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CA LYON (1re ch. civ. sect. B), 14 janvier 2014

Nature : Décision
Titre : CA LYON (1re ch. civ. sect. B), 14 janvier 2014
Pays : France
Juridiction : Lyon (CA), 1re ch. B
Demande : 13/05531
Date : 14/01/2014
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
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CERCLAB - DOCUMENT N°

CA LYON (1re ch. civ. sect. B), 14 janvier 2014 : RG n° 13/05531

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu que le contrat ne contenant aucune stipulation relative à la hauteur sous plafond, c'est à juste titre que M et Mme X. se prévalent d'une non conformité aux dispositions de l'article R. 111-2 du code de la construction et de l'habitation, la non conformité affectant la surface totale de la cuisine, ainsi qu'au règlement sanitaire départemental adopté par arrêté préfectoral du 10 avril 1980 prévoyant que la hauteur sous plafond ne doit pas être inférieur à 2,30 mètres ;

Attendu que la société SCCV ne démontre pas que M et Mme X. ont approuvé la non conformité de la hauteur sous plafond par la signature d'un plan actualisé le 17 août 2011 ; qu'en effet si ce plan a effectivement été approuvé par M X. à cette date, il ne comporte aucune mention relative à la hauteur sous plafond, seule étant mentionnée une partie grisée sur le hall et la cuisine, dépourvue de toute signification quant à la hauteur ; que par ailleurs, la société SCCV n'est pas fondée à se prévaloir des stipulations mentionnées sur le plan annexé à l'acte notarié prévoyant que les retombées, soffites, encoffrement, faux plafond, canalisations, radiateurs ou convecteurs ne figurent pas sur les plans et « ne pourront justifier de quelconques réclamations ultérieures », ces stipulations se heurtant manifestement à l'interdiction des clauses abusives ; qu'en outre, aucune information spécifique n'a été portée à la connaissance des acquéreurs pour attirer leur attention sur la réduction de la hauteur sous plafond ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE LYON

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE SECTION B

ARRÊT DU 14 JANVIER 2014

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 13/05531. Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON, Référé, du 13 mai 2013 : R.G. n° 13/00940.

 

APPELANTE :

SCI SCCV LOGEMENT […]

[adresse], représentée par la SCP DUCROT ASSOCIES-DPA, avocat au barreau de LYON

 

INTIMÉS :

M. X.

le [date] à [ville], représenté par Maître Nathalie PIGEON, avocat au barreau de LYON

Mme X. épouse Y.

née le [date] à [ville], représentée par Maître Nathalie PIGEON, avocat au barreau de LYON

 

Date de clôture de l'instruction : 25 novembre 2013

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 25 novembre 2013

Date de mise à disposition : 14 janvier 2014

Audience tenue par Jean-Jacques BAIZET, président et Michel FICAGNA, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré, assistés pendant les débats de Frédérique JANKOV, greffier

A l'audience, Jean-Jacques BAIZET a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré : - Jean-Jacques BAIZET, président - Pierre BARDOUX, conseiller - Michel FICAGNA, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Patricia LARIVIERE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DE L'AFFAIRE :

Par acte notarié du 28 mars 2011, M et Mme X. ont acquis en l'état futur d'achèvement de la société SCCV Logements [adresse] (la société SCCV) un appartement de 61,80 m², de type T3, dans la copropriété « Logements », [...] et [...], au prix de 263.500 euros. Le contrat indique que l'acquéreur a déclaré vouloir bénéficier du dispositif dit « Scellier ».

Ayant constaté la présence dans le hall d'entrée et la cuisine-salon de conduites ayant nécessité la construction d'un coffrage réduisant la hauteur sous plafond, M et Mme X. ont mis en demeure la société venderesse de faire cesser l'installation des conduites et de restaurer la hauteur sous plafond à la norme de 245 cm.

Ils ont ensuite assigné la société SCCV en référé afin d'obtenir une expertise et l'autorisation de consigner le solde du prix de vente.

Le juge des référés a rejeté leur demande aux motifs que la présence des conduites était suffisamment démontrée et que l'appréciation des non-conformités relevait de la juridiction du fond.

Le 6 décembre 2012, ils ont consigné auprès de la Caisse des dépôts et consignations le solde de 5 % du prix de vente. La société SCCV a refusé de leur remettre les clés de l'appartement en raison du refus de paiement du solde du prix.

Le 29 mars 2013, ils ont levé la consignation.

Par acte du même jour, la société SCCV les a assignés en référé afin de les entendre condamner à régler, sous astreinte, le solde du prix.

Par ordonnance du 13 mai 2013, le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon a débouté la société SCCV de ses demandes et lui a ordonné de procéder, dans les quinze jours de la signification de la décision, et sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à la livraison de l'appartement, le solde du prix pouvant être consigné par les acquéreurs conformément à l'article R. 261-14 du code de la construction et de l'habitation.

Un procès-verbal de livraison avec réserves a été établi le 14 mai 2013.

La société SCCV a interjeté appel de l'ordonnance dont elle sollicite la reformation. Elle conclut au rejet des demandes de M et Mme X.

Elle invoque l'article L. 261-14 du code de la construction et de l'habitation, au terme duquel la livraison de l'appartement suppose le paiement complet du prix de vente sauf consignation du solde entre les mains d'un tiers, uniquement lorsque cela est justifié par la preuve d'une non conformité du bien avec les termes du contrat. A ce titre, elle fait valoir que le juge des référés, pour ordonner la remise des clés, a dû apprécier le bien fondé de la consignation et par voie de conséquence, l'existence d'une non conformité, ce qui dépasse sa compétence. Elle rappelle d'ailleurs que l'ordonnance de référé du 30 octobre 2012 a dit n'y avoir lieu à référé, considérant que l'appréciation de la non conformité relevait de la compétence du juge du fond.

Sur la livraison de l'appartement, elle argue de sa volonté de remise du bien, comme en témoigne l'assignation qu'elle a formée en référé à l'encontre de M et Mme X. afin qu'ils prennent possession de leur bien. Elle soutient que, contrairement à ce qui a été considéré par la décision dont il est fait appel, l'absence de livraison du bien ne lui est pas imputable mais l'est à M et Mme X., dans la mesure où cette remise ne pouvait s'effectuer en l'absence de versement total du prix dès lors que la consignation n'était justifiée par aucun motif légitime. Elle fait valoir qu'elle a rempli son obligation d'information tant par la remise des documents contractuels avant régularisation de la vente qu'après la conclusion de celle-ci par l'envoi de documents techniques et par l'organisation d'une visite de l'appartement notifiant l'avancement des travaux et les modifications des plans impliquées par les contraintes techniques, ce qui est de nature à rendre inopérant les arguments tirés de prétendues non conformités ou d'un supposé déséquilibre du contrat. Elle critique l'argument tiré de l'article R. 111-2 du code de la construction et de l'habitation qui prescrit effectivement des normes de construction mais qui ne peuvent être invoquées qu'en vertu de la surface globale du logement et non d'une partie congrue de l'appartement. Elle ajoute que M et Mme X., qui ont pris possession de l'appartement le 13 mai 2013, n'ont formulé aucune réserve en rapport avec la non conformité alléguée, ce qui est de nature à rendre injustifiée la consignation du solde du prix.

M et Mme X., intimés, concluent à la confirmation de l'ordonnance, à l'autorisation de consigner la somme de 13.175 euros, correspondant à 5 % du prix de vente de l'immeuble, et à la condamnation de la SCCV Logements [adresse] à leur restituer cette somme.

Ils soutiennent que le juge des référés s'est borné à constater l'existence d'une contestation sur la conformité de l'appartement avec les stipulations contractuelles, sans en apprécier le bien fondé, puisqu'il a renvoyé au fond l'examen de la pertinence de la non conformité invoquée, de sorte qu'il n'a pas dépassé les limites de son office. Ils rappellent l'existence d'une telle contestation, comme en témoignent les différentes mises en demeure qu'ils ont adressées à la société venderesse, l'ordonnance de référé du 30 octobre 2012 et la procédure pendante devant le tribunal de grande instance aux fins de remise en conformité de leur appartement et précisent que cet élément est suffisant pour fonder une consignation du solde du prix, en application de l'article R. 261-14 du code de la construction et de l'habitation qui, contrairement à ce qui est soutenu par la société venderesse, n'exige pas la preuve d'une non conformité.

Sur la non conformité aux dispositions du contrat, ils soutiennent que la hauteur sous plafond de la surface totale de la cuisine, qui est de 2,06 mètres, ne respecte pas les seuils réglementaires fixés d'une part à 2,35 mètres par l'article R. 111-2 du code de la construction et de l'habitation et d'autre part à 2,30 mètres par le règlement sanitaire départemental, adopté par arrêté préfectoral du 10 avril 1980. Ils ajoutent que le non respect de l'article R. 111-2 est de nature à faire échec à l'application du dispositif de la loi « Scellier », élément qui faisait partie intégrante de la promotion de l'immeuble « Evolution ». Ils font valoir que :

- les dispositions contractuelles stipulant la renonciation par l'acheteur à tout recours concernant les « retombées, soffites, encoffrement, faux plafonds, canalisations, radiateurs ou convecteurs » ne précisent pas que ces soffites ou faux plafonds sont susceptibles de réduire la hauteur sous plafond en deçà des seuils réglementaires, ce qui aurait du faire l'objet d'une information spécifique et qui en tout état de cause, doit s'apprécier comme une clause abusive au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation dès lors qu'elles induisent un déséquilibre significatif au profit du vendeur professionnel et au détriment de l'acheteur non professionnel,

- par la modification des plans, le vendeur s'est octroyé le droit de modifier unilatéralement les caractéristiques du bien vendu, à savoir la hauteur du plafond, ce qui est irréfragablement présumé comme étant une clause abusive en application de l'article R. 132-1 du même code,

- les plans modificatifs, s'ils leur ont été effectivement communiqués par lettre du 27 juillet 2011, comportaient une partie grisée, décrite comme étant des modifications imposées par la réglementation concernant les personnes handicapées, qui s'est finalement avérée être la construction des soffites litigieuses, de sorte que la société venderesse est mal fondée à se prévaloir de leur consentement à ces modifications alors qu'ils ont été trompés.

Sur le défaut de livraison de l'appartement, ils soutiennent que la société venderesse n'a pas respecté les dispositions contractuelles contenues au chapitre 5 applicables en cas de défaut dans le paiement du prix qui exigent l'envoi d'une mise en demeure ou d'une sommation d'avoir à régler les sommes consignées. Ils ajoutent que cette dernière a, à plusieurs reprises, volontairement fait obstacle à la délivrance du bien en raison de la consignation du solde du prix de vente, ce qui a notamment été constaté par procès verbal du 11 décembre 2012.

Sur la demande de consignation du solde de 5 % du prix de vente, soit 13.175 euros, aux fins de restitution, ils invoquent l'article R. 261-14 du code de la construction et de l'habitation, dans la mesure ou une contestation existe sur la conformité du bien, qu'une instance est pendante devant le tribunal de grande instance de Lyon afin de savoir si le bien est conforme, que la SCCV Logements [adresse] dispose d'un capital social de 1.500 euros, n'est pas soumise à l'obligation de publier ses comptes et qu'elle risque de disparaître dans la mesure où elle a été créée par les promoteurs de l'opération, les sociétés Vinci et Nexity, uniquement dans le but de réaliser la construction de l'immeuble vendu, et donc pourrait être dissoute par ses associés dès que l'opération sera achevée.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Attendu qu'en application de l'article R. 261-14 du code de la construction et de l'habitation, le solde du prix égal à 5 % est payable lors de la mise du local à disposition de l'acquéreur ; qu'il peut toutefois être consigné en cas de contestation sur la conformité avec les prévisions du contrat ;

Attendu qu'il résulte des plans produits et d'un procès verbal de constat du 11 décembre 2012 qu'en raison du passage de conduites et de la réalisation d'un coffrage, la hauteur sous plafond a été réduite à moins de 2,10 mètres dans le hall d'entrée et la cuisine (hauteur variant de 2,065 à 2,075 mètres) ; que M et Mme X. ont contesté la conformité de la hauteur sous plafond par plusieurs lettres de mise en demeure ;

Attendu que le contrat ne contenant aucune stipulation relative à la hauteur sous plafond, c'est à juste titre que M et Mme X. se prévalent d'une non conformité aux dispositions de l'article R. 111-2 du code de la construction et de l'habitation, la non conformité affectant la surface totale de la cuisine, ainsi qu'au règlement sanitaire départemental adopté par arrêté préfectoral du 10 avril 1980 prévoyant que la hauteur sous plafond ne doit pas être inférieur à 2,30 mètres ;

Attendu que la société SCCV ne démontre pas que M et Mme X. ont approuvé la non conformité de la hauteur sous plafond par la signature d'un plan actualisé le 17 août 2011 ; qu'en effet si ce plan a effectivement été approuvé par M X. à cette date, il ne comporte aucune mention relative à la hauteur sous plafond, seule étant mentionnée une partie grisée sur le hall et la cuisine, dépourvue de toute signification quant à la hauteur ; que par ailleurs, la société SCCV n'est pas fondée à se prévaloir des stipulations mentionnées sur le plan annexé à l'acte notarié prévoyant que les retombées, soffites, encoffrement, faux plafond, canalisations, radiateurs ou convecteurs ne figurent pas sur les plans et « ne pourront justifier de quelconques réclamations ultérieures », ces stipulations se heurtant manifestement à l'interdiction des clauses abusives ; qu'en outre, aucune information spécifique n'a été portée à la connaissance des acquéreurs pour attirer leur attention sur la réduction de la hauteur sous plafond ;

Attendu que si le procès verbal de livraison du 14 mai 2013 ne comporte que des réserves étrangères à la non conformité litigieuse, les époux X. ont dénoncé cette dernière dans le mois de la livraison par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 juin 2013, de sorte qu'il ne peut être soutenu qu'ils sont censés avoir expressément accepté la présence des soffites ;

Attendu en conséquence que c'est à juste titre que le premier juge a considéré que la contestation existant sur la conformité de l'appartement autorisait les acquéreurs à procéder à la consignation du solde du prix et que la société SCCV a refusé sans motif légitime de procéder à la livraison de l'appartement ; que l'ordonnance entreprise doit être confirmée, sauf à constater que M et Mme X. ont levé la consignation et que la livraison de l'appartement est intervenue le 14 mai 2013 ;

Attendu que dès lors que la juridiction du fond est actuellement saisie de la demande de M et Mme X. tendant à la mise en conformité de l'appartement, la juridiction des référés n'a pas compétence pour ordonner une nouvelle consignation en raison du risque de disparition de la société SCCV qui n'est pas démontré, ni pour ordonner à cette dernière de restituer les fonds en vue de cette consignation ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme l'ordonnance entreprise,

Constate que M et Mme X. ont levé la consignation et que la livraison de l'appartement est intervenue le 14 mai 2013,

Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de M et Mme X. tendant à une nouvelle consignation et à la condamnation de la société SCCV Logements [adresse] à restituer les fonds,

Ajoutant,

Condamne la société SCCV Logements [adresse] à payer à M. et Mme X. la somme supplémentaire de 1.800 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Rejette la demande de la société SCCV Logements [adresse] présentée sur ce fondement,

Condamne la société SCCV Logements [adresse] aux dépens.

Le Greffier                Le Président