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CA ANGERS (ch. A com.), 30 janvier 2018

Nature : Décision
Titre : CA ANGERS (ch. A com.), 30 janvier 2018
Pays : France
Juridiction : Angers (CA), ch. com. A
Demande : 15/01872
Date : 30/01/2018
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 23/06/2015
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CERCLAB - DOCUMENT N° 7407

CA ANGERS (ch. A com.), 30 janvier 2018 : RG n° 15/01872 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Or attendu qu'il ressort de l'effet combiné de l'article L. 442-6-III et de l'article D. 442-4 du code de commerce que la juridiction en l'espèce compétente pour connaître de cette action était en première instance le tribunal de commerce de Rennes et en appel la cour d'appel de Paris ; Que la demande indemnitaire de M. Y. fondée en cause d'appel exclusivement sur l'article L. 442-6 du code de commerce ne peut dès lors qu'être déclarée irrecevable devant la présente cour ».

 

COUR D’APPEL D’ANGERS

CHAMBRE A - COMMERCIALE

ARRÊT DU 30 JANVIER 2018

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 15/01872. Jugement du 3 juin 2015, Tribunal de Commerce d'ANGERS, R.G. de première instance n° 012926.

 

APPELANT :

Monsieur X.

né le [date] à [ville], Représenté par Maître Ronon D. substituant Maître Jean-Charles L. de la SELARL L. SELARL, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier E120008

 

INTIMÉ :

Monsieur Y.

né le [date] à [ville], Représenté par Maître Stéphane C. de la SCP IN-LEXIS, avocat au barreau d'ANGERS

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 20 novembre 2017 à 14 H 00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame MONGE, Conseiller, qui a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame VAN GAMPELAERE, Conseiller faisant fonction de Président, Madame MONGE, Conseiller, Madame PORTMANN, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame DURAND

ARRÊT : contradictoire ; Prononcé publiquement le 30 janvier 2018 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ; Signé par Véronique VAN GAMPELAERE, Conseiller faisant fonction de Président, et par Elisabeth DURAND, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Suivant acte authentique du 24 juillet 2012, M. X. et Mme X., son épouse, ont acquis auprès de Mme Z. un fonds de commerce d'alimentation générale, dépôt de pain, café, presse et dépôt de gaz à [ville N.].

Courant juillet 2014, M. X. a informé M. Y., artisan boulanger qui était son fournisseur de pain et celui de ses prédécesseurs, de ce qu'il souhaitait arrêter leur relation commerciale.

Le 27 novembre 2014, M. Y. a assigné M. X. devant le tribunal de commerce d'Angers en paiement d'une facture d'un montant de 686,29 euros et d'une somme de 9.500 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture brutale et sans préavis de la relation commerciale.

Par acte du 5 février 2015, M. X. a appelé en garantie Mme Z.

Par jugement du 3 juin 2015, le tribunal a ordonné la jonction des deux procédures, condamné M. X. à payer à M. Y. la somme de 4.850 euros à titre de dommages et intérêts et la somme de 686,29 euros en paiement de la facture émise le 10 août 2012, outre les frais de sommation de payer, débouté M. X. de ses demandes dirigées contre Mme Z., condamné M. X. à payer à M. Y. une indemnité de procédure de 500 euros et à Mme Z. une indemnité de procédure de 1.500 euros, son conseil renonçant à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle et condamné M. X. aux dépens, le tout sous exécution provisoire.

Selon déclaration adressée le 23 juin 2015, M. X. a interjeté appel de cette décision, intimant M. Y. Celui-ci a relevé appel incident.

Les parties ont toutes deux conclu.

Une ordonnance rendue le 9 octobre 2017 a clôturé la procédure.

Le 23 novembre 2017, la cour a sollicité les observations des parties sur la recevabilité devant elle de la demande fondée sur l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce en leur impartissant un délai s'achevant le 15 décembre 2017 pour déposer une note en délibéré.

 

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Les dernières conclusions, respectivement déposées les 6 octobre 2017 pour M. X. et 21 avril 2016 pour M. Y., auxquelles il conviendra de se référer pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, peuvent se résumer ainsi qu'il suit.

M. X. demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a condamné au titre de la rupture brutale de relations commerciales établies et au paiement d'une indemnité de procédure et de condamner M. Y. à lui payer la somme de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts, outre une indemnité de procédure de 5.000 euros et les dépens.

Il explique qu'après acquisition du fonds de commerce, il a eu recours, par facilité, aux services de M. Y. pour son activité de dépôt de pain mais qu'ayant eu affaire à M. et Mme W., boulangers de la commune voisine de [ville J.], à l'occasion d'une absence de M. Y., il a constaté une différence de qualité et décidé avec son épouse de mettre un terme à ses relations avec M. Y. Il précise que non lié à ce dernier par un écrit, il n'a pas jugé nécessaire de lui adresser une lettre de préavis et s'est borné à le prévenir oralement début juillet 2014 de sa décision en poursuivant leurs relations jusqu'au 10 août 2014. Il ajoute que M. Y. lui a adressé sa dernière facture du 10 août 2014 d'un montant de 686,29 euros et soutient l'avoir réglée en déposant son chèque sous la porte du magasin, le 8 septembre 2014. Il affirme avoir adressé un nouveau chèque le 21 octobre 2014 que M. Y. a refusé. Il estime n'avoir pas à supporter les frais engagés qu'il qualifie d'inutiles et d'abusifs.

S'agissant de la rupture, il conteste avoir été lié à M. Y. par un contrat de fourniture exclusive qu'auraient signé ses prédécesseurs et conteste également l'existence d'une relation commerciale établie. Subsidiairement, si la cour considérait qu'une telle relation existait, il soutient que sa rupture n'a pas été brutale, la collaboration s'étant poursuivie un mois et demi après son annonce d'y mettre fin. Il critique encore le montant sollicité qu'il estime disproportionné au regard de la durée de la relation commerciale. Il s'oppose à un calcul sur le chiffre d'affaires. Il considère que son appel en garantie de Mme Z. était justifié compte tenu de l'acte dont M. Y. se prévalait avant qu'il soit établi qu'il était sans valeur. Il en déduit que l'indemnité de procédure qu'il a dû verser à Mme Z. doit lui être remboursée par M. Y. à titre de dommages et intérêts.

Répondant aux interrogations de la cour dans une note remise le 28 novembre 2017, il approuve le moyen d'irrecevabilité relevé d'office et conclut à l'infirmation du jugement sans évocation.

M. Y. demande à la cour de confirmer le jugement entrepris sauf en ce qui concerne le montant du préjudice, de condamner M. X. au paiement de la somme de 6.465,20 euros à titre de dommages et intérêts, outre une indemnité de procédure de 5.000 euros et les dépens.

Il expose qu'artisan boulanger dans la petite commune de [ville C.] depuis plus de dix ans, il a pris attache avec divers petits bars et épiceries de son secteur pour s'assurer un chiffre d'affaires nécessaire à la survie de son activité et que c'est dans ces conditions qu'il s'est rapproché de M. V. gérant du bar de [ville N.] et conclu avec lui une convention notariée de fourniture de pain, de pâtisseries et de viennoiseries, le 27 janvier 2005. Il ajoute que cette relation s'est poursuivie avec ses successeurs, dont M. X. qui sans écrit ni préavis l'a informé verbalement, à l'occasion d'une livraison, de la cessation de cette relation. Il soutient que M. X. ayant refusé d'acquitter sa dernière facture, il a dû avoir recours à un huissier de justice.

Il se prévaut expressément des dispositions de l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce pour fonder son action et invoque une relation commerciale établie de deux années qui ne pouvait être interrompue sans un préavis écrit, peu important que le contrat de fourniture susvisé fût inopposable à M. X. Il explicite son préjudice en affirmant que M. X. ne pouvait ignorer que sa relation avec le fonds de commerce était très ancienne. Il conteste devoir supporter les frais de l'appel en garantie de Mme Z.

Répondant aux interrogations de la cour dans une note remise le 14 décembre 2017, il indique s'en rapporter à justice quant à l'application des dispositions de l'article L. 442-6-I du code de commerce mais demande à la cour de statuer néanmoins sur toutes ses demandes.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la recevabilité de la demande indemnitaire de M. Y. :

Attendu qu'en sollicitant la confirmation du jugement sauf en ce qui concerne le montant du préjudice, M. Y. fonde expressément sa demande de dommages et intérêts sur les dispositions de l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce relatives à la rupture brutale d'une relation commerciale établie ;

Or attendu qu'il ressort de l'effet combiné de l'article L. 442-6 III et de l'article D. 442-4 du code de commerce que la juridiction en l'espèce compétente pour connaître de cette action était en première instance le tribunal de commerce de Rennes et en appel la cour d'appel de Paris ;

Que la demande indemnitaire de M. Y. fondée en cause d'appel exclusivement sur l'article L. 442-6 du code de commerce ne peut dès lors qu'être déclarée irrecevable devant la présente cour ;

Que le jugement qui a statué sur cette demande sera infirmé sur ce point ;

 

Sur les autres demandes de M. Y. :

Attendu que M. X. ne conteste ni le principe ni le montant de la facture du 10 août 2012 ;

Qu'il soutient l'avoir réglée et conteste devoir les frais de recouvrement engagés par M. Y. ;

Mais attendu qu'il lui appartient de rapporter la preuve de ce qu'il s'est libéré de sa dette en temps utile ;

Qu'en l'espèce, l'attestation de M. A. datée du 12 décembre 2014 (pièce n° 4 de l'appelant) selon laquelle il a accompagné M. X. le lundi 8 septembre 2014 afin que celui-ci dépose le règlement de sa facture d'août 2014 sous la porte du magasin de M. Y., ne suffit pas à établir la réalité de ce dépôt ni le montant du chèque prétendument déposé ni sa bonne réception par son destinataire ;

Que M. X. allègue encore avoir proposé de régler la facture litigieuse le 21 octobre 2014, après réception d'une sommation de payer, sans en justifier davantage, le courrier du conseil de M. Y. qui fait allusion à un « règlement partiel » » que son client ne peut accepter (pièce n° 6 de l'appelant) n'étant pas suffisamment précis sur le montant reçu ;

Qu'au demeurant, à cette date faute pour lui d'établir, ainsi qu'il a été vu, qu'il avait sérieusement essayé d'acquitter la facture présentée par M. Y. dont il ne critiquait pas le contenu, il ne pouvait se soustraire au paiement des frais exposés par ce dernier pour recouvrer son dû ;

Qu'il ne peut qu'être condamné au paiement de la somme de 686,29 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 juin 2015 ainsi qu'au remboursement des frais de sommation de payer ;

Que le jugement qui a statué en ce sens sera confirmé de ce chef ;

 

Sur les demandes accessoires :

Attendu que M. X. n'est pas fondé à réclamer la condamnation de M. Y. à lui rembourser à titre de dommages et intérêts l'indemnité de procédure qu'il a lui-même été condamné à verser à Mme Z. dès lors que M. Y. ne peut être tenu pour responsable de ce que Mme Z. a été inutilement mise en cause ;

Qu'il sera débouté de sa demande sur ce point ;

Attendu que les parties conserveront à leur charge les dépens d'appel par elles exposés, sans qu'il y ait lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement déféré SAUF en ce qu'il condamne M. X. à payer à M. Y. la somme de 4.850 euros à titre de dommages et intérêts,

Et statuant à nouveau du chef infirmé,

DÉCLARE irrecevable devant la présente cour la demande indemnitaire de M. Y. fondée sur l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce,

DIT que chacune des parties conservera à sa charge les dépens d'appel par elle exposés,

DÉBOUTE les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires.

LE GREFFIER                    LE PRESIDENT

E. DURAND                         V. VAN GAMPELAERE