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CA LYON (3e ch. A), 28 février 2013

Nature : Décision
Titre : CA LYON (3e ch. A), 28 février 2013
Pays : France
Juridiction : Lyon (CA), 3e ch. civ. sect. A
Demande : 12/07160
Date : 28/02/2013
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 16/10/2012
Décision antérieure : CASS. COM., 4 novembre 2014
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2013-033510
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4936

CA LYON (3e ch. A), 28 février 2013 : RG n° 12/07160 

(cassé partiellement par Cass. com., 4 novembre 2014 : pourvoi n° 13-16755)

Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2013-033510

 

Extrait : « L'action de la SAS ALTIPLAST est fondée sur les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce. L'article D. 442-3 du code de commerce dispose : « Pour l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce, le siège et le ressort des juridictions commerciales compétentes en métropole et dans les départements d'outre mer sont fixés conformément au tableau de l'annexe 4-2-1 du présent livre. La cour d'appel compétente pour connaître des décisions rendues par ces juridictions est celle de Paris. »

En application de ce texte et de l'annexe 4-2-1, le tribunal de commerce de Lyon était compétent pour connaître de l'affaire en première instance.

En revanche la cour d'appel compétente pour connaître de la décision rendue par le tribunal de commerce est la cour d'appel de Paris et non celle de Lyon. En effet, le texte précité renvoie à la connaissance de la cour d'appel de Paris l'ensemble des décisions rendues par les juridictions commerciales compétentes en première instance sans distinguer sur la nature de la décision.

D'autre part, il appartient au demandeur au contredit de préciser dans le contredit qu'il dépose au greffe du tribunal de commerce, qu'il sollicite la transmission de celui-ci à la cour d'appel de Paris.

Enfin, le fait que la cour d'appel saisie du contredit ne soit pas nécessairement la juridiction d'appel de la juridiction compétente en première instance, puisque le contredit de compétence peut aboutir à la désignation d'une juridiction située hors du ressort de la cour d'appel, n'a aucune incidence sur la compétence spéciale et d'ordre public de la cour d'appel de Paris édictée par l'article D. 442-3 du code de commerce. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE LYON

TROISIÈME CHAMBRE A

ARRÊT DU 28 FÉVRIER 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 12/07160.

 

DEMANDERESSE :

SAS ALTIPLAST

représentée par la SELARL AKLEA, avocats au barreau de LYON

 

DÉFENDERESSES :

SOCIETE SVENSKA CELLULOSA AKTIEBOLAGET

SOCIETE SCA HYGIENE PRODUCTS AB

SOCIETE SCA HYGIENE PRODUCTS GMBH

SOCIETE SCA HYGIENE PRODUCTS GMBH

représentées par la SELARL CHANON-SIMON SOCIETE D AVOCATS, avocats au barreau de LYON, assistées de Maître Didier LEBON, avocat au barreau de LILLE

 

Dates des débats tenues en audience publique : 14 janvier 2013

Date de mise à déposition : 21 février 2013 prorogé au 28 février 2013, les parties ayant été avisées

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : M. Jean-Luc TOURNIER, Président de chambre, Madame Hélène HOMS, Conseiller, M. Pierre BARDOUX, Conseiller, assistés pendant les débats de Jocelyne PITIOT, greffier

A l'audience, Hélène HOMS a fait le rapport, conformément l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de al cour d'appel, les parties ayant été avisées préalablement dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ; Signé par Jean Luc TOURNIER, président, et par Jocelyne PITIOT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

La SAS ALTIPLAST a attrait la Société SVENSKA CELLULOSA AKTIEBOLAGET(de droit suédois) et les sociétés SCA HYGIENE PRODUCTS AB (de droit suédois) SCA HYGIENE PRODUCTS GMBH située à Mannheim et SCA HYGIENE PRODUCTS GMBH située à Mainz-Kostheim (toutes deux de droit allemand) devant le tribunal de commerce de Lyon d'une action en rupture abusive des relations commerciales sur le fondement de L. 442-6 du code de commerce.

La compétence de la juridiction lyonnaise a été contestée par les défenderesses au profit des juridictions de droit allemand et subsidiairement des juridictions suédoises.

Par jugement du 17 septembre 2012, le tribunal de commerce :

- a jugé que le litige est de nature délictuelle et que le lieu du fait dommageable se situe en Suède,

- s'est déclaré incompétent au profit des tribunaux de Göterborg (Suède) et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir,

- dit qu'il n'y a pas lieu d'examiner les autres demandes,

- rejeté les demandes faites en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens seront partagés entre les parties, ceux visés à l'article 701 du code de procédure civile, étant liquidés à la somme de 153,44 euros.

Il a estimé que le litige était de nature délictuelle et qu'en application des dispositions de l'article 5-3° du règlement CE n° 44/2001 du 22 décembre 2000 qui a vocation à s'appliquer, la juridiction compétente est celle où le fait dommageable s'est produit et que ce lieu n'est pas l'endroit où sont situées les conséquences financières mais le lieu où la décision incriminée a été prise.

Le 16 octobre 2012, la SAS ALTIPLAST a formé contredit de compétence.

 

Aux termes de ses conclusions récapitulatives déposées le 14 janvier 2013, la SAS ALTIPLAST demande à la cour de :

Vu les articles 80 et suivants du code de procédure civile,

à titre préalable

- la déclarer recevable et bien fondée dans son contredit de compétence et y faisant droit,

- se déclarer compétente pour statuer sur le contredit,

à titre principal

- constater la nature délictuelle de la responsabilité encourue au titre de la rupture brutale des relations commerciales,

- constatant que le lieu du siège social de la victime est situé dans le ressort d'une juridiction relevant de la compétence du tribunal de commerce de Lyon en matière de rupture brutale,

- constatant que le lieu dans lequel a été subi le fait dommageable est situé dans le ressort d'une juridiction relevant de la compétence du tribunal de commerce de Lyon, en matière de rupture brutale,

- constatant qu'en matière délictuelle, la juridiction compétente est celle du lieu où le fait dommageable s'est produit, ce lieu s'entendant au lieu de réalisation de ce dernier,

- dire et juger que le tribunal de commerce de Lyon est compétent pour se prononcer sur les demandes formulées par elle par assignation du 4 mai 2010 à l'encontre des sociétés SVENSKA CELLULOSA AKTIEBOLAGET, SCA HYGIENE PRODUCTS AB et SCA HYGIENE PRODUCTS GMBH,

En conséquence

- dire et juger que le tribunal de commerce de Lyon est seul compétent pour statuer sur ses demandes,

- renvoyer l'affaire au tribunal de commerce de Lyon pour qu'il statue sur les demandes conformément à la loi,

en tout état de cause,

- condamner les sociétés SVENSKA CELLULOSA AKTIEBOLAGET, SCA HYGIENE PRODUCTS AB et SCA HYGIENE PRODUCTS GMBH au remboursement à son profit des frais occasionnés par le contredit de compétence,

- condamner les sociétés SVENSKA CELLULOSA AKTIEBOLAGET, SCA HYGIENE PRODUCTS AB et SCA HYGIENE PRODUCTS GMBH à lui payer une somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la demande de rejet des conclusions des sociétés défenderesses au contredit, la SAS ALTIPLAST fait valoir leur tardiveté et la violation du principe de la contradiction.

Sur la compétence de la cour d'appel de Lyon, elle soutient que la compétence spéciale de la cour d'appel de Paris ne concerne pas le contredit.

Au soutien du contredit, elle fait valoir que :

- la responsabilité pour rupture brutale des relations commerciales est de nature contractuelle comme l'a jugé le tribunal de commerce,

- qu'ainsi, en application de l'article 5-3° du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000, la personne domiciliée sur le territoire d'un état membre peut être attraite devant le tribunal, d'un autre état membre, du lieu où le fait dommageable s'est produit ou risque de se produire,

- le lieu du fait dommageable s'entend du lieu où les conséquences dommageables ont été subies et que c'est à son siège social qu'elle a subi les conséquences dommageables de la décision de rupture des relations commerciales, (le tribunal de commerce ayant confondu le lieu du dommage effectif avec celui de l'événement causal),

- son siège social est situé à [ville N.] dans le ressort du tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse,

- en application du décret du 11 novembre 2009 relatif à la spécialisation des juridictions en matière de contestations de nationalité et de pratiques restrictives de concurrence, qui énumèrent les tribunaux compétents pour connaître, en application de l'article L. 442-6 du code de commerce, des procédures applicables aux personnes qui sont commerçants ou artisans, le tribunal de commerce de Lyon est compétent.

 

Aux termes de leurs conclusions récapitulatives adressées à la SAS ALTIPLAST le 10 janvier 2013, les sociétés défenderesses au contredit demandent à la cour, de :

Vu l'article D. 442-3 du Code de commerce

- constater que la Cour d'appel compétente est celle de Paris,

- déclarer la société ALTIPLAST irrecevable en son contredit,

subsidiairement

Vu le règlement CE n° 44/2001 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (Bruxelles I),

Vu le contrat du 8 avril 2004,

- dire et juger que la demande doit être qualifiée de contractuelle,

Vu l'article 21 du contrat du 8 avril 2004,

- dire et juger que l'article 21 du contrat du 8 avril 2004 vaut clause attributive de juridiction au profit des tribunaux de l'Allemagne,

- donner plein effet à ladite clause

- dire et juger le tribunal de commerce de Lyon incompétent au profit des tribunaux allemands,

plus subsidiairement

Vu l'article 5-1°/ du règlement Bruxelles

- dire et juger que le lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la présente demande ne peut être que la Suède,

en conséquence,

- dire et juger que le tribunal de commerce de Lyon est incompétent au profit des juridictions suédoises, et plus précisément les tribunaux de Göteborg (Suède) dans le ressort duquel se trouve le siège social de la société SCA HYGIENE PRODUCTS AB,

très subsidiairement si qualification délictuelle

si de besoin, vu l'article 5-3° du règlement CE n° 44/2001 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale ;

- dire et juger que le lieu du fait dommageable ne peut s'entendre que du lieu où à été prise la décision incriminée, soit en Suède,

- dire et juger que le tribunal de commerce de Lyon est incompétent au profit des juridictions suédoises, et plus précisément les tribunaux de Göteborg (Suède) dans le ressort duquel se trouve le siège social de la société SCA HYGIENE PRODUCTS AB,

en tout état de cause

- condamner la société ALTIPLAST à payer aux sociétés SVENSKA CELLULOSA AKTIEBOLAGET (SCA), SCA HYGIENE PRODUCTS AB, SCA HYGIENE PRODUCTS GMBH (Mannheim) et SCA HYGIENE PRODUCTS GMBH (Main-Kostheim), la somme de 10.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens.

Sur la compétence de la cour d'appel de Paris, les défenderesses au contredit font valoir qu'il s'agit d'une compétence spéciale pour connaître des décisions rendues par les juridictions spécialisées de première instance sans distinguer entre les décisions sur la compétence et les décisions au fond.

Sur l'incompétence du tribunal de commerce de Lyon, elles soutiennent que le litige est de nature contractuelle car :

- la SAS ALTIPLAST a conclu un contrat de fourniture avec la société SCA HYGIENE PRODUCTS AB le 8 avril 2008 ; les parties ont convenu d'une clause attributive de compétence des tribunaux allemands et cette clause doit recevoir plein effet,

- selon la jurisprudence française, en présence d'une clause attributive de juridiction, le contrat l'emporte sur le caractère délictuel, selon le droit interne français, de l'action pour rupture commerciale établie,

- de plus, le droit de l'union européenne impose une qualification autonome en matière contractuelle et en application de la jurisprudence de la cour de cassation, en matière de droit international privé, une demande en réparation fondée sur la rupture abusive du contrat ne peut être introduite que devant le juge compétent en vertu de l'article 5,1° du règlement Bruxelles 1 qui concerne la matière contractuelle,

- ce texte donne compétence à la juridiction « du lieu où l'obligation de la demande a été ou doit être exécutée » soit en l'espèce, le lieu où sont prises les décisions relatives au contrat cadre et au volume des commandes soit Göteborg en Suède, lieu du siège de la SCA HYGIENE PRODUCTS AB, seul contactant de la SAS ALTIPLAST.

Subsidiairement, si application de l'article 5-3 était faite, les défenderesses au contredit soutiennent que « le lieu où s'est produit ou risque de se produire le dommage » (critère de compétence posé par ce texte) est celui du fait causal et non le lieu du préjudice.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la recevabilité des conclusions des sociétés défenderesses au contredit :

La SAS ALTIPLAST sollicite le rejet des conclusions des sociétés défenderesses au contredit au motif que celles-ci lui ont été adressées tardivement le 10 janvier 2013 ce qui porte atteinte au principe du contradictoire et participe une fois de plus aux manœuvres dilatoires mises en œuvre par les sociétés défenderesses au contredit depuis le début de la procédure.

La SAS ALTIPLAST a répondu par conclusions écrites déposées le 14 janvier 2013 aux conclusions que les sociétés défenderesses au contredit ont établies en réponse au contredit et elle n'a pas demandé de renvoi pour préparer sa défense.

Elle a donc été en mesure d'assurer sa défense et le principe de la contradiction a été respecté.

Le moyen d'irrecevabilité des conclusions des défenderesses au contredit soulevé par la SAS ALTIPLAST doit être rejeté.

 

Sur le moyen d'irrecevabilité du contredit :

Les sociétés défenderesses au contredit font valoir qu'aux termes de l'article D. 442-3 du code de commerce, la cour d'appel compétente pour connaître des décisions rendues par les juridictions désignées comme compétentes pour trancher les litiges sur le fondement de l'article L. 442-6 est la cour d'appel de Paris.

La SAS ALTIPLAST réplique que les sociétés défenderesses au contredit confondent les procédures d'appel et de contredit et qu'en application de l'article 80 du code de procédure civile, la décision déférée qui s'est prononcée sur la compétence sans statuer sur le fond ne peut attaquée que par la voie du contredit lequel doit être remis à la juridiction qui a rendu la décision à charge pour elle de transmettre l'entier dossier à la cour dont elle relève.

Elle ajoute qu'il ressort d'une lecture à contrario des dispositions de l'article 89 du code de procédure civile, que la cour saisie du contredit n'est pas nécessairement la juridiction d'appel de la juridiction compétente en première instance.

L'action de la SAS ALTIPLAST est fondée sur les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce.

L'article D. 442-3 du code de commerce dispose : « Pour l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce, le siège et le ressort des juridictions commerciales compétentes en métropole et dans les départements d'outre mer sont fixés conformément au tableau de l'annexe 4-2-1 du présent livre.

La cour d'appel compétente pour connaître des décisions rendues par ces juridictions est celle de Paris. »

En application de ce texte et de l'annexe 4-2-1, le tribunal de commerce de Lyon était compétent pour connaître de l'affaire en première instance.

En revanche la cour d'appel compétente pour connaître de la décision rendue par le tribunal de commerce est la cour d'appel de Paris et non celle de Lyon.

En effet, le texte précité renvoie à la connaissance de la cour d'appel de Paris l'ensemble des décisions rendues par les juridictions commerciales compétentes en première instance sans distinguer sur la nature de la décision.

D'autre part, il appartient au demandeur au contredit de préciser dans le contredit qu'il dépose au greffe du tribunal de commerce, qu'il sollicite la transmission de celui-ci à la cour d'appel de Paris.

Enfin, le fait que la cour d'appel saisie du contredit ne soit pas nécessairement la juridiction d'appel de la juridiction compétente en première instance, puisque le contredit de compétence peut aboutir à la désignation d'une juridiction située hors du ressort de la cour d'appel, n'a aucune incidence sur la compétence spéciale et d'ordre public de la cour d'appel de Paris édictée par l'article D. 442-3 du code de commerce.

En conséquence, il y lieu de déclarer irrecevable le contredit de compétence formée par la SAS ALTIPLAST devant cette cour.

L'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant publiquement par arrêt contradictoire,

Déclare irrecevable le contredit de compétence formé par la SAS ALTIPLAST,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SAS ALTIPLAST aux dépens afférents au contredit pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER                     LE PRÉSIDENT