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CA RIOM (3e ch. civ. et com.), 13 janvier 2016

Nature : Décision
Titre : CA RIOM (3e ch. civ. et com.), 13 janvier 2016
Pays : France
Juridiction : Riom (CA), 3e ch. civ. et com.
Demande : 15/00410
Date : 13/01/2016
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 20/02/2015
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CERCLAB - DOCUMENT N° 5470

CA RIOM (3e ch. civ. et com.), 13 janvier 2016 : RG n° 15/00410

Publication : Jurica

 

Extrait : « C'est de façon pertinente que les premiers juges ont relevé la contradiction existant entre, d'une part, les articles 15 et 16 relatives à la responsabilité et aux délais s'appliquant aux prestations de l'AGENCE SEPIA et la nature des garanties de conformité prévues par l'article 18, d'autre part, ce qui leur a permis de considérer que cette société n'était pas tenue d'une simple obligation de moyens.

Par ailleurs, c'est avec raison, qu'en fonction de la nature de la prestation promise et du caractère déterminant des délais pour la mise en production du site exploité par la société EDEALCLIC ils ont considéré que les dispositions l'article 16 de ses conditions générales, qui avait pour effet de faire échapper l'AGENCE SEPIA à toute responsabilité et à toute pénalité au cas de retard de livraison, devaient être réputées non-écrites. »

 

COUR D’APPEL DE RIOM

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 13 JANVIER 2016

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R. G. n° 15/00410. Sur APPEL d'une décision rendue le 22 janvier 2015 par le Tribunal de commerce de Clermont-Ferrrand (R.G. n° 2013 008038 - 2014 004016 - 2014 008150).

 

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré : M. François RIFFAUD, Président, M. Philippe JUILLARD, Conseiller, M. Cédric BOCHEREAU, Vice-Président placé auprès de Mme la Première Présidente.

En présence de : Mme Carine CESCHIN, Greffière, lors de l'appel des causes et du prononcé

 

ENTRE :

APPELANT :

SA AXA FRANCE IARD

RCS de Nanterre N° XXX, Représentants : Maître Jean-Michel DE ROCQUIGNY de la SCP COLLET DE ROCQUIGNY CHANTELOT ROMENVILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND - Maître Barbara GUTTON PERRIN, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

 

ET :

INTIMÉS :

Maître Raphaël PETAVY es-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL AGENCE SEPIA (RCS de Clermont-Ferrand N° YYY), Représentant : Maître Frédéric FRANCK de la SELARL JURIDOME, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

SARL EDEALCLIC

RCS de Clermont-Ferrand N° ZZZ, Représentant : Maître Marie-Françoise VILLATEL, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

 

DÉBATS : A l'audience publique du 5 novembre 2015 M. Riffaud a fait le rapport oral de l'affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l'article 785 du CPC. La Cour a mis l'affaire en délibéré au 13 janvier 2016.

ARRÊT : Prononcé publiquement le 13 janvier 2016, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; Signé par M. François Riffaud, président, et par Mme Carine Ceschin, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Désireux de mettre en ligne un site permettant de réaliser des ventes aux enchères au centime près, MM A. et B. ont immatriculé au registre du commerce et des sociétés de CLERMONT-FERRAND une SARL dénommée EDEALCLIC dont ils sont les cogérants.

La réalisation de site réclamant des compétences techniques dont ils ne disposaient pas, ils ont fait appel à la société AGENCE SEPIA, qui, suivant un devis du 7 décembre 2012, leur a proposé de mettre en place le site et s'est engagée à le livrer en état de fonctionnement le 28 juin 2013 moyennant un honoraire de 16.146,00 euros TTC.

Ce devis a été accepté par la SARL EDEALCLIC le 25 mars 2013, un premier acompte ayant été versé de façon anticipée le 28 février 2013.

L'AGENCE SEPIA a réalisé personnellement la partie graphique du projet, mais a confié la partie relative aux enchères, techniquement plus complexe, à M. Y. qui est intervenu en qualité de sous-traitant.

A la date prévue pour sa livraison, il est apparu que le site présentait trop de dysfonctionnements pour être utilisable en l'état, ce qui a conduit la société EDEALCLIC à accepter le report de sa livraison au 27 juillet 2013.

A cette date, la SARL EDEALCLIC, prétend que le site n'était toujours pas en état de marche, ce qui a contesté par l'AGENCE SEPIA qui a fait dresser le 30 juillet 2013 un constat d'huissier, démontrant, selon elle, l'inverse.

La SARL EDEALCLIC a consulté la société SCOPART APPUY CREATEURS pour évaluer sa capacité à remédier aux dysfonctionnements dénoncés et cette dernière lui a fait savoir, par un courrier du 22 août 2013 que le travail effectué par la SARL AGENCE SEPIA était inutilisable en l'état et qu'il fallait reconstruire le site.

La SARL EDEALCLIC, considérant que la responsabilité de l'AGENCE SEPIA était engagée, a poursuivi la résiliation du contrat devant le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand sollicitant paiement d'une somme de 222.460,00 euros au titre de son préjudice financier ainsi que d'une somme de 35 000,00 euros en réparation de son préjudice moral. Elle réclamait, en outre, la publication sous astreinte de la décision à intervenir sur la page d'accueil du site internet de la partie adverse.

La compagnie AXA FRANCE, en sa qualité d'assureur de responsabilité civile de l'AGENCE SEPIA est intervenue volontairement à l'instance.

Par jugement rendu le 12 décembre 2013, la juridiction consulaire a fait droit à la demande d'expertise qui lui était présentée par l'AGENCE SEPIA et la compagnie AXA FRANCE et a commis pour y procéder M. Z.. Les opérations d'expertise ont, par la suite, été déclarées communes à la société SCOPART et à M. Y. en leur qualité de sous-traitants de l'AGENCE SEPIA.

Le 23 juillet 2014, le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a ouvert la liquidation judiciaire de l'AGENCE SEPIA et a désigné Maître Raphaël PETAVY en qualité de liquidateur. Ce mandataire judiciaire a été appelé en la cause à la demande de la société EDEALCLIC.

Par jugement rendu le 22 janvier 2015, le tribunal de commerce a :

- dit que M. Y. et la SARL SCOPART APPUY CREATEURS sont mis hors de cause ;

- fixé la créance de la SARL EDEALCLIC au passif de la procédure de la liquidation judiciaire de l'AGENCE SEPIA à la somme totale de 93.369,00 euros, dont 33.369,00 euros en réparation du préjudice direct, 40. 000,00 euros en réparation de la perte d'une chance et 20.000,00 euros au titre du préjudice moral ;

- dit que la compagnie AXA FRANCE doit garantir l'AGENCE SEPIA de toutes condamnations prononcées à son égard dans le cadre du présent jugement ;

- en conséquence, condamné la compagnie AXA FRANCE à payer à la société EDEALCLIC la somme totale de 93.369,00 euros ;

- condamné in solidum Maître Raphaël PETAVY, ès qualités et la compagnie AXA FRANCE, à payer à la société EDEALCLIC la somme de 8.000 euros au titre de 1'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté toutes les parties du surplus de leurs demandes ;

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement selon les modalités suivantes : 45.000,00 euros immédiatement ainsi que l'article 700 du code de procédure civile et le solde entre les mains du bâtonnier constitué séquestre jusqu'à épuisement des voies de recours ;

- condamné in solidum Maître PETAVY, ès qualités et la compagnie AXA FRANCE, aux dépens de l'instance ;

- dit qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la décision à. intervenir et qu'en cas d'exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire en application des dispositions de l'article 10 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996 devront être supportées in solidum par Maître Raphaël PETAVY ès qualités et la compagnie AXA FRANCE, en sus de l'indemnité mise à leur charge sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,

 

Suivant déclaration reçue au greffe de la cour le 20 février 2015, la société AXA FRANCE IARD a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 17 septembre 2015 au moyen du RPVA, elle demande à la cour de réformer en toutes ses dispositions le jugement entrepris en ce qu'il l'a condamnée à garantir l'AGENCE SEPIA de toutes condamnations prononcées à son égard et l'a condamnée à payer à la société EDEALCLIC la somme de 93.369,00 euros.

Elle demande encore que cette société soit déboutée de toutes ses réclamations financières excessives et infondées dirigées à son encontre et qu'elle soit condamnée à lui payer une indemnité de 3.000,00 euros au titre de ses frais de procès.

Elle fait valoir que suivant le contrat d'assurance souscrit par l'AGENCE SEPIA le 1er janvier 2013 au titre de son activité « agence de publicité et communication » sont exclus s'agissant de la catégorie des dommages immatériels non consécutifs « les conséquences pécuniaires d'un défaut ou d'une insuffisance de performance ou de rendement par rapport aux spécifications techniques définies au marché lorsque cette insuffisance ou ce défaut résulte :

- soit de l'absence de tests ou essais lors de la livraison du produit ou alors que ceux-ci n'ont pas été jugés satisfaisants,

- soit de l'insuffisance des moyens humains ou techniques mis en œuvre par l'assuré pour remplir ses engagements,

- soit de l'impossibilité d'atteindre la performance ou le rendement promis en raison de l'état des connaissances techniques et scientifiques acquises lors de la signature du marché par l'assuré ».

Le rapport d'expertise judiciaire démontrant les insuffisances de son assurée et notamment l'absence de tests par manque de temps, l'absence de développement certaines fonctionnalités ou des défauts d'interprétation de certaines d'entre elles, elle en tire pour conclusions que le produit n'ayant pas été livré au sens strict de ce terme ses garanties ne sont pas mobilisables.

Elle soutient par ailleurs que la clause d'exonération mentionnée dans la police respecte les prescriptions de l'article L. 112-4 du code des assurances pour y avoir été portée en caractère gras et dans une police de caractères identique aux autres mentions du contrat.

Elle ajoute que le rapport d'expertise montre que le seul préjudice réellement subi par la société EDEALCLIC pourrait être évalué à la somme de 37. 950,00 euros correspondant aux frais qu'elle a dû exposer en pure perte et que selon le technicien une part de responsabilité, estimée entre 15 à 20 % doit être mise à sa charge du fait de son comportement.

Elle indique enfin que la preuve des autres préjudices invoqués par la société EDEALCLIC n'est pas rapportée.

 

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 16 juillet 2015 au moyen du RPVA, Maître PETAVY, ès qualités de liquidateur de l'AGENCE SEPIA demande à la cour de :

- dire l'appel de la société AXA FRANCE recevable mais mal fondée et de la débouter de l'ensemble de ses demandes ;

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré l'AGENCE SEPIA responsable en totalité du préjudice subi et de dire qu'un partage de responsabilité doit s'appliquer et faire peser sur la société EDEALCLIC a minima 15 % des sommes objet de la condamnation ;

- infirmer l'allocation d'une somme à la société EDEALCLIC au titre de la perte de chance et d'une indemnité au titre du préjudice moral ;

- confirmer, en revanche, ledit jugement en qu'il a dit que la compagnie AXA devait garantir l'AGENCE SEPIA de toutes condamnations prononcées à son égard et a condamné ladite compagnie payer à la Société EDEALCLIC la somme qui sera mise à la charge de l'AGENCE SEPIA ;

- condamner la société AXA FRANCE à lui payer, ès qualités, la somme de 2.000,00 euros au titre de ses frais de procès ;

- condamner la même aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL JURIDÔME en application de l'article 699 du code de procédure civile ;

- débouter la société EDEALCLIC de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait plaider qu'il résulte des obligations énoncées dans l'article 16 du contrat conclu avec la société EDEALCLIC que c'est à tort que la juridiction consulaire a considéré qu'elle était tenue d'une obligation de résultat et, qu'en particulier, comme l'a rappelé l'expert, il est toujours nécessaire de prévoir un délai supplémentaire pour finaliser la prestation et résoudre les difficultés qui n'apparaissent qu'à l'occasion de la mise en ligne.

Il soutient, par ailleurs, que les indemnités allouées au titre d'un préjudice indirect et d'un préjudice moral sont dénuées de fondement.

S'agissant de la garantie de la société AXA FRANCE, il invoque les dispositions de l'article L. 113 al. 1er du code des assurances et soutient qu'il résulte de la jurisprudence que lorsqu'une clause d'exclusion a pour effet d'exclure tout sinistre se rapportant à l'activité assurée les juridictions peuvent refuser d'en faire application.

Il ajoute, qu'en l'espèce, le dommage invoqué constitue un dommage immatériel non consécutif et que les exclusions énoncées dans la police ne peuvent s'appliquer dès lors que l'on ne se trouve pas en présence d'une insuffisance de performance mais de dysfonctionnements qui, empêchant l'utilisation du site pour procéder à des enchères, proviennent de l'absence d'un temps suffisant pour peaufiner le système et non de l'inexécution d'une prestation ou de l'absence de livraison du produit.

Il prétend encore que la société AXA FRANCE ne peut se prévaloir de la clause d'exclusion énoncée page 10 de la police dès lors qu'elle vise à exclure toute prise en charge du sinistre pour concerner tous les dommages résultant de la non-obtention du résultat auquel l'assuré s'est engagé et que cette compagnie est tenue par la dérogation visant l'indemnisation des dommages immatériels non consécutifs résultant d'un retard dans la fourniture de produits ou dans l'exécution de la prestation ayant pour origine une erreur dans l'exécution de la prestation.

Aux termes de ses écritures notifiées le 3 juillet 2015 au moyen du RPVA, la société EDEALCLIC demande à la cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de :

- dire qu'elle a une créance globale à l'encontre de l'AGENCE SEPIA de 93.369,00 euros dont 33.369,00 euros en réparation du préjudice direct, 40.000,00 euros en réparation de la perte de chance et 20.000,00 euros au titre du préjudice moral et de fixer la somme précitée au passif de la liquidation judiciaire de cette société ;

- condamner la société AXA à garantir l'AGENCE SEPIA des condamnations mises à la charge de sa liquidation judiciaire ;

- débouter Maître PETAVY, ès qualités et la société AXA France de toutes leurs demandes contraires ;

- condamner in solidum Maître PETAVY ès qualités et la société AXA France aux entiers dépens, dont distraction au bénéfice de Maître VILLATEL, avocat et à lui payer la somme de 3.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en complément de l'indemnité allouée à ce titre en première instance ;

- dire qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la décision à intervenir et qu'en cas d'exécution par voie extra judiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire en application des dispositions de l'article 10 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996, devront être supportées in solidum par Maître Raphaël PETAVY ès qualités et la société AXA France en sus de l'indemnité mise à leur charge sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.

Elle fait plaider que dans le cas de la réalisation d'un site internet la jurisprudence considère que le prestataire est tenu d'une obligation de résultat.

Elle considère que les clauses figurant aux articles 15 et 16 des conditions générales de l'agence SEPIA doivent être réputées non écrites dès lors qu'elles créent un déséquilibre manifeste au profit de celle-ci car cela signifierait qu'elle aurait dû accepter un retard de livraison allant jusqu'à trois mois et elle entend, à ce titre, se prévaloir des dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation en invoquant sa qualité de profane en matière informatique.

Elle soutient encore que les clauses limitatives de responsabilité contenues au contrat sont non-écrites pour contredire la portée des obligations essentielles des obligations contractées par l'agence SEPIA et elle reproche à sa cocontractante un comportement dolosif pour lui avoir laissé croire qu'elle pouvait, sans problème, réaliser une réplique du site oopad.com alors même qu'en raison de son incapacité elle devait avoir recours à des sous-traitants.

Elle critique le rapport d'expertise judiciaire et reproche au technicien de n'avoir apporté aucune ébauche de solution alors qu'elle considère que cela entrait dans sa mission et soutient que sa propre responsabilité n'est nullement en cause dès lors qu'elle a fait preuve de professionnalisme et qu'elle a examiné toutes les possibilités qui auraient permis à l'agence SEPIA de finaliser le projet.

S'agissant de son préjudice, elle fait valoir que son préjudice matériel est parfaitement justifié et que s'agissant de son préjudice indirect causé par l'absence de livraison du site, une perte certaine d'une chance, même faible, présente un caractère indemnisable.

Elle met en avant la détermination et le professionnalisme des porteurs du projet et le fait qu'ils avaient investi l'intégralité des indemnités perçues de Pôle Emploi et leurs économies dans cette affaire.

Elle ajoute que la jurisprudence a consacré le principe de la réparation du préjudice moral d'une société causé par la désorganisation ou l'atteinte à son image.

Elle ajoute, à ce titre, qu'alors que son site a été référencé et qu'il n'a pu fonctionner, elle a dû subir les critiques des internautes et potentiels clients qui n'ont pas hésité à parler d'escroquerie à son sujet.

S'agissant, enfin, des contestations, soulevées par l'appelante principale, elle reproche à la compagnie AXA de se prévaloir d'un avenant au contrat, signé tardivement le 24 juin 2013, soit quatre jours avant la livraison du site, à un moment où l'agence SEPIA savait qu'elle ne pourrait honorer ses obligations et elle évoque la possibilité d'une manœuvre de cet assureur pour contourner ses obligations.

Elle considère qu'il est constant que ses dommages doivent recevoir la qualification de dommages immatériels non consécutifs et qu'ils sont prévus par la police d'assurance en page 6 au titre d'un retard dans la fourniture de produits ou dans l'exécution de la prestation lorsqu'il a pour origine une erreur dans l'exécution de la prestation.

Elle rappelle que le non-respect de l'obligation essentielle d'un contrat met obstacle à la mise en 'uvre de la clause d'exonération de responsabilité qui le contredit et estime que le fait d'exclure les conséquences pécuniaires d'un défaut ou d'une insuffisance de performance tombe sous le coup de cette prohibition et que la compagnie AXA ne saurait valablement invoquer le montant des primes pour se soustraire à son obligation de garantie.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 octobre 2015.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la responsabilité de l'AGENCE SEPIA :

C'est de façon pertinente que les premiers juges ont relevé la contradiction existant entre, d'une part, les articles 15 et 16 relatives à la responsabilité et aux délais s'appliquant aux prestations de l'AGENCE SEPIA et la nature des garanties de conformité prévues par l'article 18, d'autre part, ce qui leur a permis de considérer que cette société n'était pas tenue d'une simple obligation de moyens.

Par ailleurs, c'est avec raison, qu'en fonction de la nature de la prestation promise et du caractère déterminant des délais pour la mise en production du site exploité par la société EDEALCLIC ils ont considéré que les dispositions l'article 16 de ses conditions générales, qui avait pour effet de faire échapper l'AGENCE SEPIA à toute responsabilité et à toute pénalité au cas de retard de livraison, devaient être réputées non-écrites.

C'est encore à bon escient qu'ils ont retenu que - les opérations d'expertise judiciaire montrant l'incapacité de cette société à livrer la prestation promise, même avec retard, en fonction des vices de conception qui l'affectait et du fait qu'elle avait manqué à son obligation d'information de sa cocontractante - l'AGENCE SEPIA avait failli à ses obligations.

Il convient d'y ajouter que la gravité de ces manquements à ses obligations contractuelles et leurs circonstances, la société EDEALCLIC ayant accepté un report de livraison, mettent obstacle à tout partage de responsabilité au motif que cette société n'aurait pas donné un temps suffisant à sa cocontractante pour mener à bien le projet.

La décision déférée sera donc confirmée en ce qu'elle a retenu l'entière responsabilité de l'AGENCE SEPIA.

 

Sur les dommages subis par la société EDEALCLIC :

Il convient, au préalable, de rappeler qu'ils ne se confondent en aucun cas avec les dommages qui ont pu être subis par ses cogérants, personnes physiques, qui ne sont pas présents à la procédure, de sorte que seuls les différents chefs de préjudice justifiés par la personne morale ont vocation à être réparés dans le cadre de la présente instance.

Le préjudice matériel subi par la personne morale et qui ne fait pas l'objet de contestation a été justement arrêté par la juridiction consulaire à la somme de 33.369,00 euros.

S'agissant du préjudice indirect, les premiers juges ont alloué à la société EDEALCLIC une indemnité de 40.000,00 euros au titre d'une perte de chance, en considérant que la perte d'une chance, même faible, présente un caractère indemnisable et en prenant la considération la motivation des dirigeants de l'entreprise et le fait qu'ils avaient réussi dans leur précédente carrière professionnelle.

Néanmoins, si le principe de l'indemnisation du préjudice économique, à raison d'une perte de chance dans le cadre de la mise en production du site, n'est pas sérieusement contestable, force est néanmoins de constater que MM A. et B., qui avaient auparavant exercé dans l'immobilier, n'avaient pas d'expérience dans le domaine du commerce électronique et que le concept des enchères en ligne n'était pas totalement novateur même s'il s'agissait de les exercer au centime près, de sorte que les chances de succès de ce concept restaient mesurées.

En fonction de ces constatations, la décision des premiers juges sera réformée et l'indemnité allouée de ce chef réduite à la somme de 10.000,00 euros.

S'agissant, de l'indemnisation d'un préjudice moral, il est effectif que l'atteinte à la réputation ou à l'image d'une entreprise présente un caractère réparable.

En l'espèce, les premiers juges ont alloué à la société EDEALCLIC une indemnité de 20.000,00 euros en retenant que l'intégrité et la compétence de ses dirigeants avait été mise en cause à raison de retards dont ils n'étaient pas responsables et qu'il leur faudrait du temps pour restaurer la confiance de leurs partenaires.

Il est effectif que le site avait été référencé et, qu'en fonction des délais qui s'attachent au fonctionnement de l'économie numérique, il ne peut fait grief aux dirigeants de la société EDEALCLIC d'avoir engagé la commercialisation de leur concept.

Toutefois, il y a lieu de prendre en considération la jeunesse de l'entreprise, le fait qu'elle n'avait encore développé aucun produit et qu'elle n'avait pas de ce fait acquis une véritable notoriété.

En fonction de ces considérations, la décision des premiers juges sera réformée et l'indemnité allouée limitée à 5.000,00 euros.

 

Sur la garantie de la société AXA France :

La société AXA FRANCE soutient que sa garantie ne serait pas acquise en invoquant la délimitation de l'objet du contrat et, en particulier, une clause d'exclusion relative à « la non-obtention du résultat auquel l'assuré se serait engagé au terme du cahier des charges ou de toute autre convention passée avec le client’ » et figurant page 10 des conditions particulières du contrat.

Il apparaît à l'examen de la police d'assurance et des demandes de la société EDEALCLIC que les différents chefs de préjudice invoqués par cette société consistent en des dommages immatériels non consécutifs tels que définis page 23 des conditions générales du contrat d'assurance qui a reçu effet le 1er janvier 2013 et qui a pour objet conformément au paragraphe 1.1 desdites conditions générales et dans les limites définies par elles et les conditions particulières de s'appliquer « à la responsabilité civile encourue par l'assuré du fait : [...] des prestations réalisées et/ou des produits vendus ».

Le dommage matériel y est, en effet, strictement défini comme constituant « la détérioration ou destruction d'une chose ou substance etc. » et le dommage immatériel non consécutif comme « tout dommage immatériel qui n'est pas la conséquence d'un dommage corporel ou matériel ».

L'examen des conditions particulières de la police montre que la compagnie d'assurance s'est notamment engagée à garantir l'activité de « création de site internet et de e-commerce ».

Les conditions générales de ce contrat précisent que, sous réserve des exclusions visées au titre 4, sont garantis « la responsabilité civile avant livraison des produits ou réception des travaux qui s'exerce du fait [...] d'une prestation ou de travaux » et « à la responsabilité civile après livraison des produits ou réception des travaux qui s'exerce en raison des dommages ayant pour origine » notamment : « une erreur de conception, un vice caché de fabrication, de montage, de matière, une malfaçon des travaux exécutés ».

En outre, les conditions générales de ce contrat (& 4.29) prévoient une clause d'exclusion de garantie en cas de retard.

Ainsi, que l'a souligné la juridiction consulaire, admettre la définition de l'objet de sa garantie telle que proposée par la société AXA FRANCE reviendrait, s'agissant de l'activité de création de site internet qu'elle a déclaré assurer, à vider le contrat d'assurance de toute substance dès lors que considérant qu'elle ne prend pas en charge les conséquences de l'inexécution de la prestation ou de la non-livraison de celle-ci, elle le priverait d'effet dans la quasi-totalité des hypothèses où la société de prestation de services informatique est susceptible de voir sa responsabilité engagée.

Surtout, il sera retenu que l'AGENCE SEPIA, qui s'était engagée à produire un site internet dans des délais déterminés et qui a fait dresser un constat en ce sens le 29 juillet 2013, a effectivement livré un site dont la défectuosité est mise en évidence par l'expertise judiciaire même si en raison des difficultés survenues entre les parties, il n'a pas été établi de procès-verbal de livraison.

Dès lors, ce site présentant des malfaçons dûment constatées, c'est en contradiction avec les conditions générales de sa police que la société AXA FRANCE vient se prévaloir d'une exclusion de garantie qui doit être écarté.

Le jugement déféré sera, en conséquence, confirmé en ce qu'il a retenu la garantie de l'assureur.

 

Sur les demandes annexes :

Il convient, pour les besoins de l'exécution du présent arrêt, immédiatement exécutoire, de dire que, dans la limite des condamnations prononcées, le séquestre désigné par le tribunal de commerce se libérera entre les mains de la société EDEALCLIC et que, s'il y a lieu, le surplus des sommes ainsi immobilisées sera restitué.

La société AXA FRANCE, qui succombe pour l'essentiel en son appel, supportera la charge des dépens d'appel, dont la distraction sera ordonnée au bénéfice de Maître VILLATEL, avocat.

Elle sera condamnée à payer à la société EDEALCLIC une indemnité complémentaire de 2 000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le surplus des demandes présentées par les parties au titre des dépens et des frais irrépétibles sera rejeté.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à la disposition des parties au greffe de la juridiction ;

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- mis hors de cause M. Y. et la SARL SCOPART APPUY CREATEURS,

- fixé la créance de la SARL EDEALCLIC au passif de la liquidation judiciaire de la SARL AGENCE SEPIA à la somme de 33 369,00 euros au titre du préjudice direct,

- condamné la société AXAFRANCE à garantir la SARL AGENCE SEPIA,

- condamné in solidum Maître PETAVY, ès qualités et la société AXA FRANCE à payer à la SARL EDEALCLIC une indemnité de 8.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- statué sur les dépens de première instance ;

L'infirmant pour le surplus,

Fixe la créance de la SARL EDEALCLIC au passif de la liquidation judiciaire de la SARL AGENCE SEPIA à la somme de 10.000,00 euros au titre du préjudice économique et à la somme de 5.000,00 euros au titre du préjudice moral ;

Condamne, en conséquence, la société AXAFRANCE à payer à la SARL EDEALCLIC une indemnité globale de 48.369,00 euros en réparation de son préjudice ;

Dit n'y avoir lieu à mettre d'avance à la charge de la liquidation judiciaire de la SARL AGENCE SEPIA et de la société AXA FRANCE les sommes retenues par l'huissier chargé de l'exécution au titre de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 ;

Y ajoutant,

Dit que pour les besoins de l'exécution du présent arrêt, M. le Bâtonnier de l'ordre des avocats de Clermont-Ferrand, constitué séquestre, se libérera, dans la limite des condamnations prononcées entre les mains de la SARL EDEALCLIC et que, s'il y a lieu, le surplus des sommes immobilisées sera restitué ;

Condamne la société AXA FRANCE aux dépens d'appel et à payer à la SARL EDEALCLIC une indemnité complémentaire de 2.000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier,                Le président,

C. Ceschin                 F. Riffaud