CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 15 novembre 2017
CERCLAB - DOCUMENT N° 7136
CA PARIS (pôle 5 ch. 4), 15 novembre 2017 : RG n° 15/10361
Publication : Jurica
Extraits : 1/ « Il convient tout d'abord de rappeler qu'un fournisseur peut légitimement arrêter une activité, sous réserve de respecter le préavis contractuel et de l'exécuter loyalement. La seule obligation qui pesait sur la société Chevrolet France était donc de poursuivre l'exécution des contrats pendant le préavis dans les termes de ceux-ci. »
2/ « Il résulte de ce qui précède qu'il appartenait à la société Chevrolet France de remplir son obligation de maintenir un stock de véhicules neufs à Barcelone, pour permettre à ses distributeurs d'exécuter le préavis dans des conditions normales, encourager les concessionnaires à commander et ne pas les laisser supporter l'intégralité des risques provoqués par la fin de l'activité annoncée et par la sortie prématurée de la majorité des concessionnaires.
Fautive dans l'exécution d'une obligation essentielle, la société Chevrolet ne peut s'exonérer en soutenant que la société L. avait été avertie dès le mois de décembre 2013 de la nécessité de passer des commandes pour respecter le contrat. »
3/ « La société L. démontre donc que la société Chevrolet France n'a pas exécuté ses obligations essentielles durant le préavis. Il y a donc lieu d'approuver les premiers juges, en ce qu'ils ont estimé que la société Chevrolet France, à l'origine d'un grave déséquilibre contractuel au détriment des distributeurs, et la fin du réseau ne constituant pas pour elle un cas de force majeure, n'a pas exécuté ses obligations contractuelles durant le préavis, rendant impossible la poursuite du contrat. Il convient également de dire que la société Chevrolet France n'était pas fondée à résilier par courrier du 16 octobre 2014 à effet du 31 octobre 2014 le contrat de l'intimée pour faute. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 4
ARRÊT DU 15 NOVEMBRE 2017
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 15/10361 (18 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 mars 2015 - Tribunal de Commerce de PARIS - R.G. n° 2014062940.
APPELANTE :
Société CHEVROLET DEUTSCHLAND GmbH, société de droit allemand, venant aux droits de la SAS CHEVROLET FRANCE suite à la fusion-absorption de la société CHEVROLET FRANCE par la société CHEVROLET DEUTSCHLAND GmbH
Ayant son siège social : [adresse], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Frédéric L. de la SELARL BDL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480, Ayant pour avocat plaidant : Maître Joseph V. de la SELAS V. & V., avocat au barreau de PARIS, toque : P0151
INTIMÉE :
SARL L. AUTOMOBILES
Ayant son siège social : [adresse], N° SIRET : XXX, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Représentée par Maître Anne G.-B. de la SCP G. B., avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111, Ayant pour avocat plaidant : Maître Renaud B., avocat au barreau de PARIS, toque : J062
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 17 mai 2017, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame Irène LUC, Présidente de chambre, rédacteur, Madame Dominique MOUTHON VIDILLES, Conseillère, Monsieur François THOMAS, Conseiller, qui en ont délibéré,
Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Irène LUC dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile,
Greffier, lors des débats : Madame Patricia DARDAS
ARRÊT : - contradictoire, - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Irène LUC, président et par Madame Cécile PENG, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
La société Chevrolet Deutschland GmbH, venant aux droits de la société Chevrolet France, est une filiale détenue à 100 % par la société General Motors Korea. Elle assurait les importations en France des véhicules neufs de la marque Chevrolet.
La société L. Automobiles est une société spécialisée dans la vente de véhicules automobiles
La vente des véhicules neufs et des pièces de rechange de la marque Chevrolet était réalisée dans le cadre de contrats de concessions par des distributeurs indépendants.
Par un contrat conclu le 20 mars 2006, la société L. Automobiles est devenue réparateur agréé représentant sur Pau pour la seule marque Chevrolet.
Le 20 décembre 2011, la société L. Automobiles a signé un nouveau contrat de distributeur Chevrolet portant sur les services et les ventes qui a pris effet à compter du 1er juin 2013.
Le 5 décembre 2013, la société General Motors Korea a décidé de cesser les ventes de véhicules neufs de la marque Chevrolet en Europe de l'ouest et centrale à partir du 31 décembre 2015.
Le 11 décembre 2013, la société Chevrolet France a notifié à chacun de ses distributeurs, dont la société L. Automobiles, la résiliation des contrats de distributeur au 31 décembre 2015, en respectant un préavis contractuel de 24 mois, conformément à l'article 21.3 du contrat de distribution. Dans ce courrier, était annoncé un programme d'incitation à une résiliation volontaire anticipée. Il était également proposé aux concessionnaires la faculté de conclure un contrat de réparateur agréé Chevrolet France pour la période postérieure au 31 décembre 2015.
Le 12 décembre 2013, la société Chevrolet France a annoncé à chacun de ses concessionnaires, dont la société L. Automobiles, la désignation d'un « gestionnaire de transition » en charge d'un accord de transition et de décharge.
Par courrier du 17 décembre 2013, la société Chevrolet France a exposé à ses concessionnaires son plan 2014 « Go To Market » ( GTM ), annoncé en deux phases :
- « la première moitié de 2014 (janvier-juin) se focalisera sur la vente des stocks réseau et Chevrolet France » ; il était annoncé que, par l'intermédiaire d'« offres clients agressives », l'intention de Chevrolet France était de « vendre la majorité (du) stock distributeur Chevrolet d'ici la fin de juin 2014 » ; « Chevrolet entend travailler ensemble avec vous pour liquider le stock des distributeurs de manière rapide et efficace » ;
- « lors de la deuxième moitié de 2014 (juillet-décembre), une approche et stratégie différentes s'appliqueront. Eu égard aux perspectives de volumes beaucoup plus basses pendant la deuxième moitié de l'année calendaire, nous ne planifierons plus de campagnes importantes de publicité. Notre approche se concentrera presqu'exclusivement sur le support de vos opérations de marketing local. En un mot : ne vous attendez pas à voir des campagnes de publicité et de promotion agressives pendant la deuxième moitié de 2014 ».
S'agissant de « la commande et de la production de véhicules », la société Chevrolet France a annoncé dans ce même courrier à Monsieur L. et à l'ensemble de ses distributeurs, qu'il était extrêmement difficile de prévoir la demande des consommateurs à court terme. Elle expliquait qu'elle avait décidé de reporter la production des véhicules non encore produits début décembre sur les mois de janvier-février 2014 : « cela vous permettra d'évaluer la demande des consommateurs suite à l'annonce et de nous informer si vous souhaitez que ces unités soient produites. Il est important de savoir que les véhicules produits en janvier n'arriveront pas en Europe avant mars/avril ». Il était également précisé que les commandes clients acceptées dont la production était reportée ne bénéficieraient pas des mesures incitatives renforcées. Les concessionnaires étaient encouragés à inciter leurs clients à prendre livraison d'un véhicule en stock distributeur ou Chevrolet France, au lieu du véhicule antérieurement commandé. Les concessionnaires étaient donc invités à annuler les commandes acceptées et à les remplacer par des véhicules en stock. Enfin, la société Chevrolet France rappelait que toute nouvelle commande serait livrée dans un délai d'environ 3 à 4 mois.
Par mail adressé à tous les distributeurs le 18 décembre 2013, il était demandé aux concessionnaires d'indiquer à Chevrolet les « commandes contremarquées clients au 5 décembre 2013 non encore produites » qu'ils ne souhaitaient pas conserver. Il était précisé : « sans réponse de votre part, ces commandes seront produites en priorité, livraison concession estimée sur fin mars 2014 ». Il était également rappelé que ces commandes bénéficiaient du plan commercial en vigueur à la date de la contre marque.
Il résulte d'une attestation du 22 mai 2014 de Monsieur D., président de Chevrolet France, que sur les 2037 commandes passées par le réseau de concessionnaires à la date du 5 décembre 2013, 1660 avaient fait l'objet d'une annulation par le réseau.
Par la suite, la société Chevrolet France, dès le 15 janvier 2014, a recherché avec les distributeurs un accord pour une cessation anticipée d'activité. À ce titre, elle a proposé des compensations financières, avec, notamment, le bénéfice d'une indemnité fixe pour la perte d'exploitation par véhicule. L'indemnité de perte d'exploitation proposée par Chevrolet France en cas de départ anticipé était déterminée de la façon suivante : la moyenne annuelle des Véhicules Neufs vendus par chaque concessionnaire en 2010, 2011 et 2012 multipliée par un montant forfaitaire dégressif dans le temps ; schématiquement, plus tôt était signé le protocole, plus importante était l'indemnisation :
- 600 euros si le protocole était signé avant le 31 mars 2014 avec départ effectif au 30 juin 2014,
- 400 euros si le protocole était signé avant le 30 juin 2014 avec départ effectif au 30 septembre 2014,
- 200 euros si le protocole était signé avant le 30 septembre 2014 avec départ effectif au 31 décembre 2014,
- 0 euros pour un départ entre le 1er janvier et le 31 décembre 2015.
[*]
Prévue initialement pour durer jusqu'au 30 juin 2014 (PC n° 11), la campagne de déstockage « jusqu'à épuisement des stocks » mise en place par Chevrolet France à compter du 2 janvier 2014 a pris fin dès la mi-mars 2014 (PC n° 16 : procès-verbal de constat d'huissier du 8 mars 2014). Si cette campagne à « prix cassés » de liquidation des stocks a certes permis de maintenir un niveau de vente satisfaisant au cours du seul mois de janvier 2014, celui-ci a baissé dès le mois de février 2014 pour s'effondrer à compter du mois de mars et sur les mois suivants.
Par lettre du 6 janvier 2014, le Conseil National des Professions de l'Automobile (CNPA) a fait part à la société Chevrolet France du caractère insuffisant des indemnisations proposées aux concessionnaires.
Dès le 14 janvier 2014, Monsieur L., gérant de la société L. Automobiles, écrivait à la société Chevrolet France pour lui demander une « proposition responsable et digne » de règlement du litige, prenant « en considération tous les paramètres de perte pour une entreprise afin de clôturer ce dossier de façon amiable » et rejetait comme irréaliste la proposition de Chevrolet. Il se plaignait dans ce courrier de l'impossibilité de satisfaire la demande des clients qui souhaitaient profiter du programme de déstockage, « seulement 249 véhicules (étant) en stocks Chevrolet ».
Monsieur L. renouvelait sa demande d'indemnisation par courrier du 3 mars 2014 : « je vous demande de bien vouloir m'adresser votre décision avant le 20 mars 2014, afin de terminer l'exploitation de la distribution Chevrolet au 31 mars comme vous l'aviez proposé. Je vous précise que depuis vos annonces officielles de retirer la marque sur le territoire français, les publicités de déstockage, la clientèle se fait extrêmement rare et ne souhaite plus investir dans l'achat d'une Chevrolet (que nous ne pouvons plus distribuer) vous avez cassé le marché il est donc temps d'arrêter ce gâchis ».
Par mails des 13 février et 5 mars 2014, adressés à la société L. Automobiles, Monsieur R., chef de région sud-ouest de la société Chevrolet France, lui a notifié la situation de son stock en véhicules neufs, lui rappelant dans le premier message, qu'au regard de la baisse considérable du stock (11 véhicules alors qu'il s'élevait à 41 au 10 décembre 2013), il lui appartenait « de placer en commande usine les véhicules qui (lui) semblent appropriés pour la bonne conduite de (son) activité'» ; il était souligné que « les usines sont en pleine capacité à répondre à vos besoins sous les délais indiqués régulièrement dans les bulletins de production ». Dans le second mail, Monsieur R. a appelé l'attention de la société L. Automobiles sur la bonne tenue des résultats de Chevrolet en janvier et février 2014, sur le lancement d'une campagne TV et Internet début mars pour soutenir les ventes de mars, et une campagne pour le second semestre. Il a fait état, dans ce mail, de son étonnement de constater une nouvelle baisse des stocks depuis le dernier point du 13 février 2014 celui-ci étant tombé à 6 véhicules. Il rappelait au concessionnaire la nécessité de placer les véhicules en commande.
Dans un courrier du 31 mars 2014, Monsieur L. dénonçait « une pression inadmissible, assimilable à une tentative d'extorsion » exercée sur son entreprise par Chevrolet, les montants dégressifs alloués ne le satisfaisant pas. Le concessionnaire reprochait à Chevrolet, notamment, d'avoir lancé immédiatement une campagne de liquidation des stocks jusqu'à épuisement, « condamnant d'emblée la poursuite normale (du) préavis de résiliation jusqu'à son terme », mais également d'avoir fait pression au moyen de toute une série de mesures restrictives pour le contraindre, lui et les autres concessionnaires, « à quitter au plus vite le réseau et abusivement renoncer à notre préavis tout en (') proposant une compensation financière dérisoire et dégressive ». Il précisait que, par ses agissements fautifs, la société Chevrolet avait très lourdement engagé sa responsabilité contractuelle au préjudice de son entreprise sur le fondement des articles 1134 alinéas 1 et 3 du code civil et que la société Chevrolet ne l'approvisionnait plus directement en véhicule neufs, se rendant ainsi responsable d'une rupture brutale des relations commerciales établies. Monsieur L. demandait enfin à être totalement libéré de la clause de non-concurrence concernant l'interdiction de représenter une autre marque que celle de General Motors dans son showroom. En définitive, la société L. Automobiles protestait contre la pression exercée par la société Chevrolet France afin qu'elle signe l'accord transactionnel à des conditions qu'elle estimait défavorables.
Avant avril 2014, la société Chevrolet France a obtenu la signature de 93 protocoles transactionnels (dits « TARA »), ayant pour objet un arrêt d'activité échelonné entre mars et juin 2014.
Par lettre du 16 avril 2014 adressée à la société L., la société Chevrolet France a précisé n'avoir commis aucune faute concernant l'exécution du contrat de distributeur. Elle rappelait à Monsieur L. qu'il n'avait pas profité des primes importantes pour racheter le stock, 700 véhicules étant en effet restés à Barcelone, entre le 15 décembre 2013 et 15 janvier 2014, date à laquelle ce stock avait été acheté par les concessionnaires belges. Elle soulignait également que la société L. avait annulé une bonne partie des commandes de décembre, puis refusé de commander des voitures en janvier, février et mars, qu'elle n'avait plus de stocks et ne commandait plus aucune voiture malgré les relances écrites de Chevrolet depuis trois mois. Le concédant signifiait à la société L. qu'il ne s'opposerait pas à la représentation d'autres marques dans ses locaux.
Le 22 avril 2014, la société Chevrolet annonçait à ses concessionnaires le lancement de véhicules MY 15 sur les marques Spark, Trax et Captiva, ces véhicules devant entrer en production sur le mois de juillet 2014 pour une livraison fin septembre/début octobre. Il était demandé aux concessionnaires de retourner le bulletin d'adhésion d'ici le 28 avril, une affectation de véhicules étant prévue lors de chaque lancement de nouveaux millésimes, d'assurer la visibilité des nouveautés dans tous les showrooms et de planifier les actions de marketing. Par mail du 28 avril 2014, adressé à la société L. Automobiles, Monsieur R., de la société Chevrolet, rappelait à son concessionnaire qu'il n'avait pas reçu de commandes s'agissant des véhicules de lancement MY 15.
Le 7 mai 2014, dans un courrier intitulé « Chevrolet France - point sur l'avancée des discussions avec le réseau au 6 mai 2014 », Monsieur D., PDG de la société Chevrolet France a adressé une mise en garde analogue à tous les distributeurs n'ayant pas signé le protocole additionnel de résiliation anticipée et a invoqué le non-respect des termes du contrat de distributeur : « je ne peux que m'étonner du double discours permanent qui consiste à expliquer que Chevrolet France ne respecte pas ses obligations contractuelles. Je réitère ici fermement un message plusieurs fois écrit : ceux d'entre vous qui ne commandent pas de voitures et qui refusent des affectations de MY 15, se mettent dans la situation de ne plus respecter les termes de leur contrat de Distributeur ».
Le 23 septembre 2014, la société Chevrolet France a adressé à chacun de ses concessionnaires, y compris la société L. Automobiles, une mise en demeure visant la clause résolutoire relative à l'exécution des obligations du contrat pour le 15 octobre 2014 au plus tard, après avoir constaté l'arrêt des commandes de véhicules neufs, la dépose de l'enseigne Chevrolet et son remplacement par une autre marque ainsi que l'absence de la gamme Chevrolet dans son showroom en démonstration. Il était notamment demandé la société L. de se réapprovisionner en véhicules sur les stocks Chevrolet ou en commandes usines, en quantité nécessaire à la poursuite de l'activité.
Le 16 octobre 2014, la société Chevrolet France a adressé à la société L. Automobiles une lettre de résiliation partielle (portant sur l'activité de vente de véhicules neufs Chevrolet) du contrat de distributeur par application de l'article 21-6 du contrat. Il était précisé que la résiliation prendra effet le 31 octobre 2014 pour l'activité de vente de véhicules neufs Chevrolet. Pour l'activité de services Chevrolet, le terme du contrat était fixé au 31 décembre 2015, sauf manquement.
La société L. Automobiles a sollicité du président du tribunal de commerce de Paris à être autorisée à assigner la société Chevrolet France à bref délai au motif que la cessation d'exécution de ses obligations essentielles sans préavis ni justifications avait provoqué une rupture brutale des relations commerciales établies.
Autorisée par ordonnance du 28 octobre 2014, la société L. Automobiles a, par acte du 31 octobre 2014, assigné à bref délai la société Chevrolet France, au vu des articles 21-3 du contrat de distributeur Chevrolet, 1134 alinéas 1 et 3 du code civil et L. 442-6-I-5° du code de commerce.
Elle soutenait devant le tribunal que dès le départ, la société Chevrolet avait prévu de ne pas maintenir le réseau plus de quelques mois et que, dès octobre 2013, le stock de véhicules Chevrolet connaissait une réduction progressive ; elle exposait que la société Chevrolet avait asphyxié les distributeurs par des actions déloyales rendant la poursuite du contrat de concession impossible, d'une part notamment en ne leur permettant pas d'approvisionnement normal, par une politique d'assèchement du stock, presque disparu dès février 2014 et par un allongement considérable des délais de livraison passant de cinq à six mois et privant les concessionnaires de tout réassortiment à partir de mars 2014, d'autre part en cessant l'exécution d'autres obligations contractuelles essentielles.
Par jugement du 23 mars 2015, le tribunal de commerce de Paris a :
Vu les articles 1134 et 1135 du code civil :
- constaté la cessation de fait de l'exercice de l'activité vente de véhicules neufs Chevrolet au 31 mars 2014,
- pris acte que le contrat de distributeur à effet du 1er juin 2013 a été résilié au 31 octobre 2014 pour cette activité, même si la SAS Chevrolet France n'a pas été fondée à la prononcer aux torts et griefs de la partie demanderesse,
- dit que la SAS Chevrolet France a manqué à son obligation d'exécution de bonne foi et loyale du contrat et est tenue de réparer le préjudice en lien avec sa faute,
- condamné la SAS Chevrolet France à payer à la SARL L. Automobiles la somme de 348.102 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé, déboutant pour le surplus,
- condamné la SAS Chevrolet France à payer à la SARL L. Automobiles la somme 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, déboutant du surplus,
- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
- ordonné l'exécution provisoire, sans garantie à hauteur de 200.000 euros, et avec garantie pour le solde. Cette garantie pourra prendre la forme, au choix de la SARL L. Automobiles, d'une caution bancaire, d'un séquestre à la Caisse des dépôts et consignations ou d'une fiducie sûreté respectant les dispositions des articles 2018 et 2372-2 du code civil, au profit de Chevrolet France, les sommes ainsi garanties n'étant libérables au profit de l'une ou l'autre des parties qu'au vu d'une décision de justice passée en force de chose jugée ou d'un accord des deux parties pour un paiement ou une libération totale ou partielle de ce solde,
- condamné la SAS Chevrolet France aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 82,44 euros dont 13,52 euros de TVA.
Le tribunal a relevé que la poursuite des contrats de concession pendant le préavis était impossible dans des conditions économiques acceptables, le déroulé des opérations ayant créé un grave déséquilibre contractuel au détriment des distributeurs. Il estimait qu'en exigeant des distributeurs qu'ils investissent dans l'achat de véhicules modèle 2015 pour les exposer et constituer un stock, alors qu'elle-même ne s'obligeait désormais qu'à fournir quelques services essentiels et à transmettre à l'usine de Corée les commandes payées par ses distributeurs, la société Chevrolet France avait modifié l'équilibre contractuel, rendant impossible la poursuite des relations commerciales, Chevrolet France reportant sur les seuls distributeurs tous les risques de la poursuite de l'exploitation des concessions. Il a relevé que la société Chevrolet France n'avait rien envisagé pour tenter de réduire ce déséquilibre, au moins en partie, et qu'au contraire elle s'était efforcée de maintenir ses contractants dans l'alternative suivante : ou tenter de poursuivre l'exploitation dans des conditions dégradées pendant 24 mois, ou accepter la résiliation anticipée du contrat, mais à ses conditions financières. Il en a conclu que la société Chevrolet France avait manqué à son obligation d'exécution de bonne foi et loyale du contrat et l'a condamnée à réparer le préjudice en résultant.
LA COUR
Vu l'appel et les dernières conclusions de la société Chevrolet France, appelante, déposées et notifiées le 13 avril 2017, par lesquelles il est demandé à la cour de :
vu l'article 1134 du code civil,
vu l'article 1315 du code civil,
vu l'article 9 du code de procédure civile,
- constater que la société Chevrolet Deutchland GmbH vient aux droits de la société Chevrolet France suite à la fusion-absorption intervenue,
à titre principal,
- infirmer le jugement du 23 mars 2015 rendu par le tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a :
* dit que la société Chevrolet France n'était pas fondée à prononcer la résiliation pour l'activité de véhicules neufs,
* dit que la société Chevrolet France a manqué à son obligation d'exécution de bonne foi et loyale du contrat et est tenue de réparer le préjudice en lien avec sa faute,
* condamné la société Chevrolet France à payer à la société L. Automobiles la somme de 348.102 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé,
* condamné la société Chevrolet France à payer à la société L. Automobiles la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamné la société Chevrolet France aux dépens,
- dire que la société Chevrolet France aux droits de laquelle vient la société Chevrolet Deutschland GmbH n'a commis aucune faute à l'égard de la société L. Automobiles et notamment n'a commis aucune faute dans l'exécution du préavis de résiliation du contrat de Distributeur Chevrolet qui la lie à la société L. Automobiles,
- dire que l'annonce de la vente de véhicules neufs de la marque Chevrolet à partir du 1er janvier 2016 n'est ni de fautive, ni déloyale,
- dire qu'un constructeur est en droit en raison de l'interdiction des engagements perpétuels, de la liberté d'organisation des entreprises et des réseaux, et de la liberté d'entreprendre, de décider d'arrêter la vente de ses produits sur un marché,
- dire que l'intimée ne démontre pas que la décision d'arrêter la vente de véhicules neufs Chevrolet à compter du 1er janvier 2016 n'a pas été annoncée le jour où elle a été prise,
- dire qu'en l'absence de faute, aucune responsabilité de Chevrolet Deutchland GmbH venant aux droits de la société Chevrolet France ne saurait être retenue,
- dire que sous-couvert du recours à la notion de bonne foi, une partie ne saurait mettre à la charge de son cocontractant des obligations non prévues au contrat ou plus généralement porter atteinte à la substance même des droits et des obligations légalement convenues entre les parties,
- dire que la société Chevrolet Deutschland GmbH venant aux droits de la société Chevrolet France ne peut se voir reprocher les effets d'une annonce qu'elle n'a d'ailleurs même pas faite,
- dire que l'annonce du 5 décembre 2013 n'est pas fautive, subsidiairement qu'elle n'émane pas de la société Chevrolet France et en tout état de cause, qu'il n'est pas démontré par l'intimée qu'elle aurait hypothéqué l'exécution du préavis,
- dire qu'aucune faute ayant causé un dommage à l'intimée n'est démontrée à l'encontre de la société Chevrolet France s'agissant de la gestion des stocks en cours de préavis,
- dire que l'intimée ne démontre pas qu'elle aurait passé à la société Chevrolet France des commandes de véhicules qui n'auraient pas été satisfaites en cours de préavis et qu'elle ne peut dès lors pas alléguer d'une faute du concédant lui ayant causé un préjudice,
- dire que les autres griefs formulés en ce qui concerne l'exécution du préavis ne sont pas davantage justifiés,
- dire que la société Chevrolet France aux droits de laquelle vient la société Chevrolet Deutschland GmbH ne peut être tenue responsable des effets de l'annonce du 5 décembre 2013 dont elle n'est d'ailleurs même pas l'auteur,
- dire que la société Chevrolet France aux droits de laquelle vient la société Chevrolet Deutchland GmbH n'a commis aucune faute dans l'exécution du préavis de résiliation du contrat de distributeur Chevrolet qui la lie à la société L. Automobiles,
- ordonner à la société L. Automobiles de restituer à la société Chevrolet France l'intégralité de la somme versée au titre de l'exécution provisoire ordonnée par le jugement du 23 mars 2015, avec intérêts au taux légal à compter de la date de paiement et capitalisation des intérêts courus depuis plus d'un an,
- débouter la société L. Automobiles de l'ensemble de ses demandes et notamment de ses demandes incidentes.
à titre subsidiaire,
- dire que la société L. Automobiles ne justifie pas du préjudice allégué ni du lien de causalité entre le préjudice invoqué et les fautes alléguées, alors qu'il est notamment établi qu'elle a cessé d'exécuter son contrat et de passer des commandes,
- dire non fondée la demande indemnitaire au titre de la marge, faute de fondement,
- dire non fondée la demande indemnitaire au titre de financements non amortis,
- dire que le lien entre la perte alléguée du fonds de commerce et les fautes alléguées n'est pas établi et que la demande indemnitaire au titre de la perte alléguée du fonds de commerce est non fondée,
en conséquence,
- débouter la société L. Automobiles de ses demandes indemnitaires,
en tout état de cause,
- condamner la société L. Automobiles à verser à la société Chevrolet Deutschland GmbH venue aux droits de la société Chevrolet France la somme de 25.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société L. Automobiles en tous les dépens dont distraction au profit de la SCP B.D. L. conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;
Vu les dernières conclusions de la société L. Automobiles, intimée, déposées et notifiées le 27 avril 2017, par lesquelles il est demandé à la cour de :
vu les articles 1134 alinéa 1 et 3 (devenus 1103 et 1104) du code civil,
vu l'article 1382 (devenu 1240) du code civil,
- déclarer la société Chevrolet Deutschland GmbH venant aux droits de la SAS Chevrolet France SAS recevable mais mal fondée en son appel,
- l'en débouter,
- dire que la société Chevrolet France a décidé de se soustraire dès sa notification à la bonne exécution jusqu'à son terme du préavis de résiliation, de vingt-quatre mois qu'elle a notifié à ses concessionnaires le 11 décembre 2013 à effet du 31 décembre 2015 en application de l'article 21.3 du contrat de distributeur Chevrolet,
- dire que la société Chevrolet France a fallacieusement laissé croire à ses concessionnaires entre le 11 décembre 2013 et courant mars 2014 qu'ils pourraient poursuivre l'exécution normale de leur préavis au moins jusqu'au 30 juin 2014 et négocier librement leur départ anticipé à cette échéance à des conditions équitables,
- dire que la société Chevrolet France a en réalité déloyalement privé ses distributeurs de toute possibilité de poursuivre l'exécution normale de leur préavis dès la mi-mars 2014 en provoquant, à leur insu, une soudaine et définitive rupture de stock, tout en cessant dans le même temps d'exécuter plusieurs de ses obligations contractuelles essentielles et indispensables à la poursuite normale du préavis, ou en s'abstenant de les exécuter de façon satisfaisante, le tout afin d'imposer à ses cocontractants la cessation anticipée de leur contrat à effet du 30 juin 2014 à des conditions financières qui n'étaient ni librement acceptables ni équitables, notamment en raison des modalités de leur calcul et de leur dégressivité prorata temporis,
- dire enfin que la société Chevrolet France a résilié par courrier du 16 octobre 2014 à effet du 31 octobre 2014 le contrat de l'intimée pour faute, et ce de façon abusive dès lors que les griefs invoqués résultaient de ses propres manquements à l'exécution normale et de bonne foi du contrat, en sachant pertinemment qu'il était matériellement impossible de satisfaire à sa mise en demeure du 23 septembre 2014 du fait de la suppression de son stock et des délais de livraison de plus de 6 mois imposés pour chaque commande usine de véhicules neufs.
en conséquence,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu que la société Chevrolet France avait engagé sa responsabilité contractuelle au préjudice de la SARL L. Automobiles,
- infirmer pour le surplus de ses dispositions et statuant à nouveau,
- condamner la société Chevrolet Deutschland GmbH venant aux droits de la SAS Chevrolet France à payer à la SARL L. Automobiles la somme de 845.251.43 euros à titre de dommages et intérêts,
- la condamner à lui payer la somme de 25.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner en tous les dépens dont distraction au profit de la SCP G.B. conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE :
La société L. reconnaît que l'annonce de la fin de la vente des véhicules neufs de la marque Chevrolet à partir du 1er janvier 2016 ne revêt pas en elle-même un caractère fautif : « il s'agit en effet d'une décision stratégique prise en application du principe intangible de la liberté du commerce et de l'industrie ».
Elle estime toutefois que cette décision de retrait de la marque n'a pas été exécutée dans le respect des obligations contractuelles de la société Chevrolet France.
Celle-ci réplique qu'aucune violation de ses obligations contractuelles n'est caractérisée par la société L. Automobiles.
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La société Chevrolet France a décidé de recourir à la procédure de résiliation du contrat de Distributeur Chevrolet, prévue à l'article 21.3 de celui-ci. Cet article dispose que « la résiliation prendra effet à la date indiquée sur la notification, cette date ne pouvant intervenir moins de 24 mois après la réception de la notification ».
La notification faite par la société Chevrolet France à son réseau le 11 décembre 2013, à effet au 31 décembre 2015, respecte la lettre de cet article.
Mais la société L. expose que la société Chevrolet France n'a pas exécuté loyalement et de bonne foi ce préavis de 24 mois, contrairement aux prescriptions de l'alinéa 3 de l'article 1134 du code civil. Elle soutient en effet que la société Chevrolet France n'a jamais eu l'intention d'exécuter ce préavis, mais de liquider le réseau au plus tard fin juin 2014, en contraignant les concessionnaires à transiger, après avoir asséché le réseau et arrêté d'exécuter ses obligations contractuelles.
Il lui appartient donc de rapporter la preuve de l'inexécution fautive du préavis ou du comportement déloyal du concédant.
Elle prétend à cet égard, d'une part, que la société Chevrolet France a privé ses concessionnaires de la faculté de vendre des véhicules dans des conditions économiques acceptables, en adoptant une politique de gestion des stocks qui a asséché le réseau en véhicules neufs disponibles et, d'autre part, qu'elle a manqué à ses autres obligations contractuelles essentielles, de sorte que le préavis n'a pas été exécuté dans des conditions normales.
La société Chevrolet France, appelante, réfute tous ces arguments.
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Il convient tout d'abord de rappeler qu'un fournisseur peut légitimement arrêter une activité, sous réserve de respecter le préavis contractuel et de l'exécuter loyalement.
La seule obligation qui pesait sur la société Chevrolet France était donc de poursuivre l'exécution des contrats pendant le préavis dans les termes de ceux-ci.
La société L. expose que :
- la société Chevrolet France aurait volontairement supprimé son stock, de sorte qu'elle aurait été défaillante dans sa principale obligation qui consistait, en tant qu'importateur en France des véhicules de la marque, à livrer des véhicules neufs à son réseau de distributeurs ;
- elle aurait failli à ses autres obligations contractuelles essentielles, notamment en ne proposant que des prestations d'aides commerciales et de publicité dégradées.
Sur la gestion des stocks par la société Chevrolet France :
La société Chevrolet Deutschland GmbH soutient que l'intimée ne démontre aucune faute de sa part en matière de gestion de stocks qui lui aurait causé un préjudice.
En effet, la société Chevrolet Deutschland GmbH considère que :
- la campagne de déstockage n'était pas fautive,
- le report des commandes se justifiait par la mise en place des offres de déstockage dont ne pouvaient bénéficier les véhicules non encore produits,
- les distributeurs Chevrolet n'étaient pas contraints d'annuler leurs commandes clients ; elles pouvaient être conservées et les délais de livraison étaient maintenus,
- les distributeurs ne recevaient plus les bulletins papiers de production indiquant l'état du stock de la société Chevrolet France mais ces bulletins étaient librement disponibles sur le nouveau système électronique,
- son stock n'ayant pas bougé depuis plusieurs mois, la société Chevrolet France a vendu à deux reprises des véhicules aux distributeurs belges,
- l'intimée ne peut pas reprocher à la société Chevrolet France une rupture de stock, puisque la baisse de son stock était liée à l'annulation et aux absences de commandes par les concessionnaires,
- la société Chevrolet France pouvait demander la mise en production de toutes les commandes qui lui étaient passées avec le même délai de livraison qu'auparavant.
La société L. Automobiles soutient qu'au lieu de bénéficier d'une période d'exploitation satisfaisante du préavis, elle s'est retrouvée confrontée à une situation très précaire dès février 2014 du fait d'une rupture de stock définitive que la société Chevrolet France a délibérément provoquée à l'insu des concessionnaires, violant ainsi l'article 1134 alinéa 3 du code civil.
En effet, elle expose que :
- la décision de report des commandes clients en cours, non encore produites au 5 décembre 2013, prise unilatéralement par Chevrolet avant l'annonce du retrait plaçait les concessionnaires dans une situation délicate découlant du non-respect du délai contractuel de livraison convenu avec leurs clients,
- Chevrolet France a incité ses concessionnaires à annuler les commandes clients non encore produites du fait du report de leur mise en production, en leur demandant de convaincre leurs clients d'y renoncer et de commander à la place un véhicule en stock, assorti d'importantes promotions,
- l'annulation par Chevrolet France de 900 véhicules commandés sans informer le réseau a précipité l'épuisement de son stock, privant ainsi les distributeurs d'un stock de 900 voitures neuves,
- la vente de 700 véhicules neufs disponibles au réseau belge intervenue dès le 15 janvier 2014 par Chevrolet France, a privé les distributeurs sur janvier et février 2014 de véhicules pour les placer brutalement en situation de rupture de stock dès fin février 2014,
- Chevrolet France a interrompu la communication entre le 27 novembre 2013 et le 15 janvier 2014 dans le but de dissimuler sa décision de fermeture définitive et de non renouvellement de son stock de Barcelone à compter de décembre 2013.
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Il résulte de l'instruction du dossier que les stocks du réseau Chevrolet étaient composés de véhicules déjà en stock chez les concessionnaires, au nombre nécessairement limité, et de ceux placés dans les entrepôts de la société Chevrolet France situés à Barcelone, livrables dans les trois semaines.
Les concessionnaires commandaient aussi des véhicules directement à l'usine Chevrolet de Corée, quand les modèles demandés n'étaient pas disponibles, et par l'intermédiaire de Chevrolet France. La société L. démontre que sur 21.518 véhicules de la marque Chevrolet distribués en France en 2013, 61,67 % provenaient du stock de Chevrolet France (pièce 25 de L.).
Le rôle de l'importateur de véhicules consiste à alimenter son réseau de distributeurs en détenant un certain nombre de véhicules en stock, rapidement disponibles, afin de permettre aux distributeurs du réseau de satisfaire la demande, ceux-ci ne pouvant eux-mêmes qu'entreposer un nombre de véhicules limité et les commandes passées à l'usine de fabrication étant couramment livrables dans des délais de quatre à cinq mois.
Or, les documents versés aux débats par la société L. permettent de faire les constatations suivantes :
- en 2013, la société Chevrolet France avait un stock moyen à Barcelone d'environ 3.000 véhicules,
- l'état des stocks du 27 novembre 2013 établit la présence, à Barcelone, de 480 véhicules livrables à trois semaines, et de 1121 véhicules disponibles (dates estimées d'arrivée) entre le 15 décembre et la deuxième quinzaine de février 2014 (véhicules non encore arrivés à Barcelone, mais d'ores et déjà commandés par Chevrolet France, dont 900 attendus en février 2014),
- l'état des stocks du 15 janvier 2014 n'a plus qu'une colonne, celle des véhicules libres sous trois semaines, ce qui démontre que Chevrolet France ne faisait plus de commandes en Corée pour alimenter son réseau. Figure dans ce document la mention selon laquelle les prochaines disponibilités interviendront fin mai ou fin juin 2014, ce qui signifie qu'une commande passée aux alentours du 15 janvier ne pouvait être satisfaite que par des demandes à l'usine de Corée et que fin mai ou fin juin,
- les véhicules livrables sous trois semaines, au nombre de 259 en janvier 2014, ne sont plus que 0 le 29 janvier 2014, 2 le 5 février 2014, 1 le 12 mars, 5 le 2 avril et 6 le 6 mai. Ils sont ensuite de 31 le 4 juin, 61 le 3 juillet (outre 15 pour la deuxième quinzaine de juillet), 85 le 6 août et 85 le 3 septembre.
La société Chevrolet France, qui ne nie pas ces constatations, prétend que les concessionnaires ne lui avaient fait aucune commande, malgré ses multiples relances, ce qui démontrerait leur propre inexécution du contrat de concession.
Mais ce simple constat d'absence de commandes ne peut permettre d'exonérer la société Chevrolet France de sa propre responsabilité dans l'exécution du contrat en tant qu'importateur, selon laquelle elle devait être en mesure d'approvisionner son réseau de distributeurs en véhicules neufs.
Enfin, loin d'être la cause de la rupture du stock, l'abstention des concessionnaires en est la conséquence.
Sur la décision de report :
En premier lieu, la décision de report des commandes clients en cours, non encore produites au 5 décembre 2013, prise unilatéralement par Chevrolet France, et justifiée par le plan de déstockage, même si elle n'est pas fautive en soi, a cassé la dynamique des commandes.
En deuxième lieu, les commandes nouvelles des distributeurs étaient clairement découragées dans le courrier de Chevrolet France du 17 décembre 2013 annonçant le plan de déstockage. Les concessionnaires étaient en effet invités à inciter leurs clients à prendre livraison d'un véhicule en stock distributeur ou Chevrolet France, au lieu du véhicule antérieurement commandé. Les concessionnaires étaient donc invités à annuler les commandes acceptées et à les remplacer par des véhicules en stock. Ils n'avaient aucune raison, en décembre 2013, de maintenir des commandes qui n'auraient pas bénéficié à leurs clients, car elles n'ouvraient pas droit aux conditions très favorables du plan de déstockage. Enfin, la société Chevrolet rappelait que toute nouvelle commande serait livrée dans un délai d'environ 3 à 4 mois, délai long au regard de l'incertitude, à ce moment, sur la situation du réseau.
L'attestation du 22 mai 2014 de Monsieur D., président de Chevrolet France, selon laquelle sur les 2037 commandes passées par le réseau de concessionnaires à la date du 5 décembre 2013, 1660 avaient fait l'objet d'une annulation par le réseau, révèle les annulations massives résultant de cette campagne.
La société Chevrolet a ensuite aggravé la situation de pénurie du réseau, par la vente des 900 véhicules attendus en février 2014 (figurant sur l'état du stock du 27 novembre 2013) et par la vente de 700 véhicules neufs disponibles au réseau belge intervenue dès le 15 janvier 2014.
La société L. reproche à juste titre à la société Chevrolet de ne pas avoir reconstitué elle-même son stock, de sorte que, dès février 2014, ainsi qu'il ressort des états des stocks, aucun véhicule n'était plus disponible dans un délai de trois semaines. Si les concessionnaires pouvaient évidemment commander des véhicules à l'usine de Corée, les délais de livraison, prolongés de cinq à six mois, étaient beaucoup trop longs au regard des incertitudes sur l'attitude de la société Chevrolet France, dont attestent les courriers des 14 janvier, 3 mars et 31 mars 2014 adressés par la société L. à Chevrolet France, mais également les autres courriers des distributeurs concernés. Dans ces courriers, en effet, la fin de l'approvisionnement direct en véhicules neufs et l'arrêt d'un certain nombre de prestations contractuelles par Chevrolet France sont perçus comme un abandon de la marque. Surtout, les risques commerciaux afférents à la poursuite de l'activité durant le préavis devaient être répartis entre le concédant et le concessionnaire, la société Chevrolet France se devant d'importer des véhicules, disponibles à bref délais, pour amorcer puis entretenir la dynamique des commandes. Or, l'état nul des stocks jusqu'en juin 2014 faisait peser la poursuite de l'activité sur les seuls distributeurs, en les contraignant à commander des véhicules sous un délai de six mois, dans des conditions commerciales et publicitaires dégradées, comme il sera vu plus bas. Enfin, si la proposition d'un plan de sortie anticipée du réseau ne peut être reprochée à la société Chevrolet, la cour ne disposant pas des éléments établissant que les conditions proposées étaient manifestement abusives, ainsi que le prétend la société L., les discussions sur la part personnelle d'indemnisation de chaque concessionnaire, relative aux investissements dédiés à la marque, non amortis et non reconvertibles, étaient en cours et insuffisamment avancées en décembre 2013 - janvier 2014 pour que les concessionnaires insatisfaits de la proposition qui leur était faite, se lancent dans les commandes de véhicules neufs pour alimenter eux-mêmes le réseau.
Si la société Chevrolet prétend qu'elle disposait du 9 juillet au 9 août 2014, d'un stock de 85 véhicules à Barcelone et que ces véhicules ne trouvaient pas preneurs, elle ne justifie pas que ces modèles n'étaient pas les véhicules des concessionnaires ayant quitté prématurément le réseau et, en toute hypothèse, la dynamique d'achat des véhicules était éteinte à ce stade avancé.
Il résulte de ce qui précède qu'il appartenait à la société Chevrolet France de remplir son obligation de maintenir un stock de véhicules neufs à Barcelone, pour permettre à ses distributeurs d'exécuter le préavis dans des conditions normales, encourager les concessionnaires à commander et ne pas les laisser supporter l'intégralité des risques provoqués par la fin de l'activité annoncée et par la sortie prématurée de la majorité des concessionnaires.
Fautive dans l'exécution d'une obligation essentielle, la société Chevrolet ne peut s'exonérer en soutenant que la société L. avait été avertie dès le mois de décembre 2013 de la nécessité de passer des commandes pour respecter le contrat.
Sur l'exécution de ses autres obligations essentielles par la société Chevrolet France :
La société Chevrolet Deutschland GmbH soutient qu'elle a continué à exécuter ses obligations contractuelles et notamment ses obligations essentielles et que l'inexécution de certaines obligations était justifiée et ne préjudiciait en rien aux concessionnaires.
En effet, elle considère que :
- l'absence de participation au mondial de l'automobile 2014 était justifiée par la volonté de cohérence avec l'état de la représentation de la marque en France et avec le nombre de véhicules vendus à partir du deuxième trimestre, et non pas par la volonté de priver le réseau d'un support de communication à la vente,
- le parc et le service presse ont été maintenus,
- le financement des véhicules de démonstration et de courtoisie ainsi que des formations ont été maintenus,
- les aides commerciales et les marges des distributeurs n'ont pas fait l'objet de diminution,
- la réduction des effectifs de la société Chevrolet France ne constitue pas une faute,
- la fin de l'outil de prévision n'a pas eu de conséquences particulières sur les distributeurs Chevrolet,
- l'absence de fixation d'objectifs de vente était justifiée et ne préjudiciait en rien aux distributeurs Chevrolet.
La société L. soutient que la société Chevrolet France a cessé unilatéralement et à l'insu de ses concessionnaires d'exécuter plusieurs de ses obligations essentielles indispensables à la bonne exécution du préavis par ses distributeurs.
En effet, elle constate que :
- le préavis de résiliation n'était censé expirer que le 31 décembre 2015 et la présence de la marque Chevrolet sur le mondial de l'automobile aurait permis de soutenir l'activité commerciale sur le réseau,
- la société Chevrolet France a décidé de mettre un terme à sa communication avant même que le quart du préavis de résiliation ne soit exécuté,
- la réduction d'effectif au sein de Chevrolet France confirme la volonté de Chevrolet France de réduire ses propres moyens humains avant l'exécution du quart de la durée du préavis,
- la réduction et la suppression des plans marketing destinés à soutenir et à promouvoir les ventes vont dans le même sens,
- la réduction des aides commerciales, alors que l'augmentation des remises était la seule arme susceptible de permettre aux distributeurs Chevrolet de tenter de résister à une concurrence pressée de s'approprier la clientèle d'une marque désormais en voie de disparition, constitue un autre indice du désengagement fautif de Chevrolet,
- la baisse consécutive des marges des concessionnaires ne pouvait permettre en aucun cas de faire face à la concurrence,
- la suppression du financement des véhicules de démonstration, des véhicules de courtoisie, et des formations a, de même, nui au réseau,
- la suppression de l'outil de gestion prévisionnel BPI a eu pour effet d'en priver les concessionnaires ne représentant que la marque Chevrolet,
- l'absence de fixation d'objectifs de vente est un indice supplémentaire confirmant la décision de la société Chevrolet France de fermer le réseau de distributeur avant décembre 2014.
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Il y a lieu de noter que, suite au déstockage massif, la poursuite de l'activité des concessionnaires restant dans le réseau, à compter de fin février 2014, ne pouvait reposer que sur une disponibilité rapide des véhicules, qui n'était pas assurée, et sur un effort marketing et commercial au moins équivalent à celui de l'année 2013.
Or, il résulte de l'ensemble des pièces versées aux débats par la société L. que cet effort a été bien moindre. En effet, si l'absence de participation de la société Chevrolet France au mondial de l'automobile 2014, le rattachement du service de presse à la direction du marketing en mai 2014 et la réduction des effectifs de la société Chevrolet France peuvent, à la rigueur, être justifiés par la nécessité d'adapter son dimensionnement à l'activité restante du réseau, il convient de souligner que les aides commerciales sur les véhicules neufs ont diminué substantiellement en 2014, par rapport à 2013. Si la société Chevrolet prétend qu'au terme de la circulaire « plan commercial » du 14 février 2014, une prime de volume payée sur facture c'est-à-dire sans qu'il soit exigé la réalisation d'un volume pouvait être versée aux concessionnaires, pour toutes les voitures produites après le 1er janvier 2014, il n'en demeure pas moins que la société L. justifie par un tableau comparatif des supports commerciaux 2013/2014 (PC 39 de la société L.), non sérieusement contesté par l'appelante, que les aides ont considérablement décru par rapport à 2013. C'est ainsi que les aides commerciales ont diminué de 35 % sur le modèle Spark, de 45 % sur le modèle Aveo, de 19 % sur le modèle Trax, de 34 % sur le modèle Cruze, de 8 % sur les modèles Malibu et Orlando et de 26 % sur le modèle Captiva (PC n° 40 de la société L.). Il en est résulté une baisse des marges par modèle, en dehors de la période de déstockage, les concessionnaires restant dans le réseau ayant vu leur marge réduite en moyenne de 30 % par rapport à celle réalisée en 2013.
Par ailleurs, si la société Chevrolet France justifie avoir mis en place un plan unique pour toutes les catégories de véhicules (VN, de démonstration, de courtoisie), elle ne démontre pas qu'il était aussi attractif que les conditions antérieures.
Il convient de souligner que si la société Chevrolet France a mené une campagne publicitaire très visible au cours du premier trimestre 2014, pour assurer le succès de l'opération de déstockage, elle se devait, après cette opération, de maintenir ses campagnes à hauteur de celles de 2013. Or, la publicité a considérablement baissé, à compter du deuxième trimestre 2014, les spots TV passant de 13 550 au deuxième trimestre 2013 à 2 300 au deuxième trimestre 2014. Surtout, à compter du deuxième semestre, la société Chevrolet France a mis fin à ses campagnes nationales TV et web, se focalisant sur une communication purement locale. Anticipé par l'importateur dès le courrier du 17 décembre 2013, ce changement d'envergure des campagnes de publicité ne peut être imputé à l'arrêt anticipé de l'activité de 75 % des distributeurs, qui n'est intervenue que bien après. La société Chevrolet France ne saurait se retrancher derrière l'abstention des distributeurs qui, sollicités par elle, auraient dû lui retourner leur plan de communication, afin qu'elle puisse leur payer les aides, alors que l'initiative lui appartenait d'assurer une publicité d'un rang au moins identique à celui de 2013, compte tenu de la situation critique du réseau.
La société L. démontre donc que la société Chevrolet France n'a pas exécuté ses obligations essentielles durant le préavis.
Il y a donc lieu d'approuver les premiers juges, en ce qu'ils ont estimé que la société Chevrolet France, à l'origine d'un grave déséquilibre contractuel au détriment des distributeurs, et la fin du réseau ne constituant pas pour elle un cas de force majeure, n'a pas exécuté ses obligations contractuelles durant le préavis, rendant impossible la poursuite du contrat.
Il convient également de dire que la société Chevrolet France n'était pas fondée à résilier par courrier du 16 octobre 2014 à effet du 31 octobre 2014 le contrat de l'intimée pour faute.
Sur la demande indemnitaire au titre de la perte de marge sur l'ensemble des activités :
La société L. Automobiles sollicite l'évaluation du préjudice sur une période de 21 mois, au plus tard à compter du 31 mars 2014, date à laquelle le contrat est devenu inexécutable. Elle évalue son préjudice direct à la marge qu'elle aurait dégagée durant l'exécution normale du préavis, entre le 1er avril 2014 et le 31 décembre 2015, soit durant 21 mois. Elle demande à la cour d'inclure dans l'assiette du préjudice non seulement son activité de vente de véhicules et d'accessoires, mais également de service après-vente lié à l'entretien et la réparation durant 5 ans des véhicules dont elle a été privée de la vente au cours de la période inexécutée du préavis. Elle a déduit de sa perte de marge les charges variables disparues sur la période ainsi que la marge résiduelle dégagée sur cette même période.
La société Chevrolet Deutschland GmbH soutient, de son côté, que la demande indemnitaire de la société L. Automobiles sur la marge brute perdue sur 21 mois, toutes activités confondues, ne pouvait avoir de sens, du fait que la résiliation ne portait que sur les véhicules neufs et non sur les autres activités inclues dans l'assiette par le tribunal de commerce et au vu de l'absence d'estimation de coûts variables venant en déduction de cette marge brute. Elle conteste les évaluations, les estimant non fondées sur des pièces suffisamment probantes.
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Sur le préjudice résultant de la perte d'activité subie pendant le préavis :
La société L. demande que soient indemnisés les gains qu'elle a manqués sur le période d'inexécution du préavis, soit du 1er avril 2014 au 31 décembre 2015.
Son préjudice est constitué de la marge sur coûts variables qu'elle aurait dû dégager du 1er avril 2014 au 31 décembre 2015 en maintenant un niveau d'exploitation équivalent à celui des exercices 2012 et 2013, aucun élément ne permettant à l'époque de prévoir une baisse d'activité.
Il résulte de l'évaluation effectuée par Monsieur Arnaud P., expert-comptable (pièce 17), versée aux débats par la société L., et corroborée par les récapitulatifs informatiques de ventes en 2012 et 2013 des véhicules neufs et d'occasion de la société L., que la marge brute moyenne mensuelle dégagée sur la vente de véhicules neufs s'élevait à 22.532 euros et celle sur les véhicules d'occasion repris à l'occasion des ventes de véhicules neufs Chevrolet à 12.549 euros. Il n'y a, en revanche, pas lieu de retenir les postes relatifs aux pièces de rechange et à l'après-vente, le lien avec les ventes perdues n'étant pas établi. La marge perdue sur 21 mois s'élève donc à 736.701 euros.
La société L. a ensuite déduit de cette marge les charges économisées en raison du défaut d'exécution du contrat, à savoir la somme de 174 198 euros (71 % de 245.350 euros), au prorata du pourcentage représenté par la vente de véhicules neufs et véhicules d'occasion dans l'activité totale.
Enfin, la marge dégagée par la société L. du 1er avril 2014 au 31 décembre 2015 sur les activités de vente de véhicules neufs et véhicules d'occasion a été nulle.
Il y a lieu d'évaluer la perte subie par la société L. du 1er avril 2014 au 31 décembre 2015 à la somme de 562.503 euros (736.701 euros – 174.198 euros).
Si Monsieur L., gérant de la société L., prétend avoir choisi la marque Skoda pour remplacer la marque Chevrolet, ce n'est qu'à compter de septembre 2014 qu'elle a été autorisée à distribuer cette marque et aucun retour sur investissement n'était attendu avant le 2ème semestre 2015, à cause des frais de rachat du fonds de commerce et des investissements pour mise au standard de la marque. Il ne saurait en résulter une diminution dans le dédommagement de la société L.
Sur la perte de marge sur l'entretien du parc constitué des véhicules qui n'ont pu être vendus entre le 1er avril 2014 et le 31 décembre 2015 :
La société L. sollicite en outre l'indemnisation de son préjudice consécutif à la perte de marge sur l'entretien du parc constitué des véhicules qui n'ont pu être vendus entre le 1er avril 2014 et le 31 décembre 2015. Elle expose en effet que la vente de véhicules neufs génère pendant cinq ans un volume de ventes de pièces détachées ainsi que des services de réparation, qu'elle évalue à un montant global de 272.132 euros.
Si la perte de l'activité de véhicules neufs génère nécessairement une perte sur l'activité d'après-vente, la société L. ne démontre pas qu'elle aurait été encore nécessairement un réparateur agréé Chevrolet de 2016 à 2021. Faute de lien entre le préjudice allégué et la perte de l'activité de véhicules neufs, ce poste de préjudice ne sera donc pas indemnisé.
Sur l'autre poste de demande d'indemnisation :
La société L. Automobiles demande en outre le remboursement de ses engagements financiers non amortis au 31 décembre 2015.
Mais faute de justifier à quelle dépense correspond cette somme et d'établir un lien direct entre ce préjudice et l'inexécution fautive du contrat par la société Chevrolet France, il n'y a pas lieu de retenir ce poste de préjudice.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Succombant au principal, la société Chevrolet Deutschland sera condamnée à supporter les dépens d'appel ainsi qu'à payer à la société L. la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
CONFIRME le jugement entrepris, excepté sur le quantum de préjudice alloué à la société L.,
l'infirme sur ce point,
et, statuant à nouveau,
CONDAMNE la société Chevrolet Deutschland (venant aux droits de la société Chevrolet France) à payer à la société L. Automobiles la somme de 562.503 euros en réparation de son préjudice,
DÉBOUTE la société L. Automobiles du surplus de ses demandes,
LA CONDAMNE aux dépens de l'instance d'appel, qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société Chevrolet Deutschland à payer à la société L. Automobiles la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier La Présidente
Cécile PENG Irène LUC