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CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 22 mars 2017

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 22 mars 2017
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), Pôle 5 ch. 4
Demande : 14/11255
Date : 22/03/2017
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
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CERCLAB - DOCUMENT N° 6779

CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 22 mars 2017 : RG n° 14/11255 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Dès lors, il n'apparaît pas établi que la société B.-P. Vins ait été contrainte par Monsieur P. de régler des honoraires et frais disproportionnés révélant un déséquilibre significatif dans les obligations respectives des parties, et que les conditions prévues à l'article L. 442-6 du code de commerce, dans son ancienne comme dans sa nouvelle version, pour retenir la responsabilité de Monsieur P. soient réunies. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 5 CHAMBRE 4

ARRÊT DU 22 MARS 2017

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 14/11255. Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 avril 2014 -Tribunal de Commerce de MARSEILLE - RG n° 2013F01939.

 

APPELANTS :

Monsieur P.

demeurant [adresse], né le [date], Représenté par Maître Alain F. de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

SARL P.

Immatriculée au RCS de Carcassonne sous le numéro XX, ayant son siège social [adresse], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Alain F. de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

 

INTIMÉS :

Monsieur B.

demeurant [adresse], né le [date] à [...], Représenté par Maître Jacques M. de la SELEURL Jacques M. Avocat à la Cour, avocat au barreau de PARIS, toque : D0546, Ayant pour avocat plaidant Maître Jean-Paul C., avocat au barreau de TOULOUSE

SARL B.-P. VINS

Immatriculée au RCS de Carcassonne sous le numéro B YY, ayant son siège social [adresse], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Jacques M. de la SELEURL Jacques M. Avocat à la Cour, avocat au barreau de PARIS, toque : D0546, Ayant pour avocat plaidant Maître Jean-Paul C., avocat au barreau de TOULOUSE

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 1er février 2017, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame Irène LUC, Présidente de chambre, Madame Dominique MOUTHON VIDILLES, Conseillère, Monsieur François THOMAS, Conseiller, rédacteur, qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur François THOMAS dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : M. Vincent BRÉANT

ARRÊT : - contradictoire, - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Irène LUC, Présidente et par Monsieur Vincent BRÉANT, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DES FAITS :

Le 6 novembre 1998, Monsieur P. a promis de céder son fonds de commerce de courtage de vins exploité en location gérance par la SARL P., à Monsieur B.

Le 3 janvier 2002, Monsieur B. et Monsieur P. se sont associés au sein de la société de courtage de vins « B.-P. vins », Monsieur B. détenant 95 % du capital et Monsieur P. 5%.

Le 4 mars 2002, Monsieur P. a cédé à la société B.-P. Vins son fonds de commerce de courtage de vins, conformément à la promesse.

Le même jour, il s'est engagé à transmettre à titre gracieux à Monsieur B. sa carte personnelle de courtier en vins le jour où il cesserait d'être associé de la société B.-P. vins.

La société B.-P. vins a alors exercé l'activité de courtage.

Monsieur P., titulaire de la carte de courtier, intervenait à titre de prestataire via sa société, la société P., et facturait à ce titre ses prestations à la société B.-P. vins.

Le 28 février 2013, la société B.-P. vins a cédé son fonds de commerce à la société G.-P. courtage dont le gérant est Madame G. et le co-gérant Monsieur P.

Monsieur P. a, de son côté, cédé à Monsieur B. pour un euro, les 5 % qu'il détenait dans le capital de la société B.-P. vins.

Le 8 mars 2013, Monsieur B. a alors demandé à Monsieur P. d'exécuter l'engagement de cession à son profit de la carte de courtier en vins et s'est vu opposer un refus par Monsieur P.

Soutenant que Monsieur P. avait usé de manœuvres dolosives et exercé une violence économique, Monsieur B. et la société B.-P. vins ont assigné Monsieur P. et la société P., par acte du 26 juin 2013, devant le tribunal de commerce de Marseille.

Par jugement du 17 avril 2014, le tribunal de commerce de Marseille :

- s'est déclaré compétent territorialement,

- a déclaré irrecevable la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur P. et la société P. en ce qu'ils invoquent la prescription,

- a dit que Monsieur P. s'est rendu fautif de manœuvres dolosives engageant ainsi sa responsabilité,

- a condamné Monsieur P. à payer à la société B.-P. vins et Monsieur B. la somme de 50.000 euros au titre de dommages et intérêts au taux légal et celle de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- a condamné Monsieur P. aux dépens TTC de la présente instance,

- a dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire,

- a rejeté pour le surplus toutes autres demandes, fins et conclusions contraires aux dispositions du présent jugement.

La cour est saisie de l'appel interjeté par Monsieur P. et la SARL P. du jugement du tribunal de commerce de Rennes du 3 juillet 2014 [N.B. conforme à la minute Jurica, l’arrêt évoquant ailleurs un jugement du tribunal de commerce de Marseille].

 

Par conclusions du 25 novembre 2014, la société P. et Monsieur P. demandent à la cour de :

vu les dispositions des articles 1116 du code Civil, L. 110-4 et L. 442-6 du code de Commerce, à titre principal :

- surseoir à statuer dans l'attente de la décision de la cour d'appel d'Aix en Provence,

à titre subsidiaire :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Marseille en ce qu'il a rejeté les demandes formulées au titre de l'article 442-6-1-4ème du code de commerce par Monsieur B. et de la société B.-P. et notamment la demande en paiement de 570.000 euros au titre de la violence économique,

- l'infirmer pour le surplus

- constater que Monsieur P. n'a pas usé de manœuvres dolosives et de la violence économique créés pour les besoins de la présente cause et par voie de conséquence débouter Monsieur B. et la société B.-P. de toutes demandes de dommages et intérêts à l'encontre de Monsieur P. et de la société P.,

- débouter les intimés de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- condamner Monsieur B. et la société B.-P. vins à payer la somme de 25.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la présente instance dont distraction de ceux d'appel au profit de la SCP AFG, représentée par Maître Alain F. Avocat à la cour d'appel de Paris, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

 

Par conclusions du 29 septembre 2014, la société B.-P. vins et Monsieur B. demandent à la cour de :

vu l'article L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce,

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Marseille en ce qu'il a déclaré irrecevable la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur P. et la société P. en ce qu'ils invoquent la prescription,

-dire et juger n'y avoir lieu à surseoir à statuer,

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Marseille en ce qu'il a jugé que Monsieur P. s'était rendu fautif de manœuvres dolosives engageant sa responsabilité,

- réformer pour le surplus le jugement frappé d'appel :

/ condamner Monsieur P. au paiement d'une somme de 119.918,43 euros à titre de dommages et intérêts à la société B.-P. vins en réparation du préjudice consécutif à la faute dolosive commise,

/ dire que Monsieur P. a engagé sa responsabilité sur le fondement de l'article L. 442-6 en soumettant son partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties,

/ dire en effet que sans le concours de Monsieur P. qui imposait une facturation sans lien avec la nature de ses prestations, aucune exploitation du fonds de commerce de la société B.-P. ne pouvait être poursuivie, malgré l'acquisition d'un fonds en 2002,

/ condamner en conséquence Monsieur P. au paiement d'une somme de 570.000 euros de dommages et intérêts à Monsieur B. et à la société B.-P. vins en réparation de ce préjudice,

- condamner solidairement la société P. et Monsieur P. au paiement d'une somme de 25.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la présente procédure.

 

Par ordonnance du 31 mars 2015, le conseiller de la mise en état a déclaré l'appel interjeté par Monsieur P. et la société P. recevable, et débouté Monsieur B. et la société B.-P. de leurs demandes.

Par arrêt du 17 mars 2016, la cour d'appel d'Aix-en-Provence, saisie par déclaration d'appel de Monsieur P. à l'encontre du jugement du tribunal de commerce de Marseille du 17 avril 2014, a :

- constaté que la cour d'appel de Paris est investie du pouvoir juridictionnel exclusif de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce,

- dit n'y avoir lieu à disjonction de l'appel portant sur l'application de l'article L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce, des autres demandes,

- renvoyé la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris pour qu'il soit statué sur l'ensemble des demandes et des dépens.

Par ordonnance du 13 septembre 2016, le conseiller de la mise en état a procédé à la jonction des deux affaires, et dit qu'elle se poursuivraient sous le numéro 14/11255.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIVATION :

Au vu de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et de la jonction intervenue, la demande de sursis à statuer apparaît sans objet.

A la suite de cet arrêt, la cour est saisie de l'ensemble du litige, tant des demandes présentées sur l'article 1382 alors applicable du code civil que sur l'article L. 442-6 du code de commerce.

Par ailleurs, les demandes relatives à la prescription ne figurant pas au dispositif des conclusions des appelants, la cour n'en est pas saisie, conformément à l'article 954 du code de procédure civile.

 

Sur les demandes principales :

Les appelants soutiennent que les chiffres d'affaires de la société P. figuraient dans l'acte de cession du 4 mars 2002 et n'ont fait l'objet d'aucun contrôle, que Monsieur P. assurait des prestations pour le compte de la société B.-P. qui représentait une part non négligeable de son chiffre d'affaires, et était tenu d'une clause de non-concurrence.

Ils contestent le prétendu détournement d'activité de la clientèle et soutiennent que la situation de l'année 2006 ne peut être une « tromperie commerciale » issue d'une démarche dolosive.

Ils ajoutent que l'intervention de Monsieur P. dans la société B.-P. tient à son statut juridique de courtier en vins et à sa grande expérience du marché et de ses intervenants. Ils affirment qu'il revenait à Monsieur B. de réagir en 2006 face à la conjoncture vitivinicole, que les prestations de Monsieur P. ont été négociées annuellement et payées par Monsieur B., en qualité de gérant de la société B.P. Vins, qui ne s'en est jamais plaint et n'a jamais alerté Monsieur P. sur l'état de la société.

Ils relèvent que la responsabilité de Monsieur P. n'a été retenue que sur le fondement de l'article 1382 du code civil, et que le jugement n'a pas visé les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce.

Ils reconnaissent que Monsieur P. a commis une erreur en signant l'engagement de transmettre sa carte de courtier en vins, mais avancent que Monsieur B. était parfaitement au courant, au moment de la signature de la cession, de la situation juridique.

Ils contestent enfin toute violence économique.

De leur côté, les intimés affirment qu'il est inconcevable que les appelants prétendent que les chiffres fournis n'aient fait l'objet d'aucun contrôle alors que l'ensemble des procès-verbaux d'assemblée générale a été signé et qu'un quitus a été donné à la gérance.

Selon eux, Monsieur P. était au courant de la situation difficile dans laquelle se trouvait la société mais a continué d'augmenter ses facturations, épuisant la trésorerie car étant le seul habilité à effectuer une activité de courtage.

Ils soutiennent que Monsieur P. a commis un dol et surpris le consentement de Monsieur B., dol caractérisé par sa qualité de président du syndicat national des courtiers s'adressant à un jeune négociant en vins, et par le fait que ses fonctions lui permettaient de refuser l'agrément de Monsieur B. Ils ajoutent que Monsieur P. a formulé un engagement, la cession de sa carte de courtier, qu'il savait impossible à remplir.

Ils déclarent avoir peu à peu découvert que Monsieur P. cherchait à détourner la clientèle de la société B.-P. Vins vers sa société P. et augmentait sensiblement ses facturations, agissements qui asphyxiaient la société B.-P. Vins.

Ils avancent que Monsieur P. n'a jamais entendu permettre à Monsieur B. d'exercer l'activité de courtier de manière indépendante sur la clientèle qu'il lui a vendue en 2002.

 

Sur le dol

L'article 1116 du code civil prévoit que : « Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.

Il ne se présume pas et doit être prouvé. »

Il relève de la loi n° 49-1652 du 31 décembre 1949 réglementant la profession de courtiers en vins dits « courtiers de campagne » et du décret du 27 mars 1951 dans leur version alors applicable, qu'à l'époque des faits la carte de professionnel de courtiers en vins était délivrée après avis d'une commission facultative présidée par le président de la chambre de commerce et composée de deux membres des syndicats des négociants en vins et commissionnaires, de deux membres des syndicats de courtiers en vins et de deux membres des associations viticoles les plus représentatives.

Le fait que l'engagement irrévocable de Monsieur P. de transmettre à titre gracieux la carte de courtier en vins dont il était titulaire à Monsieur B. ait été pris le jour même de la signature de la vente du fonds de commerce de Monsieur P. à la société B.-P. Vins dont Monsieur B. était gérant et possédait 95 % des parts sociales, met en évidence l'importance que revêtait cet engagement irrévocable dans la vente de ce fonds.

Monsieur P. ne conteste pas qu'il était président du syndicat des courtiers en vins en 2002 et ne pouvait donc ignorer, lorsqu'il s'est engagé irrévocablement à transmettre à titre gracieux à Monsieur B. sa carte personnelle de courtier en vins lorsqu'il cesserait d'être associé de la société B.-P. vins, le caractère incessible de cette carte.

Cet engagement irrévocable pris concomitamment avec la cession de son fonds de commerce de courtage de vins à la société B.-P. Vins est de nature à avoir décidé cette société et son gérant Monsieur B., à procéder à cette acquisition, la société B.-P. Vins ayant pour objet la commission et le courtage en vins de sorte que la possession d'une telle carte est nécessaire pour son exploitation.

Nul ne pouvant invoquer sa propre turpitude, Monsieur P. ne peut faire état de l'absence de valeur juridique de son engagement du 4 mars 2002 de céder sa carte de courtier en vins.

La poursuite de l'activité de courtier en vins par Monsieur P. après la cession de ses parts dans la société B.-P. Vins et la vente par cette société de son fonds de commerce de commission et de courtage en vins à la société G.-P., dont Monsieur P. est co-gérant, révèle également son absence d'intention de céder ladite carte mais au contraire sa volonté de poursuivre cette activité professionnelle de courtier après son départ de la qualité d'associé de la société B.-P. Vins.

Aussi il ressort de ces seuls éléments, sans qu'il ne soit besoin d'examiner les autres éléments avancés par les intimés, que l'intention dolosive est caractérisée.

 

Sur l'article L. 442-6 du code de commerce :

Les appelants contestent tout fait de violence, Monsieur P. percevant des frais et honoraires fixés chaque année en contrepartie de son travail, et n'ayant pas le contrôle sur l'activité ou le chiffre d'affaires réalisé par la société B.-P. Vins.

Les intimés allèguent que Monsieur P. pratiquait des honoraires sans lien avec la pratique et qui étranglaient la société, contrainte car son activité ne pouvait se poursuivre sans la détention de cette carte, et qu'il a imposé des tarifs alors que la société B.-P. Vins perdait de l'argent, provoquant ainsi un déséquilibre significatif dans la trésorerie.

L'article L. 442-6 du code de commerce prévoit qu’« engage sa responsabilité de son auteur et l'oblige à le réparer le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : ...

2° de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; ...

4° d'obtenir ou de tenter d'obtenir, sous la menace d'une rupture totale ou partielle des relations commerciales, des conditions manifestement abusives concernant les prix, les délais de paiement, les modalités de vente ou les services ne relevant pas des obligations d'achat ou de vente ; ... »

En l'occurrence, si Monsieur P., actionnaire minoritaire de la société B.-P. Vins, détenait la carte de courtier en vins dont la possession était nécessaire pour l'activité de cette société, et facturait ses honoraires à cette société, il n'est pas justifié que celle-ci ou son gérant Monsieur B. se soit plaint de leur caractère excessif ou disproportionné au regard du chiffre d'affaires ou des résultats de cette société, et ces prestations ont été acceptées par la société B.-P. Vins, dont l'activité de courtage a commencé en 2002 et a cessé avec la vente de son fonds de commerce en 2013.

Les intimés mettent en avant le fait qu'en 2006 les honoraires sollicités par Monsieur P. aient augmenté alors que la société B.-P. Vins subissait une perte, mais ont accepté de procéder à leur règlement sans manifester par aucun moyen une quelconque opposition au montant sollicité, ni souligner que le montant de ces honoraires leur paraissait trop important.

Il sera par ailleurs relevé que la société B.-P. Vins pouvait faire appel à un autre courtier que Monsieur P., si elle estimait ses honoraires excessifs, et a ainsi travaillé avec Monsieur B., qui précise que son contrat de travail a commencé « début janvier 2012 (') et s'est achevé en décembre 2005 », ce qui établit l'absence de dépendance économique.

Monsieur B. ne justifie pas non plus avoir tenté d'obtenir lui-même la qualification de courtier en vins, et ne peut se limiter à alléguer que Monsieur P. avait toute possibilité de l'empêcher d'obtenir cette carte.

Par ailleurs, et faute pour les intimés d'établir le contraire, les prestations de Monsieur P. étaient réelles, et son intervention nécessaire à l'activité même de la société B.-P. Vins.

Dès lors, il n'apparaît pas établi que la société B.-P. Vins ait été contrainte par Monsieur P. de régler des honoraires et frais disproportionnés révélant un déséquilibre significatif dans les obligations respectives des parties, et que les conditions prévues à l'article L. 442-6 du code de commerce, dans son ancienne comme dans sa nouvelle version, pour retenir la responsabilité de Monsieur P. soient réunies.

Par conséquent, la décision du tribunal de commerce de Marseille sera confirmée sur ce point.

 

Sur l'indemnisation du préjudice :

Les intimés sollicitent que la condamnation, au titre du dol, soit fixée à 119.918,43 euros, soit la différence entre le montant de l'acquisition du fonds de commerce de Monsieur P. en 2002 (243.918,43 euros) et celui auquel la société B.-P. Vins a revendu son fonds de commerce en 2013 (124.000 euros).

Cependant, comme l'a relevé le tribunal de commerce, la détermination du prix de vente d'un fonds de commerce et son évolution depuis son achat dépend d'une pluralité de facteurs liés à l'activité économique même, et les intimés ne peuvent déduire de la différence entre son prix d'acquisition et son prix de vente qu'elle correspond à l'indemnisation du dol.

Le tribunal de commerce sera confirmé en ce qu'il a apprécié à 50.000 euros le montant de cette indemnisation.

 

Sur les autres demandes :

La condamnation prononcée à l'encontre des appelants sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens en 1ère instance sera confirmée.

Par ailleurs, succombant au principal en appel ils seront également condamnés au paiement des dépens de la procédure d'appel, ainsi qu'au paiement d'une somme de 3.000 euros à chacun des intimés sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

DÉCLARE la demande de sursis sans objet,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant

CONDAMNE Monsieur P. et la société P. aux dépens d'appel

CONDAMNE Monsieur P. et la société P. à régler à chacun des intimés la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier                La Présidente

Vincent BRÉANT    Irène LUC