CA PARIS (pôle 3 ch. 1), 18 mars 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 5160
CA PARIS (pôle 3 ch. 1), 18 mars 2015 : RG n° 14/09575
Publication : Jurica
Extrait : « Considérant au préalable que la cour considère que si M. X. n'a pas informé le généalogiste de sa qualité d'héritier de Mme Y., ce dernier ne lui a pas demandé de signaler toute succession en cours lors de la signature du contrat de révélation ; que cet argument est inopérant ;
Considérant que l'article 1131 du code civil édicte que : « l'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet » ; qu'il appartient à M. X. de rapporter la preuve de cette absence de cause ; […] ; qu'en l'absence de révélation d'un secret, la convention signée entre M. X. et la SAS ARCHIVES A. est dépourvue de cause ; qu'elle ne peut avoir aucun effet ; que le généalogiste sera débouté de ses demandes ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
PÔLE 3 CHAMBRE 1
ARRÊT DU 18 MARS 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 14/09575. Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 mars 2014 - Tribunal de Grande Instance de CRÉTEIL - R.G. n° 12/10216.
APPELANT :
Monsieur X.
né le [date] à [ville] ; Représenté et assisté de Maître Nathalie H. substituant Maître Bernard F., avocat au barreau de PARIS, toque : C0431
INTIMÉE :
SAS ARCHIVES GÉNÉALOGIQUES A.
prise en la personne de son représentant légal ; Représentée et assistée de Maître Alon L., avocat au barreau de PARIS, toque : B0813
COMPOSITION DE LA COUR : Après rapport oral et en application des dispositions de l'article 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 janvier 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Evelyne DELBÈS, président et Madame Nicolette GUILLAUME, conseiller. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Evelyne DELBÈS, président, Madame Monique MAUMUS, conseiller, Madame Nicolette GUILLAUME, conseiller
Greffier : lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Madame Marie-France MEGNIEN
ARRÊT : contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Evelyne DELBÈS, président et par Madame Marie-France MEGNIEN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Mme Y. est décédée le 21 avril 1993, laissant pour lui succéder M. X.
Le 29 août 1994, la SCP A., D., G., D. et L.-A., notaires associés à Vitry-sur-Seine, a écrit à M. X. afin qu'il vienne signer l'acte de notoriété correspondant à cette succession.
Le 10 juin 2008, M. X. a signé un contrat de révélation de succession avec le cabinet A. Ce contrat prévoit en outre que le généalogiste devra lui révéler « ces droits dans le mois suivant la découverte du dernier héritier... », sa rémunération étant fixée à 20 % TTC de l'actif de la succession après déduction du passif, des droits de succession, des frais de recherches et de règlement.
Finalement, l'acte de notoriété dans la succession de Mme Y. a été signé le 18 octobre 2011 par M. X. devant Maître L.-A. Le notaire a confirmé dans une lettre datée du 26 novembre 2012, bien connaître M. X. en sa qualité d'héritier de Mme Y. depuis août 1994.
Par jugement rendu le 13 mars 2014, sur assignation délivrée le 20 novembre 2012 par la société Archives Généalogiques A. à M. X., le tribunal de grande instance de Créteil a :
- ordonné à M. X. de remettre à la SAS ARCHIVES A. la déclaration de succession et le compte rendu de gestion de la DNID,
- dit qu'à défaut, passé le délai de 30 jours, M. X. devra payer une astreinte de 500 euros par jour de retard à la SAS ARCHIVES A.,
- condamné M. X. à payer à la SAS ARCHIVES A. 20 % TTC des sommes versées par la DNID pour clôture de la succession de Mme Y., outre les intérêts au taux légal, à compter de la mise en demeure du 5 octobre 2012,
- autorisé Maître L.-A., notaire, à communiquer à la SAS ARCHIVES A. la déclaration de succession dressée après le décès de Mme Y., ainsi que le compte rendu de gestion de la succession de Mme Y. dressé par la DNID,
- condamné M. X. à verser à la SAS ARCHIVES A. 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
M. X. a interjeté appel de cette décision par déclaration du 30 avril 2014.
Dans ses dernières conclusions du 5 décembre 2014, il demande à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris dans l'intégralité de ses dispositions,
statuant à nouveau,
vu l'article 1131 du code civil,
- dire que l'intervention du cabinet de généalogie SAS ARCHIVES A. ne présente pas l'utilité requise en pareille matière,
- dire que l'inutilité de l'intervention du généalogiste rend sans cause le contrat de révélation de succession,
- à titre subsidiaire, vu l'article 1184 du code civil, prononcer la résolution du contrat et dire en conséquence qu'il n'est pas tenu au paiement des honoraires, la SAS ARCHIVES A. n'ayant pas satisfait à ses engagements,
- en conséquence, débouter la SAS ARCHIVES A. de toutes ses demandes,
- à titre infiniment subsidiaire, vu l'article 1134 du code civil et la recommandation n° 96-03 de la Commission des clauses abusives, ainsi que l'article L. 133-2 du code de la consommation, réduire les honoraires de la SAS ARCHIVES A. au pourcentage de 5 % de l'actif net, frais de recherche, justifiés sur factures, inclus,
- en tout état de cause :
- condamner la SAS ARCHIVES A. à lui payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers frais et dépens de première d'instance et d'appel dont le recouvrement sera poursuivi par Maître Bernard F., avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions du 8 janvier 2015, la société Archives Généalogiques A. demande à la cour de :
vu les articles 1134, 1147 et 1184 du code civil,
- débouter M. X. de l'ensemble de ses demandes,
- confirmer le jugement entrepris dans l'intégralité de ses dispositions,
- condamner M. X. aux entiers frais et dépens de l'instance, conformément à l'article 609 du code de procédure civile, et à lui verser la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Ces conclusions sont expressément visées pour complet exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Considérant que, selon l'article 954 du code de procédure civile, les prétentions des parties sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ;
Sur la cause :
Considérant que M. X. soutient principalement que la cause du contrat est inexistante et demande de débouter le généalogiste de l'ensemble de ses prétentions, aux motifs qu'il n'existe aucune preuve que le cabinet A. lui a révélé des informations qu'il ne connaissait pas ;
Considérant que la SAS ARCHIVES A. relève que M. X. ne l'a tout d'abord pas informée qu'il se savait héritier de Mme Y. ; qu'il soutient que la révélation de droits dans une succession que l'héritier peut faire valoir et qui demeureraient secrets, est bien la cause du contrat et qu'elle a révélé à M. X. d'une part sa qualité d'héritier, d'autre part, ses droits dans l'actif successoral par une lettre du 18 juin 2008 ; que cette interprétation des faits permet seule de comprendre que M. X. soit resté inactif pendant 18 ans, alors que renseigné par la DNID, il pensait à tort, avant l'intervention du généalogiste, que la succession était déficitaire ;
Considérant au préalable que la cour considère que si M. X. n'a pas informé le généalogiste de sa qualité d'héritier de Mme Y., ce dernier ne lui a pas demandé de signaler toute succession en cours lors de la signature du contrat de révélation ; que cet argument est inopérant ;
Considérant que l'article 1131 du code civil édicte que : « l'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet » ; qu'il appartient à M. X. de rapporter la preuve de cette absence de cause ;
Considérant qu'aux termes du contrat signé par M. X. le 10 mai 2008, la SAS ARCHIVES GÉNÉALOGIQUES A. s'engage, en contrepartie d'une rémunération, a : « révéler à l'héritier qu'il aurait des droits à faire valoir dans une succession qu'il reconnaît ignorer.
L'héritier accepte que les Archives Généalogiques A. lui révèlent ces droits dans le mois suivant la découverte du dernier héritier » ;
Considérant que par la suite, M. X. a refusé de signer une procuration autorisant le généalogiste à intervenir, en qualité de mandataire, pour toutes les opérations susceptibles de constituer le règlement successoral ;
Considérant que la lettre du 18 juin 2008 adressée à M. X. par le généalogiste dont ce dernier se prévaut pour justifier de la révélation d'un secret, est rédigée dans les termes suivants : « Nous vous informons que la succession faisant l'objet des présentes est celle de Mme Y....dont vous êtes habile à vous dire et porter héritier pour partie » ; qu'au regard de la lettre adressée à M. X. par le notaire le 29 août 1994 qui l'invitait à signer l'acte de notoriété dans cette même succession, cette lettre du 18 juin 2008 n'a rien appris à M. X. puisqu'il se savait déjà héritier de la défunte ; que sans l'intervention du généalogiste l'existence de cette succession était bien déjà parvenue à la connaissance de M. X. ; que si ce dernier n'a rien fait de cette information pendant presque deux décennies, ce choix lui appartient, sans que cette absence de réaction justifie l'intervention du généalogiste sensé lui révéler le secret de l'existence de cette succession, ce qu'il n'a donc pas fait ; que M. X. a d'ailleurs encore attendu plus de trois ans pour signer l'acte de notoriété daté du 18 octobre 2011 seulement ; que ses droits dans la succession n'ont pas non plus été révélés par le généalogiste à M. X. ; qu'il appartenait au notaire d'établir un bilan actif et passif de la succession, ce qu'il avait tous les moyens de faire notamment au regard de la lettre que lui avait adressée la DNID le 4 octobre 2001 mentionnant, outre une petite dette de 2.548,18 Francs, l'existence d'immeubles à Vitry-sur-Seine ; qu'en l'absence de révélation d'un secret, la convention signée entre M. X. et la SAS ARCHIVES A. est dépourvue de cause ; qu'elle ne peut avoir aucun effet ; que le généalogiste sera débouté de ses demandes ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Infirme le jugement entrepris,
Et statuant à nouveau sur ces chefs :
Constate l'absence de cause du contrat de révélation passé le 10 juin 2008 entre M. X. et la SAS ARCHIVES A. et le dit sans effet,
Déboute la SAS ARCHIVES A. de l'ensemble de ses demandes,
Condamne la SAS ARCHIVES A. à verser à M. X. une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SAS ARCHIVES A. aux dépens de première d'instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,