CA VERSAILLES (12e ch.), 10 novembre 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 5403
CA VERSAILLES (12e ch.), 10 novembre 2015 : RG n° 13/08665
Publication : Jurica
Extrait : « Le litige opposant les parties porte sur la demande en paiement de factures de part de la société INTERDAS, dans le cadre d'un contrat de distribution la liant à la société FRAB SERVICES, contrat pour lequel cette dernière fait grief d'un abus de dépendance économique, d'un refus de livraison des marchandises commandées alors que le plafond du crédit fournisseur octroyé n'était, selon elle, pas encore atteint et d'une rupture brutale de leurs relations commerciales qui l'aurait empêchée d'honorer ses factures.
Si les dispositions de l'article 954 du code de procédure civile édictent que la cour est saisie par les seules prétentions figurant au dispositif des dernières conclusions des parties, il n'appartient pas moins au juge, par application de l'article 12 du même code de qualifier les faits et actes litigieux soumis à son appréciation, surtout lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, une partie, en l'occurrence la société FRAB SERVICES ne vise aucune disposition législative ou réglementaire dans le dispositif de ses conclusions. Le fait de ne viser aucun texte dans le dispositif des conclusions ne signifie cependant pas que la partie est réputée avoir abandonné une prétention, au sens des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile.
Il ressort ainsi des écritures de la société FRAB SERVICES, qui a expressément visé les dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce dans ses écritures de première instance, que son accord sur l'application du droit italien aux relations commerciales la liant à la société INTERDAS n'est pas plein et entier, puisqu'elle souligne en page 14 de ses dernières conclusions d'appel que les dispositions d'ordre public de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce sur l'abus de dépendance économique, devraient prévaloir sur le droit italien. Elle apporte, en cause d'appel, une précision sur ce point, puisqu'elle produit une consultation qui indique que le droit italien contient des dispositions analogues à cet article, à savoir l'article 9 alinéa 1er de la loi n° 192 du 18 juin 1998. Au surplus elle se prévaut de la rupture brutale de relations commerciales de la part de la société INTERDAS, dont la cour estime qu'elle relève de l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce.
La cour, qui n'est pas saisie d'une fin de non-recevoir des demandes reconventionnelles de la société FRAB SERVICES au visa de l'article 70 du code de procédure civile, les estime indissociables de l'action en paiement de la société INTERDAS.
Or, selon l'article L. 442-6 du code de commerce : […] L'article D. 442-3 du code de commerce dispose quant à lui que : […] Ainsi, seuls sont compétents les tribunaux de commerce mentionnés à cette annexe 4-2-1, à l'exclusion de tout autre pour connaître des pratiques restrictives de concurrence mentionnées à l'article L. 442-6 du code de commerce, dispositions dérogatoires au droit commun des contrats, peu important que les appelants invoquent dans leurs écritures les dispositions générales de l'article 1134 au soutien de leurs prétentions à titre de fondement alternatif, dès lors qu'il est de principe que les lois spéciales dérogent aux lois générales et qu'il appartient au juge, par application de l'article 12 du code de procédure civile de donner ou restituer aux faits et actes litigieux leur exacte qualification, les parties n'ayant en l'espèce pas la libre disposition de leur droits, puisque les dispositions des articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce sont d'ordre public. En tout état de cause, quel que soit le tribunal de commerce qui a statué sur ces pratiques restrictives de concurrence, toute autre cour d'appel que celle de Paris est désinvestie du pouvoir de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce et doit, au terme de l'article 125 du code de procédure civile, relever d'office la fin de non-recevoir qui en résulte. L'appel de la société FRAB SERVICES sera donc déclaré irrecevable. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE VERSAILLES
DOUZIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 10 NOVEMBRE 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 13/08665. Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 31 octobre 2013 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE : R.G. n 2010F1875.
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANTE :
SAS FRAB SERVICES
Représentant : Maître Anne laure DUMEAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 628 - n° du dossier 40979 ; Représentant : Maître Jacques COHEN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1249
INTIMÉE :
Société INTERDAS SPA venant aux droits de INTERDATA SRL
Représentant : Maître Christophe DEBRAY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 - n° du dossier 13000562 - Représentant : Maître Jérôme PUJOL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0125
Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 1er octobre 2015 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur François LEPLAT, Conseiller chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Mme Dominique ROSENTHAL, Président, Monsieur François LEPLAT, Conseiller, Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
La société par actions simplifiée FRAB SERVICES, constituée en 1999, a une activité de commerce de gros d'appareils électroménagers. Dans la présente affaire, elle s'est substituée à la société à responsabilité limitée FRAB EXPORT, de même activité, immatriculée au RCS de Nanterre en 1994, M. X., ancien salarié de la société WHIRLPOOL Europe, étant respectivement gérant et président des sociétés FRAB EXPORT et FRAB SERVICES.
Par contrat du 9 février 1996, dénommé export dealer agreement, la société WHIRLPOOL Europe a nommé la société FRAB EXPORT en qualité de concessionnaire exportateur non exclusif des produits électroménagers offerts à la vente par la société WHIRLPOOL et portant la marque Whirlpool, et ce, pour une durée d'un an sur un territoire composé de dix-huit états africains francophones. L'exécution dudit contrat s'est poursuivie jusqu'en juillet 2005.
Par courrier du 11 juillet 2005, la société WHIRLPOOL Europe, sous la signature de Claudio BAGGIANI, alors vice-président pour l'Italie et les marchés émergents, a informé la société FRAB SERVICES que, suite à une restructuration interne, elle avait décidé de confier à la société INTERDATA SRL, société italienne d'exportation indépendante dont le siège est à Varèse, la responsabilité de la commercialisation des produits de marque Whirlpool sur certains marchés d'exportation, dont ceux intéressant la société FRAB SERVICES. Cette dernière, conservant les mêmes responsabilités qu'auparavant, était alors invitée à coopérer avec la société INTERDATA en lui achetant directement les appareils électroménagers de la marque Whirlpool.
Par courrier du 20 septembre 2005, la société WHIRLPOOL Europe a précisé à la société FRAB SERVICES l'accord, intervenu avec cette dernière, relatif eu cadre des relations FRAB SERVICES / INTERDATA / WHIRLPOOL Europe, notamment en ce qui concernait les modalités de paiement et les territoires concernés.
Par courrier du 5 octobre 2005 la société INTERDATA a confirmé à la société FRAB SERVICES qu'elle se conformerait aux termes du courrier de la société WHIRLPOOL Europe du 20 septembre 2005.
Le 13 juillet 2006, suite à la décision de la société WHIRLPOOL Europe de confier directement à la société INTERDATA le marché algérien, un accord d'une durée de deux ans a été signé entre la société INTERDATA et la société FRAB SERVICES au terme duquel cette dernière cessait son activité sur ce marché, moyennant le paiement d'une commission de 3 % sur la valeur ex-factory des fournitures vendues à la société AIT, basée à Marseille, laquelle devait en assurer la distribution sur le marché algérien, à raison de 2 % à la charge de la société INTERDATA et de 1 % à celle de la société WHIRLPOOL Europe.
À compter du mois d'avril 2006, la société INTERDATA a invité à plusieurs reprises la société FRAB SERVICES à respecter les termes de paiement de l'accord du 20 septembre 2005. N'obtenant pas entière satisfaction, la société INTERDATA a progressivement réduit la livraison de ses fournitures à la société FRAB SERVICES, ce qui a eu pour effet de faire chuter l'activité de cette dernière.
Par courrier du 24 septembre 2009, le conseil de la société INTERDATA a demandé à la société FRAB SERVICES de régler avant le 16 octobre 2009, la somme de 276.831,30 euros correspondant au montant des arriérés comptabilisés dans ses livres. Le 30 septembre 2009, la société FRAB SERVICES a réglé la somme de 55.770 euros, laissant un solde impayé de 221.061,30 euros.
Par courrier du 8 octobre 2009, le conseil de la société INTERDATA a informé la société FRAB SERVICES que faute de règlement du solde impayé avant le 15 octobre 2009, une procédure judiciaire serait engagée à son encontre.
Enfin, la société FRAB SERVICES, estimant ne pas avoir reçu les commissions au titre du contrat sur l'Algérie, a émis le 4 mars 2010, une facture d'un montant de 360.000 euros correspondant à 3 % sur un chiffre d'affaires estimé de 12 millions d'euros sur la période 2006/2009. Cette facture n'a pas été réglée.
À la suite d'une fusion-absorption, la société INTERDATA SRL est devenue la société INTERDAS SPA, Claudio BAGGIANI en étant le président.
Par jugement du 1er décembre 2011, auquel il convient de se rapporter pour un plus ample exposé de la procédure, le tribunal de commerce de Nanterre, après avoir reçu l'accord des parties sur leur volonté de tenter de régler leur litige par voie de médiation, a désigné Dominique DEDOUBLE, en qualité de médiateur.
Par courrier du 19 juin 2012, le médiateur a informé le juge chargé d'instruire l'affaire que les parties n'étaient pas parvenues à trouver une solution au conflit qui les opposait.
C'est ainsi que par conclusions responsives et récapitulatives n° 2, déposées à l'audience du 13 février 2013, la société INTERDATA SRL a demandé au tribunal de :
Vu l'article 3-1 d) de la directive européenne 2000/35/CE concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales, et sa transposition en droit italien
Vu les accords entre les parties et les pièces versées au débat,
Rejeter in limine litis la demande de la société FRAB SERVICES tendent à faire constater l'existence d'un accord procédural tacite désignant le droit français ;
Condamner la société FRAB SERVICES SAS à payer à la société INTERDATA SRL, la somme de 221.061,30 euros avec les intérêts au taux de 7 points au-dessus du taux de refinancement de la Banque Centrale Européenne à compter de l'échéance des factures impayées ;
Dire que lesdits intérêts dus depuis au moins six mois seraient capitalisés en application de l'article 1283 du code civil italien ;
Condamner en outre la société FRAB SERVICES au paiement de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dire que dans l'hypothèse où le défaut de règlement spontané des condamnations prononcées dans le jugement à intervenir, l'exécution forcée devrait être réalisée par l'intermédiaire d'un huissier, le montant des sommes retenues par l'huissier par application de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 numéro 96/1080 (tarif des huissiers) devraient être supportés par le débiteur en sus de l'application de l'article 700 ;
Débouter la société FRAB SERVICES SAS de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles ;
Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir sans constitution de garantie ;
Et condamner la société FRAB SERVICES en tous les dépens.
Par conclusions en réponse et récapitulatives n° 4 déposées à l'audience du 22 mai 2013, la société FRAB SERVICES a demandé au tribunal de :
Vu les articles 1134, 1135, 1289 et 1290 du Code Civil
Vu l'article 1244-1 du Code Civil
Vu les articles 1289 et suivants du Code Civil
Vu l'article L. 442-6-l-2°) du Code de Commerce
Vu l'article L. 420-2 du code de commerce
Vu le contrat de concession du 9 février 1996
Vu l'accord pour l'Algérie signé le 13 juillet 2006
IN LIMINE LITIS,
1/ À TITRE PRINCIPAL SUR L'APPLICATION DU DROIT ITALIEN
CONSTATER que l'accord procédural résulte, tacitement, des prétentions présentées devant celui-ci, par les sociétés INTERDAS et FRAB SERVICES en se plaçant sur le terrain du droit français.
Par conséquent,
DIRE ET JUGER que le droit français est applicable dans le cadre de la présente procédure.
2/ À TITRE SUBSIDIAIRE SUR LA PREUVE DU CONTENU DU DROIT ITALIEN
CONSTATER que la société INTERDAS qui prétend que le droit italien est applicable n'établit à aucun moment la différence de son contenu par rapport au droit français.
À défaut de quoi,
DIRE ET JUGER que le droit français, en raison de sa vocation subsidiaire, tend à s'appliquer dans le cadre de la présente procédure.
SUR LE FOND,
1/ À TITRE PRINCIPAL, SUR LA RESPONSABILITÉ CONTRACTUELLE DE LA SOCIÉTÉ INTERDATA
DÉBOUTER LA SOCIÉTÉ INTERDAS de l'ensemble de ses fins et demandes ; DÉCLARER recevable et bien fondée la SAS FRAB SERVICES en ses écritures
EN CONSÉQUENCE,
CONSTATER l'existence entre les parties d'un encours à hauteur de 2,5 millions d'euros ;
PAR CONSÉQUENT
DIRE ET JUGER que la société FRAB SERVICES n'est pas dans l'obligation de régler le solde de l'encours soit la somme de 221.061,30 euros
2/ À TITRE SUBSIDIAIRE SUR LA DEMANDE DE DÉLAIS DE PAIEMENT
ACCORDER, des délais de paiement à la Société FRAB SERVICES laquelle pourra se libérer de sa créance de 221.061,30 euros en 24 mois soit la somme de 9.210,28 euros par mois.
3/ À TITRE RECONVENTIONNEL
A/ Sur la demande de rétablissement du crédit fournisseur
CONDAMNER la société INTERDAS à rétablir le crédit fournisseur contractuel de 2.5 millions d'euros à la Société FRAB SERVICES et ce, sous astreinte de 1.000 euros par jour.
Sur le non-respect par la Société INTERDATA, du contrat relatif à l'Algérie
À titre principal,
CONDAMNER la Société INTERDAS à régler à la Société FRAB SERVICES la somme de 360.000 euros au titre de la facture n° F1XX00.
À titre subsidiaire,
DÉSIGNER tel expert-comptable qu'il lui plaira avec pour mission :
- d'entendre tous sachants,
- de se faire communiquer tous documents comptables permettant de déterminer le chiffre d'affaires réalisé par la société INTERDATA, en Algérie.
DONNER ACTE à la société FRAB SERVICES de ce qu'elle se réserve le droit de demander la réparation de tous les préjudices qu'il lui aurait été causés par la société INTERDAS dans l'hypothèse où celle-ci n'aurait pas assuré en « Bon père de famille » la pérennité du fonds de commerce développé par la société FRAB SERVICES en Algérie.
DONNER ACTE à la société FRAB SERVICES de ce qu'elle se réserve le droit de demander la réparation de tous préjudices qu'elle subit ou pourrait subir du fait des agissements de la société INTERDAS relativement au développement commercial sur l'Algérie (perte d'image de marque, notoriété...).
B/ Sur la responsabilité de la Société INTERDAS et la demande en dommages et intérêts pour le préjudice subi par la Société FRAB SERVICES
1/ Sur la responsabilité de la Société INTERDAS du fait du déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties
CONDAMNER la Société INTERDAS à régler à la Société FRAB SERVICES la somme de 250.000 euros de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L. 442-6-I-2°) du code de commerce.
2/ Sur la responsabilité de la Société INTERDAS du fait de la perte d'exploitation
CONDAMNER la Société INTERDAS à régler à la Société FRAB SERVICES la somme de 1.978,846.153 euros [sic] à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice d'exploitation
À titre subsidiaire,
CONDAMNER la société INTERDAS à verser à la société FRAB SERVICES une provision d'un million d'Euros en compte et à valoir sur le préjudice définitif de perte d'exploitation subi par la concluante et dans ce cas,
VOIR NOMMER tel expert qu'il plaira au Tribunal de Céans avec pour mission de vérifier le mode de calcul présenté par la société FRAB SERVICES afin de déterminer le préjudice subi du fait de la perte d'exploitation,
D/ Sur la demande de compensation
ORDONNER la compensation de la somme de 221.061,30 euros outre les intérêts avec celles qui sont dues par la Société INTERDAS en vertu de l'accord signé le 13 juillet 2006 sur le fondement des articles 1239 et suivants du Code Civil.
CONDAMNER la Société INTERDAS à régler à la SAS FRAB SERVICES, la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du NCPC ainsi qu'aux entiers dépens.
Par jugement entrepris du 31 octobre 2013 le tribunal de commerce de Nanterre a :
Dit que le droit applicable à la présente affaire était le droit italien,
Condamné la SAS FRAB SERVICES à payer à INTERDAS SPA venant aux droits de INTERDATA SRL, la somme de 221.061,30 euros majorée des intérêts moratoires au taux de refinancement de la BCE majoré de 7 points à compter de l'échéance des factures impayées ;
Dit que les dits intérêts dus au moins depuis six mois seraient capitalisés dans les termes des dispositions de l'article 1283 du code civil italien,
Débouté la SAS FRAB SERVICES de sa demande de délais de paiement,
Débouté la SAS FRAB SERVICES de sa demande relative au rétablissement du crédit fournisseur,
Condamné INTERDAS, SPA, à payer à la SAS FRAB SERVICES la somme de 66.977 euros au titre du non-respect par INTERDAS, SPA, du contrat relatif à l'Algérie,
Débouté la SAS FRAB SERVICES de sa demande formée au titre de la responsabilité de la INTERDAS SPA, et de sa demande en dommages et intérêts pour le préjudice subi par la SAS FRAB SERVICES,
Débouté INTERDAS SPA, de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,
Débouté la SAS FRAB SERVICES de sa demande relative à la compensation des sommes dues par chacune des parties,
Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile français,
Reçu les parties en leur demande plus ample ou contraire, les a dits mal fondées, les en a déboutées,
Dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire du jugement
Mis les dépens à la charge de chacune des parties, chacune pour la moitié.
PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Vu l'appel interjeté le 22 novembre 2013 par la société FRAB SERVICES ;
Vu les dernières écritures en date du 23 septembre 2015 par lesquelles la société FRAB SERVICES demande à la cour de :
Déclarer la société FRAB SERVICES recevable et bien fondée en son appel,
Y faisant droit,
Infirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions lui faisant grief,
Statuant à nouveau,
Vu les pièces versées aux débats et notamment le contrat de concession d'exportation signé le 9 février 1996 qui s'impose à la société INTERDAS,
Débouter la société INTERDAS en sa demande en paiement de la somme de 221.061,30 euros.
Condamner la société INTERDAS au paiement de la somme de 250.000 euros à titre de dommages intérêts au titre de l'abus de position dominante.
La condamner au paiement de la somme de 1.978.846 euros à titre de dommages intérêts au titre de la perte d'exploitation pour la période de 2007 à 2009.
Subsidiairement, si la Cour s'estimait insuffisamment informée, voire nommer tel expert qu'il plaira à la Cour de céans, avec pour mission de déterminer au regard du chiffre d'affaire enregistré en 2004 et 2005, avant l'accord de 2006, le préjudice subi du fait de la perte d'exploitation.
Condamner dans cette hypothèse la société INTERDAS à verser à FRAB SERVICES une provision d'un million d'Euros en compte et à valoir sur le préjudice définitif de perte d'exploitation subi par la concluante dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise.
Condamner la société INTERDAS au paiement de la somme de 350.000 euros au titre de l'indemnisation de la rupture brutale des relations commerciales.
Ordonner la compensation entre les éventuelles condamnations prononcées à l'encontre de la société FRAB SERVICES et les dommages intérêts qui lui seront alloués.
Subsidiairement, si la Cour de céans croit devoir confirmer le jugement en ce qu'il entre en voie de condamnation pécuniaire à l'encontre de la société FRAB SERVICES, sans faire droit aux demandes de dommages intérêts de cette dernière, lui accorder au regard de ses difficultés financières les plus larges délais de paiement.
Débouter la société INTERDAS en son appel incident du chef de la commission au titre du marché Algérien.
Condamner la Société INTERDAS à régler à la société FRAB SERVICES la somme de 12.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en indemnisation des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en appel.
Condamner la société INTERDAS SPA aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Vu les dernières écritures en date du 18 septembre 2015 au terme desquelles la société de droit italien INTERDAS SPA demande à la cour de :
Vu l'article 3-1.d) de la Directive européenne 2000/35/CE concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales, et sa transposition en droit italien,
Vu les pièces versées au débat,
Vu le jugement rendu par le tribunal de Commerce de Nanterre le 31 octobre 2013,
Rejeter l'intégralité des demandes de la société FRAB SERVICES
Confirmer le jugement du tribunal de commerce en ce qu'il a condamné la société FRAB SERVICES S.A.S. à payer à la société INTERDATA S.R.L. la somme de 221.061,30 euros (deux cent vingt et un mille soixante et un euros et trente centimes), avec les intérêts au taux de 7 (sept) points au-dessus du taux de refinancement de la Banque Central Européenne à compter de l'échéance des factures impayées.
Dire que lesdits intérêts dus depuis au moins six mois seront capitalisés, en application de l'article 1283 du Code Civil italien.
Débouter la société FRAB SERVICES de sa demande de délais de paiement.
Débouter la société FRAB SERVICES de sa demande relative au rétablissement du crédit fournisseur.
Infirmer le jugement attaqué en ce qu'il condamne INTERDAS au paiement de la somme de 66.977 euros pour non-respect des termes du contrat concernant l'Algérie.
Débouter la société FRAB SERVICES de ses demandes en responsabilité et dommages et intérêts.
Condamner la société FRAB SERVICES au paiement de 6.000,00 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et de 6.000 euros au titre de l'article 700 du NCPC.
Débouter la société FRAB SERVICES SAS de l'ensemble de ses demandes
Et condamner la société FRAB SERVICES en tous les dépens de première instance et d'appel
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées par les parties et au jugement déféré.
À l'audience du 1er octobre 2015, la cour a demandé aux parties, en application des articles 442 et 445 du code de procédure civile, de produire une note en délibéré avant le 15 octobre 2015 relative à son pouvoir juridictionnel au regard des dispositions des articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce.
Par note du 13 octobre 2015, la société FRAB SERVICES expose qu'au regard du caractère d'ordre public des dispositions des articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce, le tribunal de commerce de Nanterre aurait dû soulever d'office son incompétence pour statuer sur ce litige et demande à la cour, au visa de l'article 79 du code de procédure civile, de renvoyer l'affaire devant la cour d'appel de Paris.
Par note du 14 octobre 2015, la société INTERDAS soutient la compétence de la cour pour connaître du litige qui lui est soumis.
Elle fait observer que le dispositif des dernières conclusions de la société FRAB SERVICES, qui seul saisit la cour par application de l'article 954 du code de procédure civile, ne vise pas les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce ; qu'elle y a ainsi renoncé et ne peut donc y revenir après clôture des débats, sauf à former une demande nouvelle, au sens des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile ; qu'au surplus les parties se sont accordées pour soumettre leur relation commerciale au seul droit italien et que retenir l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce dénaturerait l'accord des parties sur ce point.
Elle ajoute qu'un renvoi de l'affaire devant la cour d'appel de Paris la priverait de voir sa cause entendue dans le délai raisonnable garanti par l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et que la demande reconventionnelle formée par la société FRAB SERVICES ne se rattache pas par un lien suffisant à sa demande principale en paiement, au sens des dispositions de l'article 70 du code de procédure civile, de sorte que la cour pourrait valablement statuer sur cette demande en paiement et se déclarer incompétente pour apprécier la demande reconventionnelle de la société FRAB SERVICES.
Par note responsive du 15 octobre 2015, la société FRAB SERVICES, répondant sur ce dernier point, plaide l'indivisibilité du litige, faisant observer qu'aucun moyen n'a antérieurement été développé sur ce point, alors que la demande en paiement de la société INTERDAS procède du contrat de distribution liant les parties, contrat pour lequel elle fait grief d'un abus de dépendance économique, d'un refus de livraison des marchandises commandées alors que le plafond du crédit fournisseur octroyé n'était pas encore atteint et d'une rupture des relations commerciales l'empêchant d'honorer ses factures.
Elle ajoute d'ailleurs que ses conclusions contiennent une demande de compensation si le paiement des factures devait être confirmé en appel.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la recevabilité de l'appel :
Le litige opposant les parties porte sur la demande en paiement de factures de part de la société INTERDAS, dans le cadre d'un contrat de distribution la liant à la société FRAB SERVICES, contrat pour lequel cette dernière fait grief d'un abus de dépendance économique, d'un refus de livraison des marchandises commandées alors que le plafond du crédit fournisseur octroyé n'était, selon elle, pas encore atteint et d'une rupture brutale de leurs relations commerciales qui l'aurait empêchée d'honorer ses factures.
Si les dispositions de l'article 954 du code de procédure civile édictent que la cour est saisie par les seules prétentions figurant au dispositif des dernières conclusions des parties, il n'appartient pas moins au juge, par application de l'article 12 du même code de qualifier les faits et actes litigieux soumis à son appréciation, surtout lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, une partie, en l'occurrence la société FRAB SERVICES ne vise aucune disposition législative ou réglementaire dans le dispositif de ses conclusions.
Le fait de ne viser aucun texte dans le dispositif des conclusions ne signifie cependant pas que la partie est réputée avoir abandonné une prétention, au sens des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile.
Il ressort ainsi des écritures de la société FRAB SERVICES, qui a expressément visé les dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce dans ses écritures de première instance, que son accord sur l'application du droit italien aux relations commerciales la liant à la société INTERDAS n'est pas plein et entier, puisqu'elle souligne en page 14 de ses dernières conclusions d'appel que les dispositions d'ordre public de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce sur l'abus de dépendance économique, devraient prévaloir sur le droit italien.
Elle apporte, en cause d'appel, une précision sur ce point, puisqu'elle produit une consultation qui indique que le droit italien contient des dispositions analogues à cet article, à savoir l'article 9 alinéa 1er de la loi n° 192 du 18 juin 1998.
Au surplus elle se prévaut de la rupture brutale de relations commerciales de la part de la société INTERDAS, dont la cour estime qu'elle relève de l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce.
La cour, qui n'est pas saisie d'une fin de non-recevoir des demandes reconventionnelles de la société FRAB SERVICES au visa de l'article 70 du code de procédure civile, les estime indissociables de l'action en paiement de la société INTERDAS.
Or, selon l'article L. 442-6 du code de commerce : I.- Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : (...)
5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur. À défaut de tels accords, des arrêtés du ministre chargé de l'économie peuvent, pour chaque catégorie de produits, fixer, en tenant compte des usages du commerce, un délai minimum de préavis et encadrer les conditions de rupture des relations commerciales, notamment en fonction de leur durée. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure. Lorsque la rupture de la relation commerciale résulte d'une mise en concurrence par enchères à distance, la durée minimale de préavis est double de celle résultant de l'application des dispositions du présent alinéa dans les cas où la durée du préavis initial est de moins de six mois, et d'au moins un an dans les autres cas ; (...)
L'article D. 442-3 du code de commerce dispose quant à lui que : Pour l'application de l'article L. 442-6, le siège et le ressort des juridictions commerciales compétentes en métropole et dans les départements d'outre-mer sont fixés conformément au tableau de l'annexe 4-2-1 du présent livre.
La cour d'appel compétente pour connaître des décisions rendues par ces juridictions est celle de Paris.
L'annexe 4-2-1 à laquelle cet article d'ordre public renvoie, donne compétence exclusive au tribunal de commerce de Paris pour les ressorts des cours d'appel de Bourges, Paris, Orléans, Saint-Denis de La Réunion et Versailles.
Ainsi, seuls sont compétents les tribunaux de commerce mentionnés à cette annexe 4-2-1, à l'exclusion de tout autre pour connaître des pratiques restrictives de concurrence mentionnées à l'article L. 442-6 du code de commerce, dispositions dérogatoires au droit commun des contrats, peu important que les appelants invoquent dans leurs écritures les dispositions générales de l'article 1134 au soutien de leurs prétentions à titre de fondement alternatif, dès lors qu'il est de principe que les lois spéciales dérogent aux lois générales et qu'il appartient au juge, par application de l'article 12 du code de procédure civile de donner ou restituer aux faits et actes litigieux leur exacte qualification, les parties n'ayant en l'espèce pas la libre disposition de leur droits, puisque les dispositions des articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce sont d'ordre public.
En tout état de cause, quel que soit le tribunal de commerce qui a statué sur ces pratiques restrictives de concurrence, toute autre cour d'appel que celle de Paris est désinvestie du pouvoir de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce et doit, au terme de l'article 125 du code de procédure civile, relever d'office la fin de non-recevoir qui en résulte.
L'appel de la société FRAB SERVICES sera donc déclaré irrecevable.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
DÉCLARE irrecevable l'appel de la société par actions simplifiée FRAB SERVICES,
CONDAMNE la société par actions simplifiée FRAB SERVICES aux dépens d'appel.
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
signé par Mme Dominique ROSENTHAL, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,