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CA POITIERS (1re ch. civ.), 17 avril 2015

Nature : Décision
Titre : CA POITIERS (1re ch. civ.), 17 avril 2015
Pays : France
Juridiction : Poitiers (CA), 1re ch. civ.
Demande : 13/04112
Date : 17/04/2015
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 5/12/2013
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CERCLAB - DOCUMENT N° 5140

CA POITIERS (1re ch. civ.), 17 avril 2015 : RG n° 13/04112

Publication : Jurica

 

Extrait : « Elle fait valoir que le préjudice correspond au coût de la mise à disposition de la salariée qui a été totalement inutile, aucun des dossiers contentieux dont celle-ci avait la charge n'ayant pu être traités pour être transmis aux conseils de la société. Elle considère que la clause exonératoire de responsabilité figurant aux conditions générales du contrat, ne lui est pas opposable et doit être en tout cas réputée non écrite en ce qu'elle porte atteinte à l'obligation essentielle du contrat de mise à disposition d'un travailleur intérimaire.

Cependant, il convient d'abord de rappeler que le salarié intérimaire n'est contractuellement lié qu'à l'entreprise de travail temporaire qui seule peut invoquer les dispositions de l'article L. 1251-28 du code du travail, en cas de rupture anticipée du contrat de mission non justifiée par la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée. Ensuite, la mise à disposition de Mme X. a été effective pendant près d'un an au bénéfice de la société SCA qui ne peut se prévaloir du défaut d'achèvement de l'ensemble des dossiers traités par la salariée laquelle se trouve placée, pour l'exécution de la mission, sous la surveillance et le contrôle de l'entreprise utilisatrice à qui il revient d'organiser le travail en fonction de ses objectifs, étant observé que la société SCA avait recruté initialement Mme X. pour une durée de 6 mois. En tout état de cause, le préjudice résultant du défaut d'achèvement des dossiers contentieux traités par Mme X. n'est établi par aucune pièce justificative, l'appelante se contentant de simples affirmations qui ne permettent pas de condamner la société ADECCO à régler les sommes réclamées de ce chef, dans l'hypothèse même où la clause exonératoire de responsabilité opposée par l'intimée, ne pourrait être mise en œuvre.

C'est donc à bon droit que le premier juge, au constat de la réalité des prestations fournies par la société ADECCO, a condamné la société SCA au paiement du solde des factures et de la clause pénale. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D'APPEL DE POITIERS

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 17 AVRIL 2015

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 13/04112. Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 6 novembre 2013 rendu par le Tribunal de Commerce de NIORT.

 

APPELANTE :

SARL SOCIÉTÉ CONSTRUCTION DE L'ATLANTIQUE

Ayant pour avocat Maître François-Xavier MORISSET de la SCP MORISSET & MONTOIS-CLERGEAU, avocat au barreau de DEUX-SÈVRES

 

INTIMÉE :

SAS ADECCO FRANCE

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Ayant pour avocat postulant Maître Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS, avocat au barreau de POITIERS. Ayant pour avocat plaidant Maître Laurent BANBANASTE, avocat au barreau de Lyon substitué à l'audience par Maître Laurent LAMBERT, avocat au barreau de POITIERS.

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des articles 907 et 786 du Code Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 3 mars 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant : Monsieur Roland POTEE, Président. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Roland POTEE, Président, Madame Marie-Jeanne CONTAL, Conseiller, Madame Odile CLEMENT, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Monsieur Jérémy MATANO,

ARRÊT : CONTRADICTOIRE, Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, Signé par Monsieur Roland POTEE, Président, et par Monsieur Jérémy MATANO, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :

Par jugement 6 novembre 2013 auquel il est référé pour l'exposé du litige et de la procédure antérieure, statuant sur les demandes en paiement de factures impayées au titre de la mise à disposition d'une salariée intérimaire, formées par la société ADECCO à l'encontre de la société CONSTRUCTION DE L'ATLANTIQUE (ci-après SCA), le tribunal de commerce de NIORT a condamné cette dernière à payer à la société ADECCO, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, les sommes de :

- 5.895,54 euros en principal, outre intérêts au taux légal à compter du jour de la demande ;

- 884,33 euros au titre de la clause pénale ;

- 1.500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

- 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

 

La SCA a régulièrement formé appel le 5 décembre 2013 de la décision dont elle sollicite la réformation dans ses conclusions du 5 mars 2014 par lesquelles il est demandé à la cour, de :

Débouter la société ADECCO FRANCE de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Condamner la société ADECCO FRANCE à payer à la société S.C.A. à titre reconventionnel la somme de 33.571 euros H.T. en réparation du préjudice subi du fait de la rupture abusive du contrat et celle de 3.000 euros résultant de la désorganisation de l'entreprise, outre la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Condamner la société ADECCO FRANCE aux dépens de première instance et d'appel.

 

La société ADECCO demande à la cour, par conclusions du 29 avril 2014, de :

Vu les articles 1134 et 1147, 1315 du code civil

Vu les conditions générales de prestations,

Vu les articles L. 1251-1, L. 1251-21, L. 1251-28 du code du travail,

Vu l'article 132-1 du code de la consommation,

Vu la jurisprudence,

Vu l'ordonnance d'injonction de payer en date du 12 septembre 2012,

Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel

Et en conséquence,

Déclarer la SCA irrecevable et mal fondée en toutes ses demandes, et l'en débouter ;

Dire que la SCA a bénéficié de la mise à disposition de Mme X. du 1er avril 2011 au 30 avril 2012, en ce compris la période du 17 avril 2012 au 30 avril 2012 sous forme d'arrêt de travail ;

Condamner la SCA à payer à la société ADECCO la somme de 5.895,54 euros en principal, assortie des intérêts au taux légal à compter du jour de la demande et celle de 884,33 euros au titre de la clause pénale prévue au contrat et représentant 15 % du principal ;

Dire que la fiche interne ADECCO FRANCE intitulée « Règlementation TT » n'est pas un document à valeur contractuelle ;

Dire que la société ADECCO est tenue d'une obligation de moyens ;

Dire que les conditions générales de prestations de la société ADECCO sont opposables à la SCA ;

Dire que la clause selon laquelle la responsabilité de la société ADECCO n'est pas engagée en cas de rupture du contrat de mission par l'intérimaire ne contredit pas la portée de l'obligation essentielle de la société ADECCO ;

Dire que la responsabilité de la société ADECCO ne peut être engagée en raison du départ de Mme X. ;

Condamner la SCA à payer à la société ADECCO la somme de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et celle de 4.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, dont distraction pour ceux-là concernant au profit de la SELARL LEXAVOUE POITIERS selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 3 février 2015.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La société ADECCO a mis Mme X. à disposition de la société SCA, en qualité de secrétaire intérimaire chargée de travaux de secrétariat divers, comptables et juridiques selon deux contrats du 1er avril 2011 et du 10 septembre 2011, prévoyant une fin de mission initiale au 30 septembre 2011 puis au 30 septembre 2012.

Mme X. a mis fin à sa mission de manière anticipée en démissionnant de son poste par lettre du 11 avril 2012 avec préavis au 27 avril 2012.

Invoquant les dommages causés à l'entreprise dans la gestion des dossiers contentieux par ce départ anticipé alors qu'il restait encore six mois de travail, la société SCA refuse le paiement des factures réclamées par ADECCO au titre des sommes restant dues et lui réclame en outre réparation des préjudices subis du fait de cette rupture abusive, sur le fondement des dispositions de l'article L. 1251-28 du code du travail.

Elle fait valoir que le préjudice correspond au coût de la mise à disposition de la salariée qui a été totalement inutile, aucun des dossiers contentieux dont celle-ci avait la charge n'ayant pu être traités pour être transmis aux conseils de la société.

Elle considère que la clause exonératoire de responsabilité figurant aux conditions générales du contrat, ne lui est pas opposable et doit être en tout cas réputée non écrite en ce qu'elle porte atteinte à l'obligation essentielle du contrat de mise à disposition d'un travailleur intérimaire.

Cependant, il convient d'abord de rappeler que le salarié intérimaire n'est contractuellement lié qu'à l'entreprise de travail temporaire qui seule peut invoquer les dispositions de l'article L. 1251-28 du code du travail, en cas de rupture anticipée du contrat de mission non justifiée par la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée.

Ensuite, la mise à disposition de Mme X. a été effective pendant près d'un an au bénéfice de la société SCA qui ne peut se prévaloir du défaut d'achèvement de l'ensemble des dossiers traités par la salariée laquelle se trouve placée, pour l'exécution de la mission, sous la surveillance et le contrôle de l'entreprise utilisatrice à qui il revient d'organiser le travail en fonction de ses objectifs, étant observé que la société SCA avait recruté initialement Mme X. pour une durée de 6 mois.

En tout état de cause, le préjudice résultant du défaut d'achèvement des dossiers contentieux traités par Mme X. n'est établi par aucune pièce justificative, l'appelante se contentant de simples affirmations qui ne permettent pas de condamner la société ADECCO à régler les sommes réclamées de ce chef, dans l'hypothèse même où la clause exonératoire de responsabilité opposée par l'intimée, ne pourrait être mise en œuvre.

C'est donc à bon droit que le premier juge, au constat de la réalité des prestations fournies par la société ADECCO, a condamné la société SCA au paiement du solde des factures et de la clause pénale.

En revanche, les circonstances du départ anticipé de la salariée et du choix de l'absence de poursuites à son encontre par ADECCO ne permettent pas de qualifier d'abusive la résistance de la société SCA et l'équité conduit aussi à rejeter les demandes de l'intimée au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Le jugement sera donc infirmé dans cette seule mesure.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Infirme le jugement en ce qu'il a condamné la société CONSTRUCTION DE L'ATLANTIQUE à payer à la société ADECCO les sommes de :

- 1.500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

- 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Statuant à nouveau dans les limites de cette infirmation ;

Rejette les demandes de la société ADECCO au titre des dommages et intérêts pour résistance abusive et au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Confirme le jugement pour le surplus ;

Dit n'y avoir lieu à indemnités en appel au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société CONSTRUCTION DE L'ATLANTIQUE aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER,                    LE PRÉSIDENT,