CA LYON (6e ch.), 26 janvier 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 6718
CA LYON (6e ch.), 26 janvier 2017 : RG n° 15/03693
Publication : Jurica
Extrait : « Le fabricant ne saurait valablement s’exonérer de sa responsabilité en cas de pannes provoquées par l’intrusion de corps étrangers prévisibles, démontrant intrinsèquement l’insuffisance du niveau de protection de l’équipement annoncé dans l’étiquetage.
L’appelante se prévaut donc vainement d’une clause abusive contenue dans les conditions générales de vente de la société Came France, excluant notamment sa garantie en cas de pannes provoquées par l’intrusion d’insectes. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
SIXIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 26 JANVIER 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 15/03693. Décision […] Juridiction de proximité de LYON, Au fond, du 18 décembre 2014 : R.G. n° 91-14-1019.
APPELANTE :
La société FRANCE-AUTOMATISMES.COM
Représentée par Maître Philippe M., avocat au barreau de LYON
INTIMÉ :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], Représenté par la SELARL B. AVOCATS, avocats au barreau de LYON
Date de clôture de l’instruction : 8 décembre 2015
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 3 janvier 2017
Date de mise à disposition : 26 janvier 2017
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré : - Dominique BOISSELET, président - Michel GAGET, conseiller - Catherine CLERC, conseiller, assistés pendant les débats de Martine SAUVAGE, greffier
A l’audience, Dominique BOISSELET a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Dominique BOISSELET, président, et par Martine SAUVAGE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES :
Le 11 janvier 2014, M. X. a passé commande pour le portail de sa propriété d’une motorisation électrique de marque Came, référence FA 40230 CB, sur le site internet de la société France-Automatismes.com, moyennant le prix de 1.004,72 euros TTC.
La motorisation est tombée en panne le 26 avril 2014. Selon M. X., des fourmis se sont introduites dans le dispositif électronique.
Après plusieurs messages, la société France-Automatismes.com a refusé de mettre en jeu la garantie du matériel au motif d’un manque d’isolation à l’installation.
Saisi par acte d’huissier du 4 juillet 2014 à la requête de M. X., le juridiction de proximité du tribunal de grande instance de Lyon a, par jugement du 18 décembre 2014 :
- ordonné la résolution de la vente de la motorisation de portail,
- condamné la Sarl (en réalité Sasu) France-Automatismes.com à payer à M. X. les sommes de :
- 1.004,72 euros avec intérêts légaux à compter du 15 juin 2014, date de la mise en demeure, à titre de remboursement du prix d’achat
- et 390 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance ;
- ordonné la restitution par M. X. à la société France-Automatismes.com, aux frais de celle-ci, sur demande postérieure à l’exécution de la décision ;
- dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;
- rejeté toutes autres demandes ;
- condamné la société France-Automatismes.com aux dépens.
La Sasu France-Automatismes.com a relevé appel de cette décision par déclaration reçue au greffe de la cour le 28 avril 2015.
Par dernières conclusions du 26 octobre 2015, la Sasu France-Automatismes.com demande à la cour d’infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 18 décembre 2014 par la juridiction de proximité de Lyon et, statuant à nouveau :
A titre principal,
- déclarer de cause extérieure et non couverte par les garanties légale et contractuelle, l’origine du préjudice subi par M. X. ;
- dire qu’il n’existe aucune cause de résolution judiciaire du contrat de vente conclu entre la société France-Automatismes.com et M. X. ;
- écarter conséquent toute responsabilité de la société France-Automatismes.com à ce titre ;
à titre subsidiaire,
- dire que la responsabilité de la société France-Automatismes.com sera limitée à la seule défaillance de la carte électronique renvoyée par M. X. et la condamner en conséquent à ne remplacer que la seule carte ou, à tout le moins, indemniser M. X. à hauteur de la seule valeur de cette carte ;
- rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires ;
- prendre acte que la société France Automatismes.com tient à la disposition de M. X. le boîtier et matériel qu’il a retournés en janvier 2015 ;
- condamner en tout état de cause M. X. à verser à la société France-Automatismes.com la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
- condamner le même aux entiers dépens distraits au profit de Maître M.
Par dernières conclusions du 9 novembre 2015, M. X. soutient la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société France-Automatismes.com et ordonné la résolution de la vente.
Il demande à la cour de :
- confirmer le montant de 1.004,72 euros avec intérêts légaux à compter du 5 juin 2014, date d’une mise en demeure,
- porter le montant des dommages et intérêts à la somme de 780 euros,
- condamner la société France-Automatismes.com au paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société France-Automatismes.com aux dépens distraits au profit de la Selarl B.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 8 décembre 2015.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
L’appelante verse aux débats une attestation établie le 17 septembre 2015 par le directeur commercial de la société Came France, selon laquelle ses services techniques ont examiné la carte électronique du moteur et confirmé le court-circuit provoqué par l’intrusion de fourmis.
Le premier juge a estimé que le matériel livré présentait un défaut d’étanchéité et que c’est bien cette défectuosité et non celle de l’installation qui est en cause. Il a prononcé la résolution de la vente sur le fondement de l’article L. 211-5 du code de la consommation.
L’appelante soutient que M. X. a choisi un matériel non étanche mais devant seulement résister aux projections d’eau et s’est dispensé de le faire installer par un professionnel agréé, en dépit de la suggestion qui lui était faite.
Elle indique qu’elle a transmis au fabricant, la société Came, la carte électronique renvoyée par le client et, au vu des observations du fournisseur, a conclu que la dégradation de la carte électronique résultait de son utilisation défectueuse, à savoir la non-isolation des entrées de câbles et éléments extérieurs qui ont conduit aux dégâts électriques allégués.
M. X. a établi un document photographique qu’il a intitulé « expertise suite refus SAV » dont il ressort que le bloc moteur porte une étiquette indiquant un classement selon la norme internationale CEI 60529 à l’indice de protection IP 54 correspondant notamment à la protection contre les dépôts de poussière (5) et contre les projections d’eau (4).
La cotation 5 relative à l’intrusion des corps étrangers est nécessairement plus protectrice que la cotation 4 relative à la protection contre les corps étrangers de plus d’un millimètre. L’intrusion d’insectes dans le bloc de motorisation suffit à démontrer que celui-ci n’était pas protégé au niveau annoncé.
Vainement, la société France Automatismes.com soutient que l’intrusion des fourmis serait causée par un défaut de pose des câbles d’alimentation :
D’une part, ce défaut n’est pas démontré, alors que les passages de câbles visibles sur les clichés figurant dans la note établie par M. X. ne donnent lieu à aucune critique technique de l’appelante.
D’autre part, la notice de montage ne contient pas de disposition particulière quant à l’isolation du passage des câbles, l’équipement fourni se suffisant à lui-même. Il est seulement préconisé de dégager les zones correspondant au déplacement du portail et au rayon d’action des cellules photoélectriques.
De manière générale, il n’est démontré aucun défaut d’installation de l’équipement et, s’il est effectivement recommandé la pose par un professionnel, il ne s’agit pas d’une obligation, le matériel étant vendu directement aux particuliers avec une notice d’installation.
La panne n’est pas non plus démonstratrice d’un défaut d’entretien de l’installation par M. X., étant de surcroît observé qu’elle est survenue dans un délai de moins de 4 mois après l’acquisition du matériel.
La protection aux intempéries, comme à l’introduction de corps étrangers prévisibles (poussières, insectes...), d’un équipement électrique destiné à fonctionner en extérieur, est une condition essentielle de son bon fonctionnement.
Il résulte de l’article L. 211-5 du code de la consommation que le bien vendu doit présenter les qualités qu’un acheteur peut légitimement attendre eu égard notamment à son étiquetage.
Le fabricant ne saurait valablement s’exonérer de sa responsabilité en cas de pannes provoquées par l’intrusion de corps étrangers prévisibles, démontrant intrinsèquement l’insuffisance du niveau de protection de l’équipement annoncé dans l’étiquetage.
L’appelante se prévaut donc vainement d’une clause abusive contenue dans les conditions générales de vente de la société Came France, excluant notamment sa garantie en cas de pannes provoquées par l’intrusion d’insectes.
L’article L. 211-7 du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur à la date d’acquisition du bien, fait présumer que le défaut, apparu moins de 6 mois après la délivrance du bien, existait déjà lors de celle-ci.
Par ailleurs, M. X. est fondé à refuser le seul remplacement de la carte électronique, dès lors que celui-ci ne serait pas de nature à mettre fin au défaut d’étanchéité du moteur et, par conséquent, à prévenir le renouvellement de la panne.
Il résulte de l’article L. 211-10 du même code que l’acheteur peut rendre le bien et se faire restituer le prix si la réparation ou le remplacement du bien n’ont pu être mis en œuvre dans le mois suivant sa réclamation.
Le premier juge a donc fait une exacte appréciation du litige en prononçant la résolution de la vente à la demande de M. X. et ordonné la restitution du prix à l’acquéreur et du matériel au vendeur.
La résolution du contrat remet les parties dans l’état qui aurait été le leur si elles n’avaient pas contracté. M. X. ne peut donc réclamer l’indemnisation d’un préjudice de jouissance stricto sensu, tenant à la privation du fonctionnement de l’appareil, mais d’un préjudice causé par les tracas occasionnés par la panne et les démarches subséquentes. L’indemnité de 390 euros fixée par le premier juge constitue la juste réparation de ce préjudice.
L’appelante, partie perdante, a la charge des dépens de 1ère instance et d’appel, ainsi que des frais irrépétibles exposés par l’intimé à concurrence de 2.500 euros.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Confirme le jugement prononcé le 18 décembre 2014 par le juge de proximité de Lyon en toutes ses dispositions, sauf à préciser qu’il est rendu à l’encontre de la Sasu France-Automatismes.com et non de la Sarl France-Automatismes.com ;
Condamne la Sasu France-Automatismes.com aux dépens d’appel ;
Condamne la Sasu France-Automatismes.com à payer à M. X. la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, avec droit de recouvrement direct au profit de la Selarl B. ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT