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6325 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Expertise et avis

Nature : Synthèse
Titre : 6325 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Expertise et avis
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6325 (7 et 16 août 2023)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CONTRAT

EXPERTISE ET AVIS

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2023)

 

A. ATTESTATION

Exonération de responsabilité en cas d’attestation inexacte. Est abusive la clause, rédigée dans le seul intérêt de celui dont elle émane, exonérant de toute responsabilité une entreprise ayant délivré une attestation inexacte concernant le raccordement d’une maison au réseau d'assainissement collectif. CA Agen (1re ch. civ.), 2 juillet 2014 : RG n° 12/01383 ; arrêt n° 488-14 ; Cerclab n° 4839 ; Juris-Data n° 2014-016277 (arrêt refusant de distinguer entre l’attestation et le certificat de conformité, dès lors, au surplus, qu’était en l’espèce en cause la réalité du raccordement et non sa conformité), sur appel de TI Condom, 12 juillet 2012 : Dnd.

Attestation de conseil donné. Sur la portée des attestations rédigées par les notaires pour constituer la preuve du renseignement ou/et du conseil donné aux parties, V. Cerclab n° 5835 et n° 6114.

B. EXPERTISE (ÉVALUATION)

Rémunération (expertise de sinistre). Absence de preuve du caractère que les clauses contestées, rédigées dans une police lisible et en des termes clairs et compréhensibles ne respectent pas les prescriptions de l'art. L. 211-1 C. consom., la clause mentionnant que la rémunération de 5 % est calculée au regard du montant des dommages estimés, qui peuvent différer du dommage indemnisé par la compagnie d'assurance en raison de l'application des garanties souscrites dans la police d'assurance. CA Colmar (3e ch. civ. A), 5 juin 2023 : RG n° 21/05015 ; arrêt n° 23/287 ; Cerclab n° 10336 (N.B. l’arrêt rejette le moyen de nullité de la clause invoqué sur ce fondement), sur appel de TJ Colmar, 29 octobre 2021 : Dnd.

N’est pas contraire à des dispositions légales ou réglementaires, ni même aux pratiques des autres professionnels en la matière, et n’est donc pas nulle pour cause illicite, la clause d’un contrat d’expertises en matière d’assurance qui prévoit une rémunération calculée sur un pourcentage de l’estimation des dommages réalisée par l’expert, indépendamment de l'indemnisation des dits dommages par l'assureur. CA Dijon (2e ch. civ.), 13 avril 2017 : RG n° 16/00040 ; Cerclab n° 6816 (expertise de sinistre en matière d’assurance), confirmant TI Dijon, 27 novembre 2015 : RG n° 11-12-1173 ; Dnd. § Cette clause n’est pas interdite par l’ancien art. R. 132-1 [212-1] C. consom. CA Dijon (2e ch. civ.), 13 avril 2017 : précité. § Étant relevé que le contrat litigieux n'est pas un contrat d'adhésion, qu'il précise le mode de calcul de la rémunération de l'expert et rend déterminable ses honoraires au moment de leur paiement, que la clause est rédigée de façon claire et explicite et que la base de calcul du montant des honoraires de la société d'expertises précisée dans le contrat a été négociée entre les parties puis acceptée par les clients lors de la signature du contrat, elle ne peut être considérée comme créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties. CA Dijon (2e ch. civ.), 13 avril 2017 : précité. § N’est pas abusive la clause, rédigée en termes clairs et compréhensibles, qui fixe la rémunération de l’expert à 5 % du montant des dommages estimés, dès lors qu'il existe une convergence d'intérêts, entre le client et la société d'expertise, pour que l'estimation des dommages soit la plus élevée possible, l'expert pour percevoir un honoraire plus élevé, et le client pour prétendre à une indemnisation la plus élevée possible et, qu'en pratique, la société d'expertise procède à l'évaluation des dommages en fonction d'un travail de collaboration avec son client, invité à produire un état de ses pertes, avec ses propres estimations. CA Colmar (3e ch. civ. A), 5 juin 2023 : RG n° 21/05015 ; arrêt n° 23/287 ; Cerclab n° 10336 (rejet aussi de l’argument tiré d’une prétendue fixation unilatérale par l’expert, alors que l'évaluation a bien été réalisée de façon contradictoire ; N.B. l’arrêt rejette le moyen de nullité de la clause invoqué sur ce fondement), sur appel de TJ Colmar, 29 octobre 2021 : Dnd.

Il ressort de l'économie générale de la convention que la mission portait d'une part sur l'audit technique et la phase conception/appel d'offres et, d'autre part, sur le suivi d'exécution et l'assistance à réception, traduisant ainsi sa technicité et sa longueur et justifiant que la rémunération du conseil technique déroge aux règles habituelles en la matière prévoyant l'application d'un taux horaire ; cette commune intention des parties sur l'adéquation de la rémunération correspondant à un honoraire de résultat de 10 % au service ainsi offert a été clairement explicitée au moyen de termes compréhensibles, excluant toute manœuvre dolosive et toute qualification de contrat d'adhésion. CA Rouen (1re ch. civ.), 16 novembre 2022 : RG n° 21/02102 ; Cerclab n° 9974 (enseignant ayant contracté dans le cadre d’une reconversion visant à faire fructifier son patrimoine ; N.B. l’art. L. 132-1 ayant été invoqué et le contrat conclu en 2012, la référence au contrat d’adhésion est sans emport, mais elle vise à répondre à un argument du client), sur appel de TJ Evreux, 20 avril 2021 : RG n° 20/02684 ; Dnd. § Jugé que n’est pas abusive la clause stipulant qu'en cas de dessaisissement du cabinet, seront substituées au principe de rémunération contractuel limité à un honoraire de résultat, les règles habituelles de facturation horaire (le taux horaire étant précisé). Même arrêt.

V. cependant : est abusive la clause du contrat d’expertise par lequel une société est chargée de déterminer et évaluer les objets volés, afin d’obtenir une indemnisation complémentaire, qui fixe les honoraires à un pourcentage de l’évaluation totale du dommage, alors qu’une partie de celui-ci a déjà été chiffré et indemnisé. CA Paris (pôle 4 ch. 9), 10 octobre 2019 : RG n° 16/19663 ; Cerclab n° 8206, sur appel de TI Le Raincy, 25 août 2016 : RG n° 11-15-001525 ; Dnd.

L’expert ayant conclu un contrat pour évaluer le montant des dommages subis par le proprétaire de l’immeuble, ne peut inclure dans le calcul des honoraires, le montant des dommages dus pour un tiers. CA Bastia (ch. civ. A), 18 mai 2016 : RG n° 14/00937 ; Legifrance ; Cerclab n° 5591 (N.B. l’arrêt avait au préalable estimé que le contrat était clair et que le consommateur ne rapportait pas la preuve d’une clause abusive, source de déséquilibre significatif), sur appel de TGI Ajaccio, 6 novembre 2014 : RG n° 13/00144 ; Dnd.

Limitation de responsabilité quant à la qualité de l’expertise. Est abusive la clause limitative d’un contrat d’expertise, au sens de l’ancien art. R. 132-1 [212-1] C. consom. dans la mesure où elle a pour effet de réduire le droit à réparation du non-professionnel en cas de manquement par le professionnel à son obligation. CA Angers (ch. com.), 22 mars 2011 : RG n° 10/00425 ; Cerclab n° 3708 (contrat d’expertise d’un escalier concluant de façon erronée à son caractère dangereux ; N.B. l’arrêt ne mentionne pas précisément la version de l’ancien art. R. 132-1 appliquée, les deux étant en l’espèce contestables puisque la rédaction de 2009 n’était pas applicable à un rapport d’expertise rendu le 22 février 2008 et qu’avant 2009, la clause ne pouvait être invaliée automatiquement que dans le cadre d’un contrat de vente), sur appel de TI Le Mans, 27 janvier 2010 : RG n° 11-09-001052 ; Cerclab n° 3707 (problème non examiné).

Limitation de responsabilité quant aux objets expertisés. Si la validité de la clause de limitation de responsabilité, insérée dans le règlement du service d’un laboratoire de gemmologie et reproduite sur le bulletin de dépôt d’un diamant remis en vue de son expertise, peut être admise dès lors qu'elle n'était pas de nature à créer un déséquilibre significatif, le bénéfice de cette clause n’est acquis qu'à la condition de pouvoir justifier de la réalisation préalable et effective du devoir de conseil du laboratoire à l'égard du déposant. En l’espèce, le laboratoire ne rapporte pas la preuve qu’il a tout particulièrement attiré l'attention du déposant sur l'importance revêtue par la déclaration de valeur nulle pour un diamant pesant 2,93 carats. CA Paris (25e ch. A), 27 octobre 2006 : RG n° 04/20821 ; Cerclab n° 2682, confirmant TGI Paris (5e ch. 2e sect.), 2 septembre 2004 : RG n° 03/01287 ; jugt n° 12 ; Cerclab n° 3428 (clause se contentant de restreindre et non de supprimer l’obligation d’assurance du laboratoire ; limitation de responsabilité conséquence directe, immédiate et proportionnée de la restriction de l'obligation du dépositaire).

Résiliation du contrat. Est abusive la clause du contrat d’expertise par lequel une société est chargée de déterminer et évaluer les objets volés, afin d’obtenir une indemnisation complémentaire, qui réserve la faculté de résiliation unilatérale au professionnel. CA Paris (pôle 4 ch. 9), 10 octobre 2019 : RG n° 16/19663 ; Cerclab n° 8206 (N.B. 1 la société prétendait, contre toute vraisemblance, que le droit de résiliation n’était offert qu’au client alors que la clause stipulait « en cas d’interruption de la mission par nos soins »… ; 2/ N.B. 2 dans un tel cas, la facturation se faisait alors à l’heure, clause particulièrement dangereuse, pouvant aboutir à un coût supérieur lorsque la mission n’est pas achevée à celui prévu lorsqu’elle l’est), sur appel de TI Le Raincy, 25 août 2016 : RG n° 11-15-001525 ; Dnd.

C. EXPERTISE-COMPTABLE

Responsabilité de l’expert-comptable : délai de réclamation. Est abusive, au regard de l’anc. art. L. 132-1 C. consom., la clause qui prévoit que l’action contre le cabinet d’expertise comptable doit être introduite dans le mois suivant la date à laquelle le client aura connaissance du sinistre, délai extrêmement court créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat s'agissant d'une part, d'un sportif de haut niveau sans compétence particulière en matière de fiscalité et d'autre part d'une société d'expertise comptable, délai particulièrement réduit de nature à porter atteinte à l'exercice d'un droit à réparation du préjudice subi par le non-professionnel. CA Pau (1re ch.), 11 février 2020 : RG n° 17/02033 ; arrêt n° 20/00624 ; Cerclab n° 8357 (N.B. l’arrêt vise l’anc. art. L. 132-1 tout en reproduisant les termes de l’anc. art. R. 132-1-6° C. consom. ; conséquence : action non prescrite), confirmant T. com. Bayonne, 15 mai 2017 : RG n° 2016005026 ; Dnd.

En sens contraire : la clause instituant un délai de forclusion de trois mois à compter de la date de connaissance du sinistre par le client d’un expert-comptable, pour agir en responsabilité contre lui, ne confère pas un avantage excessif au professionnel et ne créé pas un déséquilibre significatif entre les parties, dès lors que le délai pour agir est jugé raisonnable. CA Poitiers (1re ch. civ.), 28 septembre 2021 : RG n° 19/02206 ; arrêt n° 472 ; Cerclab n° 9153 (mission d’expertise comptable pour une association d’intérêt public ; arrêt estimant aussi que ce délai est suffisant et ne méconnaît pas le droit au procès équitable de l'art. 6 § 1 Conv. EDH, dès lors qu’il s’agit d'un délai raisonnable pour saisir les juges), sur appel de TGI La Rochelle, 18 juin 2019 : Dnd. § N.B. en l’espèce, la clause, reprise par référence à la lettre de mission-type recommandée par le conseil supérieur de l'ordre des experts comptables, stipulait que « Toute demande de dommages et intérêts ne pourra être produite que pendant une période de cinq ans commençant à courir le premier jour de l'exercice suivant celui au cours duquel est né le sinistre correspondant à la demande. Celle-ci devra être introduite dans les trois mois suivant la date à laquelle le client aura eu connaissance du sinistre ». § N.B. 2 La solution semble sévère, dès lors qu’introduire une action en justice mérite réflexion et que, s’agissant d’une profession du chiffre, elle peut nécessiter une analyse préalable complexe. Par ailleurs, il est permis de s’interroger sur le point de départ retenu qui, selon l’interprétation qu’on en donne, peut réduire, voire anéantir ce délai : si le sinistre est compris comme le redressement opéré par l’administration, sa connaissance n’implique pas nécessairement la connaissance simultanée que l’irrégularité est imputable à une faute de l’expert-comptable.

N.B. Cette clause est également discutée sur le fondement de l’art. L. 442-1 C. com. ou sur celui de l’art. 1171 C. civ.