CA DIJON (2e ch. civ.), 8 septembre 2016
CERCLAB - DOCUMENT N° 5794
CA DIJON (2e ch. civ.), 8 septembre 2016 : RG n° 14/00755
Publication : Jurica
Extrait : « Attendu que le taux d'usure des prêts personnels d'un montant supérieur à 1.524 euros ressortait à 9,20 % à la date de signature du prêt litigieux le 25 novembre 2009, le taux du 4ème trimestre 2009 n'ayant été publié que le 29 décembre 2009 ; Que le TEG de 9,187 % stipulé au contrat était donc inférieur au taux d'usure applicable et Mme Y. sera déboutée de sa demande formée à ce titre ;
Attendu que, selon l'article R. 132-2-3° du code de la consommation, dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont présumées abusives au sens des dispositions du premier et du deuxième alinéas de l'article L. 132-1, sauf au professionnel de rapporter la preuve contraire, les clauses ayant pour objet ou pour effet d'imposer au consommateur qui n'exécute pas ses obligations une indemnité d'un montant manifestement disproportionné ;
Que Mme Y. prétend que l'indemnité contractuelle de 8 % à la charge de l'emprunteur défaillant est manifestement excessive au regard du taux d'intérêt élevé ; Que l'indemnité de 8 % du capital restant dû, exigible en cas de défaillance de l'emprunteur dans le remboursement des échéances du prêt, n'a pas un caractère manifestement disproportionné au regard du pourcentage applicable aux sommes restant dues, et ne sera donc pas qualifiée de clause abusive ;
Que son caractère manifestement excessif n'est pas davantage établi par Mme Y. au regard du préjudice subi par le créancier, le prêt n'ayant été remboursé que durant deux années sur les dix contractuellement prévues »
COUR D’APPEL DE DIJON
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 8 SEPTEMBRE 2016
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 14/00755. Décision déférée à la Cour : au fond du 24 mars 2014, rendue par le tribunal d'instance du Creusot : R.G. n°13/257.
APPELANTE :
SA SOGECAP
inscrite au RCS de NANTERRE sous le n° XX, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, Monsieur Philippe P., en sa qualité de Président du Conseil d'Administration domicilié de droit au siège social : Sis [adresse], représentée par Maître Christian F., avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 89, assistée de Maître Laurence G., avocat au barreau de PARIS
INTIMÉES :
Madame X. veuve Y.
née le [date], représentée par Maître Claire G., avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 126, assistée de Maître Caroline A.-O., avocat au barreau de CHALON SUR SAÔNE
SA COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D'ÉQUIPEMENTS (CGL)
inscrite au RCS de LILLE METROPOLE sous le n° XX, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice dont le siège social est : [adresse], représentée par Maître Claire L., membre de la SCP L. & L., avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 62
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 9 juin 2016 en audience publique devant la cour composée de : Renée-Michèle OTT, Président de Chambre, Président, Michel WACHTER, Conseiller, Sophie DUMURGIER, Conseiller, ayant fait le rapport sur désignation du Président, qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Elisabeth GUEDON,
DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 08 Septembre 2016,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Michel WACHTER, Conseiller, en remplacement du Président empêché, et par Elisabeth GUEDON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Selon offre préalable acceptée le 25 novembre 2009, Monsieur et Madame Y. ont souscrit auprès de la société Compagnie générale de location et d'équipement (CGL) un prêt personnel de 17 430 euros remboursable en 120 mensualités de 251,52 euros incluant les intérêts au taux de 8,82 %.
Monsieur Y. avait sollicité son admission au contrat groupe assurance décès-perte totale et irréversible d'autonomie souscrit auprès de la société AIG VIE France, afin de garantir le remboursement de ce prêt.
Par courrier du 9 décembre 2009, les époux Y. ont été informés que la compagnie Gras Savoye avait accepté la demande d'assurance en garantie du prêt, contre le seul risque décès.
Monsieur Y. est décédé le 31 décembre 2011.
Par courrier recommandé du 26 avril 2012, la société CGL a mis en demeure Mme Y. de payer la somme de 1.110,15 euros représentant le montant des échéances du prêt impayées, dans un délai de huit jours, et l'a informée, qu'à défaut de règlement, elle prononcerait la déchéance du terme.
Par courrier du 18 juillet 2012, la société Gras Savoye a informé Madame Y. et le prêteur que la compagnie Sogecap avait annulé l'adhésion des époux Y. au contrat d'assurance décès, en application de l'article L. 113-8 du code des assurances, au motif que l'assuré n'avait pas déclaré son réel état de santé lors de son adhésion.
Par acte d'huissier du 3 mai 2013, la Compagnie générale de location et d'équipement (CGL) a fait assigner Madame Y. devant le Tribunal d'instance du Creusot afin d'obtenir sa condamnation au paiement d'une somme de 17.067,86 euros avec intérêts au taux de 8,82 % à compter du 20 janvier 2012, au titre du solde du prêt de 17.430 euros, et d'une indemnité de procédure de 700 euros, le tout sous le bénéfice de l'exécution provisoire.
Par acte du 24 septembre 2013, Madame Y. a fait assigner en intervention forcée la société Gras Savoye.
Madame Y. n'a pas contesté sa dette envers la société de crédit mais a demandé que la société Gras Savoye soit condamnée à la garantir de toute condamnation en capital, intérêts, dommages-intérêts et frais qui pourrait intervenir à son encontre à la demande de la société CGL, et, à titre subsidiaire, a sollicité les plus larges délais de paiement.
Les compagnies d'assurance Gras Savoye et Sogecap ont conclu à la nullité du contrat d'assurance en application de l'article L. 113-8 du code des assurances et au rejet de la demande de garantie formée par Mme Y., en faisant valoir que l'assuré a répondu par la négative à toutes les questions du questionnaire de santé, dont il résultait qu'il était en parfaite santé alors qu'il suivait un traitement à vie depuis 1999 et percevait une rente depuis 1995, ce qui a, selon elles, indéniablement modifié leur opinion sur le risque à garantir.
A titre subsidiaire, elles ont conclu à la réduction de la garantie à hauteur du capital restant dû à la date du décès de Monsieur Y.
Par jugement du 24 mars 2014, le Tribunal d'instance du Creusot a :
- condamné Madame Y. à payer à la Compagnie générale de location et d'équipement (CGL) la somme de 15.907,64 euros avec intérêts au taux de 8,82 % à compter du 26 avril 2012,
- condamné la société Sogecap à garantir Madame Y. de cette condamnation à hauteur de 15.241,71 euros, outre intérêts au taux de 8,82 % l'an à compter du 18 juillet 2012,
- condamné Madame Y. à payer à la société Compagnie générale de location et d'équipement la somme de 1.183,80 euros outre intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2012,
- débouté les compagnies d'assurance de leur demande de nullité du contrat d'assurance souscrit le 25 novembre 2009 par Monsieur Y.,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Sogecap aux dépens.
Le Tribunal a fait droit à la demande en paiement de la société CGL, la considérant conforme aux dispositions de l'article L. 311-30 du code de la consommation, sauf en ce qui concerne l'application du taux d'intérêt conventionnel à l'indemnité légale de résiliation.
Sur l'appel en garantie de l'assureur décès, le premier juge, après avoir relevé que le questionnaire de santé renseigné par Monsieur Y. le 25 novembre 2009 comportait plusieurs erreurs et que le Docteur Z. avait attesté qu'il était indéniable qu'à cette date l'assuré n'avait pas dit la vérité sur son état de santé, étant atteint d'une psychose chronique, a considéré que la maladie de Monsieur Y. était la cause de la fausse déclaration et que la lucidité et les facultés de compréhension de celui-ci étant altérées, le caractère intentionnel de la fausse déclaration ne pouvait pas être retenu.
Il a enfin relevé que les compagnies d'assurance ne sollicitaient pas l'application des dispositions de l'article L. 113-9 du code des assurances.
La SA Sogecap a régulièrement interjeté appel de ce jugement, par déclaration reçue au greffe le 22 avril 2014.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 30 novembre 2015, l'appelante demande à la Cour, au visa des articles L113-8 du code des assurances et 1147 du code civil, de :
- déclarer son appel recevable et bien fondé,
A titre principal,
- infirmer le jugement rendu le 24 mars 2014 par le Tribunal d'instance du Creusot en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
- déclarer mal fondée Madame Y. en toutes ses demandes, fins et conclusions à son encontre,
- prononcer la nullité du contrat d'assurance souscrit le 25 novembre 2009 par Monsieur Y. pour réticence et fausses déclarations intentionnelles en application de l'article L. 113-8 du code des assurances,
- débouter Madame Y. de toutes ses demandes, fins et conclusions,
A titre subsidiaire,
- prononcer la nullité du contrat d'assurance souscrit le 25 novembre 2009 par Monsieur Y. pour insanité d'esprit en application de l'article 414-1 du code civil,
- débouter Madame Y. de toutes ses demandes, fins et conclusions,
A titre infiniment subsidiaire,
- réduire de manière notable l'indemnisation mise à sa charge en application des dispositions de l'article L. 113-9 du code des assurances,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer des intérêts conventionnels au taux de 8,82 % l'an à compter du 18 juillet 2012,
En tout état de cause,
- condamner Madame Y. à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Madame Y. aux entiers dépens.
Par écritures notifiées le 18 septembre 2015, Madame Y. demande à la Cour, au visa des articles L. 113-8 et L. 113-9 du code des assurances, et 414-2 du code civil, de :
- confirmer le jugement rendu le 24 mars 2014 par le Tribunal d'instance du Creusot en toutes ses dispositions,
- dire et juger que les déclarations faites par Monsieur Y. sur le questionnaire de santé sont fausses mais dépourvues d'intention frauduleuse,
- déclarer irrecevable la demande subsidiaire de la société Sogecap tendant à voir prononcer la nullité du contrat d'assurance sur le fondement de l'article 414-2 du code civil,
En conséquence,
- condamner la Sogecap à la garantir de toutes condamnations en principal, intérêts, dommages-intérêts, frais de l'article 700 du code de procédure civile et dépens qui viendraient à être prononcés à son encontre à la demande de la Compagnie générale de location et d'équipement,
Si par extraordinaire, elle était condamnée sans être garantie par Sogecap,
Vu les articles L. 313-3 et L. 313-14 du Code de la consommation,
- dire et juger que le taux effectif global du contrat de prêt souscrit est usuraire,
En conséquence,
- dire et juger que les perceptions excessives s'imputeront sur les intérêts normaux échus et subsidiairement sur le capital de la créance,
Vu l'article R. 132-2-3° du code de la consommation et l'article 1152 du code civil,
- réputer non-écrite la clause du contrat de prêt imposant une indemnité de 8 % sur le capital restant dû en cas de déchéance du prêt,
A titre subsidiaire, si la clause n'était pas réputée non-écrite,
- ramener la clause pénale à l'euro symbolique eu égard à son caractère excessif,
En conséquence,
- rejeter la demande de condamnation au paiement à la Compagnie générale de location et d'équipement de la somme de 1.183,30 euros outre intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2012,
Vu l'article 1244-1 du code civil,
- lui accorder les plus larges délais de paiement,
En tout état de cause,
- condamner la société Sogecap à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Sogecap aux entiers dépens d'instance et d'appel.
Par écritures notifiées le 11 décembre 2015, la Compagnie générale de location et d'équipement demande à la Cour, au visa des articles 1134, 1147 et 1154 du code civil, et 515 du code de procédure civile, de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Madame Y. à lui payer la somme de 15.907,64 euros outre intérêts au taux contractuel de 8,82 % à partir du 26 avril 2012 et ce jusqu'à parfait paiement, ainsi que la somme de 1.183,80 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2012,
- constater qu'aucune demande n'est formée contre elle en cause d'appel,
- constater qu'elle s'en rapporte sur la prise en charge ou non des condamnations de Madame Y. par Sogecap,
Ajoutant au jugement,
- débouter Madame Y. de sa demande tendant à ce que soit réputée non écrite la clause prescrivant le taux d'intérêt du contrat à hauteur de 8,82 %,
- ordonner la capitalisation des intérêts dès lors qu'ils seront dus pour une année entière en application des dispositions de l'article 1154 du code civil,
- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,
- statuer ce que de droit sur les dépens.
La clôture de la procédure a été prononcée le 17 décembre 2015.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l'exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR QUOI :
Sur la demande en paiement du solde du prêt :
Attendu que, tout en sollicitant la confirmation en toutes ses dispositions du jugement du Tribunal d'instance du Creusot qui l'a condamnée à payer à la Compagnie générale de location et d'équipement la somme de 15.907,64 euros avec intérêts au taux de 8,82 % à compter du 26 avril 2012 au titre du solde du prêt, et la somme de 1.183,80 euros outre intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2012 au titre de l'indemnité de résiliation de 8 %, Madame Y. demande, à titre subsidiaire, que le taux effectif global du contrat de prêt soit jugé usuraire et que les perceptions excessives s'imputent sur les intérêts normaux échus et subsidiairement sur le capital de la créance, et que la clause du contrat prévoyant une indemnité de résiliation de 8 % soit réputée non écrite en application de l'article R 132-2-3° du code de la consommation, et, à titre subsidiaire, qu'elle soit réduite à l'euro symbolique ;
Qu'elle prétend que le TEG mentionné sur le contrat est de 9,187 % et qu'il est usuraire puisque le taux d'usure ressortait à 8,88 % au 4ème trimestre 2009 ;
Qu'elle soutient, d'autre part, que la clause pénale prévoyant l'application d'une indemnité de 8 % en cas de défaillance de l'emprunteur est manifestement excessive eu égard au TEG usuraire ;
Attendu que la Compagnie générale de location et d'équipement reproche à Mme Y. de faire une lecture erronée du tableau des taux usuraires et prétend que le taux d'usure applicable au 3ème trimestre de l'année 2009, à la date de signature du contrat de prêt, ressortait à 9,20 % et qu'en conséquence le TEG de 9,187 % n'était pas usuraire ;
Qu'elle conteste par ailleurs le caractère manifestement excessif de l'indemnité contractuelle de 8 % en rappelant qu'aucune mensualité n'a été réglée depuis le 20 janvier 2012 ;
Attendu que le taux d'usure des prêts personnels d'un montant supérieur à 1.524 euros ressortait à 9,20 % à la date de signature du prêt litigieux le 25 novembre 2009, le taux du 4ème trimestre 2009 n'ayant été publié que le 29 décembre 2009 ;
Que le TEG de 9,187 % stipulé au contrat était donc inférieur au taux d'usure applicable et Mme Y. sera déboutée de sa demande formée à ce titre ;
Attendu que, selon l'article R. 132-2-3° du code de la consommation, dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont présumées abusives au sens des dispositions du premier et du deuxième alinéas de l'article L. 132-1, sauf au professionnel de rapporter la preuve contraire, les clauses ayant pour objet ou pour effet d'imposer au consommateur qui n'exécute pas ses obligations une indemnité d'un montant manifestement disproportionné ;
Que Mme Y. prétend que l'indemnité contractuelle de 8 % à la charge de l'emprunteur défaillant est manifestement excessive au regard du taux d'intérêt élevé ;
Que l'indemnité de 8 % du capital restant dû, exigible en cas de défaillance de l'emprunteur dans le remboursement des échéances du prêt, n'a pas un caractère manifestement disproportionné au regard du pourcentage applicable aux sommes restant dues, et ne sera donc pas qualifiée de clause abusive ;
Que son caractère manifestement excessif n'est pas davantage établi par Mme Y. au regard du préjudice subi par le créancier, le prêt n'ayant été remboursé que durant deux années sur les dix contractuellement prévues ;
Que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a condamné Mme Y. à payer à la Compagnie générale de location et d'équipement la somme de 15.907,64 euros avec intérêts au taux de 8,82 % à compter du 26 avril 2012 au titre du solde du prêt, et la somme de 1.183,80 euros outre intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2012 au titre de l'indemnité de résiliation de 8 % ;
Qu'à la demande du créancier, les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions prévues par l'article 1154 du code civil ;
Sur la garantie de la compagnie Sogecap :
Attendu qu'au soutien de son appel, la société Sogecap fait valoir que l'assuré était parfaitement informé des conséquences auxquelles il s'exposait en cas de fausse déclaration puisque le questionnaire de santé qu'il a rempli et signé le 25 novembre 2009 mentionnait qu'il certifiait avoir répondu sincèrement aux questions précitées et n'avoir rien dissimulé, et qu'il a malgré cela répondu par la négative à toutes les questions figurant sur ce questionnaire alors qu'il suivait un traitement à vie depuis 1999, qu'il percevait une rente invalidité depuis 1995, et qu'il avait consulté deux médecins durant les 12 derniers mois, ce qui ne lui permettait pas de répondre par la négative aux questions n° 3, 4, 5 et 8 ;
Qu'elle reproche au premier juge d'avoir fait une interprétation erronée de l'attestation du Docteur Z., produite par Mme Y., ce médecin ayant nullement attesté que Monsieur Y. était dans l'incapacité de comprendre la portée de ses déclarations du 25 novembre 2009 ;
Qu'elle ajoute qu'aucune pièce médicale établissant que Monsieur Y. n'avait pas toutes ses facultés mentales lorsqu'il a souscrit le contrat d'assurance n'est produite et que l'intéressé ne faisait pas l'objet d'une mesure de protection judiciaire ;
Qu'elle considère en conséquence que les réponses apportées par l'assuré au questionnaire de santé lui sont opposables et qu'elle est en droit de se prévaloir de la nullité du contrat pour fausse déclaration ;
Qu'elle soutient enfin qu'il importe peu que Monsieur Y. soit décédé de mort naturelle et que la cause de son décès n'ait aucun lien avec ses antécédents médicaux non déclarés, la nullité du contrat étant encourue alors même que le risque non déclaré a été sans influence sur le sinistre ;
Attendu que l'intimée prétend qu'au moment de la souscription du contrat de crédit et du questionnaire d'assurance, son époux se trouvait totalement incapable de répondre normalement au questionnaire de santé joint ;
Qu'elle ne conteste pas les fausses déclarations faites par Monsieur Y. dans ce questionnaire mais conteste leur caractère intentionnel dès lors que le traitement médicamenteux suivi par son mari l'empêchait d'être conscient de la portée de ses réponses lors de la déclaration à l'assureur, en soulignant que l'écriture de celui-ci laisse apparaître qu'il tremblait et qu'il avait du mal à écrire et à signer ;
Qu'elle prétend, d'autre part, que le décès de son mari est sans aucun rapport avec l'affection dont il souffrait ;
Attendu que, selon l'article L. 113-2 2° du code des assurances, l'assuré est tenu de répondre exactement aux questions posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel celui-ci l'interroge, lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à lui faire apprécier les risques qu'il prend en charge ;
Que L. 113-8 du code des assurances dispose que le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé a été sans influence sur le sinistre ;
Attendu qu'il n'est pas contesté en l'espèce que le questionnaire de santé rempli et signé par Y. le 25 novembre 2009 en vue de son adhésion à l'assurance groupe décès-perte totale et irréversible d'autonomie comportait des réponses négatives à toutes les questions posées à l'adhérent, constituant de fausses déclarations dès lors que l'intéressé suivait un traitement à vie depuis 1999, qu'il percevait une rente invalidité depuis 1995 et qu'il avait consulté deux médecins dans les douze derniers mois, ce qui ne lui permettait pas de répondre négativement aux questions 3 à 5 ni à la question 8 ;
Que si le Docteur Z. a certifié, le 4 décembre 2013, qu'il est indéniable qu'à la date du 24 novembre 2009, lors de sa déclaration sur le questionnaire de santé accompagnant l'assurance du prêt souscrit, M. Y. n'a pas dit la vérité sur son état de santé, étant atteint d'une psychose chronique, il ne peut être déduit de ce certificat, comme l'a fait le premier juge, que la psychose dont souffrait l'assuré est la cause de la fausse déclaration ;
Que ce certificat peut simplement signifier que Monsieur Y. ne pouvait apporter des réponses négatives aux questions posées car il souffrait précisément d'une maladie chronique nécessitant traitement et consultations médicales régulières ;
Qu'il n'est d'ailleurs corroboré par aucun autre élément médical de nature à établir que les facultés mentales de Monsieur Y. étaient altérées à la date de souscription de l'assurance décès, ce qui ne peut davantage être déduit des réponses apportées au questionnaire de santé ni des mentions écrites par l'intéressé ;
Que c'est donc à tort que le Tribunal a considéré que les fausses déclarations de Monsieur Y. étaient dépourvues de caractère intentionnel ;
Que ces fausses déclarations ayant incontestablement pour conséquence d'aggraver les risques à garantir pour l'assureur, la société Sogecap est bien fondée à solliciter la nullité du contrat d'assurance en application de l'article L. 113-8 du code des assurances, et ce peu important que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre ;
Que la décision entreprise sera en conséquence infirmée en ce qu'elle a débouté la société Sogecap de sa demande de nullité du contrat et en ce qu'elle a condamné la compagnie d'assurance à garantir Madame Y. de la condamnation prononcée à son encontre à la demande de la Compagnie générale de location et d'équipement à hauteur de 15.241,71 euros, outre intérêts au taux de 8,82 % l'an à compter du 18 juillet 2012 ;
Sur la demande de délais de paiement :
Attendu qu'en vertu de l'article 1244 du code civil, le débiteur ne peut pas forcer le créancier à recevoir en partie le paiement d'une dette même divisible ;
Que l'article 1244-1 du même code énonce toutefois que, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues ;
Que le pouvoir d'accorder ou de refuser un délai de grâce est considéré comme un pouvoir souverain qui doit être motivé par les circonstances de l'espèce et notamment, s'agissant de la situation du débiteur, par ses difficultés passagères, ses offres de paiement sérieuses, et par la perspective d'un échéancier raisonnable, qui doit demeurer pertinent au regard des sommes dues, de leur ancienneté, des éventuels délais amiables déjà alloués, et plus généralement de la foi due aux contrats ;
Attendu, qu'à titre subsidiaire, Mme Y. se prévaut de sa situation financière délicate pour solliciter les plus larges délais de paiement en exposant qu'elle ne dispose d'aucune formation professionnelle, ayant été mère au foyer jusqu'au décès de son époux, et qu'elle travaille en intérim depuis le mois de décembre 2012 et perçoit désormais une pension de retraite très modeste ;
Qu'elle ne formule pour autant aucune proposition d'apurement de sa dette envers la CGL ;
Qu'au regard du délai de plus de trois années dont elle a déjà bénéficié, de fait, depuis l'introduction de la procédure le 3 mai 2013, il n'y a pas lieu de faire bénéficier la débitrice des dispositions légales susvisées ;
Sur les demandes accessoires :
Attendu que Madame Y. qui succombe supportera la charge des dépens de première instance et d'appel ;
Qu'il est en revanche équitable de ne pas faire application à son encontre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Déclare la SA Sogecap recevable et fondée en son appel principal,
Déclare Madame Y. recevable mais mal fondée en son appel incident,
Confirme le jugement rendu le 24 mars 2014 par le Tribunal d'instance du Creusot en ce qu'il a condamné Mme Y. à payer à la Compagnie générale de location et d'équipement la somme de 15 907,64 euros avec intérêts au taux de 8,82 % à compter du 26 avril 2012 au titre du solde du prêt, et la somme de 1.183,80 euros outre intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2012 au titre de l'indemnité de résiliation de 8 %,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Prononce la nullité du contrat d'assurance souscrit le 25 novembre 2009 par Monsieur Y. auprès de la société AIG Vie France aux droits de laquelle se trouve la société Sogecap,
En conséquence,
Déboute Mme Y. de sa demande de condamnation de la société Sogecap à la garantir des condamnations prononcées à son encontre à la demande de la Compagnie générale de location et d'équipement,
Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par l'article 1154 du code civil,
Déboute Mme Y. de ses demandes subsidiaires,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Madame Y. aux dépens de première instance et d'appel.
Le Greffier, Le Conseiller, pour le Président empêché
- 6121 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du consommateur - Clauses pénales ou d’indemnité forfaitaire - Droit postérieur au décret du 18 mars 2009 (R. 132-2-3° C. consom.)
- 6624 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Régime général - Obligations de l’emprunteur - Pénalités