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CA MONTPELLIER (1re ch. B), 10 janvier 2017

Nature : Décision
Titre : CA MONTPELLIER (1re ch. B), 10 janvier 2017
Pays : France
Juridiction : Montpellier (CA), 1re ch. sect. B
Demande : 14/00872
Date : 10/01/2017
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 4/02/2014
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2017-000619
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6683

CA MONTPELLIER (1re ch. B), 10 janvier 2017 : RG n° 14/00872 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu qu'en l'espèce, le contrat a incontestablement pour objet de garantir le vol du véhicule assuré ; Attendu que le propre du vol consiste d'abord matériellement dans la disparition de l'objet assuré, dont l'assuré ne peut plus avoir la libre disposition, que cet objet soit ensuite retrouvé ou pas, détérioré ou intact, ces circonstances postérieures n'ayant d'incidence éventuelle que sur le montant de la garantie ;

Attendu qu'en définissant le vol garanti uniquement comme la soustraction frauduleuse commise par effraction du véhicule et des organes de direction ou du garage dans lequel est stationné le véhicule, ou consécutive à un acte de violence à l'encontre du gardien ou du conducteur du véhicule, il est évident que la clause litigieuse permet à l'assureur de dénier sa garantie dans tous les cas où le véhicule disparaît sur la voie publique sans être retrouvé, et sans violence contre le conducteur, car dans ce cas de figure qui n'est pas une hypothèse d'école, l'assuré est radicalement dans l'incapacité de démontrer que la colonne de direction a été victime d'une effraction (alors même qu'il produirait les clés du véhicule en double exemplaire) ;

Attendu que pareillement, et dans tous les cas où le véhicule a fait l'objet d'une soustraction frauduleuse de fait qui n'est pas contestée, avec déplacement dudit véhicule sans pour autant que soit constatée une effraction mécanique de la colonne de direction, l'assureur pourra dénier sa garantie ;

Attendu qu'enfin, le lexique précité ne définit nullement la notion « d'effraction des organes de direction », la cour ne discernant pas comment un véhicule peut être déplacé sans que le blocage de la colonne de direction soit contourné, notamment par des procédés électroniques, ce qui donne tout son intérêt au rapport d'expertise Chevalier qui évoque clairement un outil pirate substitué aux clés d'origine, hypothèse qui est logiquement incontournable, du fait du déplacement du véhicule qui n'est pas contesté en lui-même ;

Attendu qu'en toute hypothèse, le libellé du contrat n'évoque pas une effraction mécanique de la colonne de direction, et la cour considère que la démonstration est suffisamment rapportée par les éléments de l'espèce du déplacement certain du véhicule qui implique une effraction de la colonne de direction par un biais électronique ;

Attendu que la cour estime par conséquent de première part que la clause litigieuse, à admettre au rang de clause contractuelle le lexique des définitions annexé aux conditions générales du contrat, a un caractère abusif et doit être réputée non écrite 

Et attendu que la cour estime en toute hypothèse de seconde part que l'assuré démontre l'effraction de la colonne de direction du véhicule, le contrat ne permettant pas de lui opposer la nécessité du caractère mécanique de cette effraction, et la démonstration étant suffisante par cet assuré non seulement de la soustraction frauduleuse de son véhicule, mais aussi du contournement du blocage de sa direction puisque le véhicule a été déplacé de plusieurs kilomètres, nécessairement par un procédé électronique ».

 

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

PREMIÈRE CHAMBRE B

ARRÊT DU 10 JANVIER 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 14/00872. Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 DÉCEMBRE 2013 - TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER : RG n° 12/06373.

 

APPELANTE :

SA MAAF ASSURANCES

immatriculée au RCS de NIORT sous le N° XX prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au dit siège, représentée et assistée de Maître G. de la SCP R., S., P., G., D.'O., B., avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

 

INTIMÉ :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], de nationalité Française, représenté par Maître B. avocat de la SCP N.- P. ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assisté de Maître Wilfried S., Avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

 

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 31 octobre 2016

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de Procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 NOVEMBRE 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre, Madame Chantal RODIER, Conseiller ; Madame Martine ROS, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Nadine CAGNOLATI

ARRÊT : - contradictoire - prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile ; - signé par Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre, et par Mme Nadine CAGNOLATI, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Les Faits, la procédure et les prétentions :

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Montpellier en date du 31 décembre 2013 ;

Vu l'appel régulier et non contesté de la société d'assurances MAAF, en date du 4 février 2014 ;

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions de l'appelante en date du 16 décembre 2015 ;

Vu les conclusions de M. X., intimé, en date du 28 octobre 2014 ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 31 octobre 1016 ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Attendu que l'assureur produit une pièce numéro un, intitulée : « déclaration d'un risque automobile », où apparaît la signature de M. X., sous la mention :

« je reconnais avoir reçu un exemplaire des conditions générales quarto, référence Q 07 20 03 qui contiennent les informations relatives à la vente à distance et au démarchage » ;

Attendu qu’un exemplaire de ces conditions générales est fourni, qui comporte en page 41, à la rubrique des événements garantis, le vol du véhicule ;

Attendu que ce libellé, exempt en lui-même de toute ambiguïté, comporte [un] astérisque, qui renvoie en bas de page, avec la mention en bas de page : « confère définitions page 104 et 105 » ;

Attendu qu'en page 104, c'est-à-dire dans le lexique regroupant les définitions qui s'appliquent à l'ensemble des garanties du contrat, le vol du véhicule est ainsi défini :

« soustraction frauduleuse du véhicule :

- commise par effraction du véhicule et des organes de direction ou du garage dans lequel est stationné le véhicule ;

- ou consécutive à un acte de violence à l'encontre du gardien ou du conducteur du véhicule » ;

Attendu qu'en réalité, il s'évince de ce rappel contractuel que, selon l’assureur, la définition du vol telle qu'elle résulte non pas de la liste des sinistres garantis mais de la mise en perspective de cette liste et du lexique regroupant les définitions des termes contractuels, serait opposable à l'assuré, au seul motif qu'il a reconnu avoir reçu un exemplaire des conditions générales « qui contiennent les informations relatives à la vente à distance et au démarchage » ;

Attendu qu'à supposer ce premier obstacle de l'opposabilité franchi, force est de constater que toute l'argumentation de l'assureur consiste non pas à nier la réalité d'un vol, mais à estimer que le vol litigieux n'est pas contractuellement garanti, dans la mesure où la définition même de la couverture du vol impliquait la démonstration par l'assuré d'une effraction des organes de direction, à titre de condition de cette garantie, et non pas à titre d'exclusion de garantie ;

Attendu qu'il s'agit là d'une condition de garantie claire, compréhensible et non sujette à interprétation selon l'assureur ;

Attendu que pour sa part, l'assuré démontre à suffisance que son véhicule a été volé, puisqu'il a été retrouvé par les gendarmes quelques jours après, en partie démonté, avec la vitre avant gauche brisée ;

Attendu que les gendarmes ont constaté que le véhicule avait fait l'objet d'un changement de plaques, et qu'il avait été intérieurement désossé de ses éléments d'équipement, outre privé des quatre roues en aluminium et des pneumatiques, le véhicule restant posé sur ses disques, avec des pièces démontées dans la partie moteur ;

Attendu que s'agissant du refus de garantie, l'assuré estime que l'assureur se fonde sur une clause abusive, que le contrat ne peut porter atteinte à la liberté du mode de preuve résultant de l'article 1315 du Code civil et à l'article six de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ouvrant le droit à un procès équitable ;

Attendu qu'à titre infiniment subsidiaire, il soutient qu'il y a bien eu effraction du véhicule et des organes de direction par voie électronique ;

Attendu que l'article 132-1 du code de la consommation s'applique, qui définit comme abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ;

Attendu qu'en l'espèce, le contrat a incontestablement pour objet de garantir le vol du véhicule assuré ;

Attendu que le propre du vol consiste d'abord matériellement dans la disparition de l'objet assuré, dont l'assuré ne peut plus avoir la libre disposition, que cet objet soit ensuite retrouvé ou pas, détérioré ou intact, ces circonstances postérieures n'ayant d'incidence éventuelle que sur le montant de la garantie ;

Attendu qu'en définissant le vol garanti uniquement comme la soustraction frauduleuse commise par effraction du véhicule et des organes de direction ou du garage dans lequel est stationné le véhicule, ou consécutive à un acte de violence à l'encontre du gardien ou du conducteur du véhicule, il est évident que la clause litigieuse permet à l'assureur de dénier sa garantie dans tous les cas où le véhicule disparaît sur la voie publique sans être retrouvé, et sans violence contre le conducteur, car dans ce cas de figure qui n'est pas une hypothèse d'école, l'assuré est radicalement dans l'incapacité de démontrer que la colonne de direction a été victime d'une effraction (alors même qu'il produirait les clés du véhicule en double exemplaire) ;

Attendu que pareillement, et dans tous les cas où le véhicule a fait l'objet d'une soustraction frauduleuse de fait qui n'est pas contestée, avec déplacement dudit véhicule sans pour autant que soit constatée une effraction mécanique de la colonne de direction, l'assureur pourra dénier sa garantie ;

Attendu qu'enfin, le lexique précité ne définit nullement la notion « d'effraction des organes de direction », la cour ne discernant pas comment un véhicule peut être déplacé sans que le blocage de la colonne de direction soit contourné, notamment par des procédés électroniques, ce qui donne tout son intérêt au rapport d'expertise Chevalier qui évoque clairement un outil pirate substitué aux clés d'origine, hypothèse qui est logiquement incontournable, du fait du déplacement du véhicule qui n'est pas contesté en lui-même ;

Attendu qu'en toute hypothèse, le libellé du contrat n'évoque pas une effraction mécanique de la colonne de direction, et la cour considère que la démonstration est suffisamment rapportée par les éléments de l'espèce du déplacement certain du véhicule qui implique une effraction de la colonne de direction par un biais électronique ;

Attendu que la cour estime par conséquent de première part que la clause litigieuse, à admettre au rang de clause contractuelle le lexique des définitions annexé aux conditions générales du contrat, a un caractère abusif et doit être réputée non écrite ;

Et attendu que la cour estime en toute hypothèse de seconde part que l'assuré démontre l'effraction de la colonne de direction du véhicule, le contrat ne permettant pas de lui opposer la nécessité du caractère mécanique de cette effraction, et la démonstration étant suffisante par cet assuré non seulement de la soustraction frauduleuse de son véhicule, mais aussi du contournement du blocage de sa direction puisque le véhicule a été déplacé de plusieurs kilomètres, nécessairement par un procédé électronique ;

Attendu que c'est donc une confirmation du principe de la garantie qui s'impose, par substitution de motifs ;

Attendu que s'agissant de dommages-intérêts, la cour adopte les motifs pertinents du premier juge s'agissant du préjudice matériel de gardiennage, compte tenu du courrier de l'assureur en date du 23 janvier 2012 ;

Attendu qu'en revanche, les frais de location réclamés sont tout à fait raisonnables et justifiés à hauteur de 687,07 euros ;

Attendu que le préjudice moral n'est pas caractérisé, le seul dommage résultant du refus de garantie depuis le sinistre, qui sera suffisamment réparé par l'allocation de l'intérêt au taux légal depuis l'assignation initiale ;

Attendu qu'il n'est pas contesté que le contrat ne prévoit que le versement de la valeur de remplacement du véhicule, majoré de 20 %, et non pas de 30 %, s'agissant de véhicule qui n'avait pas cinq ans d'âge, comme c'est le cas en l'espèce (confère page 50 conditions générales) ;

Attendu qu'une somme de 2.500 euros est justifiée au titre des frais inéquitablement exposés en cause d'appel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR statuant contradictoirement :

Fait droit très partiellement à l'appel principal ;

Statuant à nouveau de ce chef sur l'appel principal,

Dit et juge que la MAAF assurances doit la valeur de remplacement du véhicule, majorée de 20 % ;

Fait droit très partiellement à l'appel incident ;

Statuant à nouveau de ce chef, condamne la MAAF assurances à payer à Monsieur X. la somme de 687,.07 euros au titre des factures de location justifiées ;

Confirme pour le surplus le jugement de premier ressort, sauf à préciser que les condamnations seront assorties de l'intérêt au taux légal depuis l'assignation initiale ;

Condamne l'appelante aux entiers dépens, à recouvrer au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile, outre le paiement à l'intimé d'une somme de 2500 euros au titre des frais inéquitablement exposés en cause d'appel.

Le Greffier,               Le Président,

NC/GT