CA NOUMÉA (civ.), 3 septembre 2015
CERCLAB - DOCUMENT N° 5410
CA NOUMÉA (ch. civ.), 3 septembre 2015 : RG n° 14/00322
Publication : Jurica
Extrait : « Attendu qu'il résulte de l'article L. 137-2 du Code de la consommation que : « l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans » ; Que selon la jurisprudence, la notion juridique de « consommateur » s'applique à toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ; Qu'elle en déduit que d'un point de vue juridique, le consommateur doit être distingué du professionnel ; Qu'en effet, l'un et l'autre ne se voit pas appliquer le même régime juridique dans le cadre d'un contrat de vente de produit ou de prestations de service, le régime applicable au « consommateur » étant particulièrement protecteur ; Qu'ainsi, la qualité de « consommateur » permet de bénéficier des dispositions protectrices du Code de la consommation dans divers domaines tels que le délai de rétractation, la garantie de conformité, les clauses abusives, le démarchage à domicile et le crédit à la consommation ;
Attendu qu'en l'espèce, il résulte des pièces versées et des débats que le contrat de prêt a été conclu entre FORTIS BANQUE FRANCE, devenue la BNP Paribas, et la SCI JPL ; Que l'extrait K bis de la société JPL fait apparaître qu'il s'agit d'une société civile qui a pour activité l'acquisition, l'administration et la gestion par location ou autrement de tous immeubles et biens immobiliers et notamment d'un local commercial situé [adresse] ; Que ceci est confirmé par un courrier daté du 2 avril 2008 adressé à la Banque FORTIS, dans lequel M. X. écrit : « La SCI JPL a été créé afin d'acquérir et de rénover un bâtiment à usage de bureau et d'entrepôt pour la société SARL X. ÉLECTRICITÉ dont j'étais le gérant » ; Attendu qu'au vu de ces éléments, s'il ne fait aucun doute que la BNP Paribas, venant aux droits de FORTIS BANQUE FRANCE, prestataire de services bancaires, a bien la qualité de « professionnel », en revanche la société JPL, personne morale et non physique, ne peut revendiquer la qualité de « consommateur » et se prévaloir des dispositions protectrices du Code de la consommation et notamment de la prescription biennale visée à l'article L. 137-2 ;
Qu'il s'ensuit que c'est par une juste appréciation du fait et du droit que le premier juge a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale de l'article L. 137-2 du Code de la consommation ».
COUR D'APPEL DE NOUMÉA
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 3 SEPTEMBRE 2015
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 14/00322. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 juin 2014 par le Tribunal de première instance de NOUMÉA (R.G. n° 14/262)
APPELANTS :
M. X.
né le [date] à [ville], demeurant [adresse]
Mme Y. épouse X.
née le [date] à [ville], demeurant [adresse]
Tous deux représentés la SELARL GILLARDIN-AUPLAT, avocat au barreau de NOUMÉA
INTIMÉE :
LA BANQUE NATIONALE DE PARIS PARIBAS
représentée par son Directeur Général en exercice, demeurant [adresse] ; Représentée par la SELARL JURISCAL, avocat au barreau de NOUMEA
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 23 juillet 2015, en audience publique, devant la cour composée de : M. Yves ROLLAND, Président de Chambre, président, M. Christian MESIERE, Conseiller, M. François BILLON, Conseiller, qui en ont délibéré, sur le rapport de M. Christian MESIERE.
Greffier lors des débats : Mme Mikaela NIUMELE
ARRÊT : contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie, signé par M. Yves ROLLAND, président, et par Mme Cécile KNOCKAERT, adjointe administrative principale faisant fonction de greffier en application de l'article R. 123-14 du code de l'organisation judiciaire, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE :
Par un jugement rendu le 30 juin 2014 auquel il est renvoyé pour l'exposé de l'objet du litige, le rappel des faits et de la procédure, les prétentions et les moyens des parties, le Tribunal de Première Instance de NOUMÉA, statuant sur les demandes formées par la BANQUE NATIONALE DE PARIS - PARIBAS à l'encontre des époux X., aux fins d'obtenir :
* la validation de la saisie-arrêt pratiquée le 28 janvier 2014 entre les mains de divers établissements bancaires de NOUMÉA,
* l'autorisation de se faire payer sur les fonds détenus de sa créance en principal d'un montant de 10.192.482 FCFP,
* le paiement de la somme de 100.000 FCFP sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
* le bénéfice de l'exécution provisoire,
a :
* déclaré recevable l'action de la Banque Nationale de Paris Paribas,
* déclaré non fondée la demande présentée sur l'article 501 du Code de procédure civile,
* rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de la Banque Nationale de Paris Paribas,
* validé la saisie-arrêt pratiquée le 28 janvier 2014 par la Banque Nationale de Paris Paribas entre les mains de divers établissements bancaires de Nouméa, tiers saisis, au préjudice de X. et Y. épouse X. à hauteur de la somme de 9.823.339 FCFP soit 82.320 euros en principal, et intérêts,
* dit que les sommes dont les tiers saisis sont ou se reconnaîtront débiteurs à l'égard de X. et de Y. épouse X. seront versées à la Banque Nationale de Paris Paribas, en déduction ou jusqu'à concurrence du montant de cette créance en principal et intérêts ;
* dit que par ce versement les tiers saisis seront valablement libérés d'autant à l'égard du saisi,
* débouté X. et Y. épouse X. de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
* ordonné l'exécution provisoire de la décision,
* débouté la Banque Nationale de Paris Paribas de sa demande d'indemnité procédurale en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile,
* débouté X. et Y. épouse X. de leur demande d'indemnité procédurale en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile,
* condamné solidairement X. et Y. épouse X. aux dépens qui comprendront les frais de la procédure de saisie-arrêt (47.052 FCFP + 16.013 FCFP + 9.713 FCFP), le coût de la signification de la décision et le droit proportionnel dû à l'huissier de justice avec faculté de recouvrement direct au profit de l'avocat de la cause.
PROCÉDURE D'APPEL :
Par une requête enregistrée au greffe de la Cour le 11 août 2014, M. X. a déclaré relever appel de cette décision, qui ne semble pas avoir été signifiée.
Mme Y. a formé un appel incident.
Dans leur mémoire ampliatif d'appel déposé le 10 octobre 2014 et leur mémoire récapitulatif du 9 janvier 2015, M. X. et Mme Y. sollicitent l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et demandent à la Cour :
* de dire qu'en application des dispositions de l'article 502 du Code de procédure civil, la saisie arrêt est irrégulière,
* de constater que la BNP ne dispose d'aucun titre contre les époux X.,
* de constater que la BNP ne justifie pas même d'une créance certaine, liquide et exigible,
* de dire qu'en tout état de cause, la prescription extinctive est acquise et s'oppose à l'exécution d'une créance née d'un crédit immobilier de 2004,
* d'ordonner la mainlevée de la saisie,
* de condamner la BNP à leur payer la somme de 300.000 FCFP à titre de dommages-intérêts pour exécution abusive et celle de 300.000 FCFP au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction.
Ils font valoir pour l'essentiel :
- qu'en application des articles 501 et 502 du Code de procédure civile, l'Huissier ne peut exécuter que s'il est porteur de l'original du titre exécutoire,
- qu'en l'espèce, une simple photocopie de « la copie exécutoire » de l'acte notarié a été produite,
- qu'ils s'étaient portés caution de la SCI JPL envers la Banque FORTIS,
- qu'il est indiqué que la Banque FORTIS a été absorbée par la BNP en 2010,
- que la production d'un extrait de procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire de 2010 est insuffisante pour démontrer la finalisation de cette fusion et son opposabilité aux tiers,
- que le cautionnement ne profite à la personne morale absorbante que pour les dettes antérieures à la fusion, ce que la BNP ne démontre pas,
- que la BNP n'est pas créancière mais viendrait tout au plus aux droits du créancier FORTIS, et doit pour cela faire valoir ses droits pour obtenir un jugement définitif,
- que le prêt consenti se heurte à la forclusion d'une part s'agissant des échéances impayées depuis plus de deux années et d'autre part à la prescription biennale de l'article L. 137-2 du Code de la consommation applicable en Nouvelle Calédonie en ce qu'il régit les prescriptions entre professionnels et consommateurs,
- que la notion de « consommateur » s'appliquait aux sociétés civiles familiales,
- que le législateur Français a restreint la portée du code en réduisant dorénavant la notion de consommateur à la seule personne physique (loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 - article 3),
- que la Nouvelle Calédonie, seule compétente actuellement en matière civile et en droit de la consommation, n'a pas pris de telles dispositions législatives,
- que le principe demeure donc applicable, le consommateur bénéficie de la protection de l'article L. 137-2 du Code de la consommation et donc de la prescription biennale,
- qu'en toute hypothèse, le contrat relève de la prescription quinquennale attachée aux contrats à exécution successive,
- que le décompte produit par la BNP fait état d'un impayé de 52.911,72 euros au 10 février 2008,
- qu'elle précise que le prêt est devenu exigible au mois de mars 2008,
- que dans ces conditions, l'intégralité des clauses du contrat (échéances, capital) a été atteinte par la prescription en mars 2013,
- que la BNP échoue à démontrer l'existence d'une cause de suspension ou d'une interruption de celle-ci.
Par conclusions récapitulatives du 23 décembre 2014, la BANQUE NATIONALE DE PARIS demande à la Cour :
* de constater qu'elle dispose d'un titre exécutoire lui permettant de procéder à une saisie-arrêt en application des dispositions de l'article 547 du Code de procédure civile,
* de dire que le contrat de prêt du 10 juin 2004, n'est pas soumis au droit de la consommation,
* de dire que la créance de la BNP n'est pas prescrite,
* de constater qu'elle est créancière d'une somme de 86.385,64 euros sur Mme X. et M. X.,
* de valider en conséquence la saisie arrêt à hauteur de 86.385,64 euros soit 10.308.549 FCFP,
* de condamner solidairement Mme X. et M. X. à lui payer la somme de 100.000 FCFP au titre des frais irrépétibles de première instance et celle de 240.000 FCFP au titre des frais irrépétibles d'appel, ainsi qu'aux dépens avec distraction.
Elle fait valoir pour l'essentiel :
- que le 10 juin 2004, la société civile JPL a obtenu de la Banque FORTIS une convention de crédit d'un montant de 68.600 euros, établie par notaire et signée par M. X. en sa qualité de gérant,
- qu'à ce stade, ce n'était pas une SCI mais une société civile à vocation commerciale comme le montre l'extrait Kbis, à savoir la gestion d'un local commercial situé à [adresse],
- que Y. et X. se sont portés caution solidaire de ce crédit,
- qu'aux termes de l'acte notarié, constituant un titre exécutoire, ce crédit était destiné à financer l'acquisition de locaux professionnels (bureau et entrepôt de la SARL X. Electricité),
- qu'il en résulte que ce crédit, qui n'a pas été soumis par les parties au droit de la consommation, ne saurait être concerné par les dispositions de l'article L. 137-2 du Code de la consommation,
- que le contrat de prêt du 10 juin 2004 a été conclu entre deux contractants professionnels et relève des règles applicables en matière de contrat commercial,
- que s'agissant d'une créance reconnue par un titre exécutoire, la prescription n'est admise que par un délai d'inaction de dix années,
- qu'en l'espèce, la saisie-arrêt porte la date du 28 janvier 2014,
- qu'en outre, la prescription a été interrompue par un versement réalisé par les appelants le 3 juin 2009,
- que la BNP justifie venir aux droits de la Banque FORTIS et de sa créance actualisée à 86.385,64 euros à la date du 11 avril 2013,
- que quand bien même la saisie serait limitée au montant en principal de chacun des actes de cautionnement, cette validation à hauteur de 82.320 euros serait suffisante pour faire droit à ses demandes sachant que les sommes saisies sont d'un montant bien inférieur,
- que Y. et X. ne contestent pas la réalité du titre exécutoire qui fonde sa créance,
- qu'en cas de litige, le juge peut ordonner la présentation d'un original,
- que la jurisprudence relative à la validité de la caution en cas de fusion/absorption citée par les appelants n'est plus d'actualité,
- que désormais, le cautionnement est, sauf disposition contraire, transmis de plein droit à la société absorbante.
Les ordonnances de clôture et de fixation de la date d'audience ont été rendues le 1er avril 2015.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
1) Sur les demandes présentées par la BNP PARIBAS :
A) Sur la qualité à agir de la Banque Nationale de Paris / Paribas :
Attendu qu'en première instance, la requérante a produit l'extrait du procès-verbal de l'assemblée générale mixte des actionnaires de FORTIS BANQUE FRANCE du 11 mai 2010, dont sa 7e résolution (page 45) :
* approuve dans toutes ses dispositions le projet de fusion par lequel FORTIS BANQUE FRANCE apporte à titre de fusion à BNP Paribas, la totalité de son actif moyennant la prise en charge par BNP Paribas de la totalité de son passif, avec effet rétroactif au 1er janvier 2010,
* décide qu'en conséquence de ce qui précède que FORTIS BANQUE FRANCE se trouvera dissoute de plein droit et sans liquidation, BNP Paribas lui étant purement et simplement substituée dans l'ensemble de ses droits et obligations ;
Qu'en cause d'appel, la BNP Paribas a produit :
- l'avis de fusion et d'augmentation de capital de la BNP Paribas publié au Bulletin des Annonces Légales Obligatoires (numéro 1002459),
- l'avis de dissolution de FORTIS BANQUE FRANCE publié au Bulletin des Annonces Légales Obligatoires (numéro 1002460),
- l'annonce de la dissolution de FORTIS BANQUE FRANCE publié dans l'édition de la Gazette du Palais / Journal spécial des sociétés des 16, 17 et 18 mai 2010 ;
Que cette publication mentionne, d'une part, les décisions prises par l'assemblée générale mixte des actionnaires de FORTIS BANQUE FRANCE du 11 mai 2010 (approbation du projet de fusion et dissolution de plein droit sans liquidation) et d'autre part, les décisions prises par l'assemblée générale mixte des actionnaires de BNP Paribas du 12 mai 2010 (approbation du projet de fusion et augmentation corrélative de son capital) ;
Attendu qu'au vu de ces éléments, il ne peut être sérieusement contesté que la BNP Paribas est devenue aux lieu et place de FORTIS BANQUE FRANCE, le cocontractant et le créancier de l'emprunteur, la SCI JPL, ainsi que de M. X. et de Mme Y. (épouse ou ex-épouse X.) qui se sont portés cautions solidaires du crédit en vertu de l'acte de prêt notarié en date du 10 juin 2004 ;
Qu'il s'ensuit que c'est par une juste appréciation du fait et du droit que le premier juge a déclaré recevable l'action de la BNP Paribas ;
Qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris sur ce point ;
B) Sur la validité de la procédure de saisie arrêt :
Attendu que les appelants soutiennent que la procédure est irrégulière, au motif que la saisie arrêt a été réalisée avec une simple photocopie de la copie exécutoire de l'acte notarié alors que les articles 501 et 502 du Code de procédure civile prévoient que l'Huissier ne peut exécuter que s'il est porteur de l'original du titre exécutoire ;
Qu'aux termes de l'article 501 du Code de procédure civile le jugement est exécutoire, sous les conditions qui suivent, à partir du moment où il passe en force de chose jugée à moins que le débiteur ne bénéficie d'un délai de grâce ou le créancier de l'exécution provisoire ;
Qu'aux termes de l'article 502 du même code, nul jugement, nul acte ne peut être mis à exécution que sur présentation d'une expédition revêtue de la formule exécutoire, à moins que la loi n'en dispose autrement ;
Attendu que la requérante a produit la « copie exécutoire » de l'acte de vente passée entre la SARL XALDUN et la SCI JPL établi le 10 juin 2004 en l'étude de la SCP Office Notarial LARCHER/JAUREGUI/SARRAILH, Notaires à BAYONNE (64100) ;
Que ce document est revêtu de la formule exécutoire « En conséquence, la République Française mande et ordonne à tous huissiers de justice sur ce requis de mettre les présentes à exécution », suivie des mentions : Pour valoir titre exécutoire COPIE EXÉCUTOIRE UNIQUE ;
Qu'au vu de ces éléments, il apparaît que contrairement à ce que soutiennent les appelants, l'article 502 susvisé ne fait pas obligation à l'huissier d'être porteur de l'original du titre exécutoire pour diligenter une procédure de saisie-arrêt mais de présenter une expédition revêtue de la formule exécutoire, ce qui a été fait dans le cas présent à l'aide de la « copie exécutoire unique » délivrée par le Notaire à FORTIS BANQUE FRANCE ;
Attendu qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que ce moyen était inopérant et a déclaré cette demande non fondée ;
C) Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action :
Attendu que les appelants soutiennent que le contrat de prêt se heurte à la forclusion, d'une part, en raison des échéances impayées depuis plus de deux années, et d'autre part, à la prescription biennale de l'article L. 137-2 du Code de la consommation tel qu'applicable sur le territoire de la Nouvelle Calédonie en ce qu'il régit les prescriptions entre professionnels et consommateurs ;
Qu'ils soutiennent également que le contrat de prêt relève de la prescription quinquennale attachée aux contrats à exécution successive, que le prêt est devenu exigible au mois de mars 2008 à la suite d'un impayé de 52.911,72 euros à la date du 10 février 2008 et que dès lors, l'intégralité des clauses du contrat (échéances, capital) a été atteinte par la prescription au mois de mars 2013 ;
Que la BNP Paribas soutient que sa créance ayant été reconnue par un titre exécutoire, la prescription n'est admise que par un délai d'inaction de dix années, qu'en outre, la prescription a été interrompue par un versement effectué le 3 juin 2009 et que la saisie-arrêt porte la date du 28 janvier 2014 ;
a) Sur la prescription biennale :
Attendu qu'il résulte de l'article L. 137-2 du Code de la consommation que : « l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans » ;
Que selon la jurisprudence, la notion juridique de « consommateur » s'applique à toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ;
Qu'elle en déduit que d'un point de vue juridique, le consommateur doit être distingué du professionnel ;
Qu'en effet, l'un et l'autre ne se voit pas appliquer le même régime juridique dans le cadre d'un contrat de vente de produit ou de prestations de service, le régime applicable au « consommateur » étant particulièrement protecteur ;
Qu'ainsi, la qualité de « consommateur » permet de bénéficier des dispositions protectrices du Code de la consommation dans divers domaines tels que le délai de rétractation, la garantie de conformité, les clauses abusives, le démarchage à domicile et le crédit à la consommation ;
Attendu qu'en l'espèce, il résulte des pièces versées et des débats que le contrat de prêt a été conclu entre FORTIS BANQUE FRANCE, devenue la BNP Paribas, et la SCI JPL ;
Que l'extrait K bis de la société JPL fait apparaître qu'il s'agit d'une société civile qui a pour activité l'acquisition, l'administration et la gestion par location ou autrement de tous immeubles et biens immobiliers et notamment d'un local commercial situé [adresse] ;
Que ceci est confirmé par un courrier daté du 2 avril 2008 adressé à la Banque FORTIS, dans lequel M. X. écrit : « La SCI JPL a été créé afin d'acquérir et de rénover un bâtiment à usage de bureau et d'entrepôt pour la société SARL X. ÉLECTRICITÉ dont j'étais le gérant » ;
Attendu qu'au vu de ces éléments, s'il ne fait aucun doute que la BNP Paribas, venant aux droits de FORTIS BANQUE FRANCE, prestataire de services bancaires, a bien la qualité de « professionnel », en revanche la société JPL, personne morale et non physique, ne peut revendiquer la qualité de « consommateur » et se prévaloir des dispositions protectrices du Code de la consommation et notamment de la prescription biennale visée à l'article L. 137-2 ;
Qu'il s'ensuit que c'est par une juste appréciation du fait et du droit que le premier juge a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale de l'article L. 137-2 du Code de la consommation ;
Qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris sur ce point ;
b) sur la prescription quinquennale ou décennale :
Attendu qu'aux termes de l'article 2219 du Code civil, la prescription extinctive est un mode d'extinction d'un droit résultant de l'inaction de son titulaire pendant un certain temps ;
Qu'aux termes de l'article 2224 du Code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ;
Qu'en présence d'une créance constatée dans un acte authentique, la jurisprudence considère que la durée de la prescription est déterminée par la nature de la créance et la circonstance que celle-ci soit constatée par un acte authentique revêtu de la formule exécutoire n'a pas pour effet de modifier cette durée ;
Que l'action engagée par la BNP Paribas se place donc sous le régime de la prescription quinquennale ;
Que la banque fait valoir que la prescription a été interrompue en raison d'un règlement effectué par les époux X. le 3 juin 2009 ;
Que l'existence de ce paiement n'est pas contestée par les appelants ;
Qu'aux termes de l'article 2240 du Code civil, la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription ;
Qu'il en va ainsi du paiement fait au créancier par le débiteur lui-même ou par son mandataire ;
Que cette interruption fait courir, à compter de sa date, un nouveau délai de prescription ;
Qu'en l'espèce, le nouveau délai de la prescription quinquennale courait donc jusqu'au mois de juin 2014 ;
Que la saisie arrêt, diligentée par la BNP Paribas à l'encontre de M. X. et de Mme Y., a été réalisée le 28 janvier 2014 ;
Que la procédure aux fins de validation de cette saisie arrêt a été enrôlée au greffe du Tribunal de Première Instance le 19 février 2014, l'audience étant fixée au 24 février 2014 ;
Attendu qu'il s'ensuit que contrairement à ce que soutiennent les appelants, la prescription quinquennale n'est pas acquise et l'action doit être déclarée recevable ;
D) Sur la créance de la BNP Paribas :
Attendu qu'il résulte des pièces versées et des débats, et notamment de l'acte authentique du 10 juin 2004, que la Banque FORTIS a accordé un prêt de 68.600 euros à la SCI JPL, remboursable sur une durée de 12 ans, destiné à financer l'acquisition de locaux professionnels situés à [ville T.] ;
Que M. X. et Mme Y. épouse X. ont souscrit un engagement de caution solidaire de l'emprunteur envers la banque dans la limite de 82.320 euros en principal, plus intérêts, intérêts de retard, frais et accessoires ;
Que les cautions ont expressément renoncé au bénéfice de discussion et de division ;
Que la BNP Paribas, venant aux droits de la Banque FORTIS, fait état d'une créance de 86.385,64 euros, arrêtée à la date du 11 avril 2013 ;
Que les cautions ne peuvent être tenues au-delà de leur engagement, soit en l'espèce 82.320 euros ou 9.823.389 FCFP ;
Que le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point ;
E) Sur la validité de la saisie arrêt :
Attendu qu'il résulte des pièces versées et des débats, et notamment de la copie exécutoire de l'acte authentique du 10 juin 2004 valant titre fondant une procédure de saisie-arrêt sur la base des dispositions de l'article 557 du Code de procédure civile ancien, de l'engagement de caution, du décompte de la créance arrêtée au 11 avril 2013 que M. X. et Mme Y. sont solidairement redevables envers la BNP Paribas d'une somme en principal, intérêts, intérêts de retard, frais et accessoires de 82.320 euros soit 9.823.339 FCFP en exécution de leur engagement de caution solidaire de la SCI JPL ;
Que la saisie arrêt est régulière au fond et a été dénoncée et contre dénoncée dans les délais légaux ;
Qu'au vu de ces éléments, c'est par une juste appréciation du fait et du droit que le premier juge a validé la saisie arrêt pratiquée 28 janvier 2014 à hauteur de la somme de 82.320 euros soit 9.823.339 FCFP ;
Attendu qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris sur ce point ;
2) Sur la demande aux fins de dommages et intérêts pour procédure abusive présentée par M. X. et Mme Y. :
Attendu que M. X. et Mme Y. font valoir que la procédure engagée par la BNP Paribas présente un caractère abusif et doit être sanctionnée ;
Attendu que l'usage d'un droit dégénère en abus pouvant donner lieu à dommages-intérêts dès lors qu'il est établi que celui qui a fait usage de ce droit l'a fait de mauvaise foi ;
Que tel n'est pas le cas en l'espèce, M. X. et Mme Y. ne rapportant pas la preuve, qui leur incombe, que l'usage par la BNP Paribas de son droit d'engager une action en justice ait dégénéré en abus ;
Que c'est donc à juste titre que le premier juge les a déboutés de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Attendu qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris sur ce point également, ce qui revient à le confirmer en toutes ses dispositions ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Statuant par arrêt contradictoire déposé au greffe ;
Confirme le jugement rendu le 30 juin 2014 par le Tribunal de Première Instance de NOUMÉA sauf en ce qu'il a débouté la Banque Nationale de Paris Paribas de sa demande d'indemnité procédurale en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Infirme ledit jugement sur ce point ;
Statuant à nouveau dans cette limite :
Vu les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, condamne « in solidum » M. X. et Mme Y. à payer à la BNP Paribas la somme de 200.000 FCFP au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
Y ajoutant :
Rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription quinquennale de l'action engagée par la BNP Paribas ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires comme mal fondées ;
Condamne « in solidum » M. X. et Mme Y. aux entiers dépens de la procédure d'appel, avec distraction au profit de la SELARL d'avocats JURISCAL, sur ses offres de droit ;
Le greffier, Le président,