CA BORDEAUX (2e ch. civ.), 9 septembre 2008
CERCLAB - DOCUMENT N° 5185
CA BORDEAUX (2e ch. civ.), 9 septembre 2008 : RG n° 07/01443
Publication : Legifrance
Extraits (demandeur) : « A titre subsidiaire, elles concluent au débouté des demandes du CRÉDIT AGRICOLE et la réduction à 0 € des clauses pénales. Elles font valoir que ces clauses ont un caractère abusif et que le créancier ne justifie d’aucun préjudice. »
Extraits (motifs) : « Au cas d’espèce, la clause pénale est fixée à 10 % du capital restant du. La SA FIMSO et la SARL CCC ne démontrent pas en quoi est excessive cette pénalité, librement acceptée, conforme aux usages en la matière et qui, en raison de son mode de calcul, tient compte de l’intérêt que l’exécution partielle de l’obligation principale a procuré au créancier. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 9 SEPTEMBRE 2008
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 07/01443 (Rédacteur : Monsieur Jean-François BOUGON, Président). Nature de la décision : AU FOND. Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 janvier 2007 (R. G. n° 2006F127) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d’appel du 19 mars 2007.
APPELANTES :
SA FOURNITURES INDUSTRIELLES ET MARITIMES DU SUD OUEST (FIMSO),
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis 7 rue Joseph Bonnet-33100 BORDEAUX
SARL COMPOSITE CONCEPT CONSULTANT (CCC),
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis [adresse], représentées par la SCP TOUTON-PINEAU & FIGEROU, avoués à la Cour et assistées de Maître ORGE substituant la SELARL CAPORALE-MAILLOT-BLATT, avocats au barreau de BORDEAUX
INTIMÉES :
CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA RÉUNION,
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis [adresse], représentée par la SCP LABORY-MOUSSIE & ANDOUARD, avoués à la Cour et assistée de Maître LE COLLETER substituant Maître Thierry WICKERS de la SCP WICKERS, LASSERRE & MAYSOUNABE, avocats au barreau de BORDEAUX
SA OSEO GARANTIE SOFARIS,
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis [adresse], représentée par la SCP RIVEL & COMBEAUD, avoués à la Cour et assistée de Maître Michel BACHELOT, avocat au barreau de PARIS
SOCIETE FINANCIÈRE DE L’IMMOBILIER ET DES TECHNOLOGIES NOUVELLES (F.I.T.),
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social, sis [adresse], représentée par la SCP ARSENE-HENRY ET LANCON, avoués à la Cour et assistée de Maître EYQUEM substituant Maître LAYDEKER de la SCP BARRIERE-EYQUEM-LAYDEKER, avocats au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 3 juin 2008 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-François BOUGON, Président, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Jean-François BOUGON, Président, Monsieur Bernard ORS, Conseiller, Monsieur Philippe LEGRAS, Conseiller.
Greffier lors des débats : Madame Véronique SAIGE
ARRÊT : - contradictoire -prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
La société LC TIP forme le projet d’implanter un site de production à la Réunion. Pour l’achat de matériels elle emprunte au CRÉDIT AGRICOLE une somme de 640.285,87 €. Ce prêt est garanti par un nantissement, un aval de la SOFARIS et diverses cautions dont celles de trois sociétés. La SA FIMSO à hauteur de 539.000 francs (82.170,02 €) en principal, la SARL CCC à hauteur de 539.000 francs (82.170,02 €) en principal et la SARL FIT à hauteur de 215.000 francs (32.776,54 €) en principal. Ces cautions ont renoncé au bénéfice de discussion.
La société LC TIP est mise en liquidation le 30 novembre 2004. Le CRÉDIT AGRICOLE déclare sa créance le 28 décembre 2004, 592.222,02 € à titre privilégié et 451.593,35 € à titre chirographaire.
Impayé, le CRÉDIT AGRICOLE assigne les trois sociéts cautions en règlement de sa créance. Elle réclame la condamnation des sociétés FIMSO, CCC et FIT à lui payer respectivement, les deux premières la somme de 135.937,87 € et la troisième la somme de 86.544,39 €, outre intérêts à compter de la mise en demeure et capitalisation des intérêts.
Elle sollicite 3.100 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.
Les sociétés FIMSO et CCC appellent en garantie la société OSEO SOFARIS
* * *
Le tribunal de commerce de BORDEAUX, par jugement du 26 janvier 2007 rejette une demande de sursis à statuer et condamne les sociétés FIMSO et COMPOSITE CONCEPT CONSULTANT à régler au CRÉDIT AGRICOLE, chacune, la somme de 82.170,02 €, majorée des intérêts au taux légal à compter du 22 avril 2005 et la société FIT à payer au CRÉDIT AGRICOLE la somme de 32.776,54 € majorée des intérêts au taux légal à compter du 22 avril 2005. Il arbitre les frais irrépétibles du CRÉDIT AGRICOLE à la somme de 1. 500 € et ceux de la société OSEO SOFARIS, qui est mise hors de cause, à 1.000 €.
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Les sociétés FIMSO et CCC relèvent appel de cette décision dont elles poursuivent la réformation.
A titre principal, elles demandent à la cour de surseoir à statuer dans l’attente des décisions que doivent rendre le tribunal de grande instance de SAINT PIERRE de la REUNION dans le litige opposant maître H. X., mandataire liquidateur de la société LC TIP, à la société SODEGIS et la cour d’appel de BORDEAUX sur le recours formé à l’encontre de l’ordonnance du juge de la mise en état du 8 février 2007 (tribunal de grande instance de BORDEAUX 5e chambre).
A titre subsidiaire, elles concluent au débouté des demandes du CRÉDIT AGRICOLE et la réduction à 0 € des clauses pénales. Elles font valoir que ces clauses ont un caractère abusif et que le créancier ne justifie d’aucun préjudice. Elles soulignent que le CRÉDIT AGRICOLE n’a toujours pas recherché la garantie de la SOFARIS auprès de laquelle elle aurait pu obtenir la moitié des sommes qu’elle réclame aujourd’hui. Elles voudraient que leur garantie soit limitée pour chacune d’elle à la somme de 41.085,11 €. Elles concluent au débouté de la demande d’indemnisation de frais irrépétibles présentée par la société SOFARIS et elles poursuivent la condamnation du CRÉDIT AGRICOLE à leur payer la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.
La société FIT sollicite également le sursis à statuer dans l’attente des procédures en cours et, constatant que le CRÉDIT AGRICOLE ne produit aucune pièce justifiant des diligences accomplies pour obtenir la vente à son profit du matériel nanti, elle conclut au débouté de l’ensemble des demandes du banquier. A titre subsidiaire, en considération de la limitation de son engagement, elle fait valoir qu’elle ne peut être tenue au-delà de la somme de 32.776,54 €. Elle conclut au débouté du surplus de la réclamation, la banque ne justifiant pas de l’information annuelle due aux cautions. Elle sollicite 2.000 € pour frais irrépétibles.
Le CRÉDIT AGRICOLE conclut à la confirmation du jugement entrepris quant à son principe, mais demande sa réformation sur le montant des condamnations prononcées et reprend ses prétentions initiales. Il sollicite la condamnation, in solidum, des trois cautions à lui payer une somme de 2.530 € pour frais irrépétibles.
La SA OSEO GARANTIE, qui vient aux droits de la SOFARIS via OSEO SOFARIS conclut à la confirmation du jugement dans ses dispositions la concernant et réclame la condamnation des cautions à lui payer 2.000 € pour frais irrépétibles.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
Sur le sursis à statuer :
Pour les motifs développés par le tribunal dont les débats devant la cour n’affectent pas la pertinence, la décision déférée sera confirmée lorsqu’elle rejette la demande de sursis à statuer formée par les cautions.
Sur l’obligation des cautions :
- la garantie de la SOFARIS
La garantie de la SOFARIS, comme l’explique le tribunal, est subsidiaire et les cautions ont expressément renoncé au bénéfice de discussion. Aussi, la décision déférée sera-t-elle confirmée qui rejette les moyens développés à cet égard par la SA FIMSO et la SARL CCC.
Il conviendra de mettre la SA OSEO GARANTIE hors de cause.
- le nantissement :
Lorsque l’on aura précisé que le nantissement a bien été inscrit et régulièrement déclaré à la procédure collective de la société LC TIP, pour les motifs développés par le tribunal dont les débats devant la cour n’affectent pas la pertinence, la décision déférée sera confirmée qui déboute la société FIT de son moyen tiré des dispositions de l’article 2037 du Code civil.
- les sommes garanties
Les cautionnements sont donnés pour garantie du prêt de 4.200.000,00 francs au taux de fixe de 6,9 % l’an contracté par la SA LC TIP. Ils sont limités dans leur montant en principal (539.000,00 francs - 82.170,02 € - pour la SA FIMSO et la SARL CCC et 215.000 francs - 32.776,54 € - pour la SARL FIT) et ils garantissent les intérêts, commissions frais et accessoires.
La banque convient que faute de justifier de l’information annuelle des cautions elle ne peut que des intérêts calculés au taux légal à compter de la date de la mise en demeure.
Contrairement à l’opinion développée par le tribunal, la clause pénale est un « accessoire » de la dette qui, comme tel, est garanti par les actes de cautionnement litigieux.
Sur le caractère manifestement excessif de la clause pénale :
Selon l’article 1152 du Code civil, « le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la peine (la clause pénale) qui avait été convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire ».
Au cas d’espèce, la clause pénale est fixée à 10 % du capital restant du. La SA FIMSO et la SARL CCC ne démontrent pas en quoi est excessive cette pénalité, librement acceptée, conforme aux usages en la matière et qui, en raison de son mode de calcul, tient compte de l’intérêt que l’exécution partielle de l’obligation principale a procuré au créancier. En conséquence, il sera fait droit à l’appel incident de la banque qui est fondée à réclamer aux cautions les sommes suivantes : la SA FIMSO et la SARL CCC, chacune la somme de 135.937,87 € outre intérêts calculés au taux légal à compter du 22 avril 2005, date de la mise en demeure, la SARL FIT la somme de 86.554,39 € outre intérêts calculés au taux légal à compter du 22 avril 2005.
Sur les mesures accessoires :
Les frais irrépétibles de la SA OSEO GARANTIE seront arbitrés à 1.500 € qui seront mis à la charge de la SA FIMSO et la SARL CCC.
Les frais irrépétibles de la CR. C. A. M. de la Réunion seront arbitrés à 2.000 € et mis à la charge de la SA FIMSO de la SARL CCC et de la SARL FIT, in solidum.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR :
Vu l’ordonnance de clôture du 9 avril 2008,
Déclare les appels recevables,
Confirme la décision déférée qui rejette la demande de sursis à statuer, qui déboute la SA FIMSO et la SARL CCC de leurs moyens tirés de l’existence de la garantie SOFARIS et la SARL FIT de son moyen tiré du nantissement sur le matériel financé,
Réformant, dit que les engagements de caution litigieux garantissent au titre des accessoires la clause pénale,
Dit que la clause pénale n’est pas manifestement excessive,
Condamne la SA FIMSO à payer à la CAISSE RÉGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA RÉUNION la somme de 135.937,87 € outre intérêts calculés au taux légal à compter du 22 avril 2005,
Condamne la SARL CCC à payer à la CAISSE RÉGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA RÉUNION la somme de 135.937,87 € outre intérêts calculés au taux légal à compter du 22 avril 2005,
Condamne la SARL FIT à payer à la CAISSE RÉGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA RÉUNION la somme de 86.554,39 € outre intérêts calculés au taux légal à compter du 22 avril 2005,
Ajoutant, prononce la mise hors de cause de la SA OSEO GARANTIE,
Condamne, in solidum, la SA FIMSO et la SARL CCC à payer à la SA OSEO GARANTIE la somme de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
Condamne, in solidum, la SA FIMSO, la SARL CCC et la SARL FIT à payer à la CAISSE RÉGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA RÉUNION la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
Condamne, in solidum, la SA FIMSO, la SARL CCC et la SARL FIT aux entiers dépens et en ordonne la distraction en application des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile,
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-François BOUGON, Président, et par Madame Véronique SAIGE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.