CA POITIERS (2e ch. civ.), 2 mai 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 6829
CA POITIERS (2e ch. civ.), 2 mai 2017 : RG n° 16/01357 ; arrêt n° 276
Publication : Jurica
Extrait : « L'article 8 des conditions générales du contrat de location signé entre les parties le 21 août 2012 stipule quant à lui : « En cas de défaillance dans l'exécution du contrat, le bailleur pourra exiger la résiliation du contrat, la restitution du véhicule, le paiement des loyers échus et non réglés, ainsi qu'une indemnité de résiliation. (...) L'indemnité de résiliation est égale à la différence entre d'une part la valeur résiduelle hors taxes du bien stipulée au contrat, augmentée de la valeur actualisée à la date de résiliation du contrat, de la somme hors taxes des loyers non encore échus, et d'autre part, la valeur vénale hors taxes du bien restitué ».
Cette clause reprend les dispositions légales et réglementaires précitées et ne constitue donc pas une clause abusive. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 2 MAI 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 16/01357. Arrêt n° 276. Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 25 février 2016 rendu par le Tribunal d'Instance de LA ROCHE-SUR-YON.
APPELANT :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], Ayant pour avocat plaidant Maître Jacques S. de la SELARL S. ET ASSOCIES, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON.
INTIMÉE :
SA TOYOTA FRANCE FINANCEMENT
Ayant pour avocat postulant Maître Jérôme C. de la SELARL LEXAVOUE POITIERS - ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS, Ayant pour avocat plaidant Maître Jérôme G. de la SELARL JEROME G. ET ASSOCIES, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT.
COMPOSITION DE LA COUR : En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 7 mars 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant : Madame Carole CAILLARD, Conseiller. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Béatrice SALLABERRY, Présidente de chambre, Madame Carole CAILLARD, Conseiller, Monsieur Laurent WAGUETTE, Conseiller.
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU.
ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, - Signé par Madame Béatrice SALLABERRY, Présidente de chambre, et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :
Selon acte sous seing privé en date du 21 août 2012, la société Toyota France Financement et Monsieur X. ont conclu un contrat de location avec option d'achat pour un véhicule Toyota Hilux moyennant un premier loyer de 4.105,10 euros puis 59 loyers de 749,64 euros.
Suite au défaut de paiement des loyers à compter du 5 juin 2013, la société Toyota a adressé le 6 mars 2014 une lettre recommandée avec accusé de réception à Monsieur X. l'informant de la résiliation du contrat et du montant de la créance exigible à hauteur de 41.338,59 euros puis l'a fait assigner en paiement par acte du 20 octobre 2014 devant le tribunal d'instance de La Roche-sur-Yon. M. X. a soulevé le caractère abusif de la clause 8 du contrat de crédit, relatif à la défaillance du locataire et sollicité à titre subsidiaire des délais de paiement.
Par jugement du 25 février 2016, le tribunal d'instance de La Roche-Sur-Yon a :
- condamné M. X. à payer à la société Toyota France Financement la somme de 41.018,28 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2014,
- ordonné la remise immédiate du véhicule Toyota Hilux Double Cabine par Monsieur X. à la société Toyota France Financement afin que ce dernier soit vendu aux enchères, sauf la possibilité pour le défendeur de présenter, dans le délai d'un mois de la remise du véhicule, un acquéreur amiable, le prix de cession venant dans tous les cas en déduction du montant de la somme susvisée
- débouté la société Toyota France Financement de ses demandes pour le surplus,
- débouté Monsieur X. de ses demandes,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- condamné Monsieur X. aux dépens.
M. X. a formé appel le 8 avril 2016 de la décision.
Postérieurement au jugement, M. X. a restitué le véhicule à la société Toyota France Financement.
Par ordonnance du 6 février 2017, le conseiller de la mise en état a débouté la société Toyota France financement de sa demande de radiation du rôle de l'affaire en application de l'article 526 du code de procédure civile au motif que l'exécution provisoire de la décision entraînerait pour lui des conséquences manifestement excessives.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 2 mars 2017, M. X. demande à la cour, au visa des articles 1134 du code civil, L. 132-1 (devenu L. 212-1) et L. 311-25 (devenu L. 312-40) du code de la consommation et 1244-1 et 2 du code civil, de :
* A titre principal,
- infirmer le Jugement rendu par le Tribunal d'Instance en ce qu'il a fixé une indemnité de résiliation de 35.754,10 euros, a alloué des intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2014,
et débouté Monsieur X. de sa demande d'octroi de délais de paiement,
Et statuant de nouveau,
- dire et juger l'indemnité de résiliation anticipée comme constituant une clause pénale
- dire et juger que l'application de cette clause emporterait un enrichissement sans cause de la société Toyota France Financement
- dire et juger excessive cette indemnité de résiliation et la supprimer ou à tout le moins réduire celle-ci à la somme d'un euro symbolique et, à défaut, la réduire à de plus justes proportions.
- dire et juger que les intérêts de retard ne pourront courir qu'à compter de l'arrêt, ou à tout le moins à compter de la signification du Jugement du Tribunal d'Instance, soit à compter du 15 mars 2016,
- accorder à Monsieur X. des délais de paiement sur le fondement de l'article 1244-1 du code civil, d'une durée de 24 mois, sans intérêts et avec report in fine du délai de grâce et à titre subsidiaire d'une durée qu'il plaira au Tribunal de fixer ;
- suspendre toutes les mesures d'exécution à l'encontre de Monsieur X. pendant la période couvrant les délais de paiement
En toute hypothèse
- condamner la société Toyota France Financement à verser à Monsieur X. la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens
- dire et juger que l'équité commande de ne pas faire application à l'encontre de Monsieur X. de l'article 700 du code de procédure civile.
Il explique qu'à la suite de difficultés personnelles très lourdes, sa situation financière s'est dégradée, qu'il a fait son possible pour la régulariser notamment en formant des demandes de rééchelonnement auprès de la société Toyota France Financement qu'elle a toujours refusées. Il explique qu'il a restitué le véhicule à la société à la suite du jugement et que le prix de sa vente doit se déduire de la somme de 41.018,28 euros et non s'y ajouter. Il considère que la demande de cette dernière fondée sur l'article 8 du contrat conduit à une double demande puisqu'elle sollicite à la fois la restitution du véhicule et le paiement de la somme de 41.338 euros, de sorte qu'il s'agit d'une clause abusive dont l'application conduirait à un enrichissement sans cause. Il sollicite l'application de l'article 1152 du code civil.
La société Toyota France Financement demande à la cour, par dernières conclusions du 28 février 2017 de :
- débouter M. X. de toutes ses demandes,
- confirmer le jugement entrepris sauf à déduire des sommes dues par M. X. la somme de 14.000 euros HT qui est le produit de la vente aux enchères publiques du véhicule intervenue le 17 janvier 2017,
- condamner M. X. à lui payer la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner aux dépens d'instance et d'appel.
Elle fait valoir que l'article 8 du contrat, accepté par M. X., est la simple application de l'article L. 311-25 du code de la consommation, n'a rien d'abusif et ne constitue pas non plus un enrichissement sans cause. Elle ajoute que l'indemnité de résiliation n'est pas manifestement excessive et qu'il n'y a pas lieu de la réduire.
Il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé des faits ainsi que de leurs moyens et prétentions.
La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 6 mars 2017.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
L'article L. 312-40 du code de la consommation (ancien article L. 311-25 du même code) dispose : « En cas de défaillance dans l'exécution, par l'emprunteur, d'un contrat de location assorti d'une promesse de vente ou d'un contrat de location-vente, le prêteur est en droit d'exiger outre la restitution du bien et le paiement des loyers échus et non réglés, une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application de l'article 1152 du code civil, sera fixée suivant un barème déterminé par décret ».
L'article D. 311-8 pris en application de ce texte indique : « En cas de défaillance dans l'exécution d'un contrat de location assorti d'une promesse de vente ou d'un contrat de location-vente, le bailleur est en droit d'exiger en application de l'article L. 311-25 une indemnité égale à la différence entre d'une part la valeur résiduelle hors taxes du bien stipulée au contrat, augmentée de la valeur actualisée à la date de résiliation du contrat, de la somme hors taxes des loyers non encore échus, et d'autre part, la valeur vénale hors taxes du bien restitué ».
L'article 8 des conditions générales du contrat de location signé entre les parties le 21 août 2012 stipule quant à lui : « En cas de défaillance dans l'exécution du contrat, le bailleur pourra exiger la résiliation du contrat, la restitution du véhicule, le paiement des loyers échus et non réglés, ainsi qu'une indemnité de résiliation. (...) L'indemnité de résiliation est égale à la différence entre d'une part la valeur résiduelle hors taxes du bien stipulée au contrat, augmentée de la valeur actualisée à la date de résiliation du contrat, de la somme hors taxes des loyers non encore échus, et d'autre part, la valeur vénale hors taxes du bien restitué ».
Cette clause reprend les dispositions légales et réglementaires précitées et ne constitue donc pas une clause abusive.
Le prix de vente du véhicule doit être déduit des sommes dues au bailleur et l'action de ce dernier repose sur le contrat et a donc une cause.
Le fait que le bailleur ait droit, en cas de défaillance, à la fois à la restitution du véhicule et au paiement d'une indemnité de résiliation ne constitue donc pas un enrichissement sans cause.
L'indemnité de résiliation telle que prévue par le contrat et les dispositions réglementaires susvisées doit être calculée comme suit :
- montant des 42 loyers à échoir (HT) : 26.325,18 euros
- valeur résiduelle HT du bien : 3.469,90 euros
à déduire valeur vénale (HT) du bien restitué : - 14.000,00 euros
Soit 15.795,08 euros HT et 18.954,10euros TTC.
Cette indemnité qui n'est majorée d'aucun supplément prévu par le contrat correspond en fait pour l'essentiel aux loyers que M. X. s'était engagé à payer en signant le contrat et n'apparaît pas manifestement excessive, eu égard au préjudice subi par le bailleur qui n'a pu tirer le bénéfice du contrat sur toute sa durée et a certes récupéré le véhicule et le produit de sa vente mais en devant le vendre aux enchères.
Il n'y a donc pas lieu de modérer l'indemnité de résiliation en application de l'article 1152 du code civil.
C'est à bon droit que le premier juge n'a pas retenu la somme de 317,60 euros initialement sollicitée par le bailleur au titre des frais de rejet.
La créance de l'appelante doit donc être évaluée comme suit :
- 7 loyers impayés sous déduction de l'acompte de 297,60 euros : 5.264,18 euros (TTC)
- indemnité de résiliation TTC : 18.954,10 euros
soit un total de : 24.218,28 euros, ce qui correspond à la somme de 41.018,28 euros retenue par le premier juge sous déduction du prix de vente de 16.800 euros.
C'est à bon droit, s'agissant des intérêts de retard, que le premier juge a fait application de l'article 1153 du code civil et a retenu que la somme due produisait intérêts à compter du 20 octobre 2014, date de l'assignation valant mise en demeure.
S'agissant de la demande de délais de paiement, M. X. produit devant la cour diverses pièces dont il résulte qu'il a perçu sur les 10 premiers mois de l'année 2016 un net fiscal de 24.458 euros soit 2.445 euros par mois environ, son épouse étant en invalidité et que le couple outre ses charges courantes, a de nombreuses dettes qu'il essaie de rembourser en versant des acomptes mensuels aux différents créanciers.
Il apparaît donc débiteur de bonne foi et il convient de faire droit à sa demande de délais de paiement sur 24 mois, en reportant le paiement de la somme due au plus tard à l'issue du délai de 24 mois, les intérêts restant limités au taux légal.
M. X. qui succombe dans l'essentiel de ses demandes sera condamné aux dépens d'appel. En revanche, l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
la Cour,
- Infirme le jugement s'agissant du montant de la somme due par M. X. et du refus d'octroi de délais de paiement ;
Statuant à nouveau des seuls chefs infirmés,
- Condamne M. X. à payer à la société Toyota France Financement la somme de 24.218,28 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2014,
- Accorde à M. X. un délai de 24 mois à compter du jour du présent arrêt pour régler la somme susvisée qui devra être versée au plus tard à l'issue de ce délai ;
- Confirme le jugement pour le surplus ;
Y ajoutant,
- Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamne M. X. aux entiers dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
- 5992 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Cadre général - Normes de référence - Lois et règlements - Conformité au régime légal : illustrations - Code de la consommation
- 6279 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Locations financières - Location avec option d’achat (LOA) (2) - Résiliation et Fin du contrat