une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 19 juin 2013 et l'affaire renvoyée pour être plaidée à l'audience du 17 septembre 2013.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, la Cour a demandé le 15 novembre 2013 au Syndicat des copropriétaires résidence privée la Y. de produire la convention d'individualisation et invité les parties à donner, le cas échéant, tous éléments sur la date d'effet de celle-ci au plus tard le 2 décembre 2013, le délibéré étant prorogé au 18 décembre 2013.

Faisant suite à ce questionnement, le conseil du Syndicat des copropriétaires résidence privée la Y. a transmis le 2 décembre 2013, outre un document intitulé « conditions particulières », une note indiquant qu'il y avait eu une modification dans les rapports contractuels entre les parties, qu' « à l'origine, un contrat liait le Syndicat des copropriétaires à la Lyonnaise, fermier, puis qu''une convention d'individualisation a (...) été signée entre les services des eaux et le Syndicat, qui précise les conditions particulières de l'immeuble pour la mise en place de l'individualisation, notamment les conditions de reprise ou pose des compteurs », que l'actuel Syndic de copropriété a recherché en vain la copie du contrat d'individualisation « alors qu'il ne fait aucun doute sur l'existence de cette convention, dans la mesure où la difficulté provient des problèmes que rencontre la Lyonnaise dans le relevé des 999 compteurs installés dans les appartements des abonnés », que le Syndicat des copropriétaires a pu ne pas être rendu destinataire d'une copie de la convention d'individualisation qu'il a signée mais que la société Lyonnaise des Eaux de France ne peut que disposer de ce contrat, compte tenu des obligations qui sont les siennes en sa qualité de délégataire du service public des eaux.

Par lettre du 10 décembre 2013, le conseil de la société Lyonnaise des Eaux de France a répliqué qu'il n'y avait 'jamais eu de convention d'individualisation signée entre les parties, c'est ce que nous avons expliqué dans nos conclusions en page 8, ajoutant : « Le Syndicat La Y. se trouvait déjà en régime d'individualisation des compteurs avant l'entrée en vigueur de la loi SRU. L'obligation d'une convention mentionnée dans le règlement de service ne vaut que pour les immeubles collectifs qui souscrivent pour la première fois à l'individualisation des compteurs. En tant que consommateur d'eau, le Syndicat La Y. se trouvait naturellement en situation contractuelle ».

Enfin, par lettre du 12 décembre 2013, le conseil du syndicat des copropriétaires, répliquant à la note de la société lyonnaise des eaux, a indiqué qu'en 1961 le contrat ne portait que sur les compteurs généraux placés au pied des colonnes et que « ce serait en 1980 qu'il aurait été procédé à la pose de comptes (sic) divisionnaires dans les 999 appartements, compteurs qui relèvent de la SLEE, qui facture directement les occupants qui sont ses abonnés. »

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Sur la saisine de la Cour :

La Cour d'appel, juridiction désignée par la Cour de cassation aux termes de son arrêt de cassation en date du 13 décembre 2011, a été régulièrement saisie par la déclaration de la société Lyonnaise des Eaux de France, déposée le 5 janvier 2012 en application de l’article 1032 du code de procédure civile et à laquelle a été jointe copie de l'arrêt de cassation, conformément aux dispositions de l’article 1033 du code de procédure civile.

 

Sur la demande en paiement de la société Lyonnaise des Eaux de France :

La société Lyonnaise des Eaux de France fait valoir que pour établir sa facturation, elle procède au relevé du compteur général de l'immeuble et à celui des compteurs individuels des appartements, qu'elle se heurte à un problème fréquent lié à l'impossibilité d'accéder aux compteurs individuels des appartements, en raison de l'absence de l'occupant ou du refus de laisser l'accès, que son préposé procède alors par estimation pour les compteurs qui n'ont pu être relevés et qu'elle facture au syndicat des copropriétaires la différence entre le relevé du compteur général de l'immeuble et celui des compteurs des appartements relevés ou estimés du même immeuble, que le semestre suivant, le préposé, s'il peut avoir accès aux compteurs estimés, procède à la correction, que si l'estimation est trop faible, elle déduit du compteur général de l'immeuble la consommation qu'elle a pu réaffecter sur le compteur individuel, que par conséquent, le volume d'eau facturé par la concluante correspond très exactement, au mètre cube près, au volume d'eau livré au Syndicat des copropriétaires résidence privée la Y., que néanmoins, le tribunal a écarté sa demande en paiement au visa de l’article 1315 du code civil, estimant qu'elle ne rapportait pas la preuve que les factures dont elle réclame le règlement correspondraient bien à la consommation du Syndicat des Copropriétaires, et suggéré au surplus au Syndicat des copropriétaires résidence privée de soulever la fin de non recevoir tirée de la prescription quinquennale, reprochant au système mis en place de contrevenir directement au droit commun des obligations et d'être finalement un moyen facile de répercuter sur le Syndicat des copropriétaires les consommations imputables au seuls occupants qui n'ont pu faire l'objet d'un relevé, qu'elle s'estime injustement pénalisée par cette décision, alors que pour le moins le tribunal aurait pu condamner le Syndicat des copropriétaires au paiement des consommations du local chaufferie qui représente à lui tout seul 43.000 euros, dans la mesure où ses consommations ne sont pas et ne peuvent pas être discutées, que le jugement est inique en ce qu'il invite le Syndicat des copropriétaires résidence privée la Y. à ne plus payer aucune facture d'eau pour l'avenir, alors qu'il y a indiscutablement une consommation non négligeable, qu'enfin le tribunal a, sous couvert d'une motivation juridique, violé le principe de séparation des pouvoirs entre le juge judiciaire et le juge administratif, que pour toutes ces raisons, la décision devra être infirmée.

S'agissant de la prescription, elle soutient que cette fin de non recevoir ne constitue pas un moyen décisoire retenu par le tribunal dans les motifs de sa décision, qu'elle a simplement été évoquée par le tribunal (page 4 du jugement) qui n'en a tiré aucune conséquence et n'a pas jugé l'affaire en fonction de ce moyen, qu'elle ne peut accepter le motif selon lequel le Syndicat défendeur n'aurait pas été mis en mesure de se prévaloir de ce moyen au motif qu'à l'issue des débats publics, le juge a sollicité un relevé chronologique des factures, que toutes les factures impayées avaient été produites au cours de l'instance si bien que le Syndicat des copropriétaires n'ignorait rien des consommations en litige et était parfaitement en mesure de soulever le cas échéant un moyen de prescription puisqu'il disposait de chacune des factures, que le tribunal n'était pas en droit de se substituer au Syndicat des copropriétaires pour soulever un moyen que celui-ci n'avait pas cru devoir évoquer, que quoi qu'il en soit, l'assignation ayant été délivrée le 23 mai 2007 la prescription ne pourrait porter que sur la période antérieure au 23 mai 2002 pour laquelle aucune facture n'est réclamée, que le Syndicat des copropriétaires a imaginé par un moyen dilatoire de soutenir que la prescription doit s'apprécier non pas au jour de la facturation mais au jour où la créance est née et qu'il faudrait pour cela produire les relevés de consommations mais que la prescription est un mode d'extinction d'un droit résultant de l'inaction de son titulaire pendant un certain temps et que le droit au paiement est né de l'établissement de la facture et non pas de la date du relevé, qu'en tout cas la remarque adverse serait inopérante car les consommations d'eau sont continues et le relevé, la photographie à un moment donnée de la consommation, que les relevés sont effectués deux fois par an, tous les six mois, fin avril et fin octobre, et qu'il est vain de vouloir entraîner la Cour dans un débat sans intérêt puisque la réclamation ne porte pas sur une période de consommation antérieure à plus de cinq ans de la date à laquelle l'assignation a été délivrée, que par conséquent, la prescription de cinq ans n'est pas acquise.

S'agissant du système de facturation, elle soutient qu'en considérant que le système de facturation prévu par le règlement du service contrevenait au droit des obligations dans la mesure où il avait pour effet de faire payer au Syndicat des copropriétaires résidence privée la Y. des consommations qui n'étaient pas les siennes, le tribunal a apprécié la légalité d'un acte administratif réglementaire, qu'en effet le règlement du service est un acte administratif (Civ. 1ère, 3 novembre 1999 : Bull. civ. I, n° 290, p. 189) dont l'examen de la légalité relève exclusivement de la compétence du juge administratif (Civ. 1ère, 26 mai 1999, Compagnie Générale des Eaux : Bull. civ. I, n° 176, p. 115), qu'il n'appartient pas au juge judiciaire de décider du caractère abusif ou non d'une clause du règlement du service au regard de la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 (Civ. 1ère, 31 mai 1988, Société des Eaux de l'Essonne : Bull. civ. I, n° 161. p. 111), que dans le cas d'espèce elle s'est bornée à appliquer le règlement du service qui dispose en son article 3-4 a) : « Si le relevé n'a pu être réalisé, la consommation est estimée sur la base de la consommation de l'année précédente ou de la période correspondante de l'année précédente. Le compte du client est régularisé à l'occasion du relevé suivant », qu'il a été jugé par le tribunal administratif d'Orléans (20 décembre 2002, M. Daniel V. : req. n° 9901674) que l'estimation de la consommation suivant le même procédé en cas d'arrêt de compteur n'était pas abusif, que ce qui est vrai en cas d'arrêt de compteur l'est a fortiori lorsque l'abonné est à l'origine du défaut de relève, qu'en estimant illégale cette façon de facturer les consommations des parties communes des immeubles le tribunal remet en cause la volonté du législateur d'encourager l'individualisation des contrats de fourniture d'eau potable, qui n'est pas de rendre impossible la facturation des consommations relevant des parties communes des immeubles, qui ne peut s'apprécier que par soustraction des consommations individuelles à la consommation générale de l'immeuble, qu'aux termes de la circulaire 2004-3 UHC/QC4/3 du 12 janvier 2004 relative à l'individualisation générale des contrats de fourniture d'eau précitée du ministre de l'équipement « Si la consommation des parties communes ne fait pas l'objet d'un comptage individualisé, elle peut être établie par calcul de la différence entre la consommation globale de l'immeuble et la somme des consommations individuelles si le compteur général est maintenu et si les relevés de consommations sont effectués à la même date », que le tribunal a été induit en erreur par l'argumentation adverse visant à lui octroyer, à tort, des prérogatives de puissance publique, que ce moyen n'est pas fondé juridiquement, que les parties sont dans des rapports contractuels, car la fourniture d'eau est un contrat de vente qui est parfait, dès lors que les parties sont d'accord sur la chose et sur le prix, ainsi que le prévoient les dispositions de l’article 1583 du code civil, que la Cour de cassation a jugé à plusieurs reprises que le contrat d'abonnement au service de l'eau est un contrat de vente et a fait application en matière de prescription de l'ancien article 2272 alinéa 4 du code civil (Civ. 1ère, 13 mars 2001 : Bull. civ. I, n° 73 p. 47 et 25 fév. 2003 : pourvoi n° 01-02149), que le tribunal ne pouvait la débouter que s'il était en mesure d'affirmer que les conditions de la vente n'étaient pas réunies, qu'il est constant que la vente était parfaite, puisque le prix de l'eau, qui n'est pas négociable, avait été accepté par le Syndicat des copropriétaires, que les parties étaient d'accord sur la chose puisque l'objet de la vente était la fourniture d'eau, ce qu'avait également accepté le Syndicat des copropriétaires qui en a largement consommé, qu'ainsi le tribunal devait constater l'existence d'un contrat de fourniture d'eau qui s'est formé au moment précis où le Syndicat des copropriétaires a consommé pour la première fois de l'eau potable, qu'en sa qualité de délégataire du service d'eau potable, elle est en situation d'offre permanente et doit distribuer de l'eau potable à toutes les personnes qui en font la demande, que par conséquent, un usager, dès lors qu'il consomme de l'eau, accepte nécessairement l'offre du délégataire et doit en payer le prix, que le Syndicat des copropriétaires ne saurait soutenir, pour échapper à cette obligation contractuelle, qu'il se serait placé sous le régime de l'individualisation des contrats de fourniture d'eau, issu de la loi SRU et qu'il aurait donc dû être tenu de signer une convention particulière avec elle, que cette argumentation n'est pas fondée puisque le Syndicat des copropriétaires se trouvait dans un régime d'individualisation des contrats, avant même l'entrée en vigueur de la loi SRU et que les dispositions du règlement du service prévoyant la nécessité de signer une convention particulière, ne valent que pour les immeubles collectifs qui souscrivent, pour la première fois, à l'individualisation des contrats de fourniture d'eau, qu'enfin pour exister, un contrat n'a pas besoin d'être formalisé par écrit, que le Syndicat des copropriétaires résidence privée la Y. admet dans ses écritures qu'il est redevable des consommations des parties communes et qu'il a accepté à ce titre la pose de compteurs divisionnaires, que cet aveu judiciaire est bien la preuve qu'il n'est nul besoin d'un contrat écrit, dûment signé, pour être débiteur des consommations qui interviennent entre le compteur général et chaque compteur divisionnaire, que cela est encore établi par le contentieux qui a opposé les parties dans les années 1990 et a donné lieu à un protocole d'accord, que le Syndicat des copropriétaires, abonné à part entière du service, est juridiquement tenu de payer sa consommation, que la Cour d'appel a dans son arrêt du 28 janvier 2010, relevé que les conditions générales prévoient pour la facturation le recours à l'estimation de consommation si le relevé ne peut être effectué, que dès lors quand bien même les conditions particulières ne s'appliqueraient pas, il résulte de ces conditions générales ainsi que du simple bon sens que le Syndicat des copropriétaires doit supporter le coût de la consommation résultant de la différence entre celle relevée réellement au compteur général et celle résultant de l'addition des consommations réelles des compteurs individuels et des estimations pour les compteurs n'ayant pu être relevés, qu'elle a encore considéré que « si le Syndicat des copropriétaires ne voulait pas supporter l'aléa lié aux estimations, ne correspondant pas aux consommations réelles des compteurs individuels des occupants (aléas également supportés par ceux-ci), il lui appartenait de demander au concessionnaire l'installation de compteurs spécifiques correspondant à ses propres consommation (chauffage, arrosage, nettoyage des parties communes etc..), le compteur général n'étant alors là que pour faire foi de la consommation réelle de l'ensemble des abonnés (syndicat et occupants). Or, il ne l'a pas fait pendant les périodes considérées ».

S'agissant de la consommation, la société Lyonnaise des Eaux de France fait valoir qu'en la déboutant de la totalité de sa demande, alors que finalement la contestation du Syndicat des copropriétaires ne porte que sur quelques m3, le tribunal a rendu une décision injuste qui ne peut conduire le Syndicat des copropriétaires qu'à refuser de payer pour l'avenir ses factures d'eau, alors qu'elle ne discute pas en avoir consommé, qu'à titre d'exemple, lors de la relève du premier semestre 2008, le nombre des compteurs estimés car non vus a été très faible, que sur trente-trois immeubles pour lesquels tous les compteurs ont été visités, le montant impayé ressort à 39.268,76 euros, que pour trente-trois autres immeubles, qui n'ont eu qu'un seul compteur non vu, le montant impayé est de 28.030,57 euros, que le Syndicat des copropriétaires ne peut, sans faire preuve de mauvaise foi, refuser de payer ces factures, qu'un bâtiment (tour « G »- réf. n° 09188400) comprend un compteur général d'entrée, des logements avec compteur individuel et une chaufferie non équipée de compteur, laquelle utilise l'eau froide passant au compteur général, puis la chauffe, que la chaufferie n'étant pas équipée de compteur d'eau, sa consommation est calculée par la différence entre la consommation du compteur général et la somme des compteurs individuels, qu'ainsi, même si l'eau servant à la chaufferie n'est pas mesurée par un compteur, son utilisation par la copropriété est incontestable, que dans les courriers des 6 octobre 2004 et 15 décembre 2004, le Syndicat des copropriétaires a réclamé les relevés et les facturations des compteurs généraux, à l'exception de celui de la tour « G », qui sert justement à déterminer la consommation d'eau utilisée par la chaufferie pour l'ensemble de la copropriété, que d'ailleurs, le Syndicat des copropriétaires ne contestait pas précédemment devoir cette facture jusqu'en 2004 où elle a toujours payé sa consommation, puis a arrêté tout paiement le 12 mars 2004, du fait du contentieux, qu'ainsi la discussion, entretenue par celui-ci, ne concerne pas l'immeuble « G » qui, à lui seul, représente une consommation pour un coût de 43.000 euros.

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Le Syndicat des copropriétaires résidence privée la Y. expose qu'il a soutenu avec succès en première instance, se prévalant des dispositions de l’article 1315 du code civil, que la Lyonnaise des Eaux ne rapportait pas la preuve que les sommes réclamées correspondaient à ses consommations, qu'il ne peut être tenu au paiement des factures que restent devoir les autres abonnés, que sont les 999 occupants des appartements composant l'ensemble immobilier la Y., quand bien même la Lyonnaise n'aurait pas pu procéder au relevé des compteurs se trouvant à l'intérieur desdits appartements, qu'aux termes des contrats d'abonnement il n'est prévu aucune solidarité entre le Syndicat et ses membres et que cette solidarité n'est pas prévue par la loi, qu'un certain nombre de lots sont donnés en location et que les abonnés de la SLE sont les occupants et non les copropriétaires, qu'il ne saurait ainsi être imaginé une quelconque solidarité entre le Syndicat et les occupants, qu'en outre, la réclamation de la Lyonnaise se trouvait pour partie prescrite, ainsi que cela a pu être relevé par le Syndicat, suite à la communication en cours de délibéré, par la Lyonnaise, d'un état chronologique des consommations litigieuses, que le premier juge a constaté que la Lyonnaise ne pouvait lui faire reproche de ne pas avoir pris les dispositions nécessaires pour rendre plus accessibles les compteurs divisionnaires se trouvant dans les parties privatives alors qu'il ne dispose d'aucun pouvoir pour le faire et que le règlement de distribution de l'eau donne ces pouvoirs au service des eaux lui même, que la Cour d'appel d'Amiens a admis une solidarité implicite entre le Syndicat et les occupants des lots, procédant du règlement du service public de distribution des eaux, qui compte tenu de sa nature réglementaire, s'imposerait au Syndic, et a écarté le moyen de prescription, au motif que n'était pas visé le texte sur lequel se fondait le Syndicat, que la société Lyonnaise des Eaux a la qualité de fermier, reste propriétaire des ouvrages mis en œuvre pour l'exécution du service public délégué, c'est-à-dire la distribution de l'eau, que, pour accéder à ce service, le client doit souscrire un contrat d'abonnement, reçoit le règlement du service et un livre d'accueil avec la première facture, que l'article 3.4 stipule 'qu'en cas d'inaccessibilité du compteur (compteur situé à l'intérieur de l'unité d'habitation et client absent ou refusant l'accès aux lieux), ou de non-conformité de son abri (cf. article 5 du présent règlement), le service de l'eau potable peut imposer la mise en place d'un système de radio relevé ou la mise en conformité de l'abri aux frais du client', que l'annexe dénommée « conditions particulières » traite dans son article 2 de l'individualisation des contrats de fourniture d'eau dans les immeubles collectifs d'habitation et ensembles immobiliers de logements, qu'en ce qui concerne la facturation des consommations dites particulières, il est stipulé que le propriétaire est redevable des consommations communes relevées sur les compteurs spécifiques, de la consommation enregistrée au compteur général après déduction des consommations relevées ou estimées des compteurs individuels et spécifiques des abonnements correspondants, que selon la Cour d'appel, ce serait en vertu de cette disposition de nature réglementaire que la Lyonnaise pourrait exiger de lui le règlement de consommations d'eau ne lui étant pas imputables, que le règlement du service de distribution d'eau potable dont excipe la Lyonnaise des Eaux n'est pas daté mais porte le visa de la Communauté de l'Agglomération Creilloise, qui a la compétence d'exécution du service public de l'eau, que la Communauté de l'Agglomération Creilloise est un EPIC qui a succédé, en 1999, au District Urbain de l'Agglomération Creilloise, créé en 1965, que toutefois, le Syndicat des copropriétaires, qui se dénommait avant le Syndicat du Domaine des X., a été créé bien avant 1965, que dans ces conditions, pour que la Lyonnaise puisse lui opposer le règlement du service des eaux, dans sa rédaction de 1999 encore faudrait-il que soit versé aux débats le contrat d'abonnement auquel aurait dû être annexé le règlement de service des eaux de l'époque, ou éventuellement si une nouvelle convention a été signée lors de l'individualisation des compteurs, cette autre convention, qu'à défaut, la Lyonnaise des Eaux ne saurait solliciter sa condamnation au règlement de sommes dues au titre non pas de sa consommation mais de la consommation des occupants, qu'elle n'a pu qu'estimer, faute de pouvoir accéder aux logements, qu'en l'état, la Lyonnaise des Eaux ne satisfait donc pas à l’article 1315 du code civil, ce qu'a implicitement admis la Cour dans l'arrêt cassé énonçant que 'Si aucun contrat spécifique avec le Syndicat des copropriétaires n'a été signé, alors que chacun des occupants a souscrit une telle convention, il n'en demeure pas moins que les clauses précitées s'appliquent dès lors que le processus d'individualisation a été mis en place, des contrats individuels ayant été installés dans les locaux de chaque occupant. En juger autrement reviendrait à considérer que le Syndicat des copropriétaires, seul titulaire de l'abonnement du compteur général doit supporter l'intégralité des consommations de la copropriété', qu'il est ainsi démontré que la Lyonnaise n'est pas en mesure de produire le contrat d'abonnement par lequel il aurait pris connaissance des conditions particulières concernant l'individualisation des compteurs, qu'en conséquence, la combinaison des articles 1134 et 1315 du code civil ne peut que conduire au rejet des prétentions de la Lyonnaise des Eaux, dans l'incapacité de rapporter la preuve que les factures réclamées sont exigibles, soit au titre des consommations du Syndicat, soit de ses engagements, si l'on admet que l'interprétation donnée à la clause du règlement implique la solidarité dont la Lyonnaise des Eaux excipe, que, compte tenu du montant des sommes réclamées, alors que la consommation du Syndicat est limitée à l'arrosage des quelques espaces verts de la copropriété, au nettoyage des cages d'escalier et au fonctionnement de la chaudière, il est évident que la Lyonnaise des Eaux entend par cette procédure lui faire régler les consommations des abonnés qu'elle ne parvient pas à relever, qu'il serait nécessaire que soient versées aux débats les pièces de nature contractuelle, justifiant des réclamations, car l'individualisation des compteurs ne saurait suffire à prouver son engagement de régler les consommations d'autres abonnés, que ce qui serait inique, c'est qu'il soit contraint de régler des factures ne correspondant pas à ses consommations, compte tenu de l'incapacité des services de la Lyonnaise des Eaux à relever les compteurs divisionnaires se trouvant dans les appartements des occupants, parce qu'elle ne veut pas mettre en œuvre les procédés techniques qui permettraient de remédier à cette difficulté, et qui ont un coût, qu'enfin le reproche fait aux premiers juges d'avoir violé le principe de la séparation des pouvoirs n'est pas fondé, que les dispositions législatives sur les clauses abusives s'appliquent aux actes de nature réglementaire qui régissent les rapports des délégataires de service public avec les usagers de ce service, que le juge judiciaire est compétent pour apprécier si une disposition de nature réglementaire est légale, que le Tribunal des Conflits, dans son arrêt de principe de novembre 2011, donne désormais pouvoir au juge judiciaire d'interpréter et d'apprécier la légalité d'actes de nature administrative, sans avoir à renvoyer sur question préjudicielle à l'examen du juge administratif, quand la solution à la question posée est évidente par rapport au droit positif, que cette évidence est en l'état démontrée car imposer une solidarité entre des entités juridiques autonomes, pour justifier que l'une se substitue à l'autre dans l'exécution de ses obligations contractuelles, est manifestement abusif, que la Lyonnaise des eaux voudrait laisser croire qu'il tente de se soustraire au règlement de ses consommations d'eau, que cependant il n'a pas de contrat avec la Lyonnaise, le liant sur l'entretien et le relevé des compteurs individuels dans les appartements, que chaque résident a un contrat d'abonnement avec la Lyonnaise des Eaux, prévoyant le relevé de son compteur, et le paiement de l'eau froide consommée, que la Lyonnaise des eaux procède aux relevés des compteurs généraux se trouvant en pied de colonne et lui facture la différence entre ces relevés et le total des relevés des compteurs individuels, qu'il a toujours réglé la différence, qui correspond à sa consommation d'eau froide pour les parties communes, qu'à une certaine époque, il a été constaté que ces consommations dites résiduelles étaient excessives, disproportion pouvant s'expliquer par les fuites sur le réseau dans un ensemble immobilier de cette importance (composé de 13 bâtiments, pour 999 occupants), que la Lyonnaise des eaux en a convenu et qu'il a été pris diverses dispositions techniques pour remédier à cette difficulté et ramener la facturation du Syndicat au nombre de m3 d'eau froide consommés, que la Lyonnaise des Eaux a ensuite pratiqué unilatéralement une autre politique de facturation, consistant lorsqu'elle ne pouvait relever un compteur individuel, à ne pas appliquer un forfait, mais à le facturer, considérant qu'il lui appartenait d'exercer un recours contre l'occupant défaillant, lié à la Lyonnaise des eaux par un contrat d'abonnement, que cette substitution n'est pas prévue contractuellement et que, même s'il avait accepté de procéder de la sorte, il n'aurait pu exercer aucun recours contre les occupants, n'ayant aucun lien de droit avec eux, que par la mise en place de ce système, la Lyonnaise des Eaux s'est donc constituée une créance fictive contre lui, ne correspondant pas à ses consommations d'eau mais à celle des abonnés de la Lyonnaise des eaux, qu'il en ressort que c'est de façon inexacte que la Lyonnaise vient soutenir qu'il tente de se soustraire au règlement de ses consommations d'eau, qui sont importantes, qu'en réalité, il n'entend régler, conformément au principe des rapports que doit entretenir l'usager d'un service public, avec le prestataire de ce service public, que les sommes correspondant à ses consommations d'eau froide.

S'agissant de la prescription, il se dit fondé à opposer à la réclamation de la Lyonnaise des Eaux, eu égard à la nature de sa créance, l'ancien article 2277 du code civil, qui prescrivait par 5 ans les actions en paiement, dans la mesure où il s'agit d'une créance payable à termes périodiques.

Il expose que l'assignation ayant été délivrée en 2007, les consommations objet des facturations litigieuses antérieures à 2002 se trouvent prescrites, qu'aux termes de la note en délibéré qu'elle a fait adresser au juge de première instance en février 2008, la Lyonnaise des Eaux a déclaré que sa réclamation portait sur les consommations depuis 2001 jusqu'au 31 décembre 2007, que la prescription étant acquise antérieurement au 1er janvier 2003, la Lyonnaise des eaux ne pourra être que déboutée de toutes ses réclamations antérieures, soit selon son décompte pour un montant de 12.563,79 euros, que la prétendue créance invoquée par la Lyonnaise procède de la consommation d'eau et qu'en conséquence pour apprécier le délai de prescription de l’article 2277 du code civil, il ne faut pas se placer au jour de l'établissement de la facture, mais au jour où est née la créance de consommation d'eau litigieuse, que pour apprécier les créances réellement prescrites, il appartient donc à la Lyonnaise de verser aux débats non pas les factures, mais les relevés de consommation litigieux, car il importe peu que ces consommations aient été facturées postérieurement au 1er janvier 2003, que s'il est d'ores et déjà acquis que la somme de 12.563,79 euros est prescrite, concernant le solde réclamé, il est fait sommation à la Lyonnaise d'avoir à justifier que les factures émises postérieurement au 1er janvier 2003 le sont pour les consommations à tout le moins contemporaines à cette date.

S'agissant de la facturation, le Syndicat des copropriétaires soutient que la Lyonnaise des Eaux ne conteste pas lui réclamer des consommations d'eau ne le concernant pas mais prétend qu'à tout le moins il aurait pu régler la consommation d'eau correspondant à la chaudière, que l'observation manque de pertinence, car il a réglé une partie des sommes qui lui était réclamée et notamment celle correspondant à sa consommation, qu'elle est en mesure d'estimer, qu'aussi, il ne saurait lui être fait reproche de ne pas avoir payé ses factures correspondant à sa consommation.

Sur le reproche fait au premier juge d'avoir, en violation du principe de la séparation des pouvoirs, apprécié la légalité d'un acte administratif, en écartant l'application du règlement du service de distribution de l'eau, au motif qu'il aurait été abusif, le Syndicat des copropriétaires expose qu'il suffit de se référer au jugement querellé pour constater qu'il n'a pas statué sur la validité de la clause, au regard de ce qu'est une clause abusive au sens de la loi de 1978, que le premier juge s'est contenté de constater qu'aux termes du règlement du service des eaux, la Lyonnaise ne peut exiger même à compter de l'individualisation des contrats de fourniture, le règlement des factures à un autre qu'à l'abonné et a relevé qu'il n'était pas rapporté la preuve par la Lyonnaise des Eaux qu'il est responsable de ce qui est dénommé « les installations intérieures », c'est-à-dire l'ensemble des éléments d'équipement commençant immédiatement à l'aval du compteur général et s'arrêtant au dispositif de comptage individuel, qu'il ne peut dès lors être tenu pour responsable des installations situées dans les parties privatives, et donc des compteurs divisionnaires, pour lesquels les occupants ont souscrit individuellement un contrat d'abonnement à la Lyonnaise, que c'est notamment la raison pour laquelle il n'a pas la police du fonctionnement de ces compteurs individuels, que la Lyonnaise a expressément autorisé à voir installer dans les parties privatives, où l'accessibilité se trouve limitée, ce qui pose difficulté pour les relever, que les consommations communes de l'immeuble sont, précise le règlement, systématiquement mesurées par des compteurs spécifiques pour l'arrosage, lavage des parties communes, qu'il est par ailleurs redevable de la consommation enregistrée au compteur général après déduction des consommations relevées ou estimées sur les compteurs individuels et spécifiques, que selon la Lyonnaise des Eaux, cette clause justifie ses réclamations, car elle l'autoriserait à lui réclamer la différence entre la consommation du compteur général et le cumul des compteurs divisionnaires, que cette interprétation, qui permettrait de le facturer aux lieu et place des abonnés occupants, est en contradiction avec les autres dispositions qui prévoient que seuls les abonnées sont redevables, qu'entre les totaux du compteur général et des compteurs divisionnaires, il peut y avoir des différences dues à divers problèmes techniques, et notamment des pertes d'eau, ne correspondant en soi à aucune consommation, que quand ces problèmes sont dus à une défaillance du réseau, avant compteur général, la responsabilité en incombe à la Lyonnaise, qui ne peut facturer aucune consommation à ce titre, que par contre, quand la défaillance se situe entre le compteur général et les compteurs divisionnaires, conformément aux termes du règlement, la Lyonnaise des Eaux est autorisée à en réclamer paiement au syndicat des copropriétaires, présumé contractuellement consommateur de cette eau, que c'est cette interprétation qu'a privilégiée le premier juge, sans remettre en cause pour autant le règlement de distribution de l'eau, car c'est la seule qui lui a paru conforme à la lettre et à l'esprit des conventions, qu'il n'a donc pas violé le principe de séparation des pouvoirs, que, poursuivant son raisonnement, le premier juge a constaté que quand bien même la difficulté d'établissement des factures aux abonnés procédant de l'individualisation a pour cause l'accessibilité à leur compteur, ce n'est pas pour autant que le fermier peut se retourner contre le syndicat, qui ne dispose d'aucun pouvoir de police pour régler le problème, que le fermier a du fait du règlement dont il excipe, des moyens pour remédier à ce problème, en agissant directement auprès des abonnés occupants, qu'il n'a pas cru devoir mettre en œuvre, que ce qui est reproché au premier juge n'est donc pas d'avoir apprécié la légalité du règlement mais de l'avoir interprété, au visa des règles sur les contrats de consommation, s'agissant de la distribution d'eau, que la clause dont excipe la Lyonnaise des Eaux est ambiguë dans la mesure où elle mettrait à la charge du Syndicat les consommations d'un autre abonné pourtant désigné dans le règlement redevable de ces consommations, que dans la mesure où dans les contrats de consommation les clauses ambiguës s'interprètent dans le sens le plus favorable au consommateur, l'analyse du premier juge ne peut être que confirmée, qu'en outre depuis l’arrêt du Tribunal des Conflits du 16 juin 1923 Septfonds, l'interprétation d'un acte réglementaire est possible au juge judiciaire, que depuis l'arrêt de principe rendu par le Tribunal des Conflits le 17 octobre 2011, Préfet de la Région Bretagne / Cheneau, a été parachevée la doctrine sur l'extension des pouvoirs du juge judiciaire, en matière de contrôle de légalité des actes administratifs, dans le prolongement de l'arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 6 mai 1987, France Télécom c/ Communication média services, que le Tribunal des Conflits avait confirmé dans sa décision Union Française de l'Express & autres c/ La Poste de 1998, qu'ainsi les principes dégagés par l'arrêt Septfonds doivent être conciliés tant avec l'exigence de bonne administration de la justice qu'avec les principes généraux qui gouvernent le fonctionnement des juridictions, en vertu desquels tout justiciable a droit à ce que sa demande soit jugée dans un délai raisonnable, que si en cas de contestation sérieuse portant sur la légalité d'un acte administratif, les tribunaux de l'ordre judiciaire statuant en matière civile doivent surseoir jusqu'à ce que la question préjudicielle de la légalité de cet acte soit tranchée par la juridiction administrative, il en est autrement lorsqu'il apparaît manifestement au vu de la jurisprudence établie que la contestation peut être accueillie par le juge civil au principal, qu'il ressort donc de cette jurisprudence que non seulement le premier juge pouvait interpréter le règlement, car cela rentrait dans son office au titre de l’article 12 du code de procédure civile, mais de surcroît, il avait la capacité d'en apprécier la légalité, qu'en conséquence, si la Cour considérait que l'interprétation qu'a donnée le premier juge du règlement n'est pas conforme à sa lettre, il resterait fondé à en contester sa légalité devant le juge judiciaire, car si le règlement autorisait de faire supporter à un abonné les consommations d'un autre abonné, la clause serait abusive, qu'en effet, pareille clause aurait pour effet de créer au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations nés du contrat auquel il est partie, avec la Lyonnaise des Eaux, professionnel de la distribution de l'eau, dans le seul but de garantir le règlement de ses factures, que pareille garantie serait exorbitante du droit commun et le fait que la distribution de l'eau soit un service public ne saurait autoriser pareille entorse au droit de la consommation qui régit les rapports entre fermier délégataire du service public et les abonnés, que les usagers, comme les tiers, sont recevables à contester devant le juge de l'excès de pouvoir, les dispositions réglementaires contenues dans les contrats d'affermage et mettre en cause la légalité des clauses réglementaires des contrats d'affermage au regard du droit de la consommation, en invoquant le caractère abusif des clauses, ainsi que l'a rappelé la Cour d'appel de Nantes dans son arrêt du 29 décembre 2005, que la Lyonnaise ne saurait se soustraire au débat sur la licéité éventuelle de la clause figurant dans le cahier des charges, compte tenu de son caractère réglementaire, que la seule discussion qui subsiste est de savoir si le juge judiciaire peut apprécier la légalité de la clause sans renvoyer cette question au juge administratif sur question préjudicielle, en vertu de la dernière jurisprudence du Tribunal des Conflits, qu'il apporte une réponse positive à cette question, la violation des fondamentaux du droit de la consommation étant suffisamment établie en l'état, que si par impossible, la Cour considérait que le juge de l'action ne saurait être le juge de l'exception, il y aurait lieu de renvoyer sur question préjudicielle à la juridiction administrative le soin d'apprécier la légalité de la clause, qu'en l'état, il ressort manifestement des pièces versées aux débats que le problème tient essentiellement au fait que la Lyonnaise des Eaux n'a pas pu relever les compteurs divisionnaires d'un certain nombre d'abonnés, alors que ses estimations étaient manifestement inférieures à leur consommation et qu'elle a alors imaginé de lui réclamer paiement de ces sommes, bien qu'elle sache pertinemment qu'il ne s'agit pas là de sa consommation, qu'il échet pour l'ensemble de ces raisons de confirmer le jugement entrepris, et de débouter la société Lyonnaise des Eaux de l'ensemble de ces réclamations.

[***]

Sur les règles de facturation applicables entre les parties :

Le syndicat des copropriétaires intimé ne conteste pas que les parties communes qu'il administre sont approvisionnées en eau potable par la société Lyonnaise des Eaux.

Force est de constater que s'il invoque l'existence d'une convention d'individualisation signée entre les services de la société Lyonnaise des Eaux de France et lui-même, il ne produit pas un tel document, dont l'appelante conteste l'existence, indique ne pas être en mesure de le produire et ne fournit même aucune indication sur la date à laquelle la convention aurait été signée par les parties, si ce n'est au conditionnel dans sa toute dernière note qui évoque l'année 1980.

La société Lyonnaise des Eaux de France fait elle-même valoir, aux termes de la page 8 de ses conclusions à laquelle elle s'est de nouveau reportée dans sa note du 10 décembre 2013 en réponse aux interrogations de la Cour, que le Syndicat La Y. se trouvait déjà en régime d'individualisation des compteurs avant l'entrée en vigueur de la loi SRU, et verse aux débats des factures qui apparaissent en conformité avec le règlement du service de distribution d'eau potable qu'elle produit.

Notamment, la pièce numéro 9 intitulée « factures + avoir 2007 (167) », est constituée de factures, toutes libellées au nom du Syndicat des copropriétaires, mais comportant chacune une adresse desservie (« La Y. » suivie selon le cas et dans l'ordre où les factures sont produites des indications '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]','[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]', '[...]') et d'une référence (ex : « 25-092346-00 ») spécifiques.

Pour chacune des références et des adresses desservies sont produites deux factures, la première en date du 22 mai 2007 et la seconde en date du 28 novembre 2007 ou du 5 décembre 2007 et ces factures comportent un différentiel entre la consommation procédant de la lecture du nouvel index et de l'ancien index et les « consommations de compteurs individuels ».

Or, il ressort du règlement du service public de distribution d'eau potable produit aux débats et qui, en tant qu'acte administratif réglementaire annexé au marché public signé par la société Lyonnaise des Eaux de France avec la Communauté de l'Agglomération Creilloise, s'impose aux parties ainsi qu'au juge judiciaire qui n'a pas compétence de son propre chef pour en examiner la légalité - notamment de l'article des conditions particulières dénommé « mesures et facturation des consommations particulières », que « le propriétaire est redevable : des consommations communes relevées sur les compteurs spécifiques, de la consommation enregistrée au compteur général après déduction des consommations relevées ou estimées sur les compteurs individuels et spécifiques, des abonnements correspondants ».

Il est également indiqué aux conditions générales (article 3.4) que « si le relevé n'a pu être réalisé, la consommation est estimée sur la base de la consommation de l'année précédente ou de la période correspondante de l'année précédente. Le compte du client est régularisé à l'occasion du relevé suivant ».

Il est certes énoncé au même article qu' « en cas d'inaccessibilité du compteur (compteur situé à l'intérieur de l'unité d'habitation et client absent ou refusant l'accès au lieu...) (...), le Service de l'eau potable peut imposer la mise en place d'un système de radio-relevé (...) » mais cette prérogative ne peut être invoquée, pour se soustraire à ses obligations, par le Syndicat des copropriétaires auquel il appartenait, le cas échéant, de demander au concessionnaire l'installation de compteurs spécifiques correspondant à ses propres consommations (chaufferie, arrosage, nettoyage des parties communes, etc.), le compteur général n'étant alors là que pour faire foi de la consommation réelle de l'ensemble des abonnés (syndicat et occupants).

Le Syndicat des copropriétaires sera, en conséquence, débouté de ses demandes tendant à voir confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et débouter la société Lyonnaise des Eaux de l'ensemble de ses réclamations, à titre subsidiaire à ce que la clause du règlement de distribution de l'eau dont excipe la Lyonnaise des Eaux soit dite abusive au sens des dispositions de la loi de 1978 sur les clauses abusives et annulée, à titre infiniment subsidiaire, au renvoi sur question préjudicielle à la juridiction administrative du soin d'apprécier la légalité du règlement de distribution de l'eau, par référence aux dispositifs légaux de la loi de 1978 sur les clauses abusives, et le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté la société Lyonnaise des Eaux de France de ses demandes.

 

Sur la prescription :

Les explications de la société Lyonnaise des Eaux de France selon lesquelles la référence faite par le premier juge à la fin de non-recevoir tirée de la prescription ne constitue pas un motif décisoire tandis que le tribunal n'était pas en droit de se substituer au Syndicat des copropriétaires pour soulever un moyen que celui-ci n'avait pas cru devoir évoquer sont sans pertinence dès lors qu'il appartient à la Cour de connaître de l'entier litige et qu'une fin de non-recevoir peut être invoquée en tout état de cause.

Aux termes de l’article 26-I de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, « lorsqu'une instance a été introduite avant l'entrée en vigueur de la présente loi, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne. Cette loi s'applique également en appel et en cassation ».

Le Syndicat des copropriétaires est ainsi fondé à se prévaloir de la prescription quinquennale résultant de l'ancien article 2277 du code civil, qui prescrivait par 5 ans « les actions en paiement : (...) de tout ce qui est payable par année ou à des termes périodiques plus courts », et qui n'est pas autrement contestée par l'appelante, qui, au demeurant, produit elle-même une jurisprudence faisant application de l'ancien article 2272, alinéa 4, du code civil, prévoyant une prescription biennale.

Ainsi que le soutient à titre subsidiaire la société Lyonnaise des Eaux de France, il y a lieu pour l'application de la prescription de se référer à l'assignation du Syndicat des copropriétaires devant le tribunal de grande instance de Senlis, en date du 23 mai 2007, et donc de dire qu'elle ne peut porter que sur la période antérieure au 23 mai 2002.

Toutefois, et contrairement à ce que soutient l'appelante qui fait valoir qu'aucune facture antérieure à cette date n'est réclamée, la prescription s'applique dès lors que les consommations en cause sont antérieures cette date, la seule émission d'une facturation postérieure ne pouvant avoir pour effet d'écarter ou de différer son acquisition.

 

Sur la démonstration par la société Lyonnaise des Eaux de France de sa créance :

Au soutien de sa demande de condamnation de le Syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 130.832,34 euros, avec intérêts de droit à compter du 1er février 2007, la société Lyonnaise des Eaux de France fait valoir les documents suivants :

- relevé des « factures 2007 du Syndicat des copropriétaires du Domaine des X. à Creil » constituant la pièce n° 5, faisant apparaître un total de 130.817,03 euros face aux diverses références client et adresses desservies, dont 17.127,11 euros au titre de la 2ème période 2007, 10.466,87 euros au titre de la 1ere période 2007, sommes s'appuyant sur les factures versées aux débats, et 103.223,05 euros au titre des « impayés antérieurs »,

- « tableau du syndicat des copropriétaires » constituant la pièce n° 3, faisant apparaître un total de 102.919,63 euros face aux diverses références client et adresses desservies, dont 15.061,53 euros au titre de la 2ème période 2006, sommes s'appuyant sur les factures versées aux débats, et 87.858,10 euros au titre des « factures antérieures »,

- relevé des » impayées de 2001 à 2007 du Syndicat des copropriétaires du Domaine des X. à Creil », pièce non numérotée, faisant apparaître l'exact total réclamé de 130.832,34 euros face aux diverses références client et adresses desservies, dont 17.773,99 euros au titre de la 2ème période 2007, 13.850,10 euros au titre de la 1ere période 2007, 15.564,31 euros au titre de la 2ème période 2006, 13.499,57 euros au titre de la 1ere période 2006, 12.562,95 euros au titre de la 2ème période 2005, 19.887,44 euros au titre de la 1ere période 2005, 7.279,63 euros au titre de la 2ème période 2004, 5.943,60 euros au titre de la 1ere période 2004, 5.273,39 euros au titre de la 2ème période 2003, 6.503,57 euros au titre de la 1ere période 2003, 7.605,28 euros au titre de la 2ème période 2002, 2.249,33 euros au titre de la 1ere période 2002, 1.324,67 euros au titre de la 2ème période 2001 et 1.384,51 euros au titre de la 1ere période 2001,

- lettre intitulée mise en demeure avec mention « recommandée avec AR » du 1er février 2007, pièce n° 2, adressée au Syndicat des copropriétaires Résidence privée la Y. faisant état de rappels du 12 septembre 2006 et 12 octobre 2006 et d'une rencontre du 22 novembre 2006 et de « factures de consommations d'eau des compteurs généraux des immeubles de la résidence privée la Y., impayées depuis plusieurs années, pour un montant total de 87.858,10 euros en ce qui concerne les factures émises jusqu'au 1er semestre 2006 », non accompagnée de la justification de son envoi, a fortiori de sa réception par le Syndicat des copropriétaires.

Il ne résulte pas suffisamment de ces décomptes, lorsqu'ils ne reposent pas sur des factures telles que produites pour la seconde période de l'année 2006 et l'année 2007, démonstration suffisante des créances dont se réclame de la société Lyonnaise des Eaux de France qui à tout le moins devrait être en mesure de justifier de documents conformes au règlement sur lequel elle fonde ses demandes.

Une copie de lettre intitulée mise en demeure et dont ni l'envoi ni la réception ne sont justifiés ne saurait tenir lieu de preuve et de simples décomptes se référant à des impayés antérieurs ne permettent pas de s'assurer de ce que les créances réclamées à ce titre ne sont pas prescrites.

Il est également curieux que le relevé des « factures impayées de 2001 à 2007 du Syndicat des copropriétaires du Domaine des X. à Creil », en ce qu'il reprend les périodes 2006 (2nde période) et 2007, ne reprenne les sommes figurant dans les décomptes relatifs à la 2nde période 2006 (pièce n° 3) et à l'année 2007 (pièce n° 5).

En conséquence, il y a lieu de faire droit à la demande de paiement en ce qui concerne les seules sommes justifiées par des factures dûment produites dans la présente procédure, soit, au vu des factures et avoirs et des pièces n° 3 et 5, 15.061,53 euros au titre de la 2ème période 2006, 13.850,10 euros au titre de la 1ere période 2007 et 17.773,99 euros au titre de la 2ème  période 2007, ce qui représente un total de 46.685,62 euros.

Compte tenu de la déficience de la mise en demeure produite, les intérêts de retard au taux légal ne peuvent courir qu'à compter de l'assignation du 23 mai 2007 et ce uniquement en ce qui concerne la somme de 15.061,53 euros afférente à la 2ème période 2006 qui était alors due, les factures 2007, postérieures à cette date ne pouvant être assorties d'intérêts de retard qu'à compter du 1er avril 2008, date du jugement entrepris.

 

Sur les dépens et les frais hors dépens :

En application de l’article 639 du code de procédure civile, il y a lieu pour la juridiction de renvoi de statuer sur la charge de tous les dépens exposés devant les juridictions du fond y compris sur ceux afférents à la décision cassée.

Compte tenu de la succombance respective des parties, il y a lieu de dire qu'elles supporteront la charge de leurs propres dépens tant en première instance, le jugement étant infirmé de ce chef, qu'en appel.

Il n'est pas inéquitable de leur laisser la charge de leurs frais irrépétibles tant en première instance, le jugement étant infirmé de ce chef, qu'en appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant après débats publics, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 1er avril 2008 par le tribunal de grande instance de Senlis,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne le Syndicat des copropriétaires à payer à la société Lyonnaise des Eaux de France la somme de 46.685,62 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2007 sur la somme de 15.061,53 euros et à compter du 1er avril 2008 pour le surplus,

Déboute le Syndicat des copropriétaires de ses demandes,

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens de première instance et d'appel,

Déboute les parties de leurs demandes respectives sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier                Le Président