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5787 - Code de la consommation - Régime de la protection - Autres professionnels - Concurrence déloyale

Nature : Synthèse
Titre : 5787 - Code de la consommation - Régime de la protection - Autres professionnels - Concurrence déloyale
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 5787 (5 novembre 2022)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - RÉGIME

ACTION DES AUTRES PROFESSIONNELS - CONCURRENCE DÉLOYALE

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2022)

 

Présentation. L’effectivité du droit de la protection contre les clauses abusives a des répercussions sur la loyauté de la concurrence entre les professionnels. Un professionnel qui respecterait scrupuleusement le droit de la consommation, en expurgeant ses conditions générales de toute clause abusive, serait désavantagé par rapport à un autre, moins scrupuleux, maintenant de telles clauses. Pour ne prendre qu’un exemple, un professionnel pourrait afficher des prix attractifs, tout en insérant des clauses allégeant ses obligations ou limitant sa responsabilité, sans que le consommateur ne conteste leur caractère abusif, par ignorance ou en raison de la faiblesse de l’enjeu financier. Quelques décisions recensées abordent cette question sous l’angle d’une action en concurrence déloyale. § Pour la prise en compte de la concurrence pour l’appréciation du déséquilibre significatif, V. Cerclab n° 6040.

N.B. Jusqu’à la loi du 17 mars 2014, l’insertion d’une clause abusive était sans risque, puisqu’elle n’était que réputée non écrite et qu’elle ne pouvait remettre en cause le contrat que dans des cas très restrictifs. Depuis ce texte, l’insertion d’une clause « noire », interdite par l’ancien art. R. 132-1 C. consom., devenu R. 212-1 C. consom., peut entraîner une condamnation à une amende administrative et, par ailleurs, la création d’une action de groupe peut avoir des conséquences lourdes pour le professionnel qui aurait causé un préjudice à de multiples consommateurs, en tentant de se protéger par une clause abusive. Ces deux dispositifs, même s’ils sont principalement destinés à protéger les consommateurs, peuvent avoir un effet sur les respects d’une saine concurrence entre les acteurs économiques. Mais cette affirmation est conditionnée par un exercice systématique et égalitaire de ces procédés, ce qui est loin d’être acquis.

Présence de l’idée dans les textes. L’idée n’est pas absente de la directive n° 93/13/CEE dont l’art. 7 § 1 dispose que les « États membres veillent à ce que, dans l'intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l'utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel. »

Recevabilité : principe. Ayant énoncé à juste titre que l’objectif de la directive 2001/84/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 septembre 2001, relative au droit de suite au profit de l’auteur d’une œuvre d’art originale, à la lumière de laquelle l’art. L. 122-8 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction issue de la loi de transposition n° 2006-961 du 1er août 2006, devait être interprété, était non seulement d’assurer la protection des auteurs, mais aussi de contribuer au bon fonctionnement du marché commun de l’art, sans entraves ni restrictions de concurrence, par l’adoption d’un régime unifié du droit de suite entre États membres, la cour d’appel en a exactement déduit que tout opérateur, tiers au contrat litigieux, justifiant d’un intérêt légitime, était recevable à en invoquer la violation. Cass. civ. 1re, 22 janvier 2014 : pourvoi n° 13-12675 ; Cerclab n° 4700, rejet du pourvoi contre CA Paris, 12 décembre 2012 : Dnd. § Ayant par ailleurs relevé que le syndicat national des antiquaires, qui regroupe des opérateurs dont les ventes sont soumises au droit de suite, prétendait que la clause litigieuse faussait les conditions de concurrence entre les différents professionnels du marché de l’art, la cour d’appel a retenu, à bon droit, que ce syndicat avait un intérêt légitime à agir en nullité de ladite clause. Cass. civ. 1re, 22 janvier 2014 : précité, rejet du pourvoi contre CA Paris, 12 décembre 2012 : Dnd. § Sur la suite de l’affaire, après question préjudicielle : Cass. civ. 1re, 3 juin 2015 : pourvoi n° 13-12675 ; arrêt n° 605 ; Cerclab n° 5309, cassant partiellement CA Paris, 12 décembre 2012 : Dnd. § Pour l’issue : Cass. Ass. plén., 9 novembre 2018 : pourvoi n° 17-16335 ; arrêt n° 639 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 7662, pourvoi contre CA Versailles (1re ch. 1re sect.), 24 mars 2017 : RG n° 15/07800 ; Dnd.

V. aussi : les anciens art. L. 132-1 [L. 212-1 nouveau] et L. 121-1 [L. 121-1 s. nouveaux] C. consom., qui interdisent les clauses abusives et les pratiques commerciales déloyales, sont destinés à protéger les consommateurs, partie la plus faible de la transaction ; leur non respect, s'il est avéré, procure à l'auteur un avantage concurrentiel indu par rapport à ses concurrents respectueux de la même réglementation ouvrant à ces derniers un droit à réparation du préjudice subi de ce chef. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 3 juillet 2013 : RG n° 11/20697 ; arrêt n° 218 ; Cerclab n° 4590 ; Juris-Data : 2013-014060, sur appel de TGI Paris (3e ch. sect. 1), 27 septembre 2011 : RG n° 10/00943 ; Dnd, et sur pourvoi Cass. civ. 1re, 18 juin 2014 : pourvoi n° 13-21145 ; Cerclab n° 4810 (cassation partielle sur un autre point).

Recevabilité : limites (clauses supprimées). Rejet de l’action d’une association chargée de la défense de galéristes et du bon fonctionnement du marché de l'art, ayant pour mission de régulariser les pratiques commerciales, en concurrence déloyale pour des clauses figurant dans les conditions générales d’une société de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, dès lors que ces clauses ont été supprimées. CA Paris (pôle 5 ch. 4), 3 juillet 2013 : RG n° 11/20697 ; arrêt n° 218 ; Cerclab n° 4590 ; Juris-Data : 2013-014060 (action fondée sur les anciens art. L. 121-1 et L. 132-1 [212-1 nouveau] C. consom. et L. 122-8 C. propr. intellect. ; action contestant la clause mettant à la charge de l’acheteur le paiement d’un éventuel droit de suite), sur appel de TGI Paris (3e ch. sect. 1), 27 septembre 2011 : RG n° 10/00943 ; Dnd, cassé sur ce point par Cass. civ. 1re, 18 juin 2014 : pourvoi n° 13-21145 ; Cerclab n° 4810 (cassation pour méconnaissance de l’objet du litige et violation de l’art. 4 CPC, dès lors qu’en l’espèce la société de vente aux enchères avait seulement indiqué, dans ses conclusions d’appel, avoir « décidé de suspendre le schéma contractuel que lui reproche le CPGA dans l’attente d’une décision définitive au fond »). § N.B. Cette solution reprend la logique qui était mise en œuvre dans le cadre des anciens art. L. 132-1 [L. 212-1 nouveau] et L. 421-6 [L. 621-7 et 8 nouveaux] C. consom. avant la loi du 17 mars 2014. Depuis la réforme de l’ancien art. L. 421-6 [L. 621-8 nouveau] C. consom., la suppression d’une clause en cours d’instance est sans influence sur l’issue du litige, mais, faute de disposition particulière, l’extention de cette solution semble impossible dans le cadre de l’action en concurrence déloyale.

Illustrations. Pour une illustration de ce type d’action intentée contre une société spécialisée dans les ventes aux enchères publiques, par des groupements d’antiquaires ou de galeristes, V. Cerclab n° 6469.

Constitue un acte de concurrence déloyale le non-respect d'une règlementation dans l'exercice d'une activité commerciale, qui induit nécessairement un avantage concurrentiel indu pour son auteur (Cass. com., 17 mars 2021, n° 01-10414) ; tel est le cas en l’espèce dès lors que le responsable ne mentionne pas sur son site internet la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation, comme l'exige l'art. L. 616-1 C. consom., conformément aux dispositions de l'article R. 616-1 du même code, et qu’il en est de même de l'obligation d'insérer un lien vers la plateforme de règlement des litiges en ligne prévue à l'art. L. 616-2 du même code. TJ Paris (3e ch. 2e sect.), 15 avril 2022 : RG n° 19/12628 ; Cerclab n° 9907 (« tout manquement à la réglementation dans l'exercice d'une activité commerciale induit nécessairement un avantage concurrentiel indu pour son auteur » ; jugement admettant aussi une violation du RGPD dans le traitement des données personnelles, mais écartant, faute de preuve, le non-respect de la règlementation des contrats conclus hors établissement, lors de foires et salons).