5758 - Code de la consommation - Régime de la protection - Association de consommateurs - Conditions - Absence de conditions préalables à l’action
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 5758 (10 juillet 2020)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - RÉGIME
ACTION D’UNE ASSOCIATION DE CONSOMMATEURS - CONDITIONS
ABSENCE DE CONDITIONS PRÉALABLES À L’ACTION
Existence d’une recommandation (non). L'existence d'une recommandation de la Commission des clauses abusives n'est pas une condition préalable à la suppression d’une clause abusive. TGI le Mans (1re ch.), 23 novembre 1993 : RG n° 92/00832 ; Cerclab n° 369 (association de consommateurs).
A. CONDITIONS LIÉES AUX CONSOMMATEURS
Protection des consommateurs tiers au contrat. La législation sur la consommation a pour objet de protéger le consommateur même si celui-ci n'est pas personnellement le cocontractant ; locataire et conducteur agréé dans un contrat de location. TGI Paris (4e ch. 1re sect.), 21 novembre 1990 : RG n° 21719/89 ; Cerclab n° 418 (location de voiture ; jugement examinant une clause concernant un conducteur agréé, non partie au contrat qui l’oblige solidairement).
Existence de mandats de consommateurs (non). L’action d’une association de consommateurs sur le fondement de l'ancien art. L. 421-7 [L. 621-9 nouveau] C. consom. n'exige pas de mandat écrit donné par le consommateur, contrairement à l’action fondée sur l’ancien art. L. 422-1 [L. 622-1 s. nouveaux] C. consom. CA Grenoble (1re ch. civ.), 1er octobre 2012 : RG n° 09/01314 ; Cerclab n° 3984, sur appel de TGI Bourgoin-Jallieu, 5 février 2009 : RG n° 07/205 ; Dnd. § L'action en justice d'une association agréée de défense des consommateurs tend exclusivement à la défense des intérêts collectifs d'un groupe économico-social, à l'exclusion de ceux propres à une ou plusieurs personnes physiques ou morales et l'association ne revendique que la défense d'intérêts collectifs, pour laquelle elle est habilitée à ester en justice en vertu de l’ancien art. L. 421-6 C. consom., à l'exclusion de la défense d'intérêts de personnes particulières, d'où il suit que l'argument de l'absence d'un mandat ad litem est dénué de fondement. CA Paris (pôle 5, ch. 6), 15 octobre 2010 : RG n° 07/21494 ; Cerclab n° 2989, confirmant TGI Paris (1re ch. sect. soc.), 6 novembre 2007 : RG n° 05/09745 ; jugt n° 7 ; Cerclab n° 4162.
Existence d’un contentieux préalable (non). L’action des organisations ayant un intérêt légitime à protéger les consommateurs (art. 7 directive) est indépendante à l'égard de tout conflit individuel concret. CJCE (5e ch.), 24 janvier 2002, Commission/République italienne : Aff. C-372/99 ; Cerclab n° 4406 ; D. 2002. AJ. 1065, obs. Chevrier (point n° 15) - CJUE (1re ch.), 26 avril 2012, Nemzeti Fogyasztóvédelmi Hatóság/ Invitel Távközlési Zrt. : Aff. C-472/10 ; Cerclab n° 4411 (point n° 37).
Le législateur a permis aux associations d'exercer une action collective pour demander l’élimination de façon préventive et généralisée des clauses abusives, indépendamment de toute action individuelle d'un consommateur. TGI Paris (1re ch.), 8 octobre 1996 : RG n° 15827/95 ; Cerclab n° 426 ; Juris-Data n° 1996-049942. § Dans le même sens : CA Paris (25e ch. A), 19 décembre 2003 : RG n° 2002/04822 ; Cerclab n° 868 ; Juris-Data n° 2003-230702 (l’action de l’association est recevable indépendamment de toute action individuelle d'un consommateur) - TI Rennes (9e ch. 1re sect.), 24 février 2004 : RG n° 11-03-001131 ; Cerclab n° 1754 (l’action collective à fin de suppression préventive et générale des clauses abusives, fondée sur les dispositions de l’ancien art. L. 421-6 [L. 621-7 et 8 nouveaux] C. consom. est recevable indépendamment de toute action individuelle d’un ou plusieurs consommateurs), confirmé par CA Rennes (1re ch. B), 28 janvier 2005 : RG n° 04/01969 ; arrêt n° 70 ; Cerclab n° 1786 ; Juris-Data n° 2005-270029 (l'art. L. 421-6 [L. 621-7 et 8 nouveau]C. consom. ne subordonne pas les actions introduites par une association de consommateurs à une action parallèle d'un consommateur ou à la démonstration d'un préjudice individuel) - CA Grenoble (1re ch. civ.), 29 mars 2010 : RG n° 08/02044 ; arrêt n° 263 ; site CCA ; Cerclab n° 4159 (les contrats comportant les clauses contestées ont nécessairement porté atteinte à l'intérêt collectif des consommateurs, peu important qu'aucun consommateur ne se soit plaint), confirmant TGI Grenoble (4e ch. civ.), 7 avril 2008 : RG n° 06/02405 ; jugt n° 125 ; site CCA ; Cerclab n° 4160 - CA Rennes (2e ch.), 28 février 2014 : RG n° 11/02934 ; arrêt n° 100 ; Cerclab n° 4705 (l’action fondée sur les art. L. 421-1 s. [L. 621-1 s. nouveaux], not. sur l'art. L. 421-6 [L. 621-7 et 8 nouveaux] C. consom., n'est pas subordonnée à une action exercée par un consommateur ou à la démonstration d'un préjudice individuel), sur appel de TI Rennes, 11 mars 2011 : Dnd.
Existence de réclamations de consommateurs (non). L’action des associations de consommateurs n’est pas interdite du simple fait qu'aucun litige ne soit survenu entre le professionnel auteur du modèle et les consommateurs. TGI Bourgoin-Jallieu (ch. civ.), 21 juin 2000 : RG n° 99/00009 ; Cerclab n° 339 (arg. suppl. : 1/ le professionnel ne rapporte pas la preuve de cette absence de litige ; 2/ la situation pourrait s’expliquer par la faible valeur des objets remis en dépôt vente). § Aucune disposition ne soumet l’action des associations de consommateurs à l’existence de réclamations émanant de consommateurs. CA Paris (1re ch. B), 2 octobre 1998 : RG n° 1997/01533 ; Cerclab n° 1099 ; D. affaires 1998, p. 1851, obs. V.A.-R. ; RJDA 1998/12, n° 1424 (action recevable). § V. aussi : CA Grenoble (1re ch. civ.), 18 mai 2010 : RG n° 07/04169 ; site CCA ; Cerclab n° 4157 (dès lors que les contrats comportant les clauses contestées ont nécessairement porté atteinte à la collectivité des consommateurs, peu importe qu'aucun consommateur ne se soit plaint), cassé par Cass. civ. 1re, 23 janvier 2013 : pourvois n° 10-21177 et n° 10-22815 ; Cerclab n° 4187 (cassation par voie de conséquence compte tenu de l’invalidation de certaines solutions de l’arrêt).
Un sondage établissant que 58 % des clients sont satisfaits et un contrat passé avec un grand distributeur, versés par le professionnel, sont sans intérêt pour l'issue du litige qui porte sur le caractère abusif ou illicite de certaines clauses au seul regard des dispositions légales ou réglementaires. TGI Nanterre (1re ch.), 4 février 2004 : RG n° 01/9240 ; site CCA ; Cerclab n° 3948, annulé pour des raisons de procédure par CA Versailles (3e ch.), 20 mai 2005 : RG n° 04/01207 ; arrêt n° 277 ; site CCA ; Cerclab n° 3947 (problème non examiné).
Le caractère abusif et l’élimination d’une clause est indépendante du fait que la stipulation ne pourrait concerner qu’une proportion faible de clients. TGI Grenoble (6e ch.), 20 mars 2003 : RG n° 200200219 ; jugt n° 93 ; site CCA ; Cerclab n° 3171 (sol. implicite).
B. CONDITIONS LIÉES À L’ASSOCIATION DE CONSOMMATEURS
Négociation préalable (non). Aucun texte n’impose à une association agréée de négocier les conditions de suppression des clauses estimées abusives avant de saisir la juridiction civile. CA Paris (1re ch. B), 7 mai 1998 : RG n° 96/86626 ; arrêt n° 160 ; Cerclab n° 1103 ; Juris-Data n° 1998-023868 ; RJDA 8-9/98, n° 1058 ; D. Affaires 1998. 1851, obs. V.A.-R ; Lamyline. § Une association de consommateurs n’est pas tenue de rechercher au préalable une solution amiable avec le professionnel. TGI Grenoble (4e ch. civ.), 29 septembre 1997 : RG n° 95/05045 ; jugt n° 254 ; site CCA ; Cerclab n° 3156, confirmé par CA Grenoble (1re ch. civ.), 23 novembre 1999 : RG n° 97/04461 ; arrêt n° 747 ; site CCA ; Cerclab n° 3112 - TGI Grenoble (4e ch. civ.), 7 juin 2010 : RG n° 08/03679 ; site CCA ; Cerclab n° 4078 (l'action n'est pas soumise à une obligation préalable de négociation).
Comp. pour la prise en compte pour l’astreinte : CA Versailles (3e ch.), 17 janvier 2019 : RG n° 16/03662 ; Cerclab n° 8166 (contrats d’assurance et d’assistance contre les fuites d’eau ; en l’absence de démarche préalable de l’association aux fins d’obtenir la suppression des clauses qu’elle estimait abusive, celle-ci ne caractérise pas le risque d’inexécution de l’injonction, et le prononcé d’une astreinte n’apparaît dès lors pas justifié), sur appel de TGI Nanterre (7e ch.), 10 septembre 2015 : RG n° 14/08226 ; Dnd.
Conciliation (non). L'association, qui tire son droit d'ester de l’ancien art. L. 421-6 C. consom., n'est aucunement tenue d'engager une procédure amiable préalable. TGI Grenoble (4e ch. civ.), 27 octobre 2008 : RG n° 07/03705 ; Cerclab n° 4256 (syndic).
Illustration d’un refus de conciliation opposé par l’association de consommateurs : CA Paris (pôle 5 ch. 5), 29 novembre 2012 : RG n° 09/22267 ; Cerclab n° 4061. § V. aussi, jugeant la conciliation inutiler : § V. aussi dans le cadre de la demande de dommages et intérêts et de publication : si l’association peut encourir le reproche d’invoquer une multiplicité de griefs et de procéder parfois par affirmation, sans chercher à démontrer en quoi consiste le déséquilibre significatif qu'elle invoque, faisant montre de légèreté et d'une certaine volonté procédurière, étrangère à une réelle prise en compte des intérêts du consommateur, le comportement du professionnel est parfaitement critiquable dès lors que, professionnel du crédit, soumis à une législation d'ordre public dont la finalité est la protection du consommateur grâce à une parfaite information de celui-ci propose, celui-ci proposer plus de vingt ans après la mise en place de ces dispositifs, des contrats qui ne respectent pas ces règles protectrices. TI Rennes, 8 août 2000 : RG n° 11-99-000726 ; Cerclab n° 1760 (recours à la conciliation jugé illusoire).
Néanmoins, elle n’est pas interdite non plus. Pour une illustration : aux termes de l’art. 22 de la loi du 8 février 1995, « Les parties déterminent librement la répartition entre elles de la charge des frais de la médiation. A défaut d'accord, ces frais sont répartis à parts égales, à moins que le juge n'estime qu'une telle répartition est inéquitable au regard de la situation économique des parties » ; dès lors qu’en l’espèce, le professionnel et l’association ont accepté de recourir à une mesure de médiation, en convenant de prendre en charge la provision à valoir sur les honoraires de l'expert par moitié chacune, ainsi qu'il ressort des termes du jugement ayant ordonné une médiation, aucune circonstance ne justifie qu'il soit dérogé au partage des frais de la médiation. TGI Paris (1/4 soc.), 22 mars 2011 : RG n° 09/18791 ; site CCA ; Cerclab n° 4062 (accès internet).
Mise en demeure (non). Une mise en demeure préalable du professionnel par l’association de modifier ou supprimer les clauses abusives ou illicites de son modèle de contrat n’est pas nécessaire. V. en ce sens, explicite : l'absence de mise en demeure préalable n'est pas une condition de recevabilité de l'action que les associations de consommateurs tiennent de l’ancien art. L. 421-6 C. consom. TGI Grenoble (4e ch. civ.), 4 novembre 2013 : RG n° 12/00884 ; site CCA ; Cerclab n° 6999.
Néanmoins, l’absence de mise en demeure est parfois prise en compte dans le cadre de l’action en réparation du préjudice subi : CA Grenoble (1re ch. civ.), 5 juin 2012 : RG n° 09/00977 ; Cerclab n° 2952 (réduction du préjudice à 5.000 euros compte tenu notamment de l'absence de mise en demeure en vue d’une mise en conformité préalable, le professionnel étant un cessionnaire de l’établissement), infirmant sur le montant TGI Grenoble, 26 janvier 2009 : RG n° 06/3180 ; Dnd (10.000 euros).
Prise en compte des conditions générales d’abonnement à l’association. Rejet de la demande d’irrecevabilité de l’action de l’association, pour absence d’intérêt légitime, aux motifs que ses propres conditions générales d'abonnement contiendraient des stipulations semblables à celles qu’elle critique, dès lors que, la cour n’étant pas saisie de l'examen de la validité des clauses des conditions générales d'abonnement à l’association, le moyen d'une situation immorale ou inopportune est sans effet sur la recevabilité de l'action de l’association, et qu’en outre celle-ci, chargée d'une mission de promotion et de défense des droits et intérêts des consommateurs, dont l'objet est préventif, dissuasif et curatif, établit agir pour l'intérêt collectif des consommateurs. CA Paris (pôle 5 ch. 11), 30 mars 2018 : RG n° 16/16694 ; Cerclab n° 7534, confirmant TGI Paris, 17 mai 2016 : RG n° 12/09999 ; Dnd.