6195 - Code de commerce (L. 442-1-I-2° C. com. - L. 442-6-I-2° ancien) - Notion de déséquilibre - Présentation par contrat - Construction
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6195 (14 octobre 2023)
PROTECTION CONTRE LES DÉSÉQUILIBRES SIGNIFICATIFS DANS LE CODE DE COMMERCE (ART. L. 442-1-I-2° C. COM.)
NOTION DE DÉSÉQUILIBRE SIGNIFICATIF - PRÉSENTATION PAR CONTRAT - CONSTRUCTION
Renvoi. Sur l’appréciation du déséquilibre significatif en droit de la consommation, V. Cerclab n° 6303.
Renonciation au contrat : renonciation du fait d’un tiers. Dès lors que le projet pour lequel il avait été sollicité ne s’est pas réalisé, pour des raisons qui n’engagent pas la responsabilité du maître de l’ouvrage mais résultent de la décision d’un tiers, la demande d’un prestataire de services d’être indemnisé, en l’espèce à hauteur de 15 % du montant total des honoraires prévisionnels, relèverait, en l’absence de preuve d’un préjudice réel, des dispositions de l’anc. art. L. 442-6-I-1° [L. 442-1-I-1°] C. com. sanctionnant le fait d’obtenir d’un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu. CEPC (avis), 14 décembre 2011 : avis n° 11-09 ; Cerclab n° 4268.
Marché à forfait non révisable. L’acte d'engagement ne comportant aucune incohérence dès lors qu'il indique que le coût total des travaux fixé est prévisionnel et qu'il appartient au maître d'œuvre d'établir l'estimation définitive, le cahier des clauses administratives particulières précisant que l'offre de prix est portée à l'acte d'engagement et que les prix sont forfaitaires et définitifs, il ne saurait être soutenu qu'il y aurait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au sens de l’anc. art. L. 442-6-1-2° C. com. en raison de l'impossibilité pour le groupement de voir sa rémunération adaptée à l'évolution du programme et de son coût, puisque celui-ci s'est porté candidat à un appel d'offre restreint en toute connaissance de cause des éléments du contrat. CA Paris (pôle 4 ch. 6), 2 septembre 2022 : RG n° 19/16468 ; Cerclab n° 9813 (contrat de maîtrise d’œuvre pour l’aménagement d’une ZAC ; résiliation par le promoteur du projet en raison du dépassement des coûts, avec versement de l’indemnité prévue ; arrêt vérifiant et écartant le caractère incomplet du programme ou l’ajout de tâches supplémentaires qui auraient pu remettre en cause le forfait), sur appel de T. com. Bobigny, 28 mai 2019 : RG n° 2017F01714 ; Dnd.
Assurance : prise en charge par l’entrepreneur. Crée un déséquilibre significatif entre les parties la clause qui impose à un entrepreneur de supporter une partie des assurances qui bénéficient exclusivement au promoteur/maître de l'ouvrage et aux acquéreurs des logements, alors que chaque constructeur doit s'assurer au titre de la responsabilité obligatoire et que cette obligation ne comporte aucune contrepartie. CA Rennes (4e ch.), 23 janvier 2020 : RG n° 17/00298 ; arrêt n° 9 ; Cerclab n° 8315, sur appel de T. com. Brest, 25 novembre 2016 : Dnd.
Etablissement des factures en cours de chantier. La clause d’un contrat d’architecte intérieur en vertu de laquelle la validation des factures est effectuée par le maître de l'ouvrage, le maître de l'ouvrage délégué, le maître d’œuvre ou l’économiste, ne saurait être considérée comme potestative au sens de l’ancien art. 1174 C. civ. [1304-2 nouveau], dès lors que l'exécution de l'obligation de paiement des factures ne dépend pas de la décision discrétionnaire du maître de l'ouvrage, mais de l'avancement des travaux en fonction du calendrier prévisionnel prévu tant dans le contrat initial que dans les avenants. CA Aix-en-Provence (2e ch.), 16 juillet 2015 : RG n° 13/04081 ; arrêt n° 2015/241 ; Cerclab n° 5228 ; Juris-Data n° 2015-017521, sur appel de T. com. Marseille, 10 décembre 2012 : RG n° 2012F01427 ; Dnd.
Délai de contestation des décomptes. Annulation, en raison du déséquilibre significatif qu’elle institue, de la clause d’un contrat conclu entre un promoteur et un entrepreneur, imposant à ce dernier de contester le décompte général définitif auprès du maître d’œuvre dans le délai contractuel de 15 jours prévu au cahier des clauses administratives particulière. TJ Lyon (3e ch. - JME), 28 février 2022 : RG n° 21/03410 : Dnd (juridiction compétente ; conséquence : absence de forclusion de l’action en paiement intentée par l’entrepreneur), confirmé par CA Lyon (6e ch.), 17 novembre 2022 : RG n° 22/01823 ; Cerclab n° 9952 (peu importe que l’entrepreneur n'ait pas présenté ses observations au maître d’œuvre dans le délai de 30 jours prévu par la norme AFNOR qui est dépourvue d'effet contraignant ; N.B. si l’arrêt confirme la nullité, excédant semble-t-il son pouvoir juridictionnel, il estime par ailleurs que le courrier envoyé correspondait aux exigences de la clause).
Absence de délai de validation des mémoires conditionnant le paiement du solde du prix. Rappr. n’examinant pas le problème : CA Versailles (4e ch.), 25 mars 2019 : RG n° 17/04328 ; Cerclab n° 7913 (marché de travaux de menuiserie dans le cadre de la construction d’un ensemble immobilier ; inutilité d’examiner le caractère abusif de la clause imposant des délais courts à l’entrepreneur pour adresser les mémoires et ne prévoyant aucun délai à la charge du maître d’œuvre pour les vérifier, alors que cette vérification conditionne le paiement du solde du marché, dès lors qu’en l’absence de délai dans le marché, il convient d’appliquer les délais prévus par la norme supplétive NF P 03 001, les parties, selon la cour, ayant entendu à l'article 4 du cahier des charges générales se référer à la norme à défaut de mention contraire du contrat ; N.B. l’art. 4 stipulait : « sont applicables de plein droit au marché : - 4.1 Les lois, décrets, arrêtés, circulaires et autres règlements ainsi que les DTU, REEF et Normes Françaises et Européennes en vigueur lors de la conclusion du marché, - 4.2 Par dérogation à ce qui précède, ne sont pas applicables au marché les normes NF P 03 001 et plus généralement celles établissant un cahier des clauses générales ou des dispositions contraires au présent CCG. »), sur appel de TGI Nanterre (7e ch.), 23 mai 2017 : RG n° 15/12625 ; Dnd, cassé pour dénaturation par Cass. civ. 3e, 4 mars 2021 : pourvoi n° 19-16952 ; arrêt n° 233 ; Cerclab n° 8842 (en statuant ainsi, alors que l'article 4.2 du cahier des clauses générales stipule que « ne sont pas applicables au marché les normes NF P 03 001 et, plus généralement, celles établissant un cahier des clauses générales ou des dispositions contraires au présent CCG », la cour d'appel, qui a dénaturé les termes claires et précis de cette convention, a violé le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis).
Pénalités pour retard. La clause d’un contrat de rénovation de combles et de réfection de la toiture d’un immeuble prévoyant des pénalités de retard égales à 1/3000èmes du montant TTC du prix convenu par jour calendaire de retard, sans pouvoir excéder 5 % du montant du contrat et des avenants, n’impose aucun déséquilibre significatif dans les obligations respectives des parties ; l'indemnité n'apparaissant en rien dérisoire, il n'y a pas lieu d'en majorer le quantum, par rapport au montant déterminé par le premier juge, soit au titre de l’anc. art. L. 442-6 [L. 442-1] C. com., soit au titre de l'ancien art. 1152 C. civ. [1231-5 nouveau]. CA Colmar (2e ch. civ. B), 19 novembre 2010 : RG n° 07/03189 ; arrêt n° 976/10 ; Cerclab n° 2902, sur appel de TGI Saverne, 15 juin 2007 : Dnd. § V. aussi : les clauses relatives aux pénalités de retard ne créent pas un déséquilibre significatif. CA Rennes (4e ch.), 23 janvier 2020 : RG n° 17/05470 ; arrêt n° 28 ; Cerclab n° 8314 (arrêt rappelant au préalable que la norme Afnor ne s'applique qu'à défaut de stipulations contraires des parties ; N.B. juridiction incompétente), sur appel de T. com. Saint-Brieuc, 12 juin 2017 : Dnd.
Aménagements contractuels de la notion de réception. Entre un professionnel et un consommateur, la clause qui a trait en réalité à l'aménagement contractuel de la preuve de la réception, définie comme résultant d'une prise de possession est abusive ; si le maître de l’ouvrage, qui est en l'espèce une professionnelle de l'immobilier sinon de la construction ne peut invoquer ce texte, l’existence d’un déséquilibre pourrait être reprochée dans le cadre de l’anc. art. L. 442-6-I-2° [L. 442-1-I-2°] C. consm., puisque appliquer strictement cette clause empêcherait un promoteur de faire connaître par le biais de réserves émises à l'encontre des constructeurs, celles formulées par ses propres acquéreurs au moment de la livraison de l'ouvrage, aboutissant ainsi à exonérer totalement de sa responsabilité un constructeur, alors que par ailleurs, il peut être de l'intérêt du constructeur lui-même de voir prendre possession de façon anticipée par le client final, dès lors que cette livraison est de nature à éviter toute demande de pénalités de retard. CA Chambéry (ch. civ. 1re sect.), 20 juin 2017 : RG n° 16/02612 ; Cerclab n° 6924 (contrat de construction entre un entrepreneur et société de construction vente ; l’interprétation et la validité de la clause soulèvent une contestation sérieuse, qui s’oppose à l’octroi de la provision demandée par le constructeur).