CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA RENNES (4e ch.), 12 avril 2018

Nature : Décision
Titre : CA RENNES (4e ch.), 12 avril 2018
Pays : France
Juridiction : Rennes (CA), 4e ch.
Demande : 15/02625
Décision : 18/142
Date : 12/04/2018
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 31/03/2015
Numéro de la décision : 142
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2018-007078
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 7538

CA RENNES (4e ch.), 12 avril 2018 : RG n° 15/02625 ; arrêt n° 142

Publication : Jurica

 

Extrait : « Le mandat de vente non exclusif du 19 octobre 2009 stipule que, « les biens devront être présentés au prix de 40.000 euros net vendeurs soit un prix présenté aux acquéreurs de 43.000 euros commission à la charge du vendeur incluse sauf accord ultérieur écrit entre les parties ». Il prévoit également à la rubrique « Rémunération du mandataire » : « En cas de réalisation, la rémunération du mandataire sera : 1 à la charge du vendeur de : 3.000 euros ; 2 à la charge de l'acquéreur en cas de négociation par l'acquéreur du prix de vente fixé par le mandant : 50 % du montant de la négociation effectuée du prix net vendeur (prix du mandat ou de son dernier avenant) avec un montant de 6,5 % du prix net vendeur. » Les époux X. soutiennent le caractère abusif de cette clause rémunération qu'ils souhaitent voir annuler. […]

La clause de rémunération litigieuse dissocie la mission d'entremise de l'agence immobilière rémunérée par une commission fixe à la charge du vendeur, de sa mission de négociateur rétribuée par l'acquéreur s'il obtient une réduction du prix figurant au mandat. Les parties étant libres de déterminer les modalités de rémunération de l'agent immobilier et la pratique du partage d'honoraires étant autorisée, ce système de rémunération ne contrevient pas au statut des agents immobiliers. Par ailleurs, en l'espèce, la clause « rémunération » n'apparaît pas abusive au sens des articles du code de la consommation ci-dessus rappelés puisque, comme l'on pertinemment indiqué les premiers juges, les époux X., vendeurs mandants, restaient libres de refuser l'offre des époux Y., candidats acquéreurs présentés par la société G. IMMOBILIER sur laquelle apparaissaient clairement les deux rémunérations du mandataire. En outre, le système d'une rémunération due par l'acquéreur à l'agence immobilière proportionnelle à la réduction que l'acquéreur obtient sur le prix de vente du bien figurant au mandat est favorable au mandant puisqu'il est de nature à dissuader le candidat acquéreur de négocier ce prix.

La cour approuve donc que le premier juge d'avoir retenu la validité de la clause de rémunération litigieuse. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE RENNES

QUATRIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 12 AVRIL 2018

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 15/02625. ARRÊT n° 142.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Président : Monsieur Louis-Denis HUBERT, Président de chambre, Assesseur : Madame Andrée GEORGEAULT, Conseiller, Assesseur : Madame Florence BOURDON, Conseiller,

GREFFIER : Mme Françoise DELAUNAY, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS : A l'audience publique du 13 mars 2018, devant Monsieur Louis-Denis HUBERT, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 12 avril 2018 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

 

APPELANTE :

SARL G. IMMOBILIER La SOCIETE G. IMMOBILIER, SARL

au capital de 8.000 euros inscrite au RCS RENNES sous le numéro XXX, dont le siège est situé [adresse], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège. Représentée par Maître Christophe B. de la SCP AVOLITIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

 

INTIMÉS :

Madame X.

Représentée par Maître Antoine C. de la SCP C. M. & ASSOCIÉS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

Monsieur X.

Représenté par Maître Antoine C. de la SCP C. M. & ASSOCIÉS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Par acte sous seing privé en date du 19 octobre 2009, M. X. et son épouse, Mme X. ont donné mandat non exclusif à la société G. IMMOBILIER de vendre un studio leur appartenant situé [...].

Le mandat indiquait que, « les biens devront être présentés au prix de 40.000 euros net vendeurs soit un prix présenté aux acquéreurs de 43.000 euros commission à la charge du vendeur incluse sauf accord ultérieur écrit entre les parties ».

Le mandat prévoyait également à la rubrique « Rémunération du mandataire » :

« En cas de réalisation, la rémunération du mandataire sera :

1 à la charge du vendeur de : 3.000 euros

2 à la charge de l'acquéreur en cas de négociation par l'acquéreur du prix de vente fixé par le mandant : 50 % du montant de la négociation effectuée du prix net vendeur (prix du mandat ou de son dernier avenant) avec un montant de 6,5 % du prix net vendeur. »

Le 30 octobre 2009, l'agence a présenté à M. et Mme X. l'offre d'achat de M. et Mme Y. pour un prix net vendeurs de 36.400 euros. L'offre d'achat prévoyait, à la charge du vendeur, une commission au titre de la rémunération de l'agence à hauteur de 3.000 euros ainsi que, à la charge de l'acquéreur, une commission de 1.800 euros.

L'offre a été acceptée par les époux X. le même jour et la signature du compromis de vente a été fixée au 2 novembre 2009.

Les vendeurs ont ensuite refusé de signer la vente à ce prix ayant signé avec les époux Z., par l'intermédiaire d'une autre agence immobilière, la société AGENCE DIRECTE, une offre d'achat portant sur le même bien au prix net vendeurs de 40.000 euros.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 3 novembre 2009, l'agence G. IMMOBILIER a mis en demeure M. et Mme X. de régulariser la vente, ou d'indemniser l'agence évincée.

Par acte d'huissier en date du 8 février 2011, les époux X. ont fait assigner la SARL G. IMMOBILIER devant le Tribunal d'Instance de RENNES aux fins, sur le fondement des articles L. 132-1 et R. 132-2 du code de la consommation, de voir juger abusives, nulles et ambiguës les clauses du mandat du 19 octobre relatives au prix de vente et à la rémunération de l'agence. Ils ont aussi invoqué le manquement de l'agence G. à son devoir d'information et le vice de leur consentement lors de l'acceptation de l'offre d'achat.

La SARL IMMOBILIER G. a conclu au débouté et a sollicité, à titre reconventionnel, la condamnation des époux X. à leur verser la somme de 4.800 euros à titre de dommages-intérêts

Par jugement en date du 2 mars 2015, le tribunal a :

- Débouté Monsieur X. et Madame X. de l'ensemble de leurs demandes ;

- Débouté la SARL G. IMMOBILIER de l'ensemble de ses demandes ;

- Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

- Laissé à la charge des parties les dépens qu'elles ont dû exposer à l'occasion de la présente instance.

Le 31 mars 2015, la SARL G. immobilier a interjeté appel de ce jugement ;

Les parties ont conclu ;

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 février 2018.

 

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Vu les conclusions en date du 22 janvier 2017, pour la SARL G. IMMOBILIER, qui demande à la Cour de :

Vu les articles L. 132-1, R. 132-1 et R. 132-2 du code de la consommation,

Vu l'article 73, alinéa 2, du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972,

Vu les articles 1112, 1993, 1134 et 1147 du code civil,

Vu l'article 514 du code de procédure civile,

- Confirmer le jugement du Tribunal d'Instance de RENNES du 2 mars 2015 en ce qu'il a :

* Dit et jugé que la clause figurant dans le mandat de vente du 19 octobre 2009 relative à la rémunération du mandataire était valide.

* Dit et jugé que le consentement de Monsieur et Madame X. n'a pas été obtenu par violence ou de façon dolosive.

* Débouté Monsieur et Madame X. de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

* Dit et jugé que Monsieur et Madame X. ont manqué à leur obligation conventionnelle.

- Infirmer le jugement du Tribunal d'Instance de RENNES du 2 mars 2015 pour le surplus et statuant de nouveau :

- Dire et juger que la société G. IMMOBILIER n'a aucunement manqué à son obligation de loyauté ;

- Condamner Monsieur et Madame X. à verser à la société G. IMMOBILIER la somme de 4.800 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2011 et jusqu'à parfait paiement ;

- Condamner Monsieur et Madame X. à verser à la société G. IMMOBILIER la somme de 3.500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

- Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir ;

- Condamner les mêmes aux entiers dépens.

L'argumentation de la SARL G. IMMOBILIER est essentiellement la suivante :

* Sur la validité des clauses du mandat de vente du 19 octobre 2009 :

- la clause précisant la rémunération de l'agence ne peut être considérée comme abusive, non seulement parce qu'elle n'est considérée comme telle par aucun texte, mais aussi parce qu'elle a été librement acceptée par les parties, et ne créé par de déséquilibre significatif entre les parties, du fait que le mandant a toujours la possibilité in fine, d'accepter ou de refuser l'offre l'agent immobilier ne pouvant engager le mandant dans la vente sans son accord ; le prix de vente correspond prix du marché ;

- le mode de rémunération prévu par la clause a d'ailleurs été validé par la jurisprudence ;

- la clause unique relative à la rémunération de l'agent immobilier est rédigée en caractères gras et apparents de façon claire et compréhensible conformément à l'article L. 133-2 du code de la consommation ;

- cette clause n'emporte pas non plus une rémunération sur la seule volonté de l'agent, une partie seulement de sa rémunération étant variable et soumise à la négociation, ce qui résulte donc in fine de l'accord de volonté entre les vendeurs et les acquéreurs ;

* Sur l'absence de manquements au devoir de conseil se et de loyauté :

- la société G. IMMOBILIER a régulièrement accompli son mandat non exclusif, en proposant à son mandant des offres d'achats à un prix proche de celui du mandat, libre au mandant de les accepter au non ;

- la différence entre le prix prévu au mandat (40.000 euros) et le prix de vente (36.400euros) et de 10 %, ce qui est tout à fait classique ; l'offre d'achat à 36.400 euros était conforme au prix du marché et se situait même dans la fourchette haute des tarifs immobiliers pratiqués en 2009 pour le même type de biens ;

- aucune faute de la part de l'agence dans l'évaluation du prix du bien, étant précisé que le prix de vente, fixé par les vendeurs, était dans la fourchette haute des prix pratiqués pour ce type de bien, et l'offre proposée correspondait aux prix du marché ; les époux X. ont eux-mêmes fixés le prix prévu au mandat et ont admis qu'ils ont une proposition à hauteur de 40.000 euros justes après avoir accepté celle de 36'400 euros ; le prix net vendeurs de 40.000 euros fixé par les époux n'était pas surévalué ;

* Sur la solvabilité de l'acquéreur potentiel :

- en première instance, les juges ont reproché à l'agence de ne pas avoir vérifier la solvabilité des acquéreurs éventuels, or cet élément, soulevé d'office sans avoir invité les parties à présenter leurs observations, n'a jamais été discuté devant le tribunal, et n'est pas non plus soulevé par M. et Mme X. dans leurs conclusions ; il ne peut donc servir à fonder la décision du tribunal, et par conséquent celle de la Cour ;

- il serait contraire à l'esprit de la loi HOGUET de faire supporter à l'agence l'insolvabilité éventuelle de l'acquéreur potentiel, d'autant plus que la différence relevée par le tribunal est particulièrement ténue ; la société G. à solliciter le versement d'un séquestre de 1.950 euros et la vente était soumise à condition suspensive d'obtention du prêt sous 30 jours à compter de la signature du compromis de vente ; l'agence immobilière n'est tenue qu'à une obligation de moyens pour la vérification de la solvabilité de l'acquéreur potentiel ;

* Sur la demande de dommages et intérêts de M. et Mme X. :

- M. et Mme X. ne justifient d'aucun préjudice lié directement à une faute qu'aurait commise l'agence, leur bien ayant été vendu à un tiers pour le prix demandé ;

* Sur la validité de l'offre d'achat du 30 octobre 2009 :

- malgré les dires de M. et Mme X., l'attestation de Monsieur A. démontre que leur consentement à l'offre d'achat du 30 octobre n'a pas été obtenue par dol ou violence morale ;

- les époux X. avaient d'ailleurs signé une offre d'achat au même prix et aux mêmes conditions, 6 jours auparavant, qui n'a pas été suivie d'effet pour rétractation de l'acquéreur, ils connaissaient donc parfaitement les conditions dans lesquelles ils s'engageaient ;

- il n'existe aucun élément de preuve d'une violence morale quelconque de l'agence sur M. et Mme X., ni de pressions, ni d'état de dépendance économique ; le courrier non daté produit par les époux X. permet de prouver que l'offre d'achat n'a pas été signée à leur domicile mais dans les locaux de l'agence comme il l'ont reconnu dans leurs conclusions du 6 juin 2012 ;

* Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts présentés par l'agence G. :

- la demande reconventionnelle est recevable ; l'agence G. ne fait que réclamer l'indemnité forfaitaire prévue au mandat en cas de violation des engagements contractuels des mandants ;

- l'acceptation d'une offre d'achat supérieure à celle acceptée précédemment, au mépris délibéré du premier engagement, a causé un préjudice à l'agent immobilier, ayant effectué le travail demandé et obtenu un engament des vendeurs qu'ils n'ont pas tenus ; ce préjudice est équivalent à la somme de 4.800 euros correspondant à la part de commission qui incombait en mandant et à celle de l'acquéreur évincé de leur fait ; cette demande indemnitaire à titre de clause pénale n'est pas une demande de commission ;

- l'agence n'ayant en réalité manquer à aucune de ses obligations, au contraire des vendeurs, est bien fondée à demander des dommages et intérêts équivalent au montant de la commission sur la vente qui aurait dû intervenir ;

- à titre subsidiaire, l'agence immobilière doit être indemnisée en raison de la faute dolosive des époux X. caractérisés par leur volonté d'évincer la société G. IMMOBILIER pour des raisons économiques.

 

Vu les conclusions en date du 17 novembre 2016, pour M. et Mme X., qui demandent à la Cour de :

Vu les articles L. 132-1 et s du code de la consommation

Vu l'article 1134 du code civil

Vu l'article 1147 du code civil

Vu l'article 1984 du code civil

- Débouter la SARL G. IMMOBILIER de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

En conséquence,

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- dit et jugé que la société G. IMMOBILIER a manqué à son obligation de loyauté

- Débouté la société G. IMMOBILIER de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

Reconventionnellement,

- Recevoir Monsieur et Madame X. en leur appel incident :

En conséquences,

- Infirmer le jugement attaqué pour le surplus et statuant de nouveau :

- Dire et juger que la clause figurant dans le mandat du 19 octobre 2009 relative à la rémunération du mandataire était abusive donc nulle ;

- Dire et juger que le consentement de Monsieur et Madame X. a été obtenu par violence ou de façon dolosive ;

- Condamner la société G. IMMOBILIER à verser la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- Condamner la SARL G. à verser aux époux X. la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du CPC.

L'argumentation de Monsieur et Madame X. est essentiellement la suivante :

* Sur le caractère abusif de la clause de rémunération :

- en application des articles L. 132-1 du code de la consommation et 1984 du Code civil, la clause basant une partie des frais d'agence sur la baisse du prix de vente est abusive car elle créé un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, le mandant étant rémunéré en fonction du service qu'il rend au tiers acquéreur, et non à ses mandataires ; le principe de cette clause de rémunération est contraire au but poursuivi par le mandat qui est de vendre le bien au meilleur prix ; l'agence immobilière mandataire qui représente les intérêts du vendeur a intérêt à baisser le prix du bien vendu et ses intérêts sont donc contraires à ceux de son mandant ;

- l'arrêt produit par l'appelant au soutien de ses intérêts et validant, selon ses dires, la clause litigieuse, est sans aucune portée dans la présente instance, la Cour d'appel ayant dans cet arrêt été censuré pour défaut de base légale, expliquant que la signature de la promesse de vente avait régularisé les irrégularités du mandat, une jurisprudence qui ne trouve donc pas d'application en l'espèce ;

- en application de l'article R. 132-2 du code de la consommation, la clause est également abusive comme basant la rémunération du professionnel sur une condition dont la réalisation dépend de sa seule volonté, à savoir la négociation du prix à la baisse, au détriment du vendeur, son mandant ;

- en application de l'article L. 133-2 du code de la consommation, le contrat de mandat manque également de lisibilité, en ce qui concerne la rémunération du mandataire, faisant apparaître une première clause fixant la rémunération à la charge des vendeurs à 3.000 euros, et une autre clause détaillant une somme de 3000euros à la charge des vendeurs et une rémunération par les acquéreurs, sachant que dans les deux cas, l'attention des mandants n'était portée que sur la somme de 3000euros, mise en valeur sur le contrat par l'agence, entourée en rouge ;

* Sur le non-respect de l'obligation de conseil :

- l'agence immobilière devait conseiller ses clients sur une éventuelle sous-évaluation du bien, ce qui n'a pas été le cas lorsqu'il leur ont soumis une offre d'achat inférieur au prix demandé, seulement 20 jours après la mise en vente, sans même conseiller à ses clients profanes de faire une contre-proposition ; les époux X. ont d'ailleurs vendu le bien au prix de 40.000 euros net vendeurs justes après avoir accepté l'offre d'achat à 36.400 euros sur les conseils de la société G. ;

- soutenir que le prix net vendeur ne serait fixé in fine que par les vendeurs n'est pas réaliste, les vendeurs étant ici totalement profanes en la matière et s'étant adressé à la même agence lors de l'évaluation du bien ;

- l'estimatif du prix du marché fourni par l'agence pour justifier l'adéquation du prix de vente du bien à ceux pratiquer sur le marché n'a pas non plus de valeur probatoire, faisant état d'un panel d'appartements sélectionnés par l'agence, de façon non contradictoire et n'étant pas non plus exhaustif ;

- a fortiori, l'absence totale de vérification de la solvabilité des acquéreurs potentiels démontre que l'agence a manifestement agi à l'encontre des intérêts des vendeurs ;

* Sur la demande de dommages et intérêts présentée par les époux X.

- malgré ce qu'a considéré le tribunal, M et Mme X. respectivement âgés de 70 et 71 ans ont bien subi un préjudice moral du fait du manquement de l'agence à son obligation de conseil, ce qui justifie une condamnation de celle-ci à l’euro symbolique ;

* Sur le vice du consentement :

- en application de l'article 1112 du Code civil, le consentement de M. et Mme X. a bien été obtenu par violence, l'agent immobilier s'étant rendu le vendredi soir à leur domicile pour leur faire signer l'offre d'achat sans délai de réflexion, profitant de l'âge avancé de ceux-ci et de sa propre position, pour leur faire accepter l'offre aux conditions de l'agence, en leur assurant qu'ils ne pourraient pas obtenir mieux ;

- M. et Mme X. se sont d'ailleurs immédiatement rétractés, appelant l'agence le lundi matin et envoyant un courrier recommandé au responsable ;

- l'attestation de Monsieur A. pour contredire le vice du consentement, émane de l'employé de l'agence G. IMMOBILIER responsable des actes dolosifs ; elle est donc dépourvue de valeur probante.

* Sur la demande de l'agence à hauteur de 4800 euros :

- l'agence ne peut espérer obtenir une rémunération sans démontrer, selon la jurisprudence, que l'opération a effectivement été réalisée ;

- en matière de vente immobilière, en application de l'article 6-1 de la loi du 2 janvier 1970, la rémunération de l'agent immobilier n'est due que lorsque l'opération est intégralement accomplie c'est-à-dire lorsque les parties ont signé l'acte notarié de vente.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des articles, 455 et 954 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions ci-dessus rappelées.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la validité de la clause de rémunération de la société G. IMMOBILIER :

Le mandat de vente non exclusif du 19 octobre 2009 stipule que, « les biens devront être présentés au prix de 40.000 euros net vendeurs soit un prix présenté aux acquéreurs de 43.000 euros commission à la charge du vendeur incluse sauf accord ultérieur écrit entre les parties ».

Il prévoit également à la rubrique « Rémunération du mandataire » :

« En cas de réalisation, la rémunération du mandataire sera :

1 à la charge du vendeur de : 3.000 euros

2 à la charge de l'acquéreur en cas de négociation par l'acquéreur du prix de vente fixé par le mandant : 50 % du montant de la négociation effectuée du prix net vendeur (prix du mandat ou de son dernier avenant) avec un montant de 6,5 % du prix net vendeur. »

Les époux X. soutiennent le caractère abusif de cette clause rémunération qu'ils souhaitent voir annuler.

L'article 1134 ancien du Code civil dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi.

L'article L. 132-1 du code de la consommation dans sa version applicable au litige dispose que dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

En application de l'article R.132-2 du code de la consommation applicable au litige, dans les contrats conclus entre des professionnels et des non-professionnels ou des consommateurs, sont présumées abusives au sens des dispositions du premier et du deuxième alinéas de l'article L. 132-1, sauf au professionnel à rapporter la preuve contraire, les clauses ayant pour objet ou pour effet de prévoir un engagement ferme du non-professionnel ou du consommateur, alors que l'exécution des prestations du professionnel est assujettie à une condition dont la réalisation dépend de sa seule volonté.

La clause de rémunération litigieuse dissocie la mission d'entremise de l'agence immobilière rémunérée par une commission fixe à la charge du vendeur, de sa mission de négociateur rétribuée par l'acquéreur s'il obtient une réduction du prix figurant au mandat.

Les parties étant libres de déterminer les modalités de rémunération de l'agent immobilier et la pratique du partage d'honoraires étant autorisée, ce système de rémunération ne contrevient pas au statut des agents immobiliers.

Par ailleurs, en l'espèce, la clause « rémunération » n'apparaît pas abusive au sens des articles du code de la consommation ci-dessus rappelés puisque, comme l'on pertinemment indiqué les premiers juges, les époux X., vendeurs mandants, restaient libres de refuser l'offre des époux Y., candidats acquéreurs présentés par la société G. IMMOBILIER sur laquelle apparaissaient clairement les deux rémunérations du mandataire.

En outre, le système d'une rémunération due par l'acquéreur à l'agence immobilière proportionnelle à la réduction que l'acquéreur obtient sur le prix de vente du bien figurant au mandat est favorable au mandant puisqu'il est de nature à dissuader le candidat acquéreur de négocier ce prix.

La cour approuve donc que le premier juge d'avoir retenu la validité de la clause de rémunération litigieuse.

 

Sur le manquement de l'agence immobilière à son devoir de conseil :

Les deux aspects de la rémunération de l'agence immobilière figurant dans le mandat de vente non exclusif de façon claire et compréhensible conformément à l'article L. 133-2 du code de la consommation, et l'offre d'achat des époux Y. faisant figurer sans ambiguïté le prix net vendeurs ainsi que la rémunération contractuellement prévue du mandataire à la charge des époux X., il ne peut être reproché aucune déloyauté à la société G. IMMOBILIER dans la présentation de cette offre d'achat.

Le seul fait que cette société n'a proposé en dix jours que deux offres d'achat au même prix net vendeurs de 36.400 euros et qu'une autre agence immobilière a postérieurement obtenu une offre d'achat au prix figurant sur le mandat ne constitue pas une preuve suffisante que le prix de 36.400 euros était sous-estimé et ne correspondait pas au prix du marché, étant observé que la société appelante justifie de ce prix notamment par l'estimation Argus sans que les époux X. ne produisent aux débats aucune pièce de nature à contredire cette estimation.

Ayant mis en concurrence plusieurs agences immobilières, il appartenait aux vendeurs-mandants de refuser l'offre d'achat des époux Y. transmise seulement 10 jours après la conclusion du mandat.

Rien ne prouve que la société G. IMMOBILIER a sciemment surévalué le prix de l'immeuble figurant sur le mandat pour obtenir une rémunération résultant de sa négociation à la baisse. En effet, outre le fait que ce prix a été accepté et fixé par les mandants, ces derniers ont naturellement cherché, au-moins au début de l'exécution du mandat, à obtenir de leur immeuble un prix le plus élevé possible qui, en l'espèce, dépassait raisonnablement le prix que l'agence immobilière estimait être celui du marché.

 

Sur la solvabilité des époux Y. :

S'il n'est pas contestable que l'offre d'achat régularisée le 30 octobre 2009 et le projet de compromis de vente comportaient des données différentes en ce qui concerne le montant de la mensualité d'emprunt, la pension alimentaire et les ressources mensuelles des candidats acquéreurs, ces divergences ne suffisent pas à prouver que l'agence immobilière a failli dans son obligation de moyens de vérifier la solvabilité des acquéreurs potentiels.

En effet, outre le fait que la société G. IMMOBILIER a prévu un séquestre et une condition suspensive d'obtention de prêt, la preuve n'est pas rapportée que, sur la base des données figurant sur le projet de compromis, les époux Y. n'auraient pas eu la capacité financière d'acquérir le bien.

Au surplus, en cause d'appel, les époux X. se limitent à reprendre l'argumentation du premier juge qui a soulevé d'office ce manquement contractuel. En outre, ils affirment à tort qu'il appartient à l'agence immobilière de démontrer que les candidats acquéreurs étaient solvables.

En tout état de cause, le refus de signer le compromis de vente avec les époux Y. n'a pas été motivé par leur insolvabilité mais par le fait qu'une autre agence immobilière a présenté aux époux X. des acquéreurs offrant le prix net vendeurs de 40.000 euros.

 

Sur la validité de l'offre d'achat du 30 octobre 2009 :

Sur le fondement de l'article 1112 du Code civil qu'ils invoquent, il incombe aux époux X. de rapporter la preuve qu'ils n'ont accepté l'offre d'achat des époux Y. qu'en cédant à la pression morale exercée par l'agence immobilière.

Outre que aucune pièce versée aux débats ne permet d'affirmer que les époux X. âgés de 70 et 71 ans en capacité de conclure plusieurs mandats de vente étaient dans un état de faiblesse ou de dépendance face à la sollicitation de la société G. IMMOBILIER, la cour considère avec les premiers juges que les intimés ne démontrent pas que leur acceptation a été obtenue par violence ou dol.

En outre, la société appelante rappelle avec pertinence qu'ils avaient déjà signé une première offre d'achat W. six jours auparavant aux mêmes conditions et que rien ne prouve que l'acceptation de l'offre d'achat Y. a été obtenu « le soir à leur domicile sans leur laisser un délai de réflexion » alors que Monsieur A., préposé de la société G. IMMOBILIER en charge du mandat, atteste que la signature a eu lieu dans les locaux de l'agence lors d'un rendez-vous qui s'est très bien passé.

 

Sur la demande indemnitaire des époux X. :

La clause de rémunération étant jugée valable et aucune faute contractuelle n'étant retenue à l'encontre de la société G. IMMOBILIER tant dans la phase précontractuelle que dans la phase contractuelle du mandat de vente, les intimés ne peuvent prétendre à aucune indemnisation.

Au surplus, ayant vendu leur bien par l'entremise d'une autre agence immobilière au prix de 40.000 euros figurant sur le mandat de vente, ils ne peuvent se prévaloir d'aucun préjudice indemnisable.

 

Sur la demande reconventionnelle de la société G. IMMOBILIER :

La société G. IMMOBILIER demande la condamnation des époux X. à lui payer la somme de 4800 euros à titre de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal.

Elle précise qu'il s'agit d'une demande indemnitaire et non d'une demande de versement de sa commission contractuellement prévue à laquelle elle admet n'avoir pas droit en l'absence de conclusion effective de la vente.

L'argumentation des époux X. fondée sur l'absence de son droit à rémunération est donc dépourvue d'efficacité juridique en l'espèce.

Il est de jurisprudence assurée que l'agent immobilier mandaté dans le cadre d'un mandat de vente a droit à des dommages-intérêts s'il prouve une faute de son mandant l'ayant privé de la réalisation de la vente.

En violation de leur engagement pris dans le contrat souscrit le 19 octobre 2009, les époux X. ont refusé de signer le compromis de vente avec les époux Y. que leur avait présentés la société G. IMMOBILIER et alors qu'ils avaient accepté les termes de l'offre d'achat le 30 octobre 2009.

Les conséquences d'une telle faute contractuelle sont prévues au mandat qui indique que dans un tel cas « par application des articles 1142 et 1152 du Code civil, une indemnité compensatrice forfaitaire égale au montant de la rémunération prévue au recto » sera due par les mandants.

Au titre de cette clause pénale, en application de la clause de rémunération prévue au mandat, la société G. IMMOBILIER sollicite la somme de 4.800 euros correspondant à hauteur de 3.000 euros à la rémunération fixe prévue à la charge des vendeurs, et correspondant à hauteur de 1.800 euros à la rémunération qu'auraient dû payer les acquéreurs suite à la réduction de prix négociée par l'agence immobilière.

Cependant, ainsi qu'il a été précédemment rappelé, la société G. IMMOBILIER ne peut se prévaloir des dispositions de cette clause pénale puisque la vente n'a pas été conclue.

Son préjudice résultant de la faute contractuelle des époux X. sera fixé à la somme de 3.000 euros au paiement de laquelle ils seront condamnés.

 

Sur les autres demandes :

Parties perdantes, les époux X. seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à payer à la société G. IMMOBILIER la somme de 1.000 euros au titre de ses frais non répétibles de procédure d'appel.

L'équité ne commande pas qu'il soit fait plus ample application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement rendu le 2 mars 2015 par le tribunal d'instance de Rennes SAUF en ce qu'il débouté la SARL G. IMMOBILIER de l'ensemble de ses demandes ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE in solidum M. X. et son épouse, Mme X. à payer à la SARL G. IMMOBILIER, en indemnisation de leur faute contractuelle, la somme de 3.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

CONDAMNE in solidum M. X. et son épouse, Mme X., sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, à payer à la SARL G. IMMOBILIER la somme de 1.000 euros au titre de ses frais non répétibles de procédure d'appel ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

CONDAMNE in solidum M. X. et son épouse, Mme X. au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier                            Le Président