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5847 - Code de la consommation - Domaine d’application - Légalité des actes réglementaires - Compétence administrative

Nature : Synthèse
Titre : 5847 - Code de la consommation - Domaine d’application - Légalité des actes réglementaires - Compétence administrative
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 5847 (8 août 2023)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION

DOMAINE D’APPLICATION - LÉGALITÉ DES ACTES RÉGLEMENTAIRES

COMPÉTENCE ADMINISTRATIVE

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2023)

 

Principe : exclusion de la compétence judiciaire pour apprécier la légalité d’un acte administratif. Le droit français impose une répartition entre les ordres de juridiction, administratif et judiciaire, qui interdit aux juridictions judiciaires d’apprécier la légalité d’un acte administratif (sauf exception pour les juridictions pénales) (A). Cette solution oblige le juge judiciaire à saisir le juge administratif par le biais d’une question préjudicielle (B). Le juge judiciaire demeure compétent si le contrat est purement privé ou s’il peut trancher le litige sans apprécier la légalité de l’acte réglementaire (C)

Articulation des deux voies de contestation. Pour une décision résumant les deux voies possibles de contestation : eu égard aux rapports juridiques qui naissent du contrat d'abonnement liant le distributeur d'eau et l'usager, ce dernier ne peut, en cas de dommage subi par lui à l'occasion de la fourniture de l'eau, exercer d'autre action contre son cocontractant que celle qui procède du contrat, alors même que la cause du dommage résiderait dans un vice de conception, de construction, d'entretien ou de fonctionnement de l'ouvrage public qui assure ladite fourniture ; il appartient, en conséquence, à l'abonné qui, à l'occasion d'un litige né du contrat d'abonnement, invoque le droit que lui confère sa qualité de consommateur, d'opposer le caractère abusif d'une clause du contrat devant le juge judiciaire qui saisira la juridiction administrative par la voie préjudicielle, s'il s'agit d'une clause réglementaire. CAA Lyon, 20 octobre 2022 : req. n° 21LY02840 ; Cerclab n° 9895 (point n° 7), sur appel de TA Grenoble, 24 juin 2021 : req. n° 1905708 ; Dnd. § Cette voie de droit ne fait pas obstacle à ce que l'usager saisisse le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir contre les clauses qui, comme les clauses litigieuses, ont une portée réglementaire, la conformité aux anc. art. L. 132-1, L. 212-1 et R. 212-1 C. consom. conditionnant, non plus l'opposabilité contractuelle de ces clauses, mais leur légalité. CAA Lyon, 20 octobre 2022 : req. n° 21LY02840 ; Cerclab n° 9895 (point n° 8 ; tardiveté du recours ne ressortant pas, en l’espèce, des pièces du dossier).

Portée de la saisine sur question préjudicielle. Il incombe au juge administratif, dès lors qu’il est lui-même compétent pour en connaître, de répondre à la question préjudicielle posée par le juge judiciaire, sans que puisse être discutée devant lui la question de l’applicabilité de l’ancien art. L. 132-1 [212-1 nouveau] C. consom. CE (3e ch. 8e sect.), 30 décembre 2015 : req. n° 387666 ; Rec. Lebon (tables) ; Cerclab n° 5460 (motif répondant sans doute à la contestation de la qualité de professionnel de l’abonné, une société de production et distribution de café), réformant TA Marseille, 16 décembre 2014 : req. n° 1103577 ; Dnd, sur demande de T. com. Marseille, 21 avril 2010 : RG n° 2008F02130 et n° 2008F02334 ; Dnd.

A. ILLUSTRATIONS D’APPLICATIONS DU PRINCIPE

Abonnement d’autoroute. Pour une prise de position générale, en dehors des clauses abusives : une société concessionnaire de la construction et de l’exploitation d’une autoroute a pour activité l’exécution d’une mission de service public administratif, sans qu’y fasse obstacle la circonstance que les péages, qui ont le caractère de redevances pour service rendu, sont assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ; les usagers de l’autoroute, même abonnés, sont dans une situation unilatérale et réglementaire à l’égard du concessionnaire ; il en résulte que les litiges pouvant naître entre ces usagers et le concessionnaire quant au principe et au montant du péage, y compris quant à la délivrance de factures afférentes à ce péage, relèvent de la compétence de la juridiction administrative. T. confl., 20 novembre 2006 : req. n° C3569 ; rec. Lebon ; Cerclab n° 5201 - T. confl., 20 novembre 2006 : req. n° C3599 ; Cerclab n° 5202 (idem). § Dans le même sens : CE, 28 juillet 1995 : req. n° 126484 ; Cerclab n° 5203 (l’abonné à un péage autoroutier se trouve dans une situation unilatérale et réglementaire à l’égard de la société chargée de l’exploitation de l’autoroute), annulant TA Nice, 26 mars 1991 : Dnd.

L’usager de l’autoroute participe à un service public administratif. Il adhère aux conditions par un acte qui ne présente aucun caractère contractuel et se trouve dans une situation unilatérale et réglementaire. Le paiement du péage ne fait naître aucun lien contractuel entre l’usager d’une autoroute et la société concessionnaire, de telle sorte que leurs relations sont régies par les règles du droit public. CA Paris (pôle 5 ch. 11), 18 septembre 2009 : RG n° 06/21695 ; arrêt n° 58 ; Cerclab n° 2605 ; Juris-Data n° 2009-011469 (renvoi du demandeur à mieux se pourvoir ; N.B. la clause litigieuse concernait un contrat d’abonnement autoroutier), confirmant TGI Paris (1re ch. soc.), 16 mai 2006 : RG n° 05/00523 ; jugt n° 2 ; Cerclab n° 3728 (jugement rejetant l’argument du demandeur estimant que la situation d’usager ne concerne que le péage ordinaire aux guichets et non la souscription du contrat d’abonnement Libert-T, lequel présenterait toutes les caractéristiques d'une exploitation commerciale classique et ne contiendrait aucune clause exorbitante du droit commun, aux motifs que les conventions de concession conclues prévoient la possibilité pour les concessionnaires de proposer aux usagers des formules d'abonnement permettant l'octroi de conditions préférentielles, matérialisées dans un contrat type, formules qui comportent des clauses réglementaires dans la mesure où elles tirent leur source directement du contrat de délégation et du cahier des charges qui y est annexé, notamment celles qui recouvrent les conditions de tarification du service rendu à l’usager, le télépéage n'étant qu'une modalité particulière de paiement du péage autoroutier), après renvoi sur contredit de CA Paris (1re ch. D), 6 décembre 2006 : RG n°06/10415 ; Dnd.

V. cependant, en sens contraire, la Recommandation n° 95-01 sur les contrats d’abonnement autoroutier, reconnaissant explicitement une nature contractuelle aux contrats d’abonnement conclus entre les sociétés concessionnaires et les usagers : Recomm. 95-01 : Cerclab n° 2163. § N.B. La solution contraire n’aurait a priori pas privé la Commission de sa compétence quant à l’émission d’une recommandation.

Aménagement et entretien d’espaces publics. Impossibilité d’examiner le caractère abusif d’une clause d’un cahier des charges approuvé par un conseil municipal, régissant les relations entre la commune et une société chargée de l’entretien des espaces verts et des parkings d’ensembles immobiliers créés à la suite d’une opération de rénovation urbaine, qui constitue un acte administratif. CA Paris (pôle 4 ch. 2), 3 juillet 2019 : RG n° 16/03193 ; Cerclab n° 8135 (impossibilité pour le syndicat d’une copropriété de dénoncer le contrat pour les parkings, de refuser de payer les redevances et de renvoyer chaque occupant à conclure un contrat avec la société pour l’usage du parking), sur appel de TGI Bobigny, 8 décembre 2015 : RG n° 13/09994 ; Dnd.

Approvisionnement en eau. Cassation du jugement qui retient que les relations entre l’usager et un syndicat intercommunal des eaux ont un caractère contractuel et que le Tribunal était compétent pour apprécier la validité du principe d’une consommation minimale, sans rechercher comme il y avait été invité, si ce règlement n’avait pas un caractère réglementaire, les tribunaux judiciaires ne pouvant, alors, en apprécier la légalité. Cass. civ. 1re, 22 novembre 1994 : pourvoi n° 93-11611 ; arrêt n° 1511 ; Bull. civ. I, n° 343 ; Cerclab n° 2084. § Les stipulations du cahier des charges type approuvé par le décret du 17 mars 1980 sont effectivement applicables aux usagers dès lors que le règlement du service qui s’y réfère leur a été remis lors de la signature de la demande d’abonnement ; les dispositions du cahier des charges pour l’exploitation par affermage d’un service de distribution d’eau potable ont un caractère réglementaire, de sorte que les tribunaux de l’ordre judiciaire ne peuvent, sans méconnaître le principe de séparation des pouvoirs, déclarer que de telles dispositions sont des clauses abusives au sens de l’art. 35 de la loi du 10 janvier 1978. Cass. civ. 1re, 31 mai 1988 : pourvoi n° 87-10479 ; arrêt n° 683 ; Bull. civ. I, n° 161 ; Cerclab n° 2112 ; D. 1988. somm. 406, obs. Aubert (solution contraire du tribunal d’instance jugée erronée mais surabondante en l’espèce, la Cour interprétant l’art. 64 du cahier des charges dans un sens favorable à l’abonné). § Aux termes de l’art. 49, al. 2, CPC, lorsque la solution d'un litige dépend d'une question soulevant une difficulté sérieuse et relevant de la compétence de la juridiction administrative, la juridiction judiciaire initialement saisie la transmet à la juridiction administrative compétente en application du titre Ier du livre III du code de justice administrative : il appartient à la juridiction administrative, seule compétente pour apprécier la légalité du règlement d'un service public définissant les relations entre l'exploitant du service et les usagers de celui-ci, d'apprécier le caractère abusif de ses clauses, au sens du code de la consommation ; il s'en déduit qu'en présence d'une difficulté sérieuse et en l'absence d'une jurisprudence établie, il appartient à la juridiction judiciaire de surseoir à statuer jusqu'à ce que soit tranchée par la juridiction administrative la question préjudicielle du caractère abusif des clauses en cause. Cass. civ. 1re, 8 avril 2021 : pourvoi n° 18-24494 ; arrêt n° 298 ; Bull. civ ; Cerclab n° 9003 (contrat d'abonnement en eau potable auprès de la société Générale des eaux Guadeloupe - le délégataire -, délégataire du service public de distribution d'eau potable à Saint-Martin ; désordres causés par une fuite sur une canalisation du réseau commun enterré, situé sur le terrain de la copropriété, entre le compteur individuel et le compteur général), pourvoi contre CA Basse-Terre (1re ch. civ.), 19 mars 2018 : Dnd.

Dans le même sens, pour les juges du fond : un règlement de Service des Eaux, élaboré, adopté et modifiable suivant les mêmes modalités que le contrat d’affermage, a la même nature règlementaire que celui-ci, de sorte que les tribunaux de l’ordre judiciaire ne peuvent, sans méconnaître le principe de la séparation des pouvoirs, déclarer que les clauses figurant dans ce document ont un caractère abusif. CA Dijon (1re ch. 2e sect.), 2 juillet 1992 : RG n° 548/91 ; arrêt n° 845 ; Cerclab n° 614 ; RJDA 1993, n° 970 (absence d’influence de la loi du 5 janvier 1988), infirmant TGI Mâcon (ch. civ.), 25 février 1991 : RG n° 16/90 ; jugt n°158 ; Cerclab n° 374 ; Gaz. Pal. 1992. 2. somm. 515 (jugement considérant qu'il n'est pas possible contractuellement d'imposer des modifications unilatérales non imposées par des dispositions réglementaires, notamment pour augmenter les obligations des clients, peu important que les modèles de contrats proposés ne soient pas impératifs). § Le règlement de service en matière de distribution d'eau potable est l'acte pris par la commune ou la collectivité en charge du service public de distribution d'eau, en application de l'article L. 2224-12 CGCT ; si ce règlement entre dans le champ contractuel et s'impose aux parties du fait même du contrat d'abonnement, il n'en reste pas moins que ce règlement constitue un acte administratif dont il n'appartient pas au juge judiciaire d'apprécier le caractère abusif de tout ou partie de ses clauses. CA Caen (1re ch. civ.), 25 juin 2019 : RG n° 16/02716 ; Cerclab n° 7776 (le tribunal a statué sur un moyen ne relevant pas de la compétence des juridictions judiciaires en violation de l’art. 49 CPC), infirmant TGI Coutances, 28 avril 2016 : RG n° 14/00133 : Dnd. § V. aussi : CA Montpellier (1re ch. D), 15 mai 2001 : RG n° 98/05400 ; arrêt n° 2138 ; Cerclab n° 939 ; Juris-Data n° 2001-154157 (contrat conclu avec un délégataire de service public en application d’un règlement : les dispositions du Code des communes fondant la tarification pratiquée par la commune étant de nature réglementaire, leur légalité ne peut être appréciée par le juge judiciaire et relève de la compétence du juge administratif), sur appel de TI Prades, 10 juillet 1998 : RG n° 235/97 ; jugt n° 310/98 ; Cerclab n° 112 (problème non examiné) - CA Bordeaux (1re ch. civ. sect. B), 26 octobre 2010 : RG n° 09/04052 ; Cerclab n° 2890 (distribution d’eau par une société privée ; règlement ne pouvant être contesté devant les juridictions judiciaires), sur appel de TGI Bordeaux (5e ch. civ.), 5 mai 2009 : RG 09/306 ; Dnd - CA Amiens (1re ch. civ.), 18 décembre 2013 : RG n° 12/00080 ; arrêt n° 530 ; Cerclab n° 4636 (un règlement du service public de distribution d'eau potable, acte administratif réglementaire annexé au marché public signé entre une commune et une société, s'impose aux parties ainsi qu'au juge judiciaire qui n'a pas compétence de son propre chef pour en examiner la légalité ; refus de question préjudicielle), sur appel de TGI Senlis, 1er avril 2008 : Dnd.

V. cependant : CA Nîmes (4e ch. com.), 12 avril 2023 : RG n° 21/01344 ; Cerclab n° 10217 (n'est pas abusive la clause du règlement du service de l'eau selon laquelle le paiement de la « facture de souscription » confirme l'acceptation des conditions particulières du contrat et du règlement du service de l'eau et vaut accusé de réception dans la mesure où elle n'est que le rappel des dispositions légales de l'art. L. 2224-12 CGCT), infirmant T. com. Avignon, 5 mars 2021 : Dnd - CA Toulouse (1re ch. sect. 1), 3 mai 2021 : RG n° 19/01091 ; Cerclab n° 8935 (le règlement de service eau potable du syndicat mixte tient lieu de convention entre les parties et se trouve, du fait de sa nature même, soumis en ce qui concerne l'ensemble de ses stipulations, au régime du droit privé ; arrêt visant explicitement l’art. L. 212-1 C. consom. mais déclarant la clause inopposable), sur appel de TGI Saint-Gaudens, 8 février 2019 : RG n° 17/00508 ; Dnd - Jur. prox. Lyon (sect. Tassin), 8 février 2008 : RG n° 91-07-000967 ; jugt n° 249 ; Cerclab n° 3710 (il appartient à la juridiction de contrôler toute clause contractuelle susceptible de créer un abus de puissance économique à l'encontre des usagers du service ; jugement se référant à l’arrêt du Conseil d’État du 11 juillet 2001), sur appel CA Lyon (6e ch. civ.), 17 septembre 2009 : RG n° 08/01817 ; Cerclab n° 2442 (référence implicite au même arrêt) - TGI Nîmes (réf.), 28 mai 2003 : RG n° 03/00386 ; Cerclab n° 1047 ; Bull. inf. C. cass. 2003, n° 1274 (convention passée avec un délégataire de service public ; interdiction en référé de la dépose de compteurs sollicitée par le délégataire en application d’une clause déclarée abusive par la recommandation n° 01-01) - TGI Paris (6e ch.), 17 janvier 1990 : RG n° 22652 /89 ; Cerclab n° 417 ; D. 1990. 289, note Ghestin (exploitation en régie intéressée : possibilité d’examiner les clauses du contrat de distribution).

Sur la répartition des compétences quant aux litiges affectant l’exécution du contrat : les litiges nés des rapports entre un service public industriel et commercial et ses usagers, qui sont des rapports de droit privé, relèvent de la compétence des juridictions judiciaires ; le service public de distribution de l’eau est en principe, de par son objet, un service public industriel et commercial ; il en va ainsi même si, s’agissant de son organisation et de son financement, ce service est géré en régie par une commune, sans disposer d’un budget annexe, et si le prix facturé à l’usager ne couvre que partiellement le coût du service ; en revanche le service ne peut revêtir un caractère industriel et commercial lorsque son coût ne fait l’objet d’aucune facturation périodique à l’usager. T. confl., 21 mars 2005 : pourvoi n° 05-03413 ; Bull. confl. n° 6 ; Cerclab n° 3623 (compétence judiciaire, pour une exploitation en régie, sans budget annexe mais avec facturation aux usagers ; litige concernant le remboursement d’un compteur), sur demande de TA Nice, 10 octobre 2003, annulant TGI Nice, 24 février 1998 (incompétence). § Eu égard aux rapports de droit privé nés du contrat d'abonnement qui lie le service public industriel et commercial de distribution d'eau potable à l'usager, il n'appartient qu'à la juridiction judiciaire de connaître des dommages causés à ce dernier à l'occasion de la fourniture de la prestation due par le service, alors même que ces dommages trouvent leur origine dans un incident survenu en amont du branchement particulier desservant l'usager. TA Lyon (3e ch.), 2 février 2023 : req. n° 2106786 ; Cerclab n° 10087 (compétence judiciaire, le désordre affectant la canalisation située entre la rue de desserte du lotissement et l'immeuble dont la SCI est propriétaire et dont la seule fonction est de desservir cette habitation).

Fourniture de chaleur. La juridiction administrative est compétente, quelle que soit la nature du service délégué et des liens qui l’unissent aux tiers et usagers, pour se prononcer sur la légalité des clauses réglementaires d’un contrat de concession ou du règlement de service de ladite concession, même si la distribution de chauffage et de froid présente le caractère d’un service public industriel et commercial et que le recours émane d’un usager de ce service. CAA Paris (4e ch.), 17 mars 2009 : req. n° 07PA01173 ; Cerclab n° 3346 (contestation de l’acte réglementaire pour atteinte à la liberté contractuelle et apparemment pas pour clause abusive), sur appel de TA Paris, 16 janvier 2007 : req. n° 0113200/6-1 ; Dnd. § Comp. pour la possibilité pour le juge judiciaire de contrôler les clauses du contrat d’abonnement : CA Besançon (1re ch. civ. com.), 30 juin 2020 : RG n° 19/00258 ; Cerclab n° 8488 (résumé ci-dessous).

Occupation du domaine public : port. La location d'un emplacement dans un port ne répond pas à la notion de service public industriel et commercial, dès lors que les plaisanciers ne payent pas un prix en contrepartie d'un service, mais une redevance pour occupation du domaine public. CA Aix-en-Provence (11e ch. B), 23 octobre 2014 : RG n° 11/14550 ; arrêt n° 2014/508 ; Cerclab n° 4979 ; Juris-Data n° 2014-028732 (incompétence de la juridiction judiciaire pour statuer sur l’action en responsabilité du propriétaire d’un bateau endommagé par un feu d’artifice contre la commune l’ayant organisé et son assureur ; examen, en revanche, de l’action contre la communauté de commune, concédante de l’emplacement, dès lors que celle-ci n’a pas soulevé l’exception d’incompétence in limine litis ; clause jugée non abusive), sur appel de TI Toulon, 30 juin 2011 : RG n° 11/09/2496 ; Dnd. § Comp. ci-dessous pour le contrat conclu avec un exploitant.

Piscine municipale. Dès lors que la piscine municipale litigieuse est un établissement géré en régie directe par la direction de la Jeunesse et des Sports de la ville de Paris et chargé de développer la pratique sportive, que ses produits d'exploitation sont imputés, avec ceux des terrains de sports et des stades municipaux, au chapitre des Sports et Beaux-arts du budget de la collectivité territoriale, il en résulte qu'elle constitue un service public administratif. La demande d'indemnisation du préjudice causé par le vol d'effets et d'objets personnels commis par des individus non identifiés dans un casier fermé à clé de cette piscine municipale ressortit donc à la compétence de la juridiction de l'ordre administratif. T. confl. 26 mai 2003 : pourvoi n° 03-03346 ; décision n° 1446 ; Cerclab n° 1895, après demande de Cass. civ. 1re, 22 octobre 2002 : pourvoi n° 00-18770 ; Cerclab n° 1889, solution reprise par Cass. civ. 1re, 28 octobre 2003 : pourvoi n° 00-18770 ; arrêt n° 1307 ; Cerclab n° 2019 (compétence administrative), cassant CA Paris (8e ch. D), 29 juin 2000 : RG n° 1998/09533 ; Cerclab n° 923 ; Juris-Data n° 2000-141026 (décision écartant l’application de l’arrêté de la Ville de Paris pris pour l’exploitation des piscines en ce qu’il exonérait l’exploitant de toute responsabilité en cas de vols ou de détérioration d’objets, la clause n’ayant pas été portée à la connaissance du public, la cour assimilant la situation à un service public industriel et commercial), sur appel de TI Paris 15e 12 février 1998 : Dnd.

Tarif SNCF. L'appréciation de la légalité des actes administratifs réglementaires est attribuée exclusivement à la juridiction administrative et la juridiction judiciaire ne peut se prononcer sur la légalité des actes administratifs que dans les litiges nés dans le cadre de liens de droit privé entre un usager et le service fournisseur des prestations fonctionnant dans les mêmes conditions qu'une entreprise privée. CA Riom (ch. com.), 16 mai 2012 : RG n° 11/01399 ; arrêt n° 255 ; Cerclab n° 4504 (caractère abusif de la clause en tout état de cause non établi ; sur le doute émis préalablement quant à l’applicabilité de la protection, V. Cerclab n° 5846), sur appel de TI Clermont-Ferrand, 20 avril 2011 : Dnd.

En sens contraire : TI Paris (9e arrdt), 23 avril 1992 : RG n° 1754/91 ; jugt n° 1134/92 ; Cerclab n° 435 (examen du caractère abusif de l’art. 55 A alinéa 1er du tarif général des voyageurs par lequel la SNCF s’exonére en cas de vol des bagages à mains ; caractère abusif admis), infirmé par CA Paris (8e ch. A), 23 novembre 1993 : RG n° 92/21697 ; Cerclab n° 1298 (caractère abusif examiné mais rejeté). § V. aussi pour la Commission des clauses abusives : Recomm. n° 84-02 : Cerclab n° 2175 (contrats de transport terrestres de voyageurs ; considérant n° 1 ; les clauses insérées par les transporteurs professionnels dans les contrats de transport de voyageurs entrent dans le champ d'application de la loi du 10 janvier 1978 ; recommandation ne distinguant pas selon la nature du transport, routier ou ferroviaire et évoquant les « tarifs » spécifiques au transport ferroviaire de voyageurs).

B. QUESTION PRÉJUDICIELLE

Régularité. Il n’appartient pas à la juridiction administrative de connaître d’une question préjudicielle qui ne lui a pas été expressément renvoyée par l’autorité judiciaire. CE (2e et 7e sect. réun.), 24 mars 2004 : req. n° 255317 ; Cerclab n° 3348 (saisine directe du Conseil d’État par le consommateur parties au procès civil).

Opportunité. * Situation avant la loi du 17 mars 2014. L’opportunité de soumettre au juge administratif une question préjudicielle relève de l’appréciation du juge judiciaire.

Les décisions recensées montrent que cette faculté autorise parfois le juge à excéder sa compétence, en estimant la disposition contestée non abusive, afin de refuser une telle question. V. par exemple : l’appréciation de la légalité des dispositions de nature réglementaire du Code des communes fondant la tarification pratiquée par la commune relevant de la compétence du juge administratif, le juge judiciaire peut surseoir à statuer, en raison de l'existence d'une question préjudicielle mais, en l’espèce, il convient de refuser celle-ci dès lors qu’elle ne présente pas un caractère sérieux, les art. R. 372-6 et s. du Code des communes ne procurant pas un avantage excessif au fermier. CA Montpellier (1re ch. D), 15 mai 2001 : RG n° 98/05400 ; arrêt n° 2138 ; Cerclab n° 939 ; Juris-Data n° 2001-154157 (contrat conclu avec un délégataire de service public en application d’un règlement de service des eaux), sur appel de TI Prades, 10 juillet 1998 : RG n° 235/97 ; jugt n° 310/98 ; Cerclab n° 112 (problème non examiné). § Le Tribunal civil a la possibilité de saisir la juridiction administrative pour qu'elle statue sur la légalité de dispositions réglementaires qui conditionnent la poursuite de l'instance civile ; une telle saisine constitue un préalable pour permettre au Tribunal de juger le caractère abusif ou non de la clause incriminée, le caractère abusif du modèle réglementaire pouvant entacher de nullité la clause utilisée par les prêteurs qui l'ont contractualisée avec les emprunteurs. TI Bourganeuf, 8 décembre 2004 : RG n° 11-04-000010 ; Site CCA ; Cerclab n° 7032 (jugement concluant que la législation sur le crédit à la consommation n’est pas exclusive de celle sur les clauses abusives et invitant les parties, pour les clauses litigieuses, à saisir le juge administratif), après avis de CCA, 27 mai 2004 : avis n° 04-02 ; Cerclab n° 3609 - TI Bourganeuf, 8 décembre 2004 : RG n° 10-04-000015 ; Cerclab n° 7054 (idem), après avis CCA (avis), 27 mai 2004 : avis n° 04-03 ; Cerclab n° 3610. § V. aussi : CA Amiens (1re ch. civ.), 18 décembre 2013 : RG n° 12/00080 ; arrêt n° 530 ; Cerclab n° 4636 (règlement du service public de distribution d'eau potable ; refus de question préjudicielle sur les clauses concernant l’évaluation de la consommation et l’articulation entre la consommation individuelle des copropriétaires et le solde imputé au syndicat, dès lors que le syndicat a bien bénéficié de cette fourniture pendant des années et qu’il lui incombait d’installer des compteurs spécifiques), sur appel de TGI Senlis, 1er avril 2008 : Dnd

* Situation après la loi du 17 mars 2014. Le maintien d’une telle liberté peut se discuter depuis la loi du 17 mars 2014, modifiant l’ancien art. L. 141-4 C. consom., nouvellement art. R. 632-1 C. consom., pour imposer au juge d’écarter d’office une clause abusive : lorsque la disposition litigieuse est contenue dans un acte réglementaire, le juge judiciaire ne peut trancher cette question, mais cette impossibilité n’est pas forcément une raison suffisante pour faire disparaître l’obligation générale prévue par le texte. Il pourrait dès lors paraître cohérent d’imposer au juge la formulation d’une question préjudicielle.

Sursis à statuer. Pour une illustration : TGI Grenoble, 5 novembre 2012 : RG n° 09/03438 ; Dnd (sursis à statuer sur quatre clauses jusqu'à ce qu'il soit définitivement statué sur la juridiction compétente pour en apprécier le caractère illicite ou abusif allégué ; N.B. issue du sursis inconnue).

C. LIMITES : MAINTIEN DE LA COMPÉTENCE JUDICIAIRE

Question préjudicielle à la demande de la juridiction administrative. Il n'appartient pas à la juridiction administrative de se prononcer sur la nullité d'un contrat de droit privé, en l’espèce, notamment, au regard de l’application de l’art. 1171 C. civ. à une convention d’affiliation entre une association en charge d’un club de judo et la Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées. CAA Paris (3e ch.), 4 mai 2021 : req. n° 20PA00111 ; Cerclab n° 8883 (point n° 19 ; association visant aussi l’art. 1190 C. civ. sur l’interprétation des contrats d’adhésion), sur appel de TA Paris, 15 novembre 2019 : req. n° 1821902 ; Dnd. § Néanmoins, la saisine de l’autorité judiciaire d’une question préjudicielle ne s’impose que pour autant que la question posée soit nécessaire au jugement de la requête et que les moyens soulevés soient sérieux ; en l’espèce, la sanction fondée sur le fait que l’association ne faisait licencier que les inscrits de la section « compétition » et non ceux de la section « loisirs » est clairement fondée sur la violation de l’art. 4 des statuts de la Fédération ; en tout état de cause, et pour le surplus, l'obligation faite à un club qui adhère à une fédération sportive de s'acquitter des obligations qui résultent de son affiliation et notamment de payer la cotisation club fédérale et de faire prendre une licence à tous ses adhérents en échange des services que la fédération s'engage à lui fournir ne crée pas de déséquilibre entre les droits et obligations des parties. CAA Paris (3e ch.), 4 mai 2021 : précité (les dispositions de l’art. L. 121-12 C. consom. ne sont manifestement pas applicables à l'adhésion d'un club à une fédération sportive, laquelle répond en tout état de cause à une démarche volontaire de l'association).

Les conditions générales de vente des tickets pour une saison de football représentent un contrat de billetterie conclu entre la société exploitant le club sportif, personne morale de droit privé, et le spectateur, généralement une personne physique, qui est aussi une personne privée ; par ailleurs, le club n'est pas chargé, à titre délégataire, de l'exécution d'une mission de service public à caractère administratif ; les conditions générales de vente en litige ont ainsi le caractère d'obligations contractuelles découlant d'un contrat de droit privé ; il s'ensuit que l'appréciation par la voie de l'exception de la licéité des stipulations des CGV au regard des art. L. 212-1 et R. 212-1 C. consom. ressortit à la compétence exclusive des juridictions de l'ordre judiciaire. TA Marseille, 8 novembre 2022 : req. n° 2000337 ; rôle n° 49186 ; Cerclab n° 9935 (points n° 6 et 7 ; eu égard au caractère sérieux de la contestation soulevée, qui ne peut être résolue au vu d'une jurisprudence établie, et alors que la commission des clauses abusives n'a pas rendu d'avis, au demeurant purement consultatif, il convient de surseoir à statuer).

Législations spéciales. Dès lors que les demandes des attributaires d’un contrat d’exploitation des marchés communaux d’approvisionnement, conclu avec une commune, ne tendent pas à remettre en cause la légalité des décisions de celle-ci, dont ils disent prendre acte qu’elle avait le droit de résilier le traité et celui de ne pas appliquer la clause contractuelle, mais à obtenir la réparation pécuniaire des préjudices résultant pour eux de la résiliation anticipée du contrat et de la non application de la clause de variation des prix, le litige entre bien dans les prévisions de l’article 136 du décret du 17 mai 1809 relatif aux octrois municipaux et applicables aux droits de places perçus dans les halles et marchés qui attribue spécialement compétence aux tribunaux judiciaires pour statuer sur toutes les contestations s’élevant entre les parties au traité, sauf renvoi préjudiciel à la juridiction administrative sur le sens des clauses, lequel n’est ici pas en cause. CA Versailles (1re ch. 1re sect.), 26 février 2004 : RG n° 2003-01403 ; Legifrance ; Cerclab n° 5285, sur appel de TGI Pontoise (1re ch.), 28 janvier 2003 : RG n° 01/6883 ; Dnd.

Service public industriel et commercial : fourniture de chaleur. Le litige portant sur la police d'abonnement à un service public de transport et de distribution d'énergie géré en régie, en l’espèce de fourniture de chaleur, relève de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire dès lors qu'un tel service constitue un service public industriel et commercial. CA Besançon (1re ch. civ. com.), 30 juin 2020 : RG n° 19/00258 ; Cerclab n° 8488 (commune ayant créé un établissement doté d'un budget spécifique), confirmant sur ce point TGI Vesoul, 15 janvier 2019 : RG n° 17/01138 ; Dnd.

Service public industriel et commercial : location d’emplacement portuaire. Si les litiges relatifs à la passation et à l’exécution de contrats comportant occupation du domaine public relèvent, en vertu de l’art. L. 2331-1 CG propr. pers. publ., de la compétence de la juridiction administrative, les litiges entre le gestionnaire d’un service public industriel et commercial et ses usagers, quand bien même l’activité de ce service a lieu sur le domaine public, relèvent de la compétence de la juridiction judiciaire, ces litiges étant par nature détachables de l’occupation domaniale ; cassation de l’arrêt déclinant la compétence judiciaire pour l’action du locataire d’un corps-mort contre la régie du port, pour les dommages subis par son voilier. Cass. civ.1re, 30 novembre 2016 : pourvoi n° 15-25516 ; arrêt n° 1360 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 6676, cassant sans renvoi CA Aix-en-Provence (2e ch.), 11 juin 2015 : RG n° 14/20732 ; arrêt n° 2015/217 ; Cerclab n° 7311 (le litige se rattache non à l'usage d'un service public industriel et commercial, mais à l'exécution d'un contrat comportant occupation du domaine public, ce qui en vertu du texte précité rend la juridiction judiciaire incompétente pour en connaître). § V. aussi : le grand port maritime est un établissement public de l'État (anc. art. L 101-2 C. ports maritimes, devenu l’art. L. 5312-1 C. transp.) ; son règlement d'exploitation qualifie l'utilisateur des installations de client (notamment le préambule de l'article 2 - Pôle de réparation et de construction navale et l'article 2.1.3 relatif aux « responsabilités générales des clients ») et emploie le terme de facturation (notamment l'article 2.2.4.3 et l'article 2.2.16.1 relatif à « la facturation de l'occupation de l'aire de carénage dès le lendemain de la levée du navire ») ; il en résulte que le GPMLR est un établissement public à caractère industriel et commercial et que ses relations avec ses « clients » relèvent du droit privé ; dès lors, si le règlement d'exploitation du GPMLR est de nature administrative, en ce qu'il définit les droits et obligations du port et du client, il a, dans leurs relations, une nature contractuelle. CA Poitiers (1re ch. civ.), 16 mars 2021 : RG n° 19/01194 ; Cerclab n° 8856 (arrêt estimant significatif que le port n’ait soulevé aucune exception d'incompétence de la juridiction judiciaire), sur appel de T. com. La Rochelle, 18 janvier 2019 : Dnd.

Comp. ci-dessus pour la solution inverse pour un contrat conclu directement avec une commune.

Service public assuré par un contrat privé : maison de retraite. Relève des juridictions judiciaires et donc de la compétence du tribunal de grande instance, lequel peut en cas de nécessité et par application de l’art. 49 CPC, poser une question préjudicielle à la juridiction administrative, l’examen des clauses d’un contrat de maison de retraite, à la demande d’une association de consommateurs, dès lors qu’en l’espèce celle-ci est exploitée sous la forme d’une association relevant de la loi de 1901 qui, quelles que soient les modalités de son fonctionnement et l'origine de ses ressources, est une personne morale de droit privé et que le contrat passé par cette association avec une autre personne de droit privé, fût ce pour l'exécution d'un service public, est un contrat de droit privé. CA Grenoble (1re ch. civ.), 14 janvier 2013 : RG n° 11/01899 ; Cerclab n° 4169 ; Juris-Data n° 2013-000494 (association non investie d'une mission de service public ou de prérogatives de puissance publique, même si elle satisfait à l'intérêt général en proposant des contrats de droit privé à des personnes privées, âgées dépendantes physiquement et/ou psychiquement, désireuses d'être accueillies dans ses locaux en séjour définitif), sur appel de TGI Grenoble (ord JME), 30 mars 2011 : RG n° 09/03438 ; Dnd. § Comp. pour les établissement publics : pour les établissements accueillant des personnes âgées et faisant partie du secteur hospitalier public, les règles régissant leurs rapports avec les consommateurs ne relèvent pas du droit privé et la commission peut seulement proposer les modifications réglementaires qui lui paraissent souhaitables, conformément à l'art. 38 de la loi du 10 janvier 1978. Recomm. n° 85-03 : Cerclab n° 2155 (considérant n° 5). § Une maison de retraite, gérée par une congrégation religieuse, est une personne privée, qui propose des contrats de droit privé à des personnes privées âgées, dépendantes physiquement et/ou psychiquement, désireuses d'être accueillies dans ses locaux en séjour définitif ; un tel contrat, même conclu pour l'exécution d'un service public, relève des juridictions judiciaires. CA Grenoble (1re ch. civ.), 28 avril 2015 : RG n° 12/04733 ; Cerclab n° 5149 (congrégation estimant qu’elle ne participe pas au secteur marchand, toute son activité étant régie par l'autorité administrative, et plus particulièrement par le Conseil général du département, et en ce que les pensionnaires ne peuvent être considérés comme des consommateurs), sur appel de TGI Grenoble, 1er octobre 2012 : RG n° 09/05644 ; Dnd.

Conclusion d’un contrat individuel spécifique. Pour une décision semblant admettre, implicitement, que le contrôle du caractère abusif aurait pu s’exercer et relever du juge judiciaire, si l’approvisionné avait démontré qu’il avait conclu une « convention d’individualisation » avec son fournisseur : CA Amiens (1re ch. civ.), 18 décembre 2013 : RG n° 12/00080 ; arrêt n° 530 ; Cerclab n° 4636 (action du délégataire du service public de distribution d'eau contre un syndicat de copropriétaires). § N.B. Dans une telle hypothèse, l’applicabilité de la protection risque d’être d’une portée très théorique, la conclusion d’un tel contrat spécifique risquant de mettre en lumière une négociation entre les parties et une adaptation du contrat à la situation de l’approvisionné peu propice à l’admission d’un déséquilibre significatif.

Intervention du juge judiciaire se limitant à une appréciation de l’opposabilité de la clause contestée. Un jugement peut déclarer une clause d’indexation d’un contrat d’adhésion inopposable, le rédacteur ne rapportant pas la preuve d’une information suffisante de son cocontractant sur les conditions de détermination du prix de la fourniture (eau), sans mettre en cause la légalité des clauses du cahier des charges. Cass. civ. 1re, 20 novembre 2001 : pourvoi n° 99-13731 ; arrêt n° 1770 ; Cerclab n° 2039, rejetant le pourvoi contre TI Grenoble, 2 mars 1999 : RG n° 11-98-000049 ; Cerclab n° 3191 ; Lamyline.  § Comp. CA Bordeaux (1re ch. civ. sect. B), 26 octobre 2010 : RG n° 09/04052 ; Cerclab n° 2890 (distribution d’eau par une société privée ; règlement ne pouvant être contesté devant les juridictions judiciaires, mais absence de preuve d’un déséquilibre significatif dans le cadre du contrat du fait de l’absence de remise du règlement), sur appel de TGI Bordeaux (5e ch. civ.), 5 mai 2009 : RG 09/306 ; Dnd.

Comp. en sens inverse pour un service public administratif : Cass. civ. 1re, 28 octobre 2003 : pourvoi n° 00-18770 ; arrêt n° 1307 ; Cerclab n° 2019 (compétence administrative ; piscine publique ; v. ci-dessus pour le raisonnement), cassant CA Paris (8e ch. D), 29 juin 2000 : RG n° 1998/09533 ; Cerclab n° 923 ; Juris-Data n° 2000-141026 (arrêt ayant constaté l’inopposabilité d’une disposition exonérant la commune pour des vols commis dans une piscine). § V. aussi semblant admettre le contrôle : CA Toulouse (1re ch. sect. 1), 3 mai 2021 : RG n° 19/01091 ; Cerclab n° 8935 (fourniture d’eau ; inopposabilité d’une clause du règlement qui impose une charge disproportionnée et est impossible à mettre en œuvre en mettant à la charge de l’abonné l’entretien du réseau sous le domaine public), sur appel de TGI Saint-Gaudens, 8 février 2019 : RG n° 17/00508 ; Dnd.

Intervention du juge judiciaire se limitant à une interprétation de l’acte réglementaire. Interprétation dans un sens favorable à l’abonné de la clause du cahier des charges d’approvisionnement en eau, comme n’ayant pas pour effet de mettre à la charge de l’abonné les dommages causés par le gel, dès lors qu’il démontre qu’il avait pris les précautions nécessaires pour protéger le compteur d’eau des gelées, afin de rejeter le pourvoi contre un jugement qui avait de façon erronée, mais surabondante, apprécié la légalité d’une clause réglementaire. Cass. civ. 1re, 31 mai 1988 : pourvoi n° 87-10479 ; arrêt n° 683 ; Bull. civ. I, n° 161 ; Cerclab n° 2112 ; D. 1988. somm. 406, obs. Aubert, rejetant le pourvoi contre TI Corbeil-Essonnes, 22 août 1986 : Dnd. § V. aussi : CA Nîmes (ch. com. 2 B), 7 mars 2013 : RG n° 11/03401 ; Cerclab n° 4314 (clauses abusives dans un contrat d’approvisionnement en eau ; arrêt privilégieant l’interprétation de la clause proposée par la Commission des clauses abusives et écartant l’existence d’un déséquilibre significatif), sur appel de T. com. Avignon, 10 juin 2011 : Dnd.

Intervention du juge judiciaire ne nécessitant pas l’application de la clause contestée. Absence de question préjudicielle, dès lors que la clause mettant les réparations à la charge de la copropriété concerne des canalisations propriété indivise de la collectivité des copropriétaires, en l’espèce des colonnes montantes d'eau potable et non des ouvrages relevant de la partie publique. CA Caen (1re ch. civ.), 25 juin 2019 : RG n° 16/02716 ; Cerclab n° 7776, infirmant TGI Coutances, 28 avril 2016 : RG n° 14/00133 : Dnd (jugement ayant déclaré la clause du règlement abusive, alors que seul le pouvoir judiciaire pouvait le faire).

Contrôle par le juge judiciaire des modèles de contrats. Certaines décisions ont admis, dans le cadre du crédit à la consommation, de contrôler les modèles de contrats définis par arrêtés au regard de la protection contre les clauses abusives, sans formuler de question préjudicielle, V. Cerclab n° 5988. § N.B. Pour des clauses identiques, certaines juridictions ont à l’inverse estimé que le problème ne se posait pas, dès lors que la clause litigieuse ne correspondait pas au modèle, V. Cerclab n° 6635.

Lorsque l'aménagement et l'adaptation du modèle type par le prêteur excède les dispositions réglementaires, le tribunal  civil reste seul compétent pour apprécier le caractère abusif ou non de cette adaptation contractuelle sans que ne soit en cause la validité même des dispositions réglementaires. TI Bourganeuf, 8 décembre 2004 : RG n° 10-04-000015 ; Cerclab n° 7054 (crédit renouvelable) - TI Bourganeuf, 8 décembre 2004 : RG n° 11-04-000010 ; Site CCA ; Cerclab n° 7032 (idem). § N.B. Le  jugement estime qu’en l’espèce les clauses d’augmentation du découvert et de variabilité du taux d’intérêt s’écartent du modèle, mais il décide de surseoir à statuer de façon assez surprenante : d’une part, il laisse aux parties le soin de saisir le juge administratif, d’autre part, il étend le sursis à toutes les stipulations, alors que la clause d’augmentation du découvert pouvait sans doute être examinée indépendamment du modèle, ce qui était en revanche moins le cas de la clause d’intérêt variable).

Contrôle conséquence de l’invocation irrégulière de l’exception d’incompétence. Aux termes de l'art. 74 CPC, les exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir ; est irrecevable l’exception d’incompétence de la juridiction judiciaire invoquée par une communauté de commune, concédante d’un emplacement portuaire, qui n’a été formulée que tardivement. CA Aix-en-Provence (11e ch. B), 23 octobre 2014 : RG n° 11/14550 ; arrêt n° 2014/508 ; Cerclab n° 4979 ; Juris-Data n° 2014-028732, sur appel de TI Toulon, 30 juin 2011 : RG n° 11/09/2496 ; Dnd.

Réseau électrique. Rappr. pour le raisonnement : le cahier des charges type approuvé par le décret n° 2006-1731 du 23 décembre 2006 n'a de caractère réglementaire qu'à l'égard du concessionnaire du réseau public de transport d'électricité ; viole les art. 873 CPC, ce décret n° 2006-1731 du 23 décembre 2006 et les art. L. 321-2 et L. 322-2 C. énerg., l’arrêt qui accueille l’action en référé provision de la société ayant fait une demande de rattachement pour le préjudice causé par le retard dans le traitement du dossier, aux motifs que l’art. 13 du décret qui dispose que « le délai de transmission de la proposition technique et financière ne peut excéder trois mois à compter de la réception de la demande de l'utilisateur ou du gestionnaire du réseau de distribution », est opposable, à compter de sa publication, à toutes personnes juridiques, au nombre desquelles la société ERDF, de sorte que celle-ci a manifestement failli à son obligation sans pouvoir sérieusement invoquer un événement de force majeure qui, seul, pourrait l'en exonérer. Cass. civ. 1re, 4 juin 2014 : pourvoi n° 12-35262 ; arrêt n° 665 ; Cerclab n° 8404 (société ayant un projet d'installation et d'exploitation d'une centrale photovoltaïque, contactant ERDF pour une demande de raccordement, dont il a été accusé réception avec indication d’une réponse dans les trois mois, non respecté par le gestionnaire du réseau ; N.B. le moyen, plus clair que l’arrêt, expose que si le gestionnaire du réseau public de transport de l'électricité, dont l'autorité concédante est l'Etat, exerce ses missions dans les conditions fixées par un cahier des charges type de concession approuvé par décret en Conseil d'Etat, les rapports entre les collectivités territoriales, autorités concédantes du réseau public de distribution de l'électricité, et les concessionnaires gestionnaires de ce réseau sont régis par des contrats de concession librement négociés ainsi que par des modèles de cahiers des charges), pourvoi contre CA Versailles, 17 octobre 2012 : Dnd.