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CA BESANÇON (1re ch. civ. et com.), 5 novembre 2014

Nature : Décision
Titre : CA BESANÇON (1re ch. civ. et com.), 5 novembre 2014
Pays : France
Juridiction : Besancon (CA), 1re ch. civ.
Demande : 13/02021
Date : 5/11/2014
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 1/10/2013
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4918

CA BESANÇON (1re ch. civ. et com.), 5 novembre 2014 : RG n° 13/02021

Publication : Jurica

 

Extrait : « La clause pénale, fixe les dommages et intérêts dus par le débiteur qui n'exécute pas son obligation. Destinée à réparer forfaitairement le préjudice nécessairement subi par le créancier du fait de cette inexécution, elle ne saurait enrichir celui-ci sans cause. Stipulée expressément en cas de défaillance de l'emprunteur pour simple retard, elle ne se heurte pas aux dispositions de l'article 1229 du code civil.

En outre, insérée dans un contrat de prêt destiné à l'exercice de l'activité professionnelle de l'emprunteuse, elle n'est pas régie par l'article L. 132-1 du Code de la Consommation.

Enfin, le caractère manifestement excessif d'une clause pénale s'apprécie par rapport au contrat dans lequel elle s'intègre sans égard à d'éventuelles autres conventions conclues entre les mêmes parties ayant pu prévoir une clause identique ou similaire. C'est dès lors à tort que le Juge Commissaire, pour juger que l'indemnité stipulée était manifestement excessive, s'est référé aux autres contrats souscrit par Mme X. auprès du Crédit Agricole Mutuel de Franche Comté. En l'espèce, la clause prévoyant, en cas de retard dans le remboursement, la majoration du taux d'intérêt de deux points, ne présente aucun caractère manifestement excessif. Librement acceptée par les parties au contrat, elle constitue l'évaluation conventionnelle et anticipée du préjudice subi par le prêteur du fait de la rupture du contrat. Il n'y a dès lors pas lieu de la réduire ou de la supprimer. »

 

COUR D'APPEL DE BESANÇON

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 5 NOVEMBRE 2014

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 13/02021. Réputé contradictoire. Audience publique du 7 octobre 2014 sur appel d’une décision du juge commissaire relative à l'admission des créances de LONS-LE-SAUNIER en date du 24 septembre 2013 : R.G. n° 12/00007.

 

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT :

CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE FRANCHE COMTÉ

dont le siège est sis [adresse], Représentée par Maître Jean-Marie L. de la SCP C. - L. - GOY L. - R., avocat au barreau de LONS-LE-SAUNIER

 

ET :

INTIMÉES :

Madame X.

demeurant [adresse], n'ayant pas constitué avocat

SCP L. PASCAL, Maître L. Pascal agissant en qualité de liquidateur de Madame X.

désigné à ses fonctions le 14 MARS 2013. demeurant [adresse], Représentée par Maître Jean-Pierre F. de la SELARL F. - B., avocat au barreau de LONS-LE-SAUNIER

 

COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats : MAGISTRAT RAPPORTEUR : Monsieur E. MAZARIN, Président de Chambre, conformément aux dispositions des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile, avec l'accord des Conseils des parties.

GREFFIER : Madame D. BOROWSKI, Greffier.

Lors du délibéré : Monsieur E. MAZARIN, Président de Chambre (magistrat rapporteur) a rendu compte conformément à l'article 786 du Code de Procédure Civile aux autres magistrats : Mesdames V. GAUTHIER, et H. BITTARD, Conseillers. L'affaire, plaidée à l'audience du 7 octobre 2014 a été mise en délibéré au 5 novembre 2014. Les parties ont été avisées qu'à cette date l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Vu le jugement rendu le 14 mars 2012 par le Tribunal de Grande Instance de Lons-Le-Saunier ayant notamment prononcé la liquidation judiciaire de Mme X. et désigné la SCP Pascal L. en qualité de liquidateur,

Vu la déclaration par le Crédit Agricole Mutuel de Franche-Comté le 11 avril 2012 de sa créance résultant d'un prêt non bonifié agricole n° 55WWW77 en date du 29 septembre 2005 de 8.500 euros, pour la somme de 9.670,78 euros à titre chirographaire outre intérêts au taux contractuel majoré de 6,35 % l'an sur 8.746,78 euros,

Vu la lettre de contestation adressée le 24 juin 2013 par la SCP Pascal L. et les observations présentées en réponse par le créancier en date du 17 juillet 2013,

Vu l'ordonnance rendue le 24 septembre 2013 par laquelle le Juge Commissaire de cette liquidation judiciaire, considérant que le montant des clauses pénales stipulées dans le contrat de prêt, à savoir une indemnité et une majoration du taux des intérêts en cas de retard, était manifestement excessif, l'a réduit à 10 % de la somme réclamée, a admis la créance déclarée par le Crédit Agricole Mutuel de Franche-Comté pour la somme de 9.101,38 euros à titre chirographaire outre intérêts au taux de 4,35 % l'an sur 9.038,11 euros, et a condamné le créancier déclarant aux dépens,

Vu l'appel interjeté contre cette décision, selon déclaration au greffe en date du 1er octobre 2013, par le Crédit Agricole Mutuel de Franche-Comté lequel conclut à l'infirmation de l'ordonnance déférée en ce qu'elle a estimé que l'indemnité contractuelle devait être fixée à la somme de 63,27 euros et admis sa créance pour un montant de 9.101,38 euros à titre chirographaire outre intérêts au taux de 4,35 % l'an sur 9.038,11 euros, et demande à la Cour de prononcer son admission au passif de la liquidation judiciaire pour la somme déclarée de 9.670,78 euros à titre chirographaire outre intérêts au taux contractuel majoré de 6,35 % l'an,

Vu les conclusions prises par la SCP L. ès qualités tendant à la confirmation de l'ordonnance déférée sauf en ce qu'elle a retenu une clause pénale, à la suppression de toute clause pénale, subsidiairement à sa limitation à la somme de 1 euro, à la condamnation du Crédit Agricole aux dépens ainsi qu'à lui payer 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 12 août 2014,

Mme X. n'a pas constitué avocat. La déclaration d'appel lui a été signifiée par acte d'huissier en date du 29 novembre 2013 remis à sa personne. En application des dispositions de l'article 474 alinéa 1 du code de procédure civile, le présent arrêt sera réputé contradictoire.

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère aux dernières conclusions transmises le 30 juillet 2014 par le Crédit Agricole Mutuel de Franche-Comté et le 5 août 2014 par la SCP L., ès qualités.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Les conditions générales applicables au prêt sous seing-privé accepté le 20 juin 2002 par Mme X. et paraphées par elle, stipulent que :

- page 2 : le taux des intérêts de retard sera égal au taux du prêt majoré de 2 points,

- page 3 : « clause pénale - indemnité de recouvrement » : dans le cas où pour parvenir au recouvrement de sa créance en capital, intérêts, commissions, frais et accessoires, le prêteur se trouverait obligé d'avoir recours à un mandataire de justice, ou d'exercer des poursuites, ou de produire à un ordre, l'emprunteur s'oblige à lui payer, outre les dépens mis à sa charge, une indemnité forfaitaire de sept pour cent calculée sur le montant du prêt ou de ce qui resterait dû, pour le couvrir des pertes et dommages de toute sorte occasionnés par ce fait.

1 - La majoration du taux de l'intérêt contractuel en cas de retard constitue manifestement une clause pénale.

La clause pénale, fixe les dommages et intérêts dus par le débiteur qui n'exécute pas son obligation. Destinée à réparer forfaitairement le préjudice nécessairement subi par le créancier du fait de cette inexécution, elle ne saurait enrichir celui-ci sans cause.

Stipulée expressément en cas de défaillance de l'emprunteur pour simple retard, elle ne se heurte pas aux dispositions de l'article 1229 du code civil.

En outre, insérée dans un contrat de prêt destiné à l'exercice de l'activité professionnelle de l'emprunteuse, elle n'est pas régie par l'article L. 132-1 du Code de la Consommation.

Enfin, le caractère manifestement excessif d'une clause pénale s'apprécie par rapport au contrat dans lequel elle s'intègre sans égard à d'éventuelles autres conventions conclues entre les mêmes parties ayant pu prévoir une clause identique ou similaire.

C'est dès lors à tort que le Juge Commissaire, pour juger que l'indemnité stipulée était manifestement excessive, s'est référé aux autres contrats souscrit par Mme X. auprès du Crédit Agricole Mutuel de Franche Comté.

En l'espèce, la clause prévoyant, en cas de retard dans le remboursement, la majoration du taux d'intérêt de deux points, ne présente aucun caractère manifestement excessif. Librement acceptée par les parties au contrat, elle constitue l'évaluation conventionnelle et anticipée du préjudice subi par le prêteur du fait de la rupture du contrat.

Il n'y a dès lors pas lieu de la réduire ou de la supprimer.

2 - Nonobstant la dénomination qui lui a été donnée dans l'acte et à laquelle le juge ne doit pas s'arrêter, il est de jurisprudence constante que n'ayant pas pour objet de faire assurer par l'une des parties l'exécution de son obligation, la stipulation selon laquelle, dans le cas où le créancier serait obligé d'avoir recours à un mandataire de justice, ou d'exercer des poursuites, ou de produire à un ordre, il aurait droit à une indemnité forfaitaire, ne constitue pas une clause pénale susceptible d'être modérée par le juge (Civ. 1re, 16 janvier 1985 : Bull. civ. I, n° 24 et 21 février 1995 : Bull. civ. I n° 90).

La Banque qui a engagé des poursuites en mandatant à cette fin un conseil, est dès lors en droit de réclamer l'application de cette clause contractuelle.

La créance déclarée n'étant pas autrement discutée, il convient en conséquence, infirmant l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, de prononcer son admission pour la somme de 9.670,78 euros à titre chirographaire outre intérêts au taux de 6,35 % l'an sur 8.746,78 euros, conformément à la déclaration qui en a été faite.

L'intimé qui succombe sera débouté de sa demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens de la procédure seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant par arrêt réputé contradictoire, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

DÉCLARE l'appel du Crédit Agricole Mutuel de Franche-Comté recevable et bien fondé.

INFIRME l'ordonnance rendue le 24 septembre 2013 par le Juge Commissaire de la liquidation judiciaire de Mme X. en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,

PRONONCE l'admission au passif de ladite liquidation judiciaire de la créance déclarée par le Crédit Agricole Mutuel de Franche-Comté résultant d'un prêt non bonifié agricole n° 55WWW77 en date du 29 septembre 2005 de 8.500 euros, pour la somme de neuf mille six cent soixante-dix euros et soixante-dix-huit centimes (9.670,78 euros) à titre chirographaire outre intérêts au taux de 6,35 % l'an sur 8.746,78 euros.

REJETTE la demande de la SCP L. ès qualités formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

DIT que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

LEDIT ARRÊT a été signé par Edouard MAZARIN, Président de chambre, ayant participé au délibéré, et Madame D. BOROWSKI, Greffier.

LE GREFFIER,                    LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE,