TI TOULOUSE, 1er mars 2001
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 738
TI TOULOUSE, 1er mars 2001 : RG n° 11/00/004219 ; jugement n° 01/626
Extrait « Et la clause « AOLB et ses FS ainsi que les tiers fournisseurs se réservent le droit de modifier ou interrompre à tout moment certains aspects « du service AOL » y compris des contenus et services » et ne peut s'interpréter comme une clause permettant au professionnel de se dispenser de fournir à l'abonné le service pour lequel il reçoit paiement, à savoir un accès illimité au service (clause qui au demeurant serait abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation). »
TRIBUNAL D’INSTANCE DE TOULOUSE
JUGEMENT DU 1er MARS 2001
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11-00-004219. Jugement n° 01/626.
A l'audience publique du Tribunal d'Instance de TOULOUSE (Haute-Garonne) tenue le Jeudi 1er mars 2001 ;
Sous la Présidence de Josée NICOLAS, Juge au Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE, chargé du service du Tribunal d'Instance, assisté de Kamel MOKHTARI, Greffier ;
Après débats à l'audience du 18 janvier 2001, le jugement suivant a été rendu ;
ENTRE :
DEMANDEUR :
Monsieur X.
[adresse], comparant
ET :
DÉFENDEUR :
SNC AOL
[adresse], représentée par Maître BARBIER du Barreau de : PARIS
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Mr. X. a souscrit auprès de la société AOL un contrat de prestation de service, selon une offre intitulée « tout compris illimité ».
Ce contrat permet à l'abonné un accès à Internet et son coût de 199,00 Francs par mois inclut les frais de connexion et de communication locale pour un accès illimité 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, à INTERNET et à tous les services AOL, ainsi que le précise une lettre datée du 22 AOUT 2000 du PDG d'AOL.
Mr. X. estime qu'AOL a failli à l'exécution de ses obligations contractuelles, en imposant à l'utilisateur des écrans de contrôle et des déconnexions forcées.
Par ordonnance du 5 DÉCEMBRE 2000, il a été enjoint à AOL de fournir à Mr. X. la connexion Internet illimitée, sans écran de contrôle ni déconnexion forcée.
A l'audience du 18 JANVIER 2001 à laquelle l'affaire a été examinée par application de l'article 1425-4 du Nouveau Code de Procédure Civile, les parties ont comparu.
AOL n'a pas exécuté l'ordonnance du 5 DÉCEMBRE 2000.
Mr. X. demande condamnation d'AOL, en indemnisation des manquements contractuels qu'il lui impute, à lui payer les sommes suivantes :
- 796,00 Francs en remboursement de ses frais de connexion depuis le mois d'OCTOBRE 2000,
- 3.000,00 Francs de dommages et intérêts,
- 2.000,00 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
[minute page 3] Il fait valoir que :
- postérieurement à l'essai précédant son abonnement, ainsi qu'à l'abonnement, AOL a introduit des écrans dans la procédure de connexion, puis un « timer ».
- depuis début NOVEMBRE 2000, AOL procède à une déconnexion systématique et autoritaire au bout de 30 minutes d'utilisation.
- ces éléments seraient contraires aux termes du contrat et lui causeraient préjudice.
- l'article 2 des conditions générales du contrat ne permettrait nullement à AOL d'agir ainsi, sauf à constituer une clause abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation.
AOL BERTELSMANN ONLINE FRANCE SNC conteste toute inexécution de sa part et conclut au débouté du demandeur.
Elle soutient que :
- les écrans de contrôle font partie intégrante du service, et ce depuis de nombreuses années, et ne sauraient être considérés comme des modifications du service ayant causé préjudice à Mr. X.
- devant l'importance du nombre des abonnés, AOL reconnaît avoir connu des difficultés liées à l'insuffisance des moyens mis en place pour répondre à la demande, en avoir informé ses abonnés, et avoir pris des mesures pour y remédier dont les résultats devraient aboutir dans le courant du 1er trimestre 2001.
- ses abonnés, dans la grande majorité, en seraient satisfaits.
- Mr. X. n'aurait pas à s'en plaindre plus longtemps s'il demandait la résiliation de son abonnement, ce qu'il ne fait pas, ce qui démontrerait qu'il y trouve intérêt.
- elle reconnaît avoir mis en place, provisoirement et aux heures de forte affluence un modulateur de session, en conformité avec les articles 2 et 6 des conditions générales d'utilisation selon lesquelles :
* « AOL ... se réserve le droit de modifier ou interrompre à tout moment certains aspects du service AOL, [minute page 4] y compris des contenus et services ».
* « AOL n'offre aucune garantie que vous pourrez vous connecter à AOL où et quand vous l'aurez choisi ».
- ce modulateur s'appliquerait seulement aux heures de fortes affluences (soit de 17 H à 24 H) et aux seuls internautes ayant déjà comptabilisé 60 heures de connexion dans le mois, et limiterait alors la connexion à 30 minutes.
- Mr. X. ne subirait aucun préjudice, eu égard à l'important accès au service dont il userait (79 heures à 106 heures par mois).
La cause n'est pas susceptible d'appel. Les parties comparaissent.
Le présent jugement sera rendu en dernier ressort, de façon contradictoire.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
L'article 1134 du Code Civil pose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Le contrat conclu entre les parties le 28 AOUT 2000 correspond à l'offre « tout compris illimité », ainsi que cela ressort de l'historique du compte de Mr. X. produit par la société AOL.
La description de l'offre comportait ces termes :
« points forts : pouvoir surfer sans se préoccuper du temps passé en ligne ; ...
Avec cette formule, vous pouvez surfer autant que vous voulez, sans vous préoccuper du temps passé en ligne. En effet, quel que soit votre temps de connexion, vous payez chaque mois le même prix : 199,00 Francs, communications téléphoniques Internet incluses ».
[minute page 5] Le grief tenant à l'introduction post abonnement d'écrans de contrôle parasitant la connexion en cours, voire interrompant la connexion si le logiciel utilisé ne permet pas l'accès à cet autre écran pour lui confirmer que l'utilisateur souhaite maintenir la connexion, est contesté.
AOL soutient que ces écrans font partie intégrante du service et ce depuis des années.
Mr. X. ne prouve pas le contraire.
Il n'en sera donc tiré aucune conséquence.
Il est, par contre, reconnu et établi que AOL, par la mise en place de « modulateur de session », limite la connexion en cours de certains utilisateurs à 30 minutes, et, à l'issue de cette période, impose une déconnexion forcée, et donc l'interruption de l'activité de l'utilisateur sur internet.
Ce fait est incontestablement préjudiciable à l'utilisateur qui se voit imposer cette déconnexion forcée.
Le fait que cette limitation de la durée de la connexion ne soit appliquée qu'aux utilisateurs les plus importants, et seulement après qu'ils aient dans le mois déjà utilisé le service pendant 60 heures (fait constant), n'empêche pas que cette limitation est contraire aux termes du contrat dont justement, l'objet est un accès illimité au service.
AOL le reconnaît d'ailleurs implicitement, puisqu'elle expose avoir engagé les moyens pour tenter de solutionner cette difficulté, et qu'elle explique que ce « modulateur de session » n'est prévu que provisoirement, dans l'attente du développement technique du réseau de modem qui permettra d'augmenter considérablement le nombre des connexions.
Les conditions générales d'utilisation, que AOL cite et que Mr. X. produit dans leur intégralité, prévoient 11 articles, dont l'article 2 et 6 sont cités par AOL comme lui permettant la déconnexion reprochée.
L'article 6 prévoit seulement que AOL ne garantit pas la possibilité de se connecter « où et quand » l'utilisateur l'aura choisi.
Ceci n'a rien à voir avec le problème de limitation d'une connexion en cours qui est l'objet du présent litige.
L'article 2 est relatif au contenu des documents accessibles en ligne sur AOL.
Et la clause « AOLB et ses FS ainsi que les tiers fournisseurs se réservent le droit de modifier ou interrompre à tout moment certains aspects « du service AOL » y compris des contenus et services » et ne peut s'interpréter comme une clause permettant au professionnel de se dispenser de fournir à l'abonné le service pour lequel il reçoit paiement, à savoir un accès illimité au service (clause qui au demeurant serait abusive au sens de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation).
En résumé, c'est à bon droit que Mr. X. reproche à AOL une inexécution contractuelle, consistant à lui imposer, dans certaines conditions, des déconnexions forcées, en contradiction avec les termes de l'abonnement souscrit.
Sur le quantum de la réparation :
Il ressort des pièces du dossier que le modulateur de session a été introduit depuis OCTOBRE ou NOVEMBRE 2000. AOL justifie que pour cette période, Mr. X. a eu accès au service pour des durées variant de 79 à 106 heures par mois.
[minute page 7] Le préjudice subi recevra une réparation de principe dès lors que Mr. X. ne demande pas la résiliation du contrat.
Il lui sera alloué, à ce titre, au vu des éléments de la cause et notamment du coût de l'abonnement (199,00 Francs par mois) et de la durée du préjudice subi, la somme de 1.000,00 Francs.
L'équité commande de lui allouer 2.000,00 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Celui qui succombe supporte les dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire et en dernier ressort :
Rejetant toutes conclusions contraires ou plus amples des parties,
Condamne AOL à payer Mr. X. les sommes de :
- MILLE FRANCS (1.000, 00 Francs) à titre de dommages et intérêts.
- DEUX MILLE FRANCS (2.000,00 Francs) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Condamne AOL aux dépens.
Le présent jugement a été signé par le Président et le Greffier.