CA PARIS (pôle 5 ch. 5), 8 juin 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 6930
CA PARIS (pôle 5 ch. 5), 8 juin 2017 : RG n° 15/19891
Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2017-011806
Extraits : 1/ « Qu'en l'espèce, au visa de ces textes, il ne résulte pas du bon de commande signé par Monsieur X. seul le 7 novembre 2012 qu'il remplisse les conditions formalistes sus rappelées, et notamment l'exigence de double face du formulaire, la mention apparente des textes du code de la consommation applicables, le soulignement ou les caractères gras ou dans une police minimum de certaines mentions dans le formulaire de rétractation, la lisibilité et le caractère distinct des lignes séparées exigées, l'espace pour énoncer la nature du ou des biens commandés ;
Que les dispositions légales et réglementaires ci-dessus visées relèvent de l'ordre public de protection des consommateurs et que la nullité pour vice de forme encourue même si elle est relative, ne peut être couverte que si la partie profane a été préalablement informée, par un professionnel averti, de la nullité du contrat et des risques encourus à l'exécuter ;
Qu'en l'espèce, la nullité du bon de commande établi lors du démarchage à domicile au nom d'un seul des deux époux, Monsieur X., signé par lui seul, et ne comportant pas toutes les mentions et les formes légales et réglementaires requises ne peut être couverte par la production d'une attestation de fin de travaux établie au nom de Monsieur X. seul mais manifestement non signée par lui, la signature figurant sur l'attestation était plutôt similaire à celle de Madame Y., contredisant le bon de commande qui avait expressément prévu les démarches administratives (mairie, région, EDF, ERDF, Consuel) et la mise en service, ainsi qu'un raccordement à hauteur de 500 euros, alors que selon ladite attestation de fin de travaux, le raccordement et la mise en service contractuellement prévus n'étaient pas réalisés, ce qui ne permet dès lors pas d'établir que les époux X. ont, en toute connaissance de cause, renoncé à se prévaloir de la nullité encourue ».
2/ « Considérant qu'en application de l'article L. 311-31 devenu L. 312-48 du code de la consommation relatif aux crédits affectés, commet une faute le privant de son droit à restitution le prêteur qui délivre les fonds au vendeur sans s'assurer que celui-ci a exécuté complètement sa prestation ;
Qu'en l'espèce le prêteur, la société Banque Solféa, spécialiste de la distribution de crédit affecté dans le cadre de démarchage à domicile, plus particulièrement dans le domaine de l'énergie solaire, était parfaitement en mesure de constater que le bon de commande prévoyait, tout inclus, un forfait d'installation solaire Photovoltaïque comprenant expressément, dans le prix de 21.500 euros, la pose des « panneaux avec onduleurs, coffret de protection, disjoncteur, parafoudre » et « les démarches administratives ainsi que la mise en service, le Consuel et le tirage des câbles entre le compteur et l'onduleur » ; Qu'en recevant une attestation de fin de travaux ne caractérisant pas suffisamment l'exécution de la prestation financée, à peine un mois après la signature du bon de commande, mentionnant expressément qu'une partie de la prestation prévue (le raccordement et les autorisations administratives) n'avait pas été réalisée, alors que la facture émise par la société France Solaire Energie inclut clairement ces prestations à concurrence de 593,46 euros, la banque a commis une faute en violation des dispositions de l'article L. 311-31 du code de la consommation ;
Que cette faute consistant en la délivrance prématurée des fonds est sanctionnée par la privation de la créance de restitution ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 5
ARRÊT DU 8 JUIN 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 15/19891 (10 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 3 juin 2015 - Tribunal de Commerce d'EVRY – R.G. n° 2014F00214.
APPELANTE :
SA BANQUE SOLFEA
ayant son siège social [adresse], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Anne G.-B. de la SCP G.B., avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111, Représentée par Maître Caroline P., avocat au barreau de PARIS, toque : B0496, substituant Maître Edgard V., avocat au barreau de PARIS, toque : B0496
INTIMÉS :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], demeurant [adresse]
Madame Y.
née le [date] à [ville],
Représentés par Maître Virginie D., avocat au barreau de PARIS, toque : C2440, Assistés de Maître Aurélien B., avocat au barreau de LILLE, substituant Maître Stéphanie G., avocat au barreau de LILLE
SARL FRANCE SOLAIRE ENERGIES prise en la personne de son liquidateur Maître Pascale H.-E.
domiciliée [adresse], ayant son siège social [adresse], N'ayant pas constitué avocat, régulièrement assignée
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 9 mars 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Yabienne SCHALLER, Conseillère, chargée du rapport, et Madame Anne DU BESSET, Conseillère.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Yabienne SCHALLER, Conseillère faisant fonction de Présidente, Madame Anne DU BESSET, Conseillère, Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère appelée d'une autre chambre afin de compléter la Cour en application de l'article R. 312-3 du Code de l'Organisation Judiciaire, qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno REITZER
ARRÊT : - réputé contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Yabienne SCHALLER, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Monsieur Vincent BRÉANT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
Le 7 novembre 2012, M. X. a passé commande auprès de la société France Solaire Energies, suite à un démarchage à domicile de cette dernière, d'une installation photovoltaïque pour un montant de 21.500 euros. Le même jour, M. X. et Mme Y. ont signé un contrat de crédit affecté au titre de ladite installation auprès de la Banque Solféa pour la somme de 21.500 euros au TEG fixe de 5,95 % remboursable en 159 mensualités.
Le 5 décembre 2012, la Banque Solféa a débloqué les fonds au profit de la société France Solaire Energies au vu d'une attestation de fin de travaux.
Les échéances mensuelles de 228,65 euros été prélevées à compter du 10 décembre 2013, soit avec un différé d'un an, conformément au tableau d'amortissement du prêt.
La mise en service n'ayant pas été effectuée, M. X. et Mme Y. ont assigné la société France Solaire Energies et la Banque Solféa devant le Tribunal de commerce d'Evry, aux fins de voir prononcer la nullité du contrat passé avec la société France Solaire Energies et par voie de conséquence la nullité du contrat de crédit avec Solféa, subsidiairement la résolution de ceux-ci, avec remise en état des lieux et restitution des sommes versées.
Par jugement du 3 juin 2015, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce d'Evry a :
- prononcé la résolution de la vente
- condamné la SARL France Solaire Energies à reprendre le matériel installé chez Monsieur X. et Madame Y. et à remettre les lieux en l'état où ils se trouvaient avant son intervention,
- condamné la SARL France Solaire Energies à rembourser à la Banque Solféa, la somme de 21.500 euros relative au financement de l'installation effectuée chez Monsieur X. et Madame Y.,
- prononcé la résolution du contrat de prêt affecté conclu entre Monsieur X. et Madame Y. auprès de la Banque Solféa,
- ordonné à la Banque Solféa de procéder au remboursement des sommes déjà perçues au titre des échéances dudit prêt affecté,
- condamné la SARL France Solaire Energies à payer à Monsieur X. et Madame Y. la somme de 3.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC,
- débouté les parties de leurs autres demandes
La société France Solaire Energies a été placée en redressement judiciaire, puis en liquidation judiciaire par jugement du 22 septembre 2015.
Vu l'appel interjeté le 8 octobre 2015 par la société Banque Solféa,
Vu les dernières conclusions signifiées le 18 janvier 2017 par la société Banque Solféa par lesquelles il est demandé à la cour :
- d'infirmer le jugement du Tribunal de commerce d'Evry en ce qu'il a :
Prononcé la résolution de la vente
Condamné la SARL France Solaire Energies à reprendre le matériel installé chez Monsieur X. et Madame Y. et à remettre les lieux en l'état où ils se trouvaient avant son intervention
Condamné la SARL France Solaire Energies à rembourser à la Banque Solféa la somme de 21.500 euros relative au financement de l'installation effectuée chez Monsieur X. et Madame Y.
Prononcé la résolution du contrat de prêt affecté conclu entre Monsieur X. et Madame Y. auprès de la Banque Solféa
Ordonné à Banque Solféa de procéder au remboursement des sommes déjà perçues au titre des échéances dudit prêt affecté
- Et statuant à nouveau
1°) A titre principal :
Dire et juger irrecevables en leur demande de résolution du contrat de prêt Monsieur X. et Madame Y., compte tenu de la signature de l'attestation de fin de travaux.
2°) Subsidiairement, au fond :
Dire et juger qu'en toute hypothèse, la résolution judiciaire n'est pas une sanction proportionnée.
Condamner éventuellement Banque Solféa à payer à Monsieur X. et Madame Y. la somme de 593, 46 euros au titre de la mise en service ;
3°) A titre très subsidiaire, pour le cas où le contrat de crédit serait résolu :
Condamner solidairement Monsieur X. et Madame Y. à rembourser à Banque Solféa l'intégralité du capital restant dû à la date du jugement, soit la somme de 21.500,00 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la remise des fonds, sous déduction des échéances le cas échéant déjà remboursées ;
Pour le cas où une faute de la banque serait caractérisée :
Dire et juger que seule la théorie de la responsabilité civile peut trouver à s'appliquer et qu'en tout état de cause, le préjudice des époux X. ne peut être égal au montant du capital emprunté puisqu'en raison de la liquidation judiciaire de la société venderesse, ces derniers vont conserver l'installation et pourront la faire raccorder ;
En conséquence, évaluer le montant du préjudice à de plus justes proportions ;
4°) En toute hypothèse,
Débouter Monsieur et Madame X. de l'ensemble de leurs demandes ;
Condamner Monsieur X. et Madame Y. à payer à Banque Solféa la somme de 2.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Vu les dernières conclusions signifiées le 24 janvier 2017 par Monsieur X. et Madame Y. par lesquelles il est demandé à la cour de :
A titre principal :
Déclarer recevables et bien fondés les Consorts X./Y. en leur appel incident
Y faisant droit :
Infirmer le jugement du tribunal de commerce d'ÉVRY en ce qu'il ne s'est pas prononcé sur les irrégularités entourant le formulaire de rétractation.
Statuant à nouveau :
Dire et juger que le bon de commande liant la société France Solaire Energies et Monsieur X. en date du 7 novembre 2012 constitue bien un contrat de démarchage au sens des dispositions de l'article L. 121-21 du Code de la consommation ;
Dire et juger que le formulaire de rétractation contenu sur le bon de commande en date du 7 novembre 2012 ne respecte pas le formalisme imposé par les articles L. 121-21 et R. 121-5 du Code de la consommation ;
Dire et juger que la société France Solaire Energies a usé de pratiques commerciales trompeuses au sens des dispositions de l'article L. 121-1 du Code de la consommation en vue de conclure avec Monsieur X. le bon de commande en date du 7 novembre 2012 ;
En conséquence, prononcer l'annulation du contrat litigieux ;
Dire et juger que le contrat de crédit affecté conclu entre Monsieur X., Madame Y. et la banque Solféa le 7 novembre 2012 est par voie de conséquence annulé de plein droit.
A titre subsidiaire :
Confirmer le jugement du tribunal de commerce d'EVRY qui a prononcé la résolution du contrat principal et du contrat de crédit affecté compte-tenu du manquement des obligations contractuelles de la société France Solaire Energies.
En conséquence :
Dire et juger que la société France Solaire Energies a manqué à ses obligations contractuelles en ne procédant pas aux opérations de raccordement de l'installation photovoltaïque de Monsieur X. dans le délai de trois mois à compter de la signature du bon de commande en date du 7 novembre 2012 ;
En conséquence, ordonner la résolution du contrat litigieux ;
Dire et juger que le contrat de crédit affecté conclu entre Monsieur X., Madame Y. et la banque Solféa le 07 novembre 2012 est par voie de conséquence résolu de plein droit.
En toute hypothèse :
Ordonner la remise en état de l'habitation de Monsieur X. et Madame Y. aux entiers frais de la société France Solaire Energies ;
Ordonner la restitution des sommes déjà versées par Monsieur X. et Madame Y. au titre du contrat de crédit affecté ;
Condamner la banque Solféa à verser à Monsieur X. et Madame Y. le somme de 8.000 euros au titre de dommages et intérêts ;
Condamner la banque Solféa à verser à Monsieur X. et Madame Y. la somme de 8.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
La société France Solaire Energie, en liquidation judiciaire par jugement du 22 septembre 2015, quoique régulièrement mise en cause par l'intermédiaire de son liquidateur, n'a pas constitué avocat et n'a pas conclu.
* * *
La société Banque Solféa soutient que la demande de résolution du prêt est tout à la fois irrecevable et mal fondée, que Mme Y. a valablement signé l'attestation de fin de travaux qui a autorisé la banque à débloquer les fonds au bénéfice de la société France Solaire Energies, que la signature de Madame Y. n'est pas contestable et qu'en sa qualité d'épouse et co-emprunteur, elle était fondée à signer seule ladite attestation, qu'en conséquence, la Banque n'avait aucune raison de ne pas débloquer les fonds.
Sur le fond, la société Banque Solféa soutient que l'installation de panneaux photovoltaïques a bien été posée et raccordée, que l'absence de mise en service est uniquement due à l'absence de certificat de conformité, qu'il incombait à M. X. et Mme Y. d'effectuer les diligences nécessaires au raccordement de l'installation, le devis ne comportant pas une telle obligation à la charge de la société France Solaire Energies, que M. X. et Mme Y. n'ont réglé le coût du raccordement que le 26 février 2013, que le défaut de mise en service ne suffit pas pour justifier la résolution du contrat, qu'en outre, la société France Solaire Energies étant en liquidation judiciaire, elle ne reprendra pas le matériel installé chez M. X. et Mme Y. qui conserveront donc l'installation et bénéficieront du crédit d'impôt correspondant, qu'il n'y a pas lieu par conséquent de prononcer la résolution des contrats.
A titre subsidiaire, si le contrat de crédit était résolu, il appartiendrait à M. X. et Mme Y. de rembourser la société Banque Solféa et non à la société France Solaire Energies de le faire, le paiement fait par la banque entre les mains de la société France Solaire Energies n'étant que la conséquence d'une indication de paiement au sens de l'article 1227 du code civil, la société Banque Solféa restant créancière des emprunteurs, ceux-ci conservant leur installation.
La société Banque Solféa rappelle qu'elle n'a pas commis de faute en débloquant les fonds au profit de la société France Solaire Energies sans attendre le raccordement éventuel au réseau dès lors que l'attestation de fin de travaux, qui excluait le raccordement, permettait de constater que Madame Y. avait accepté les travaux ayant fait l'objet du financement.
En réponse à l'appel incident de M. X. et Mme Y., sur la nullité du bon de commande, la société Banque Solféa fait valoir que les dispositions des articles L. 121-24 ou R. 121-5 du code de la consommation ne sont pas prescrites à peine de nullité et qu'au surplus, si la Cour devait découvrir une cause de nullité du bon de commande, celle-ci aurait été couverte par un acte postérieur, puisque Mme Y. a signé l'attestation de travaux et qu'ils ont payé le coût de raccordement le 26 février 2013.
Sur les pratiques commerciales trompeuses alléguées, la société Banque Solféa précise que la mention « demande de candidature au programme maison verte » figurant au-dessus de la mention « bon de commande » n'est pas de nature à induire le consommateur en erreur sur le caractère contractuel de l'engagement et ne constitue pas une pratique commerciale trompeuse.
M. X. et Mme Y. rappellent que les dispositions formalistes strictes du code de la consommation relatives au démarchage à domicile sont applicables aux contrats litigieux, que le bon de commande du 7 novembre 2012 encourt l'annulation, le bon de commande et le formulaire détachable de rétraction ne respectant pas les prescriptions des articles R. 121-4 et R. 121-5 du code la consommation, que l'acceptation de la livraison et de la pose de matériel ne couvrent pas cette nullité relative, ce d'autant que la mise en service de l'installation n'ayant jamais eu lieu, les consorts X. et Y. n'avaient dès lors pas renoncé à se prévaloir de ces irrégularités dont ils n'avaient pas pleinement conscience, qu'en outre ils estiment être victimes d'une pratique commerciale trompeuse qui les a induits en erreur, le bon de commande comportant un grand intitulé « demande de candidature au programme maison verte » et un logo « partenaire bleu ciel d'EDF » alors que la mention « bon de commande » était écrite dans une police plus petite et ne leur a pas permis d'appréhender la nature juridique du document qui leur était soumis, que la nullité est dès lors encourue, qu'en application de l'article L. 311-21 du code de la consommation, la nullité du contrat principal entraîne de facto la nullité du contrat de crédit affecté.
Subsidiairement, sur la résolution du contrat principal, M. X. et Mme Y. soutiennent que les prestations relatives à la fourniture et l'installation photovoltaïque ainsi qu'à l'accomplissement des démarches administratives auprès d'ERDF n'ont pas été exécutées par la société France Solaire Energies dès lors que la mise en service n'a pas été effectuée dans les délais de trois mois et que la société France Solaire Energies n'a jamais opéré les diligences auprès de l'organisme chargé de certifier de la conformité de la centrale aux règles de sécurité des installations électriques et que la mise en service n'est toujours pas effectuée à ce jour, plus de cinquante mois après la signature du contrat par l'installateur, ce qui est attesté par ERDF, que la résolution est dès lors encourue. Sur le contrat de prêt, ils indiquent que la résolution du contrat de vente, ou sa nullité, entraîne ainsi la résolution de plein droit du contrat de crédit. Ils soutiennent que la banque a commis une faute en débloquant les fonds sur la base d'une attestation de fin de travaux dont ils contestent la signature, qu'aucun nom ni prénom de signataire n'apparaît, que ce n'est manifestement pas la signature de Monsieur X. qui figure sur cette attestation, que la banque aurait dû en outre vérifier si le raccordement avait bien été fait dès lors que le devis prévoyait expressément que la société France Solaire Energies procède à l'ensemble des démarches administratives et de mise en service, qu'en ne le faisant pas elle a commis une négligence qui la prive de son droit à remboursement des sommes prêtées.
La société France Solaire Energies, mise en liquidation judiciaire, n'a pas constitué avocat et n'a pas conclu.
La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Sur ce, la Cour,
Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-21 du code de la consommation, les contrats conclus par démarchage, au domicile d'une personne physique, à sa résidence ou à son lieu de travail, même à sa demande, afin de lui proposer l'achat, la vente, la location, la location-vente ou la location avec option d'achat de biens ou la fourniture de services sont soumis aux dispositions des articles L. 121-22 à L. 121-33 du même code ;
Que l'article L. 121-23 du code de la consommation dispose :
« Les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion du contrat et comporter à peine de nullité, les mentions suivantes :
1) nom du fournisseur et du démarcheur
2) adresse du fournisseur
3) adresse du lieu de conclusion du contrat
4) désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés
5) conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens ou d'exécution de la prestation de service
6) prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L. 313-1
7) faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de la faculté et de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 ».
Qu'en outre, la forme du bon de rétractation doit respecter un certain nombre de prescriptions précisément énumérées aux articles R. 121-4 et R. 121-5 du code de la consommation ;
Qu'en l'espèce, au visa de ces textes, il ne résulte pas du bon de commande signé par Monsieur X. seul le 7 novembre 2012 qu'il remplisse les conditions formalistes sus rappelées, et notamment l'exigence de double face du formulaire, la mention apparente des textes du code de la consommation applicables, le soulignement ou les caractères gras ou dans une police minimum de certaines mentions dans le formulaire de rétractation, la lisibilité et le caractère distinct des lignes séparées exigées, l'espace pour énoncer la nature du ou des biens commandés ;
Que les dispositions légales et réglementaires ci-dessus visées relèvent de l'ordre public de protection des consommateurs et que la nullité pour vice de forme encourue même si elle est relative, ne peut être couverte que si la partie profane a été préalablement informée, par un professionnel averti, de la nullité du contrat et des risques encourus à l'exécuter ;
Qu'en l'espèce, la nullité du bon de commande établi lors du démarchage à domicile au nom d'un seul des deux époux, Monsieur X., signé par lui seul, et ne comportant pas toutes les mentions et les formes légales et réglementaires requises ne peut être couverte par la production d'une attestation de fin de travaux établie au nom de Monsieur X. seul mais manifestement non signée par lui, la signature figurant sur l'attestation était plutôt similaire à celle de Madame Y., contredisant le bon de commande qui avait expressément prévu les démarches administratives (mairie, région, EDF, ERDF, Consuel) et la mise en service, ainsi qu'un raccordement à hauteur de 500 euros, alors que selon ladite attestation de fin de travaux, le raccordement et la mise en service contractuellement prévus n'étaient pas réalisés, ce qui ne permet dès lors pas d'établir que les époux X. ont, en toute connaissance de cause, renoncé à se prévaloir de la nullité encourue ;
Que la nullité du contrat de vente en date du 7 novembre 2012, et, en application des dispositions de l'article L. 311-32 du Code de la Consommation, celle subséquente du contrat de prêt souscrit avec la Société Banque Solféa devra par conséquent être prononcée, sans qu'il soit par conséquent utile de se prononcer sur les pratiques commerciales trompeuses alléguées ;
Que la demande de résolution des contrats est également devenue sans objet ;
Que la décision des premiers juges sera donc infirmée sur ce point ;
Considérant que l'annulation des contrats entraîne la remise des parties dans leur état antérieur ;
Qu'ainsi, par l'effet de l'annulation du contrat principal, Monsieur X. et Madame Y. doivent se voir restituer le montant du prix de vente versé à la société France Solaire Energies, qui devra récupérer son matériel ;
Que la société France Solaire Energie étant en liquidation et son liquidateur ne s'étant pas constitué, il appartiendra aux époux X./Y. de produire leur créance sur le prix de vente au passif de celle-ci et au liquidateur judiciaire de récupérer par ses propres moyens les matériels au domicile des particuliers, sans qu'aucune condamnation ne puisse être prononcée contre elle ;
Que la décision des premiers juges sera également infirmée sur ce point ;
Considérant qu'en ce qui concerne les demandes de la Banque Solféa à l'encontre de Monsieur X. et Madame Y. en remboursement du capital prêté, il n'est pas contesté que la Banque qui a versé le montant du crédit à la société France Solaire Energies l'a fait pour le compte des époux X. Y. et non pour son propre compte ;
Qu'elle est donc bien créancière de Monsieur X. et Madame Y., ses emprunteurs, qui doivent lui restituer le capital prêté déduction faite des sommes versées sauf à démontrer une faute de celui-ci dans l'exécution des ses obligations de nature à le priver de sa créance de restitution ;
Qu'en tout état de cause, il n'appartient pas à la société France Solaire Energie de restituer ledit capital à la Banque Solféa ;
Que le jugement sera également infirmé sur ce point ;
Considérant qu'en application de l'article L. 311-31 devenu L. 312-48 du code de la consommation relatif aux crédits affectés, commet une faute le privant de son droit à restitution le prêteur qui délivre les fonds au vendeur sans s'assurer que celui-ci a exécuté complètement sa prestation ;
Qu'en l'espèce le prêteur, la société Banque Solféa, spécialiste de la distribution de crédit affecté dans le cadre de démarchage à domicile, plus particulièrement dans le domaine de l'énergie solaire, était parfaitement en mesure de constater que le bon de commande prévoyait, tout inclus, un forfait d'installation solaire Photovoltaïque comprenant expressément, dans le prix de 21.500 euros, la pose des « panneaux avec onduleurs, coffret de protection, disjoncteur, parafoudre » et « les démarches administratives ainsi que la mise en service, le Consuel et le tirage des câbles entre le compteur et l'onduleur » ;
Qu'en recevant une attestation de fin de travaux ne caractérisant pas suffisamment l'exécution de la prestation financée, à peine un mois après la signature du bon de commande, mentionnant expressément qu'une partie de la prestation prévue (le raccordement et les autorisations administratives) n'avait pas été réalisée, alors que la facture émise par la société France Solaire Energie inclut clairement ces prestations à concurrence de 593,46 euros, la banque a commis une faute en violation des dispositions de l'article L. 311-31 du code de la consommation ;
Que cette faute consistant en la délivrance prématurée des fonds est sanctionnée par la privation de la créance de restitution ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu de statuer sur l'évaluation du préjudice subi par les époux X. Y., ces derniers ne sollicitant pas de dommages et intérêts, sauf au titre de la résistance abusive qui n'est pas établie en l'espèce ;
Que la Banque Solféa - tout comme la société France Solaire Energies non comparante, - ne forme aucune demande au titre de la non restitution des panneaux installés ;
Qu'il est dès lors sans objet de vérifier si les panneaux sont aujourd'hui raccordés et mise en service ;
Qu'en tout état de cause, une attestation contraire est versée aux débats ;
Qu'il y a lieu d'infirmer la décision des premiers juges et de débouter la Banque Solféa de sa demande en remboursement de la somme de 21.500 euros ;
Considérant qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans les termes du dispositif ci-après ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
PRONONCE la nullité du bon de commande du 7 novembre 2012 et par voie de conséquence du contrat de crédit affecté souscrit par Monsieur X. et Madame Y. auprès de la Banque Solféa le même jour,
REJETTE les demandes en paiement formées par la société Banque Solféa à l'encontre de M. X. et de Mme Y. en exécution du contrat de crédit conclu le 7 novembre 2012,
REJETTE toute autre demande,
DIT irrecevables les demandes formées à l'encontre de la société France Solaire Energie, en liquidation judiciaire,
CONDAMNE la société Banque Solféa à verser à M. X. et de Mme Y. la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société Banque Solféa aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Le Greffier La Conseillère faisant fonction de Présidente
Vincent BRÉANT Fabienne SCHALLER