6357 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Assurance - Assurances de groupe - Assurances sans lien avec un crédit
CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6357 (8 août 2023)
PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CONTRAT
ASSURANCE - ASSURANCES DE GROUPE - ASSURANCES NON LIÉES À UN CRÉDIT
Présentation. La garantie contre des risques de difficulté de paiement lié à une perte d’emploi, une incapacité temporaire ou une invalidité totale ou partielle est fréquemment souscrite lors de la conclusion d’un contrat de prêt (Cerclab n° 6359). Mais, il est possible de souscrire à des garanties similaires dans le cadre d’une assurance de groupe sans lien avec un crédit, ce qui est notamment proposé par des employeurs, et peut impliquer l’application de règles spécifiques.
A. RÉGIME GÉNÉRAL
1. CONTENU DU CONTRAT
Questionnaire de santé. L'assureur étant en droit de se faire une opinion exacte du risque garanti, n’est pas abusive la « clause » par laquelle l’assureur s'enquiert des pathologies affectant le candidat assuré. CA Metz (1re ch. civ.), 7 février 2023 : RG n° 21/00902 ; arrêt n° 23/00042 ; Cerclab n° 10092 (assurance de groupe), sur appel de TJ Sarreguemines, 9 février 2021 : RG n° 18/00274 ; Dnd.
Remise des conditions générales. Pour une illustration : CA Douai (3e ch.), 22 mai 2014 : RG n° 13/01327 ; arrêt n° 14/409 ; Cerclab n° 4798 (contrat collectif d'assurance-vie « option prévoyance » prévoyant, en cas de décès, le versement d'un capital à un bénéficiaire désigné, et en cas d'invalidité avec assistance d'une tierce personne, le versement d'un capital à l'assuré lui-même ; inopposabilité des conditions générales dès lors qu'il ne résulte d'aucune des mentions de la demande d'adhésion que celles-ci auraient été remises à l’adhérent ; conséquence : le contrat « option prévoyance » s'est substitué au contrat initial, mais seulement dans les stipulations figurant sur la demande d'adhésion), sur appel de TGI Béthune, 29 janvier 2013 : RG n° 11/04395 ; Dnd.
V. cep. estimant que la conclusion par une société d’un contrat d’assurance portant sur les garanties décès ou perte totale et irréversible d’autonomie à la suite d’une maladie ou d’un accident, au profit de son directeur général, ce dernier et ses héritiers, qui ne sont pas partie au contrat ne sont pas titulaires d’une action fondée sur la responsabilité contractuelle de l’assureur, mais qu’un manquement contractuel de celui-ci peut engager sa responsabilité à l’égard des tiers sur un fondement délictuel. CA Limoges (ch. civ.), 28 mars 2013 : RG n° 12/00341 ; Cerclab n° 5249 (arrêt estimant que le directeur général d’une société, bénéficiaire d’une assurance souscrite par son entreprise au cas où il décèderait ou deviendrait invalide, n’est qu’un tiers au contrat, et qu’il ne peut qu’invoquer un manquement contractuel dans le cadre d’une action délictuelle ; conséquences : il n’y a pas lieu d’apprécier le caractère abusif ou non de la clause prévoyant un délai de carence), sur appel de T. com. Limoges, 5 mars 2012 : Dnd.
Modification du contrat. Le simple envoi d’un avis d'échéance faisant application d'une cotisation réduite et d'un capital décès réduit, tout en proposant en outre à l’assuré de « faire le point » sur l'évolution de ce contrat, ne peut être considéré comme une modification régulièrement acceptée par l'assuré des conditions du contrat, en ce qu'il n'a pas été suivi de réponse de la part de ce dernier, et qu'en outre la lettre demeure particulièrement peu explicite sur la modification des garanties appliquée, de sorte qu'il n'a pu se renouveler par tacite reconduction qu'aux conditions initiales. CA Douai (3e ch.), 22 mai 2014 : RG n° 13/01327 ; arrêt n° 14/409 ; Cerclab n° 4798 (contrat collectif d'assurance-vie « option prévoyance » prévoyant, en cas de décès, le versement d'un capital à un bénéficiaire désigné, et en cas d'invalidité avec assistance d'une tierce personne, le versement d'un capital à l'assuré lui-même), sur appel de TGI Béthune, 29 janvier 2013 : RG n° 11/04395 ; Dnd.
2. RISQUES GARANTIS
Invalidité. * Interprétation des clauses. Les juges du fond ne jouissent du pouvoir d’interpréter les conventions que si celles-ci sont obscures ou ambiguës ; le fait qu’une clause cite un article du code de la sécurité sociale qui n’existe pas n’est pas une circonstance suffisante pour la priver de clarté et nuire à sa compréhension. Cass. civ. 2e, 10 septembre 2015 : pourvoi n° 14-22669 ; arrêt n° 1278 ; Cerclab n° 5321 (contrat d’assurance de groupe garantissant notamment le risque d’invalidité permanente totale souscrit par l’employeur ; cassation pour refus d’application de l’anc. art. 1134 C. civ. et fausse application de l’anc. art. L. 133-2 C. consom. de l’arrêt qui ne s’est pas attaché au sens clair et précis de la clause qui ne nécessitait aucune interprétation), cassant CA Paris (pôle 2 ch. 5), 3 juin 2014 : RG n° 12/08459 ; Cerclab n° 7366, sur appel de TGI Paris, 12 avril 2012 : RG n° 10/14554 ; Dnd.
Décès : clauses de désignation du bénéficiaire. Ne sauraient recevoir la qualification de clause abusive, les indications figurant sur la notice d’un contrat de groupe dit « de prévoyance » conclu par un employeur pour ses salariés, ayant notamment pour objet le versement d'un capital décès, qui n'ont pas pour effet de permettre à l'organisme de prévoyance de modifier unilatéralement les dispositions contractuelles répartissant entre les parties leurs droits et obligations respectifs, mais seulement de préciser les modalités de désignation du bénéficiaire dont l'assuré conserve le total libre choix. CA Amiens (1re ch. 1re sect.), 26 septembre 2013 : RG n° 12/01353 ; Cerclab n° 4526 (souscripteur ayant utilisé la faculté qui lui était offerte de désigner un bénéficiaire particulier, en l’espèce son frère en 2001, à une époque où il n’était pas marié, ayant reçu la nouvelle version des modalités de désignation en mars 2008 et s’étant marié en décembre 2008, sans changer cette désignation au profit de son épouse, alors qu’il pouvait le faire ; N.B. dans la version initiale, contrairement à la seconde, le mariage valait automatiquement caducité de la désignation), sur appel de TGI Amiens, 29 mars 2012 : Dnd.
Perte de licence d’un pilote de ligne. Un officier, pilote de ligne, était titulaire d’une assurance-groupe contre le risque de perte de licence complète et définitive imputable au service aérien constituée d’un contrat d’adhésion obligatoire souscrit par l’employeur pour l’ensemble du personnel, garantissant le risque lié à la décision d’inaptitude physique définitive à la fonction de pilote de ligne et un contrat d’assurance collectif, souscrit au bénéfice de ses adhérents, par l’association de prévoyance du personnel navigant ; victime, dans le cadre d’un stage de formation, d’un accident ayant provoqué une incapacité permanente partielle de 10 %, le pilote a été déclaré définitivement inapte à l’exercice de la profession de navigant par le CMAC (Conseil médical de l’aéronautique civile) et a perdu de manière définitive sa licence de pilote. Selon l’arrêt : doit être confirmé le jugement qui a estimé que l’obligation de se soumettre à une visite médicale de contrôle ne pouvait concerner la garantie « perte de licence définitive », sauf à priver de toute portée l’acceptation expresse et inconditionnelle, par l’assureur, de la décision du CMAC, seule autorité compétente pour caractériser l’inaptitude définitive aux fonctions de navigant. CA Pau (1re ch.), 10 mai 2017 : RG n° 15/02238 ; arrêt n° 17/1915 ; Cerclab n° 6838 (N.B. 1. Le fondement de la solution est incertain ; 2. l’arrêt rejette la distinction entre les deux contrats, obligatoire et complémentaire), sur appel de TGI Bayonne, 15 juin 2015 : Dnd.
Clauses d’exclusion de garantie : maladies psychiques. Absence de preuve d’un déséquilibre significatif créé par la clause d’un contrat d’assurance collectif excluant la garantie en cas de maladie psychique, qui participe à la définition du risque et qui laisse subsister la garantie pour tous les accidents et les maladies autres que psychiques et pour ces dernières, celles en lien avec des incidents grave du service aérien. CA Paris (pôle 2 ch. 5), 25 octobre 2016 : RG n° 15/12115 ; arrêt n° 2016/325 ; Cerclab n° 6515 (contrat d'assurance à adhésion facultative du régime du personnel navigant commercial couvrant notamment le risque de perte de licence), sur appel de TGI Bobigny, 18 mai 2015 : n° 12/08625 ; Dnd.
3. DATE DE PRISE D’EFFET DES GARANTIES
Délai d’attente. V. par exemple : si le contrat d’assurance de groupe, apparemment de prévoyance, est conclu pour un an, ce n’est pas pour autant un nouveau contrat qui se crée à chaque renouvellement tacite, mais le même contrat qui se poursuit dans le temps : une franchise ou un délai d’attente supérieur à un an n’est donc pas incompatible. CA Nîmes (1re ch. A), 17 juin 2008 : RG n° 05/02158 ; arrêt n° 369 ; Legifrance ; Cerclab n° 1198 (délai en l’espèce de trois ans ; N.B. l’arrêt ne conteste pas par ailleurs, les modalités d’acceptation du délai, qui semblaient particulièrement contestables en l’espèce, compte tenu des différences entre le bulletin d’adhésion et la proposition de l’assureur), confirmant TGI Avignon, 6 décembre 2004 : Dnd. § Contra en matière d’assurance crédit : Cass. civ. 1re, 13 février 2001 : pourvoi n° 98-16478 ; arrêt n° 221 ; Cerclab n° 2042.
Garanties soumises à condition (invalidité d’un notaire). Une clause d’un contrat d'assurance groupe de prévoyance collective, conclu entre un assureur et la chambre interdépartementale de notaires de Paris, par l’intermédiaire de l'association générale de retraite et de prévoyance, subordonne, en cas d’invalidité absolue et définitive de l’assuré notaire, le versement du capital au fait que l'assuré cède son étude ou ses parts sociales « dans le délai d'un an à compter du certificat d'invalidité professionnelle délivré par le contractant (la chambre des notaires) » ; est abusive, au sens de l’ancien art. L. 132-1 C. consom. et du point 1.q de son annexe (N.B. dans la version consultée, l’arrêt vise le point g, apparemment en raison d’une erreur matérielle), la clause qui, lorsque le délai d’un an n’a pas été respecté, autorise le versement à la seule condition que l’assuré fournisse une attestation de la chambre des notaires, cocontractante, établissant que cette situation se fonde sur des raisons indépendantes de la volonté de l'assuré, en ce qu'elles limite indument les moyens de preuve de l'assuré. CA Paris (pôle 2 ch. 5), 1er décembre 2015 : RG n° 14/00545 ; arrêt n° 2015/414 ; Cerclab n° 5442 (professionnel se garantissant un avantage significatif, devant le juge, puisque face à ses contestations, son adversaire est irrecevable à établir les éléments, motifs ou raisons retenus par la Chambre départementale pour attester dans un sens favorable à sa thèse ou à apporter des éléments complémentaires ; retour au droit commun de la preuve des faits juridiques : par tout moyen), sur appel de TGI Paris, 21 novembre 2013 : RG n° 11/10542 ; Dnd, suite de CA Paris (pôle 2 ch. 5), 23 juin 2015 : RG n° 14/00545 ; Cerclab n° 5173 (relevé d’office).
4. MONTANT DES INDEMNITÉS
Montant des indemnités. L’assuré, secouriste bénévole, ne démontre par aucun élément de preuve que ne serait pas en l'espèce respectée l'économie du contrat d'assurance souscrit pas la Croix Rouge Française qui repose, comme tout contrat d'assurance, sur la garantie, en cas de survenance du risque assuré, d'une indemnisation en contrepartie du paiement de primes, le montant de l'indemnisation prévue étant en relation avec le montant des primes payées. CA Aix-en-Provence (15e ch. B), 27 novembre 2008 : RG n° 07/09598 ; arrêt n° 2008/474 ; Cerclab n° 2223 (rejet d’un prétendu caractère abusif qui se fonderait sur le montant ridiculement bas du capital versé), confirmant TI Cannes, 8 février 2007 : RG n° 11-06-000522 ; jugt n° 139 ; Cerclab n° 3800 (« il n'y a pas lieu de considérer l'art. 14 du contrat d'assurances comme étant une clause abusive » sans autre justification).
B. RÉGIMES SPÉCIAUX
Les dispositions de l’art. L. 141-4 C. assur. sont inapplicables à une opération collective à adhésion facultative souscrite auprès d’une institution de prévoyance régie par le code de la sécurité sociale. Cass. civ. 2e, 9 juin 2016 : pourvoi n° 15-21412 ; arrêt n° 977 ; Cerclab n° 5636 (21 arrêts du même jour, numérotés de 15-21412 à 15-21432, tous sur pourvoi contre CA Paris, 12 mai 2005, sans indication de RG ; quatrième branche du moyen, invoquant l’ancien art. L. 132-1 [212-1] C. consom., déclarée irrecevable sans explication ; rejet du pourvoi contre l’arrêt estimant que l’assureur offrait aux adhérents une option entre le maintien du capital garanti moyennant le paiement de cotisations fixées par lui ou le maintien des cotisations fixées antérieurement à la résiliation moyennant une réduction proportionnelle du capital garanti, de sorte que les adhérents ne pouvaient prétendre au maintien du capital garanti sur la base de leur ancienne cotisation uniquement revalorisée en fonction du salaire de base EDF-GDF ), rejetant le pourvoi contre CA Paris, 12 mai 2015 : Dnd (selon le jugement, rappelé par la moyen, le contrat prévoyait que l’adhésion était conclue pour la vie entière de l’adhérent sous réserve du paiement des cotisations, mais que l’adhésion et les garanties pouvaient cependant cesser en cas de résiliation du contrat collectif sous réserve des stipulations édictées par l’article 9 du contrat).
L’ancien art. R. 132-1-1° [R. 212-1-1°] C. consom. est inapplicable à une modification d’un contrat d’assurance de groupe dans la mesure où la loi - art. L. 932-14-1 C. séc. soc. - prévoit les modalités d'information de l'adhérent ou de l'affilié lors d'une modification du contrat collectif, la preuve du respect de ce texte étant en l’espèce rapportée. CA Paris (pôle 2 ch. 5), 25 octobre 2016 : RG n° 15/12115 ; arrêt n° 2016/325 ; Cerclab n° 6515 (arrêt posant au préalable que le décret n° 2009-302 du 18 mars 2009, ancien art. R. 132-1-1° C. consom., était inapplicable à une modification d’un contrat d’assurance de groupe datant de décembre 2008), sur appel de TGI Bobigny, 18 mai 2015 : n° 12/08625 ; Dnd.