CA PARIS (pôle 4 ch. 9), 23 mars 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 6789
CA PARIS (pôle 4 ch. 9), 23 mars 2017 : RG n° 14/18752
Publication : Jurica
Extrait : « C'est ainsi le contrat litigieux est signé par Monsieur X. avec la société CHG MERIDIAN, à qui le matériel aurait été cédé par la société MSI aux fins de location, mais porte également la signature de la société FRANFINANCE LOCATION en qualité d'établissement cessionnaire à qui le matériel est « cédé » pendant la durée du contrat et à qui normalement sont versés les loyers pendant la durée de la cession.
Ce montage apparaît totalement artificiel puisqu'il n'est, en effet, fait aucune référence au cessionnaire dans les conditions générales du contrat alors qu'il est censé être le propriétaire « temporaire » du matériel pendant la durée de la location, et que les loyers ont été perçus par la société CHG MERIDIAN, bien qu'elle ne soit plus propriétaire du matériel, et non par la société FRANFINANCE par prélèvement sur le compte du client, et la société MERIDIAN n'explique d'ailleurs pas l'intérêt économique d'un tel montage qui n'apparaît pas clairement évident.
En revanche, il peut parfaitement induire en erreur le client sur la nature du contrat souscrit en ce qu'il lui laisse croire qu'il s'agit d'un crédit-bail dans lequel le fournisseur cède le matériel à un organisme financier qui le lui achète, à charge pour le preneur de verser les échéances au crédit bailleur qui lui cède le matériel en fin de contrat, opération à laquelle Mr D. avait l'habitude de recourir pour l'achat de son matériel professionnel.
Dès lors, il est parfaitement démontré que le consentement de Monsieur X. a été déterminé par l'idée qu'il avait des droits qu'il pensait obtenir par l'effet du contrat à savoir la possibilité d'acquérir le matériel à l'issue de la période de location.
Il s'ensuit que le contrat est nul en application de l'article 1110 du code civil (dans son ancienne rédaction applicable au contrat) et le jugement sera donc confirmé dans toutes ses dispositions. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 4 CHAMBRE 9
ARRÊT DU 23 MARS 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 14/18752 (4 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 avril 2014 - Tribunal d'Instance de LAGNY SUR MARNE - RG n° 11-13-2075.
APPELANTE :
SASU CHG - MERIDIAN FRANCE exerçant sous le nom commercial CHG - MERIDIAN COMPUTER FINANCE FRANCE
n° SIRET : XXX, Représentée par Maître Serena A., avocat au barreau de PARIS, toque : B0489, Assistée de Maître B. Éric, avocat au barreau de Versailles, toque : 350, Substituée à l'audience par Maître Serena A., avocat au barreau de PARIS, toque : B0489
INTIMÉ :
Monsieur X.
né [date] à [ville], Représenté par Maître Anne G.-B. de la SCP SCP G. B., avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111, Ayant pour avocat plaidant Maître Pierre K., avocat au barreau de MEAUX, toque : 16
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 8 février 2017, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame Patricia GRASSO, Conseillère faisant fonction de présidente, Madame Françoise JEANJAQUET, Conseillère, Madame Marie MONGIN, Conseillère, qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Monsieur Thibaut SUHR
ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Patricia GRASSO, Conseillère faisant fonction de présidente et par Madame Camille Lepage, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Par acte délivré le 13 juillet 2012, la société CHG MERIDIAN FRANCE a assigné Monsieur X. devant le tribunal d'instance de Lagny-sur-Marne aux fins d'obtenir notamment la condamnation de ce dernier à lui payer la somme de 3.946,80 euros au titre des loyers impayés outre une indemnité de non restitution du matériel, suite à la résiliation d'un contrat du 22 juillet 2008 portant sur location d'un matériel médical pour son cabinet de kinésithérapie.
Par jugement du 22 avril 2014, le tribunal a, constaté la nullité du contrat du 22 juillet 2008 pour erreur sur la nature même du contrat et ses qualités substantielles, condamné la société CHG MERIDIAN à verser à Monsieur X. la somme de 12.827,10 euros, ordonné à Monsieur X. la restitution de l'appareil LASER-KILINA à la société CHG MERIDIAN, condamné la société CHG MERIDIAN à payer Monsieur X. la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, débouté les parties du surplus de leurs demandes, condamné la société CHG MERIDIAN aux dépens.
Par déclaration en date du 12 septembre 2014, la société GHG MERIDIAN FRANCE a interjeté appel de la décision.
Aux termes de ses dernières conclusions du 28 avril 2014, la société appelante demande à la cour d'infirmer le jugement et de condamner Monsieur X. à lui payer la somme de 3.946,80 euros au titre des loyers impayés, la somme de 10.536,90 euros à titre de provision au titre de l'indemnité de non restitution arrêtée au 18 décembre 2014, dire que cette indemnité sera réévaluée chaque mois jusqu'à la parfaite restitution du matériel loué, condamner Monsieur X. à lui payer une somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens qui pourront être recouvrés directement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Elle soutient que Monsieur X. a souscrit un contrat de location pure et non un contrat de crédit-bail ainsi qu'il ressort des stipulations de celui-ci, qu'il a produit en première instance un document dénommé : « Acceptation du contrat de location et de la cession à l'établissement cessionnaire » qui était tronqué, alors que les conditions générales figurant au verso du contrat, que Monsieur X. n'a jamais contesté avoir signé, mentionnent expressément un contrat de location, soit une convention entre un loueur et un locataire relative à la location des produits désignés, que le contrat ne mentionne pas l'existence d'une option d'achat, ou la possibilité d'acquérir le matériel à un prix donné à l'issue des 39 premiers loyers et qu'il peut y avoir dans ce type de contrat l'intervention d'un cessionnaire.
Elle fait valoir que Monsieur X. se prévaut d'une erreur qui n'est pas excusable, dans la mesure où il est un professionnel de santé, qu'il a conclu ce contrat pour les besoins de son activité professionnelle qui porte sur un matériel professionnel choisi sous sa seule responsabilité avec le fournisseur de son choix.
Elle fait valoir en outre que Monsieur X. se prévaut subsidiairement à tort des dispositions de la loi CHATEL, L. 136-1 du code de la consommation et de la réglementation sur les clauses abusives, dès lors qu'il n'est pas un consommateur ou un non-professionnel.
Selon ses dernières conclusions du 5 février 2015, Monsieur X. sollicite la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et subsidiairement, demande à la cour de condamner la société GHG MERIDIAN à lui restituer les échéances indûment perçues par prélèvement bancaire à hauteur de 986,70 euros, de dire qu'il restituera l'appareil Laser K. à la société CHG MERIDIAN, les frais engagés pour cette restitution devant lui être remboursés par MERIDIAN et en tout état de cause, de condamner l'appelante à lui payer la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés directement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Monsieur X. soutient que son consentement a été manifestement vicié au moment de la souscription du contrat, qu'il a été victime d'une erreur sur les conditions substantielles du contrat, ayant pensé souscrire un contrat de crédit-bail et que c'est à bon droit que le tribunal d'instance a considéré que bien que le contrat soit intitulé « contrat de location », la présence de la signature de l'établissement cessionnaire démontre qu'il s'agit d'un contrat de crédit-bail, que son seul interlocuteur a été un représentant du fournisseur, la société MSI et que les pourparlers et négociations ont portées sur un contrat de crédit-bail.
Subsidiairement, il estime que la société CHG MERIDIAN n'a pas respecté les dispositions de la loi CHATEL et plus précisément de l'article L. 136-1 en ne l'avisant pas, trois mois avant la date limite du résiliation, de la possibilité de ne pas reconduire le contrat et que la clause prévoyant un délai de préavis de 6 mois est léonine et donc réputée non écrite.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE,
Le premier juge, par des motifs pertinents que la cour ne peut qu'adopter et qui répondent suffisamment aux moyens soulevés par l'appelante repris pour l'essentiel dans ses écritures d'appel, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et a légalement motivé sa décision.
Il sera souligné que Monsieur X. a directement traité avec le fournisseur du matériel la société MSI qui n'apparaît d'ailleurs pas au contrat litigieux du 22 juillet 2008 et dont le représentant Monsieur F., aux termes d'un courrier adressé à son client le 9 mars 2012 a confirmé que la proposition de contrat portait bien sur un crédit-bail offrant la possibilité en fin de contrat d'acquérir l'appareil pour une somme résiduelle et qu'il n'a jamais été question d'une location sans option d'achat ce qui aurait été complètement hors de propos pour ce type d'appareil, déclarations réitérées aux termes d'une attestation du 28 janvier 2013.
Il est ainsi parfaitement établi que Monsieur X. souhaitait conclure un contrat de crédit-bail lui permettant devenir à l'issue de la période de location propriétaire du matériel moyennant le versement d'une indemnité résiduelle
Si le contrat souscrit par Monsieur X. dénommé « contrat de location » ne fait effectivement aucune référence à l'option d'achat à la fin de la période de contrat et au prix résiduel du matériel ni dans les conditions particulières ni dans les conditions générales, il convient d'observer que s'il s'adresse à un professionnel, ce professionnel exerçant une profession para médicale n'a aucun compétence juridique particulière en matière de crédit-bail de matériels professionnels s'agissant au demeurant de contrats complexes peu lisibles quant à leur montage juridique puisqu'ils comportent l'intervention de plusieurs personnes à des niveaux différents.
C'est ainsi le contrat litigieux est signé par Monsieur X. avec la société CHG MERIDIAN, à qui le matériel aurait été cédé par la société MSI aux fins de location, mais porte également la signature de la société FRANFINANCE LOCATION en qualité d'établissement cessionnaire à qui le matériel est « cédé » pendant la durée du contrat et à qui normalement sont versés les loyers pendant la durée de la cession.
Ce montage apparaît totalement artificiel puisqu'il n'est, en effet, fait aucune référence au cessionnaire dans les conditions générales du contrat alors qu'il est censé être le propriétaire « temporaire » du matériel pendant la durée de la location, et que les loyers ont été perçus par la société CHG MERIDIAN, bien qu'elle ne soit plus propriétaire du matériel, et non par la société FRANFINANCE par prélèvement sur le compte du client, et la société MERIDIAN n'explique d'ailleurs pas l'intérêt économique d'un tel montage qui n'apparaît pas clairement évident.
En revanche, il peut parfaitement induire en erreur le client sur la nature du contrat souscrit en ce qu'il lui laisse croire qu'il s'agit d'un crédit-bail dans lequel le fournisseur cède le matériel à un organisme financier qui le lui achète, à charge pour le preneur de verser les échéances au crédit bailleur qui lui cède le matériel en fin de contrat, opération à laquelle Mr D. avait l'habitude de recourir pour l'achat de son matériel professionnel.
Dès lors, il est parfaitement démontré que le consentement de Monsieur X. a été déterminé par l'idée qu'il avait des droits qu'il pensait obtenir par l'effet du contrat à savoir la possibilité d'acquérir le matériel à l'issue de la période de location.
Il s'ensuit que le contrat est nul en application de l'article 1110 du code civil (dans son ancienne rédaction applicable au contrat) et le jugement sera donc confirmé dans toutes ses dispositions.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Confirme le jugement dans toutes ses dispositions ;
Condamne la société CHG MERIDIAN à payer à Monsieur X. la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
La condamne aux dépens de l'appel qui pourront être recouvrés directement par maître G.-B., avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le greffier Le conseiller faisant fonction de président